Alphonse_tabouret
23 Mars
Nouvel occupant dune pièce, le premier réflexe dAlphonse était toujours den ouvrir une fenêtre; saisir la perspective quoffrait un gite encore inconnu était une envie contre laquelle il ne luttait jamais, soucieux des vues densembles autant que des détails.
Le bagage déposé au pied de son lit nest toujours pas ouvert que la main, déjà, a saisi le loquet et tiré les battants, déversant à la chambre la lumière dun courant dair. Lhiver à lazur dégagé ne se mesure plus quaux ombres compactes des fins de journée, linceuls aux fraicheurs aussi subites que piquantes, épinglant les os sitôt le soleil à sa ligne dhorizon ; royaume abandonné aux rameaux dun cycle nouveau, lon discerne déjà aux branches émaciées des mois glacés, les bourgeons promettant les verdures à venir.
Coudes prenant appui à la traverse, le buste se penche pour visiter la vue quoffre la hauteur de létage, noirs sattachant aux silhouettes disséminées à la rue, distraits tout autant quattentifs aux minutes passantes. A létude encore précaire de ce nouvel habitat, il guette pensivement le signal attendu ; lorsque la monture sera prête, le commis lui fera signe aux portes des écuries dont la cour perce un flanc de lauberge, alors, à cet instant de flottaison, coiffé dun rayon de midi, Alphonse dénoue le fil de ses prérogatives, chasse les chiffres commandés par Denée et omet les laborieuses heures auxquelles il doit encore se présenter; non loin, Saint-Front et ses toits dessinent aux nuées dimprobables rondeurs, ravivant à la mémoire janvier et ses secrets.
Un carillon frappe lair au métal dune première salve et le cri aigu dun enfant éclabousse les pierres, attirant fatalement sur lui le regard de lanimal autant que du père ; un petit oblat alerté par le ventre de la cloche délivrant sa sonore syllabe tire avec empressement sur la manche du clerc qui le suit, les bras chargés.
Noirs aux surprises brusquement saisies sarrondissent dune extase fortuite et dévorent en douce, captivés, chaque mèche blanche dune éphémère couronne sculptée au vent de mars.
Sous sa fenêtre, Faust et ses pigments passent dun pas pressé, altérant à leur sillons, une onde monochrome.
Le nez plonge à lécharpe claire qui lui barde le cou, y noyant la féroce douceur dun pli conquis jusquà la gorge dont livresse soudaine contamine la respiration dun vertige heureux, dune complexe impatience. Aux chemins pavés de priorités, les amants portent chacun leurs croix et les tiennent comme sacrées ; lerrance et ses déviances nentament pas les dogmes des consciencieuses créatures dont les âmes forgées ont les aspérités des rigoureuses vertus, mais sy rehaussent, y enflent, anarchiques pour ne prendre plus que les violents contrastes des couleurs primaires.
Tout a plus de saveur au manque de Faust.
Dans le dos du jeune duo précipité quemporte une deuxième semonce, la main du grouillot lappelle, les rênes allongées dun hongre au museau clair à ses doigts nattendant plus que lui. Senestre larrache à sa contemplation en répondant dun geste, et à lélan obligé, referme la fenêtre.
La nuit finira par tomber.
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