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[RP] De la part d'une plume usée jusqu'à l'os

Octave.
Et voici le retour des nièces prodigues !

Citation:
Bonsoir très cher Oncle éloigné dans tout les sens du terme.

Comment vous portez vous ?

Pourquoi n'ai je jamais le loisir de vous lire ?

Pour ma part je suis sur Tours, nous stationnons depuis un moment donc cela me convient car j'ai le loisir de passer mon temps avec Raimbaut, au calme. Maman est toujours très occupée je ne la vois pratiquement plus... C'est infernal la politique. Et vous vous êtes où ? Vous faites quoi ? Arioce et Louise passent beaucoup de soirées ensemble c'est louche !

Vous me manquez.

Belle soirée.

Lilye.


Pardon ? Que lit-il ?

Citation:
Ma presque nièce, le bon jour !

    Quel plaisir de recevoir ENFIN de vos nouvelles, alors que voilà des lustres que je suis revenu en Armagnac !

    J'ai failli croire que vous m'oubliiez. Je me suis demandé combien de temps il vous faudrait avant de vous rappeler comment m'écrire...

    Pour ma part, tout va bien. Muret est toujours franche, mais les renforts s'organisent et nous espérons la reprendre bientot aux mains des couillons de la Memento. En attendant, j'ai été élu Juge, et je joue du Maillet, mais finalement assez peu par rapport à ce que j'espérais.

    Vous me voyez ravi que le PMH et vous puissiez passer un peu de temps ensemble. J'espère que vous êtes dûment chaperonnée même si je sais votre mère peu à cheval sur la surveillance de jeunes filles en fleur.

    D'ailleurs, je vous remercie de veiller à ce que Louise et ce Arioce là, que je n'ai pas l'heur de connaitre, ne soient jamais seuls tous les deux. Sinon, je demanderai à Leffe de leur coller un garde. Ou je dépêcherai un espion de mon cru. Que votre mère vous laisse "faire vos expériences", si elle veut, mais chez les Beaupierre, j'ose croire que nous sommes un peu plus sérieux !

    Je vais d'ailleurs lui écrire de ce pas.

    Transmettez mes salutations à Raimbaut, et mes pensées à votre cousine et Alvira.

    Que le Très Haut vous ait en sa bonne garde,


Octave


Puis, bien entendu...

Citation:
A Louise, ma nièce chérie,

    Le bon jour,

    J'espère que tu vas bien. Je note que contrairement à Lilye, tu ne prends pas le temps de m'écrire et tu m'en vois fort marri. Terré comme je le suis à Auch, en attendant les renforts qui nous permettront de récupérer Muret, j'aurais bien besoin d'un peu de lecture pour m'occuper !

    D'ailleurs, qu'apprends-je ? Il semblerait que tu fréquentes quelqu'un ? Un Archoche ? Aruche ? Arquelque-chose ?

    Qui est-ce ? Que fait-il dans la vie ? Que font ses parents ? Quel age a-t-il ? Est-il droitier ou gaucher ?

    Qui est votre chaperon, que je prenne contact avec ?

    J'attends tes réponses de pied ferme.

    Que le Très Haut t'ait en sa bonne garde (et surveillance)


Octave


A croire qu'on ne peut pas tourner le dos 2 mois dans ce Royaume sans que ça parte à vau l'eau !
_________________
Isaure.beaumont
Doit-on préciser qu'Isaure s'est persuadée de la mort de Dana ? Doit-on préciser qu'elle s'est autorisé un petit verre ? puis un autre et encore un autre ?

Doit-on enfin préciser que tristesse et alcool n'aident en rien à répondre à un Octave ? Doit-on préciser que la Beaumont était un peu mélodramatique ?


Citation:

Seriez-vous sans cœur, Octave de Beaupierre ? Je vous écris ma peine, je vous confie mon chagrin et vous l’ignorez ? Pire, vous me faites de nouveau des reproches et menacez de porter ma lettre sur le tas des papiers sans importance ? Vous achevez de piétiner mon âme déjà meurtrie par la tragique disparition de Dana. Dois-je ajouter par-dessus tout cela qu’en plus vous osez me traiter de menteuse alors même que je vous ai dit toute la vérité ? Je n’entretiens aucune correspondance avec Archibald. Il m’a seulement envoyé une lettre inquiétante – et croyez-moi, il n’y a aucun plaisir à lire les torchons d’Archibald – pour m’annoncer la survenue d’un accident de bain impliquant Dana avant de me laisser ensuite dans le plus cruel silence qui soit. Mais je sais déjà tout. Je l’ai senti avant même de le savoir : sa douce rythmique qui résonnait en moi a cessé de battre, l’écho mélodieux de sa voix dans ma tête s’est tu et son image, lorsque je ferme les yeux, s’estompe irrémédiablement : Dana n’est plus.

Je me trouve sotte désormais d’avoir cru que vous aviez pour moi quelques considérations amicales. Je me sens stupide d’avoir pensé que vous m’aideriez à panser mes blessures et que vous berceriez ma douleur pour l’apaiser. Mais rassurez-vous, Octave, je ne vous importunerai plus désormais. Je vous laisse à vos correspondances ô combien plus colorées, à vos dindes caquetant vos louanges et je m’en vais traîner mon chagrin sur les chemins éloignés de cette tombe austère qui aura englouti ma Lumière. De cette façon, je n’alimenterai pas votre pile de courriers inutiles, ni ne vous coûterait plus en temps. Vous aurez ainsi tout le loisir de vous lier d’amitié avec une infirmière, puisque la mienne vous indiffère.

Ce qu’il reste d’Isaure.



_________________
Octave.
Hein ? Quoi ? Comment ? Mais ?!

Bon sang !


Citation:
A la jeune femme la plus excessive que je connaisse,

    Mais quel don vous avez ! Quel talent ! Je ne sais quelle récompense inventer pour vous décerner le prix de la Mélodramatie.

    Mais avant, et parce que vous m'avez fendu le coeur (après l'avoir piétiné, pour changer) je veux vous rassurer : Dana n'est pas morte enfin ! Puisque je vous disais dans ma dernière missive qu'elle m'avait écrit la veille ! Le temps qu'Archibald trace laborieusement ses lettres et qu'elles vous parviennent, je pense pouvoir assurer sans me tromper que si Dana a pu m'écrire, c'est qu'elle est en vie.

    Séchez vos larmes, écoutez votre coeur, resplendissez et guérissez, la Lumière est toujours !

    Maintenant que vous êtes consolée - et vous l'êtes, sinon cela voudrait dire que vous m'avez retiré votre confiance si chèrement acquise - je vous remercie de cesser là vos enfantillages.

    D'abord, je vous saurai gré de lire l'INTEGRALITE de mes lignes lorsque je prends le temps de vous les écrire. Et non pas le tiers qui vous arrange.

    Ensuite, je ne vous permets pas, Isaure, de remettre en cause MES considérations à VOTRE égard. Cela suffit. Nous savons tous deux que si quelqu'un a des considérations envers l'autre, c'est bien moi !

    Enfin, votre amitié ne m'a jamais indifféré. Diantre, ce fut pourtant l'un de nos principaux sujets d'arguties sans fin ! Arrêtez de décider pour moi ce que je ressens ou non. Essayez déjà de déterminer ce que VOUS ressentez, et nous en reparlerons.

    Mon invitation tient toujours. Y compris si vous avez toujours besoin d'être bercée.

    Que le Très Haut vous ait en sa bonne garde,


Octave de Beaupierre


Il a beau être énervé, agacé et passablement en colère contre la dame, il ne peut s'empêcher de jeter un coup d'oeil par la fenêtre, comme s'il pouvait apercevoir d'ici le Périgord, se demandant ce qu'elle est en train de faire, son coeur serré à l'idée qu'elle soit encore en pleurs.
_________________
Don.
Citation:
Dôn af Nærbøfj-Røykkness
Gîte des templiers.
Bergerac, PERIGORD.

Oct,

Oui. Je change les règles, les couleurs et nuances de la vie. Ne puis-je adapter mes courriers, à défaut de pouvoir le faire sur un autre support ? Celui de mon âme par exemple !
Je n'abandonne rien, ou ne le regrette guère. Votre sobriquet est là, dans ma poche, au bout d'une plume ou celui de ma langue. A moi seule de décider s'il doit un jour revenir sur l'entête de mes messages ou à votre esgourde, être murmuré.

Quant à ma jalousie, n'en parlons pas, elle n'existe guère. Ce qui est réel à l'inverse, c'est le mensonge que vous infligez à votre propre personne. Vous refusez de voir combien cette femme est merveilleuse et peut faire de l'ombre à la moindre demoiselle susceptible de vouloir lui voler un brin de sa lumière. Avez-vous seulement plongé votre regard dans le sien ? Deux perles, deux superbes perles bleues. D'une profondeur fluviatile. Oui, fluviatile est un mot joli, j'aime écrire ou dire des choses mignonnes. Son nez, petit pucier angélique vous envoûte, et il est difficile de ne pas céder à l'envie de venir le flatter à l'aide du votre. Frotti-frotta nasal indispensable si vous souhaitez atteindre un jour le bien-être ultime.
Mais soit, préférez-lui la justice, les procédures larmoyantes et les châtiments assommants. Qu'espérez-vous en retour ? Désillusions et déceptions, c'est tout ce que vous obtiendrez. Alors que Beaumont peut emplir votre existence de joie, et ce jusqu'à la fin des temps. De votre temps tout du moins.
Mais soit, ne l'épousez pas. Et cessez d'imaginer qu'il me soit possible d'intégrer ou de rejoindre un clan quelconque. Si cette idée fut évoquée par d'autres, apprenez que je suis forcément la première à l'avoir rêvée.
L'instigatrice donc.

Et exclusive. Vous me devez une danse pour l'affront que vous imposez, à me croire l'alliée d'inconnues sans aucun doute bien plus douceâtres et insignifiantes que moi.
Depuis que j'honore la France par ma présence, je n'ai dansé que peu. Deux, ou trois fois et la dernière peut se vanter d'avoir été traumatisante pour mes incisives supérieures.
Oh que ce souvenir est désagréable tant mon partenaire fut malhabile ! Et gauche ! Une véritable catastrophe ambulante, qui au lieu de me faire virevolter, m'a littéralement imposé la dégustation d'un mur. Je vous l'assure, n'essayez jamais. Ce n'est ni bon, ni consommable.

Voici là, le seul accident à déplorer, et il date déjà.
Mes proches s'ébranlent vivement et ceci à la moindre occasion leur permettant d'agiter les bras, et d'activer leurs palpitants trop peu éprouvés. Je n'ai rien, si ce n'est une main en moins et quelques lobes raccourcis par mère nature.

Cette dernière n'est d'ailleurs pas très active en Guyenne. Si je déplore les regrets et m'efforce de les évincer, il est difficile de ne pas admettre que les paysages bretons éclipsent - de par leur beauté - ceux que je parcoure ces derniers mois.

La Guyenne fut un choix complexe. Je souhaitais retrouver une passion oubliée. Celle que j'éprouvais pour la politique et pour qui j'ai dévoué une partie de ma vie, en Bretagne. Ainsi, il m'était envisageable d'espérer retrouver ma noblesse perdue et d'assurer à mes trois fils un avenir certain. Bien meilleur que celui envisagé actuellement.
Cette contrée se trouve près de Limoges, où mon époux aime se rendre. Elle est aussi, non loin de Sainte Illinda car il m'est inconcevable de vivre éloignée d'Isaure et enfin, elle se trouve à quelques pas du Périgord qui abrite cadet et héritier, Nicolas et Salomon.
Malheureusement, mes rêves - encore une fois - et mes projets tombent à l'eau. Ceux qui devaient nous rejoindre dans le but d'exaucer ce souhait, cher à mon cœur, ne viennent plus. Les histoires évoluent, les rancœurs s'accumulent, et c'est ainsi que la vie trace les routes et surtout, les intersections. Je pense migrer vers Paris, y louer un appartement... Je ne sais. Le flou me paraît confortable, tant établir des projets me semble aujourd'hui désuet. A trop échouer, il est vain d'insister.

J'en viens donc à ma dernière réponse : 0
Lorsque je décide d'introduire une masse solide, dans une onde liquide, étrangement. Elle coule.
Même ornée d'un foulard.

A mon tour.

    - Pourquoi n'avons nous pas de poils sur les entrecoudes ? (Je claironne cette question à qui veut l'entendre depuis au moins 10 longues années, je n'ai jamais eu de réponse satisfaisante).
    - Croyez-vous être capable de sucer un doigt, même s'il n'est rattaché à personne ?
    - Vous sentez vous seul, parfois ? Souvent...?


Au votre.

Baisers,
D.



_________________
Octave.
A peine a-t-il lu qu'il prend la plume.

Citation:
MaDôn

    Alors déjà, vous allez écrire à Isaure qui vous croit morte. J'ai reçu hier une missive baignée de larmes d'une brune complètement à la ramasse qui veut arrêter de m'écrire parce que je ne viens pas bercer sa tristesse d'avoir perdu la Lumière de sa vie.

    Vous me ferez le plaisir de la rassurer derechef, et si vous voulez faire du zèle, vous en collez une à Archibald qui l'a alarmée de la sorte.

    Maintenant, vos questions.

    1. Parce que si nous avions des poils à cet endroit là, outre le fait qu'ils seraient constamment collés de sueur, vous ne pourriez plus poser cette question, et avouez que vous vous priveriez de réponses savoureuses.

    2. Je ne suce pas de doigts, rattachés ou pas, à l'exception des miens, et encore, pas en toute circonstance.

    3. Seul ? Moi ? Jamais. Constamment. Peut-on se considérer seul si l’on est très entouré ? N’est-ce pas un peu injuste pour ceux qui nous entourent justement ? Ils y mettent de l’énergie, et nous également, à entretenir et à tisser des liens. A prendre des nouvelles, à sourire, à se disputer, à lancer des miettes de pain. On les aime, on est content d’être là, ce n’est pas le sujet. Mais oui, il arrive que de manière surprenante et un peu triste, je me sente seul au milieu d’une foule. Pour peu que ladite foule ne comprenne pas le second degré ni l’ironie, alors je désespère. N’y a-t-il rien de pire que de se sentir incompris ? D’avoir à expliquer toutes ses saillies ? Je ne suis jamais seul. Mais je me sens souvent seul. Voilà pour votre réponse.

    Je vous promets une danse. Je ne peux en revanche vous garantir l’heure ni le lieu. Elle ne sera que pour vous. S’il y a une chose que j’apprécie dans la danse, c’est cette impression d’être hors du monde, d’avoir un instant volé pendant lequel tout s’éteint, on évolue de manière quasiment automatique sur une piste, sur une musique dont les mesures sont souvent connues d’avance, il ne reste qu’à profiter de ce moment hors du temps et d’en savourer la rythmique. J’essaierai de ne pas vous casser de dents, ni les pieds.

    En échange, je vous demanderai de faire attention avec vos écharpes et vos heures aqueuses. Plus nous échangeons et moins je resterai indifférent à l’annonce d’un ricochet foireux avec vous-même dans une baignoire ou un lac. Foulard ou pas.

    L’on peut se sentir seul, et pour autant apprécier d’être en bonne compagnie pour ce faire.

    Enfin, je reprends le début de votre courrier. Je suis au regret de vous annoncer que Beaumont a complètement déteint sur vous !
    Où ai-je écrit qu’elle n’était pas merveilleuse ? Que ses yeux n’étaient pas un horizon dans lequel se perdre pouvait paraitre l’idée la plus lumineuse du jour ? Que son nez n’était pas parfait ? Quand ai-je écrit que je ne voyais pas quelle jeune femme adorable elle pouvait être ? Combien je la trouvais intéressante, passionnante, pénible à souhait, mais si charmante quand elle doute ?

    Si je me souviens bien, je vous relatais les propos de la principale concernée, qui quant à elle a une idée de votre filleul tout à fait déplorable. Elle ne perçoit que mes défauts - qu’elle invente ! - et en rajoute constamment. Même par écrit, c’est à peine si elle supporte ma rhétorique ! Vous n’imaginez pas dans quel état je me trouve quand je reconnais son écriture sur un pli, ne pouvant deviner quelle plaie elle va encore me coller sur le dos, quel propos elle aura détourné pour en faire tout autre chose, combien il est blessant de se voir écrire qu’elle n’a pas pensé à vous un instant.

    J’ai cru comprendre qu’elle avait abandonné l’idée de prononcer des voeux supérieurs. Pour combien de temps ? Quelle nouvelle lubie l’emmènera encore plus loin de moi qu’en Flandres ? Ne voyez vous pas qu’elle me fuit ?

    Et vous - vous ! - voulez la marier à quelqu’un qu’elle n’apprécie guère, qu’elle supporte à peine, qu’elle évite soigneusement ?

    Je ne sais ce qui rendra Isaure heureuse, mais je crains qu’il ne s’agisse pas de moi, s’il s’agit d’un homme.

    Merci donc d’arrêter de déformer mes propos à votre tour.

    Chacun ses défauts !

    Et nous avons besoin de conseillers investis, ici, et ne sommes pas loin du Périgord.

    Et maintenant :

    1. A quel français mort ou vivant aimeriez vous offrir un verre et pourquoi ?
    2. Si je devais porter une cicatrice, laquelle m’irait le mieux ?
    3. Croyez vous devenir folle quand parfois on ne vous comprend pas ? Folle à éclater une tête contre un mur ?

    Prenez soin de vous Marraine.

    Que le Très Haut vous ait en sa sainte garde,


Octave de Beaupierre


Il replie le velin, l'air pensif et le regard perdu au loin, sur les murailles d'Auch. Il va bien falloir aller reprendre Muret à un moment, et une seconde, il se demande s'il sera encore là pour lire les réponses à ses questions.

Secouant la tête pour chasser cette pensée, il sort de chez lui. L'heure de saluer son pote le coursier.

_________________
Hazell
C'est sur le champ de bataille d'un chaos sans nom que la blondine reçut sa toute première lettre.
Isaure et Archibald, habités tous deux par une rage de berserker, s'en prenaient l'un à l'autre à coups de paroles affûtées comme des rasoirs qui prenaient la forme d'étoiles filantes droit au coeur -à peine elles sortaient, intantanément elles frappaient juste-, et l'échange était si terrorisant pour la gamine qu'elle s'était réfugiée sous un dôme de bois à quatre pieds, la chaise la plus proche. Il était question de tombe, de mort, de menaces, de blague, de mariage et de miel. L'orage grondait dans la taverne, Caia observait les foudres. Impuissante.

Ce ne fut que lorsque tout s'apaisa qu'elle se souvint de la lettre froissée dans sa main. Auprès d'une Beaumont adoucie, la muette en prit connaissance, et eut un sourire en voyant les grandes lettres faciles à lire, même si malgré tout, elle ne comprit pas tout. Des mots compliqués ponctuaient ça et là, les quelques phrases, mais comme demandé, elle s'appliqua à tout bien lire attentivement, jusqu'au bout. Isaure l'emmena ensuite dans leur chambrée du moment, afin de se mettre en condition pour y répondre.

Citation:
Octave

CAIA voit Auch.
TrèS boN mieil. Isaure Beaumont Wagner paS touché. été triSte. MarSi pouR boN mieil.

Isaure Beaumont Wagner bieN apreNdre CAIA liRe ecRiRe OUI. CAIA aime bieN mais duR.
Arnoul aprend épée et pipi coNtRe AbRe avec Cassian. Arnoul mieux écRiRe CAIA.

Octave paS cimetieRRe. DaNa paS cimetieRRe auSSi. Isaure Beaumont Wagner maRié fiN aNNée Cassian dit, quand Cassian Duc.

RavoiR Octave.

CAIA


La blondine releva le nez vers Isaure pour qu'elle corrige, tout sourire. Elle afficha une mine fière en voyant que la Beaumont n'avait pas barré trop de chose sur sa lettre.

Armée d'une plume, la Beaumont s'était penchée sur l'écrit enfantin, prête à corriger chaque faute. L'oeil buta sur chacune d'elles, s'étonna de l'étrange syntaxe tandis que les lèvres s'étiraient en un sourire aussi amusé qu'attendri. Si Caia avait fait bien des progrès, il restait encore beaucoup de travail à faire. Et alors qu'elle se préparait à venir corriger chaque malfaçon linguistique, à mutiler la spontanéité de l'enfance, elle suspendit son geste en sentant le regard de Caia vissé sur elle. Lui offrant un sourire rassurant, elle décida finalement d'épargner la lettre et son innocence, se contentant juste de venir barrer l'allusion aux projets cassianesques.

- Voilà Caia, c'est parfait. Nous pouvons l'envoyer ainsi à Octave. Il sera ravi d'avoir de vos nouvelles.


Feat. Jd Isaure.beaumont, tmtc.

_________________
Don.
Citation:
Dôn af Nærbøfj-Røykkness
Périgueux, PERIGORD.


Octave,

Remarquez-vous, qu'en entête, toujours, je place mon nom et le lieu où je me trouve ?
J'y songeais en l'appliquant sur mon vélin, là. Pourquoi faire cela ? Pour que vous puissiez me retrouver et répondre ? J'en doute, les coursiers du royaume n'ont pas besoin de cela, ils sont suffisamment débrouillards pour pister une bonne âme et lui livrer missives. Alors pourquoi ? Par souci d'esthétisme ? Non plus. S'il m'était possible de soigner davantage mon courrier ce serait fait différemment je vous l'assure.
Je crois que je fais cela pour qu'un jour, si la mémoire me quitte, ou peut-être même la raison, je puisse retrouver des bribes de souvenirs. De réalité. Je note, chaque jour - car j'écris chaque jour - cette petite précision, à mes destinataires. Ce petit détail. Insignifiant pour beaucoup, il est pour moi une source sûre. Un moyen pour mes méninges de survivre et de m'éviter une solitude plus pesante encore.

Parce que je suis seule, Octave. Vous n'y pouvez rien, personne ne le peut. Mais j'avais l'envie de vous le dire, parce que vous ne m'êtes pas lié pour rien. Ce lien, bien qu'il soit encore frais, ne doit être rompu. Je vous l'implore, ne rompez pas. Je jure de répondre à toutes vos questions.

Encore.

- J'aimerais offrir un verre à Yoldur de Niraco. L'hésitation fut grande, j'aurais pu nommer Judas von Frayner, qui fut l'époux d'Isaure. Ainsi, il m'aurait été possible de l'interroger sur leur passé commun, sur ses écarts de conduite, et connaître enfin les raisons de son désamour pour ma soeur. Comprendre ses actes, sa vie et sa mort aussi. Mais me voilà à opter pour Yoldur. C'était - car je doute qu'il soit encore en vie - mon premier fiancé. Promise à la main d'un berrichon, j'ai décidé de détruire cette union arrangée, pour l'amour d'un autre. Je n'ai jamais pu dire adieu à Yoldur, ni lui demander pardon. Ce n'est pas réellement un regret, mais il serait bon de pouvoir effacer ceci de la liste de mes fautes passées.


- Une lèvre fendue serait du meilleur effet. Vous n'avez guère le visage laid, et l'entailler ne serait pas la plus judicieuse des idées. Toutefois, pour qu'une cicatrice soit commentée, mieux vaut qu'elle crèche sur votre jolie trogne. Votre verbe est affûté, la verve semble l'être aussi, venons alors abîmer cet ensemble d'une guillerette encoche. J'ignore si auprès des femmes, vous avez du succès mais une fois partiellement défiguré, les lauriers de la séduction, viendront couronner votre tête bien faite.

- Octave, je ne suis jamais comprise. Si vous saviez le nombre de crânes qu'il me serait bon d'éclater contre les tables, murs et autres supports solides.
Si vous saviez...

Et toujours.

1. Que pensez-vous de la fidélité ?
2. Qu'aimeriez-vous voir sortir d'une boite ensorcelée, qui aurait pour capacité de vous offrir la chose que vous espérez le plus au monde ?
3. Au lieu de faire des ricochets, ne préférez-vous pas vous baigner ? Où iriez-vous, là, maintenant, si d'une tête vous deviez aller saluer une étendue d'eau ?

Pensez à vous. Et puis un peu, à moi.
Dôn.





_________________
Isaure.beaumont
Deux nuits et deux jours que les enfants étaient introuvables. Les yeux cernés, le teint blafard, Isaure ne savait plus que faire. Et entre deux vagues d'angoisse grandissantes, elle prit la plume pour écrire au seul dont l'inébranlable assurance aurait su calmer ses angoisses , le seul dont l'expérience aurait pu la rassurer.

Citation:
Mon cher Octave,

Rassurez-vous : elle est vivante. Ce sont là les cinq seuls mots que j’aurais aimé vous écrire. J’aurais voulu vous rassurer – ou plutôt me rassurer en les traçant avec application. « Rassurez-vous, Octave, je l’ai retrouvée et tout va pour le mieux ». Alors la vie aurait été douce. Pourquoi ne peut-elle jamais l’être pleinement ? Voilà deux nuits que je ne parviens pas à fermer l’œil, deux nuits que je vis dans la pire angoisse, que la peur étreint mon cœur. Et vous n’êtes pas là. Vous êtes si loin et je panique. J’ai besoin de vous, Octave. Est-ce ainsi quand vous menez une guerre ? Le sommeil vous quitte-t-il tout à fait ? L’insomnie vous tourmente-t-elle ? J’ai besoin de vous : Dana est vivante mais Caia et Arnoul ont disparu.

Ils étaient là. Ils ne sont plus là. Je ne cesse de vérifier sous mon lit, de contrôler chaque recoin de ma chambre, là où Caia avait cette étrange habitude de se réfugier. J’ai fouillé chaque taverne et auberge, m’assurant qu’Arnoul n’était pas dissimulé derrière les comptoirs. J’ai écumé Périgueux de long en large. J’ai bousculé bien d’hommes et de femmes chaque fois que je croyais apercevoir leurs petites silhouettes se faufilant dans les venelles. J’ai même, et croyez-moi ce fut douloureux, donné un coup de tête à cet imbécile qui m’interdisait l’accès de ses caves : elles étaient vides. Ma robe fut en vain souillée de son sang.

Les heures passent et se transforment en jours. Je crains qu’ils ne deviennent des semaines. Comment pourrai-je annoncer à mon cousin ou Axelle que leur fils a disparu ? Comment pourrai-je avouer à Agnès que j’ai perdu sa pupille ? Il devient évident que ce que je pensais être un simple jeu d’enfant est en réalité bien plus : on les a enlevés. D’aussi jeunes enfants ne fuguent pas. Pas aussi loin. Pas aussi longtemps. Pas sans raison.

Comme j’aurais voulu que vous soyez là. Vous auriez su les retrouver, vous, bien mieux que Cassian. Vous auriez su apaiser mes craintes, comme vous l’avez si bien fait pour Ysilgonde. Mais vous n’êtes pas là. Vous êtes loin, si loin, trop loin. Et sur le point de vous battre. Alors je m’inquiète un peu plus : ne mourrez pas, Octave ! Votre amitié, aussi susceptible soit-elle, m'est bien trop précieuse. J'ai besoin de vous savoir vivant quelque part, même si je ne dois plus jamais vous revoir. Je trouve cette pensée plus réconfortante.

Prenez soin de vous. Je ne sais plus prier depuis deux jours, alors à défaut de le faire, je pense à vous.

Isaure




_________________
Octave.
Les mains calleuses du Beaupierre sont tachées d'encre. Le regard d'habitude rieur est un peu cerné. A une chaise, près du lit, est accrochée son épée, propre et fraiche. Tout bon soldat sait que c'est la première chose à faire en revenant du combat. Même si pour le coup, lesdits combats furent brefs.

Faut dire que l'A&C, et les armées royales, n'étaient pas venues en ballade, et qu'ils n'étaient pas là non plus pour un duel. Le but était de reprendre la ville, ç'avait été chose faite en deux jours et une nuit.

Le plus dur pour le Pôle Justice avait été de préparer les dossiers des procès qui seraient lancés pour punir ceux qui criaient liberté quand ils n'obtenaient pas d'écus sonnants et trébuchants. L'hypocrisie l'avait toujours amusé.

Le seul point positif de cette histoire, c'était qu'il s'était rapproché de son neveu. L'estime s'était gagnée, devenue mutuelle, et ils travaillaient de concert, comme s'ils l'avaient toujours fait, sans avoir besoin d'ergoter, de discuter, de pinailler. A la fin de la journée, le boulot était abattu, et les procès lancés.

Après avoir passé plusieurs jours entre le campement de l'armée et le Tribunal, le Beaupierre avait fini par abandonner un peu le bruit incessant des discussions, interrogations, demandes et autres requêtes, pour rejoindre une chambre à Muret, réservée il y a quelques jours, et finalement jamais occupée. C'est là que l'attendait son courrier.

D'abord il sourit. Puis rit, d'une voix rauque qui n'avait pas ri depuis quelques temps. Caia est définitivement douée en dessins, il reconnait parfaitement les protagonistes, et surtout le principal, le plus beau, le plus majestueux, au centre, avec son maillet ! Son portrait craché ! Posant le dessin sur le côté, il entreprend la lecture de la missive de sa marraine. Et sourit de nouveau.

Il en aurait presque oublié, avec le Conseil, avec la guerre, combien déjà les volutes de la Bretonne lui semblaient familières, comme il se sentait bien quand il la lisait. D'un geste un peu moins las, déjà, il attrape sa vieille plume.


Citation:
MaDôn

    Le bon jour,

    D'abord, je suis vivant, Muret est revenue dans le giron armagnacais. Nous n'avons pas eu Namay.

    Ensuite :

    1. J'en pense que cette notion varie selon les gens, les cultures, les genres et les âges. Dans mon cas, elle est absolue ou elle n'est pas. Je n'imagine pas lier ma vie, mon âme et mon coeur à quelqu'un qui irait les disperser aux quatre vents. J'imagine encore moins être de ceux qui iraient conter fleurette à droite et à gauche. Je ne saisis pas ce que le corps a comme besoin impérieux qui mérite qu'on trahisse l'âme et une promesse. Mais bien sur, cela n'engage que moi.


    2. La question est ardue. J'ai à peu près tout ce que je pourrais souhaiter. J'ai des amis intelligents, drôles et fidèles. Une famille aimante, vive et enjouée. J'ai une fortune qui me permet d'élever une palanquée de petits Beaupierres si je devais un jour procréer. Une fonction intéressante. Un comté que j'aime. J'ai voyagé, et je voyagerai. Que pourrais-je souhaiter si ardemment que je n'aie encore rien entrepris pour l'obtenir ? Je ne sais pas, Dana, j'ai beau penser... Je crois que je suis quelqu'un de simple, qui se contente de ce qu'il a ou qui s'arrange pour l'obtenir. A la limite, une carotte bleue impérissable. Parce que quand même, la classe d'être le seul à en posséder une, vous ne trouvez pas ?


    3. Si je devais aller dès maintenant me baigner, j'irais au Lac de Four de Louge. Déjà parce que le nom me fait rire, et ensuite parce que c'est un endroit très beau, éloigné de toute vie, près de Muret, puisque j'y suis cantonné. Ce lac est assez grand pour qu'on s'y perde, assez agréable pour qu'on y nage, et assez calme pour qu'on y fasse la sieste. Tout pour plaire.

    J'aime bien que vous précisiez où vous êtes. Je trouve ça rassurant, quelque part, de savoir que vous êtes quelque part, pas trop loin. Peut-être est-ce en rapport avec ce lien dont vous m'entretenez. Sachez qu'un lien, pour tenir, doit être bien accroché des deux côtés. Et que le notre ne lâchera pas du mien.

    A cet égard, je vous présente mes excuses pour le délai, je n'étais pas repassé par ma chambre depuis un moment, et je crains d'avoir laissé filer le temps. Cela ne se reproduira plus, je vous l'assure. Je comprends la solitude, je la comprends très bien, et si mes réponses vous permettent, le temps de la lecture, de l'être un peu moins, je continuerai.

    Je pense à vous Dana. S'il vous venait l'envie de passer par ici, ne vous gênez pas. Je pourrais avoir l'usage d'une animatrice, d'une porte parole, d'une Connétable, d'une Juge ! Bientôt.

    Vos questions :

    1. Pensez-vous que l'on puisse être très intelligent ET très con ?
    2. Si vous aviez ma carotte bleue, qu'en feriez vous ?
    3. Si vous pouviez voyager dans le temps, quel évènement changeriez-vous et comment ?

    J'espère que vous avez pu récupérer votre fils, et rassurer Isaure.

    Prenez soin de vous, MaDôn,
    Que le Très Haut vous ait en sa sainte garde,


Octave de Beaupierre


Il scelle le pli, qui sera remis au coursier à sa sortie de la chambre, puis ouvre celui d'Isaure, dont il reconnaitrait l'écriture entre mille. La première phrase ne le surprend pas. Pas comme si ça faisait plusieurs fois qu'il écrivait à la brune que sa Lumière était en vie. ll faut bien l'avouer, y'avait pas vraiment de suspense.

En revanche il ne s'attendait pas à la suite. La lettre à la main, il se lève. Se rassied. Se relève. Regarde autour de lui. Là, tout de suite, il veut grimper sur Cheval, prendre la route, rejoindre le Périgord. Caia, perdue ? Isaure, dans l'angoisse ? De nouveau ?

Le Beaupierre envisage sérieusement le départ. Il faudrait écrire au Conseil, démissionner, laisser Martin se débrouiller avec les 30 procès, ne jamais oser revenir... mais retrouver Isaure, la calmer, et surtout, chercher les enfants. Enfin Caia. Arnoul, le Beaupierre s'en fout un peu à vrai dire.

Puis il se rappelle que c'est Isaure. S'il l'avait écoutée, il serait déjà parti pour aller chercher Dana, qui se porte à merveille. Quand a-t-elle écrit ? Avant hier ? Hier ? Il ne sait pas depuis quand ces lettres l'attendent. Le plus sur serait de demander, d'avoir des détails. Et pourtant... pourtant, au fond de lui, l'inquiétude se niche déjà. Sans compter cette terrible frustration de l'impuissance. A quoi sert-il, Octave, s'il n'est pas là pour Isaure Beaumont ?


Citation:
Isaure,

    Je vous en prie, dites moi que vous avez retrouvé Caia, qu'elle plaisantait, qu'elle est dans le coin, qu'elle cherchait à vous rendre folle, mais qu'elle est revenue à la raison !

    Rassurez moi, que diable ! Je suis bloqué, Isaure, bloqué ici dans une armée mal gérée, bloqué parce que j'en suis le logisticien, bloqué parce que nous avons blessé trop de membres de la Memento et que nous restons jusqu'à ce que le dernier ait guéri et soit reparti... Bloqué parce que j'ai donné ma parole et me suis engagé pour mon Comté... Je ne suis pas mort. Je me suis à peine battu. Je crains qu'ils ne m'aient soigneusement évité. Je les affronterai donc au Tribunal. Encore une raison qui me retient ici.

    Mais croyez bien que je suis inquiet, et que s'il ne tenait qu'à moi, j'aurais pris la route sans même attendre votre réponse. Je me rappelle trop de vos traits, de vos nuits, de vos cernes, lorsque nous cherchions Ysilgonde. De votre voix parfois tremblante, de vos doutes et de votre peur. Je me rappelle trop bien de vous Isaure pour vous savoir dans cet état désormais. Pire : loin de moi.

    Vous voyez ! Je vous avais dit de venir me voir ! Caia m'apprécie, elle ne m'aurait pas fui ! J'ai des pots de miel pour la retenir 10 ans sur place ! Si vous étiez là, ils seraient à vos côtés, vous souririez, vous seriez bien. Pourquoi donc avez-vous tenu à me fuir ?

    Caia est une jeune fille sensée. Je ne doute pas qu'elle revienne. Elle sait désormais presque écrire, elle pourra demander sa route. Lui avez-vous appris à écrire Isaure au moins ? et Arnoul, à part près de sa mère, où donc pourrait-il aller ? Sait-il où se trouve cette dernière ? De quoi parlaient ils, enfin de quoi s'entretenaient ils tous deux avant leur disparition ? Et Pierre, votre garde du corps surpayé ? Que faisait-il pendant ce temps ? Il n'est pas parti à leur recherche ?

    Quant à Cassian, j'espère qu'il a mûri depuis les jeunes années où j'ai pu l'apercevoir. Et qu'il se bouge les fesses pour retrouver les enfants ! Enfin surtout Caia.

    Tenez moi au courant.

    De mon côté, j'aurai bientôt besoin d'un Procureur ou d'un Juge... Peut être. Si vous avez remis la main sur Caia, revenez donc dans le Sud, je vous y ferai une place. Et je tiendrai ainsi ma promesse. En partie.

    Prenez soin de vous, et si vous ne priez pas, je le ferai pour deux.

    Que le Très Haut vous ait, et Caia, en sa sainte garde.


Octave.


Il cachette le pli, qui s'en vient rejoindre celui de Dana dans sa poche. Retourne vers la fenêtre, comme si de Muret, il pouvait apercevoir la jeune fille accro au miel, où qu'elle se trouve. Et puis il reprend le chemin de la porte. Le repos attendra, il a encore bien des choses à faire.
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Isaure.beaumont
Soulagée, aussitôt avait-elle quitté Cassian, qu'elle écrivait à Octave. Le visage émacié, les yeux complètement cernés, elle était penchée au-dessus d'un vélin, occupée à l'écriture de quelques lignes qui ne manqueraient pas de rassurer le soldat-juge bloqué en A&C.

Citation:
Mon cher Octave,

Je vous rassure aujourd’hui, puisque me voilà (presque) rassurée moi-même. L’appétit me revient, et sans doute le sommeil l’imitera-t-il. Il m’est désormais plus facile de retourner prier : Arnoul et Caia ont été retrouvés à Périgueux ; nous y serons demain. Il me tarde de les revoir et de les serrer contre mon cœur, avant de pouvoir les gourmander. J’ai tant craint pour leur vie !

Jamais je ne pourrai assez remercier Cassian. Il semblerait qu’il soit devenu un homme sur lequel je puisse compter. Si vous saviez comme il est bon de pouvoir m’appuyer sur lui et de ne pas être celle qui le sauve. Les rôles sont pour une fois inversés et je pourrais y prendre goût. Priez pour qu’il soit devenu enfin cet homme dont je rêvais autrefois.

Je songe à reprendre la route dès que les enfants auront été récupérés afin de conduire ma petite Caia là où elle aurait dû être depuis bien longtemps : auprès d’Agnès de St Just. Il est évident désormais que je suis bien incapable de prendre soin d’elle, comme j’ai toujours été incapable de protéger mes propres enfants. Voyez, c’est l’ultime preuve que je fus une mère déplorable. Les ordres m’appellent, c’était un signe divin. Je préfère donc m’arracher Caia au plus vite pour ne pas m’y attacher plus. La séparation sera déjà bien trop douloureuse pour que j’y ajoute plus de difficulté. Je dois me concentrer sur Arnoul et uniquement lui, afin de respecter la parole donnée à ses parents. Je serai son ombre et ne le quitterai plus des yeux. Je mourrais s’il disparaissait encore ! Même vous le pensez, puisque vous dites – et vous avez tout à fait raison – que rien ne serait arrivé si elle était restée près de vous.

Je ne vous fuis pas, Octave. Vous avez simplement pris un chemin différent du mien, si vous ne m’avez-vous-même pas fui. De quelle promesse parlez-vous ? Vous ne m’en avez faite aucune et je ne souhaite pas devenir un poids. L’A&C vous occupe et vous n’avez pas besoin d’avoir une charge supplémentaire. Caia sera bientôt remise à Agnès, ma venue n’aurait alors plus de sens. J’escompte retourner finir ma licence à Ste Illinda. Arnoul y sera en sécurité. Enfin, j’achèterai sans doute des terres en Périgord, pour y faire bâtir mon haras, à moins que le Béarn ne soit une meilleure idée. J’y réfléchissais encore mais la disparition des enfants a gelé quelques temps ma réflexion.

Que le Très-Haut vous garde, Octave.
Je vous donnerai des nouvelles, bonnes je l’espère, dès que nous aurons retrouvé les enfants.

Prenez soin de vous

Isaure

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Isaure.beaumont
Elle avait manqué à sa parole. La lettre fut envoyée avec un jour de retard. La fatigue avait eu raison d'elle et après avoir inondé la taverne périgourdine de sa colère, elle était allée se coucher, sans prendre la plume. Elle avait sombré dans un sommeil lourd, peuplé d'ombres inquiétantes avant qu'enfin des visages amis n'y poussent.

Octave !

Ce fut sa première pensée du matin, avant même de poser le pied par terre. Elle ne lui avait pas écrit, et avant même de s'adonner à sa traditionnelle toilette matinale, elle s'empara d'une plume pour lui adresser quelques mots. La présence du Beaupierre lui manquait, et si elle ne l'avouait pas, son discours la trahissait parfois: le nom du juge d'A&C revenait souvent à sa bouche et elle se plaisait à comparer quiconque à lui.


Citation:
Mon cher Octave,

Vos prières ont été entendues : les enfants sont sains et saufs. Ils ne semblent pas avoir trop fondus et Cassian avait pris soin de les faire savonner et peigner avant que je ne les vois. N’est-ce pas attentionné de sa part ? Je dois dire qu’il m’étonne un peu plus chaque jour et que ma vision de lui s’améliore de constamment. A croire que vos prières à son sujet sont également parvenues au Très-Haut, qui vous aura écouté.

Nous partons ce soir pour la Guyenne en espérant y trouver Axelle, la mère d’Arnoul. Cassian a promis au petit que nous irions la voir. J’aurais préféré me rendre direction à Toulouse pour y déposer Caia au plus vite, mais j’imagine que cela laissera aux enfants le temps de se dire au revoir. Je vous dirai à quelle adresse vous pourrez lui écrire, j’ai cru comprendre que vous aimiez bien échanger quelques lettres avec elle.

Priez pour notre salut, Pierre n’est pas là pour nous protéger. Il est parti sur les routes pour rendre service à mon cher Nicolas, en escortant Messire Tabouret qui doit ramener un lévrier de noble naissance en Périgord. Espérons qu’ils seront vite de retour pour que je retrouve mon précieux garde du corps.

D’ailleurs, en parlant de Nicolas, sa dernière lettre m’a inquiétée et j’espère que rien de fâcheux ne lui arrivera. Il est convoqué par la Sainte Inquisition. J’imagine qu’il est appelé simplement pour témoigner, mais la teneur de son courrier était alarmante. Priez donc pour lui, il semblerait que vos prières soient toujours exaucées.

J’espère que vous vous portez bien et que cette lettre vous trouvera rasséréné et en parfaite santé. Racontez-moi votre vie à Auch, cela me changera les idées. Avez-vous condamné de viles âmes au pilori ou à la potence ? Vous devez faire un beau et remarquable juge. Je gage que l’on vous respecte autant que l’on vous craint. Je vous aurais imaginé Capitaine, mais je dois avouer que je vous visualise parfaitement dans ce rôle qui est le vôtre.

Je vais vous abandonner sur ces mots, il est temps de préparer mes effets pour le voyage et d’aller rejoindre Cassian avant qu’il ne s’enivre de trop.

Que le Très-Haut vous garde,

Isaure



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Don.
Remuée par le chagrin.
Remuée par le deuil, porté comme un secret.
Remuée, par la folie, qui gagne les portes de sa conscience.

Elle n'a plus la même vivacité des mots lorsqu'il le faut, mais s'applique à écrire. Encore.


Citation:
Dôn af Nærbøfj-Røykkness
La taverne du Peuple.
BERRY.


Fill'Oct,

Pourrez-vous oublier le temps qui me fut nécessaire pour vous répondre ? Jamais, excuse n'est permise lorsque plume est délaissée mais il me faut tout de même vous avancer quelques raisons, que j'espère valables. A vos yeux.

Figurez-vous qu'alors au chevet d'un homme en convalescence et aux sens altérés, j'ai été enlevée par le Sieur Ravier dont nous avons tous les deux évoqués l'existence lors d'un précédent courrier. Enlevée ! Oui ! S'il n'y avait ni cordes, ni bâillon, ma taille et mes épaules furent tout de même contraintes à l'immobilité par la force et l'emprise exercées par "mon ami" sur ces dernières. Brutalement empoignée, je n'ai pu faire qu'une chose : Suivre ses ordres qui furent de quitter Périgueux en sa compagnie et celle de quelques autres compagnons de route, que j'apprends doucement à connaître.

Pour vous répondre alors, je pense - et mon ravisseur confirme cette hypothèse - qu'il est tout à fait possible d'être intelligent ET très con. Je ne pensais pas avoir si tôt, la chance de vous prouver la justesse de ma réponse. Voilà qui est fait.

Quant à votre carotte bleue, là, présentement, il me serait difficile de ne pas l'utiliser pour soulager mes quelques colères dernières. Considérez que son usage serait très hostile à la tonicité d'une croupe Archibaldienne et qu'alors, sa couleur n'aurait aucune importante. Qu'elle soit blanche, orange ou bleue, aujourd'hui son sort resterait le même, elle viendrait consoler mon humeur en allant châtier un derrière.

S'il m'était possible de voyager dans le temps, j'irai prévenir une femme nommée Pelotine de ne pas partir en Bourgogne. Ainsi, je crois, je pourrais lui épargner une mort violente, et injuste. C'est idiot, pareil souhait non ? J'aurais pu choisir d'éviter bien des guerres, de tuer tyrans ou autres personnages importants mais j'ai tendance à tout vivre par l'émotion, et celle-ci m'est apparue évidente pour le bien de mon âme. L'histoire, la mienne tout du moins, en aurait été différente.

    1. Votre nombril est il rentrant, ou sortant ?
    2. Si vous pouviez inventer une nouvelle couleur, comment la nommeriez vous ?
    3. Pensez-vous qu'il serait judicieux de proposer aux armées de combattre nues, pour une entière équité sur les lieux de bataille ?


A vous,
Dôn.


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Octave.
Fatigué mais vaillant le Juge. D'un regard, il embrasse la campagne qui environne Auch, et qu'il aperçoit depuis la fenêtre de son appartement. A peine avait il quitté l'armée, qu'il avait parcouru le Comté de long en large et s'apprêtait à recommencer. Mais avant, il prendrait enfin le temps de répondre à son courrier en attente.

Citation:
Ma très chère Isaure,

    Vous ne me voyez pas, mais je suis ravi que mes prières aient été entendues et que les enfants vous soient revenus sains et saufs. J'espère que vous avez songé à dire à Caia le sang d'encre qu'elle m'a causé, et ce sentiment d'impuissance qui ne m'a pas quitté jusqu'à votre dernier courrier, et qui subsiste encore un peu.

    Si ces mêmes prières peuvent être utiles à votre ami Nicolas, alors sachez que je prierai pour son salut et l'issue favorable de son entrevue avec la Sainte Inquisition. Il n'est jamais bon je crois de rencontrer ces tristes sires. Vous connaissez mon désamour de la punition et ma préférence pour l'exemple, autant dire qu'ils en sont à l'opposé si je ne me méprends pas.

    D'ailleurs, c'est un vrai plaisir que d'être juge avec cette philosophie qui est la mienne. Entre ceux qui pensent que je ne punis pas assez, et les punis qui trouvent que c'est déjà trop, je ne sais où tendre la joue. Heureusement que je reçois également des missives de félicitations pour la justesse de mes verdicts. Il n'est pas aisé de juger bien quand on juge beaucoup... 32 procès, Isaure, et ce n'est pas fini. Je croule littéralement sous les dossiers...

    Sans compter que j'ai décidé de me présenter aux comtales qui se tiendront dans 3 semaines désormais. Quelle folie m'a prise ? Je savais la politique un milieu impitoyable, mais je ne le pensais pas si peuplé de petits esprits et de petites gens...

    Mais passons là les désagréments de se voir cracher sur le dos par des gens que je pensais de bien, quand il a suffi d'une concurrence politique bon enfant pour leur faire découvrir les dents et les ragots. Vous me connaissez, je n'aime pas m'arrêter sur ce qui reste finalement anecdotique : je préfère vous entretenir des gens qui me suivent dans mon entreprise surprenante.

    Des jeunes gens enthousiastes. Certains avec de l'expérience à revendre et des idées fantastiques. D'autres avec des idées novatrices et de la motivation en voulez vous en voilà. Je suis impressionné par notre jeunesse, qui ne demande qu'à y croire, à s'investir ! Si vous aviez entendu nos discussions : pleine d'entrain, sans pessimisme aucun ! Je me sens gonflé d'énergie rien qu'à les entendre.

    Je ne sais pas si nous avons quelque chance, et quelque part, je peux bien vous l'avouer, à vous, je n'en ai cure. Quels que soient les résultats, nous aurons mon neveu et moi, éveillé quelques consciences, donné quelque espoir et avec un peu de chance, nous aurons deux mois pour mettre en place quelques points de notre programme.

    Et si nous échouons, et bien ma foi, j'aurai plus de temps pour aller à Paris, pour vous écrire, pour récolter du miel pour la future Toulousaine. Sait-elle combien elle sera près de chez moi, Caia ?

    Isaure, si vous amenez Caia à Toulouse un jour, veillez bien à faire un détour pour venir me trouver. Cela fait si longtemps désormais que nous n'avons eu l'occasion d'échanger et de deviser. Bien que le caractère des femmes du Sud soit explosif, aucune ne vous arrive à la cheville en termes d'argumentation. Vous me manquez, Isaure Beaumont. Vous êtes partie depuis si longtemps que je ne sais même si je saurais encore vous reconnaitre !

    Oh.. Et j'oubliais presque. Vous trouverez ci-joint votre certificat de propriété d'Artémis. N'avez vous pas ouvert l'oeil quand le coursier vous a porté ma missive ? C'était elle. Il a pour ordre d'attendre que vous veniez la chercher aux écuries après m'avoir lu. J'espère qu'elle vous plaira autant qu'escompté. Prenez en soin, et que ses pas vous portent jusqu'à moi, un jour.

    Que le Très Haut vous ait en sa sainte garde,


Octave de Beaupierre


Spoiler:


La plume est désormais au bord de rendre l'âme. Entre ses dossiers, ses verdicts, ses avis au Conseil, sa correspondance quotidienne avec les habitants de son Comté, il finit par avoir des cals entre les doigts et de l'encre incrustée sous les ongles. Il aurait presque pu oublier ce qu'avait été sa carrière de militaire si la Memento n'avait pas décidé d'élire domicile à Muret il y a quelques semaines.

Après un long soupir, il s'arrache à la contemplation du paysage. Il lui reste encore un courrier à écrire ce soir avant d'aller profiter pour quelques minutes d'une taverne, lieu qu'il a déserté il y a des semaines, des mois, maintenant, happé par les tâches qui incombent à un conseiller comtal actif.


Citation:
MaDôn

    Qu'il m'est agréable de vous lire, quand bien même vous mettez un temps incroyable à me répondre !

    Le sieur Ravier est un homme décidément plein de surprises. Qui aurait cru qu'il ferait un jour quelque chose qui ne serait pas uniquement motivé par une récompense Isaurienne ? Comme quoi, il ne faut jamais désespérer, tout arrive à point à qui sait attendre.

    D'ailleurs, cela me fait penser : et si l'on attend rien ? Qu'on attend pas la bonne chose ? Qu'on se trompe d'attente, qu'on oublie d'attendre ? Alors qu'arrive-t-il ? Saignant, bleu, trop cuit ? C'est une sacrée responsabilité, d'attendre. Peut-être est-ce pour cela qu'on ne me voit que rarement m'y essayer. Essayez-vous ?

    1. Mon nombril est rentrant. Et je vous confie qu'il m'a fallu vérifier.

    2. Le bleuve.

    3. Je ne pense pas que la nudité amène l'équité. Imaginez : une armée de flamands nourris à la bière, aux ventres bedonnants que plus aucune armure ne retient, qui pendouillent. Et en face une armée de jeunes mercenaires aux seins hauts et fiers, à la fesse ferme. Pensez-vous le combat équitable ? Et l'inverse ? Une armée d'apollons aux pectoraux gonflés, aux ventres dessinés, aux sexes dressés par l'adrénaline du combat, et en face, une armée de vieilles duchesses répondant au ban, avec les chairs vieillissantes, le sein pendant, le bras flasque ? Arf... Par Deos, remercions nos forgerons pour nos armures, qui maintiennent à défaut de l'équité, la gravité.

    Souriez vous un peu dans votre captivité Dana ?

    1. Si vous n'avez plus qu'un mot à prononcer pour le reste de votre vie, mais que vous pouvez le répéter à l'envi, lequel choisiriez vous ?

    2. Ne trouvez vous pas que le jaune est une couleur affreuse ?

    3. Pour vous faire sourire, que devrais je faire, sachant que je ne peux quitter le Comminges pour l'instant ?


    Je ne vous oublie pas, vous voyez.

    Que le Très Haut vous ait, et vos proches, en sa sainte garde.


Octave


Il sourit lorsqu'il quitte son appartement, les deux lettres à la main. Il voulait en écrire une à Caia, mais ça attendra demain. Guidant ses pas vers les écuries, il y rejoint un coursier en qui il sait pouvoir avoir confiance. Lui confiant les lettres, la jument, et de quoi en louer une pour le retour, il prend enfin la direction du centre village. La vie est belle quand on aime. Bien plus que lorsqu'on exècre. C'est là dessus qu'il se met à chantonner, direction la taverne.
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Isaure.beaumont
Alors que l'ombre du procès à venir planait sur sa tête, la lettre et le présent d'Octave furent accueillis dans l’allégresse la plus parfaite. Malgré la menace, elle avait passé tout le jour à sourire et à pépier dans la bonne humeur, oubliant pour un temps Anefleur et Orkange.

Citation:
Mon très cher Octave,

Je suis peinée de lire que la distance et le temps ont raison de mon souvenir et effacent mes traits de votre esprit quand j’entrevois encore clairement les vôtres. Il me suffit d’invoquer votre nom et de fermer les yeux pour voir se dessiner sous mes paupières closes votre aimable profil. Je me souviens de chaque détail : de votre nez affirmé, du pli sérieux de votre bouche quand il ne se fait pas boudeur, de l’éclat de vos yeux quand vous riez. Je me rappelle jusqu’à la chaleur de votre voix, jusqu’à l’intelligence de votre regard et la douceur de vos lèvres sur mon front. Et s’il est possible que ma mémoire déforme quelque peu la réalité de votre visage, je n’ai cependant aucun doute sur ma capacité à vous reconnaître entre mille, et ce même si je devais rester des siècles sans vous voir.

J’ose cependant espérer que les années ne s’étireront pas autant sans que je puisse avoir le plaisir de vous recroiser ; mais je crains que nos retrouvailles ne soient pas pour demain, ni même qu’elles aient lieu un jour. J’avais espéré pouvoir vous faire la surprise de notre venue : nous aurions pu alors apprécier vos talents de juge, et je ne doute pas que vous soyez le meilleur. Il m’aurait d’ailleurs plu que vous le soyez en Périgord, car apprenez, Octave, que je vais être traduite en justice pour haute trahison. Une sombre affaire de chouquettes, mais comme vous l’avez si bien fait dans votre lettre, je ne vais pas m’appesantir sur ces gens qui n’en valent pas la peine. Priez pour que j’ai l’occasion de vous conter un jour cette histoire ridicule et que je puisse vous dépeindre ce grotesque portrait de cette dindonne idiote par la faute de qui tout arrive ! J’ignore la peine que l’on me réserve, mais je tiens à vous préciser : je suis innocente de tout crime ! Tâchons d’oublier quelques instants que c’est peut-être la dernière fois que je vous écris, car ne nous voilons pas la face, l’innocence n’a jamais empêché l’application de la peine capitale. Qui sait, peut-être verrez-vous rouler ma tête jusqu’à vos pieds : ce sera là un touchant adieu ! Même dans la mort, j’aurai eu une pensée pour vous, jusqu’au bout. Peut-être vous sourirai-je.

Avez-vous déjà vu une tête coupée, Octave ? Croyez-moi, pour en avoir tenue une entre mes mains, cela n’a rien de plaisant, ni de séduisant. Mais je gage que si ma dernière pensée est pour vous, alors mes traits seront suffisamment beaux et peu déformés pour ne pas être tout à fait repoussants. Vous aurez alors l’heur de pouvoir me contempler une dernière fois et de graver dans votre mémoire l’image de ce visage ami qui vous fait aujourd’hui défaut. J’aimerais ensuite que vous enterriez ma précieuse tête sous une glycine. C’est une plante que j’affectionne et cela me rapprochera d’une certaine façon de ma fille. A moins que vous ne préfériez l’inhumer dans une prairie folle, couverte de coquelicots ou de violettes, c’est là une idée envisageable. Vous pourriez alors aller cueillir chaque printemps quelques fleurs en mon souvenir : elles se seraient gorgées de mes chairs décomposées et de mon sang desséché.

Il est désolant de se dire que je ne vous connaîtrai jamais comte, mais ainsi va la vie. J’aurai survécu à Judas pour mieux mourir neuf ans plus tard, toujours aussi injustement, mais sans doute était-ce la volonté du Très-Haut que je vous rencontre et que je vous connaisse, pour un temps. Je voulais d’ailleurs vous remercier, car il ne me semble pas l’avoir suffisamment fait, pour le présent que vous m’avez fait. Artémis est une parfaite merveille. J’aime sa structure et ses allures, et s’il lui manque l’impétuosité des étalons, elle a l’œil vif et intelligent. Son arrivée, ainsi que votre lettre, ont adouci mon humeur et illuminé ma journée. J’ai passé tout le jour dehors, à la contempler, à apprécier ses qualités. J’ai pris plaisir à parcourir quelques lieues, sans but, laissant le vent fouetter mon visage, juste pour m’étourdir de vitesse. Je me suis laissée griser par ce sentiment de liberté qui me saisit chaque fois que je m’abandonne en selle. Je ne pense alors plus à rien, je m’affranchis de tout : je ressens simplement. Je suis juste vivante. Connaissez-vous ce sentiment enivrant ?

Je constate que j’ai déjà trop noirci cette page, et que vous devez avoir bien des choses importantes à faire. Je vous promets de clore bientôt cette lettre, afin de vous laisser à vos occupations de futur comte. Mais avant cela, puisque nous ne savons pas si j’aurai l’occasion de vous écrire encore, je voulais vous demander une faveur. J’aimerais baptiser Caia, mais sans doute n’en aurai-je pas le temps. J’espérais vous demander en venant d’en être le parrain, choix confirmé par notre petite Caia. Si je n’ai pas l’heur d’organiser la cérémonie, vous en chargerez-vous ? Vous en parrain, et Dana en marraine. Je compte sur vous, Octave.

Que le Très-Haut vous garde, mon cher Octave, qu’il vous garde et vous protège du malheur.
Qu’il vous apporte félicité et richesse.

Isaure





Edit faute(s)

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Octave.
Il n'a pas encore pris la route pour Muret quand il récupère le courrier d'Isaure. D'abord touché, puis effaré, il finit la lettre en secouant la tête, visiblement aussi heureux qu'horrifié par ce qu'il vient de lire. Chaque mot, ou presque, il pourrait l'entendre le prononcer. Ce courrier représente à ses yeux la quintessence Isaurienne. Il y a tout. Le chaud, le froid, le reproche, le compliment, et le glauque.

Citation:
Ma très chère Isaure,

    Je ne sais quoi vous répondre tant vos mots me laissent sans plume.

    Vous êtes vous relue avant de m'adresser votre pli ? Vous rendez-vous seulement compte que vous m'avez proposé de m'envoyer votre tête, sur un ton presque romantique ? Votre TETE Isaure.

    Je ne sais pour quelle raison l'on vous a mise en procès. Je peux me renseigner ceci dit, entre juges, nous nous comprenons. Mais si je n'ai ordonné aucune décapitation pour des traitres à la Couronne qui ont pris, affranchi et pillé une ville, je ne doute pas qu'on ne vous y condamnera pas non plus. Quel crime avez-vous pu commettre, droite comme vous êtes ?

    Je ne vous imagine pas en bandit de grand chemin, ni les armes à la main, de sorte que je peux vous assurer que vous ne risquez pas la peine capitale. Ainsi, vous n'avez plus aucune excuse pour ne pas venir me voir dans mon petit coin de paradis. Vous seriez vraiment prête à tout pour ne pas me revoir et vous contenter de votre souvenir ? Isaure, vous valez tellement mieux que ça.

    Ceci dit, la glycine est effectivement très jolie. D'autant que c'est tout à fait la saison. Vous avez au moins bien choisi la période. Je vous en félicite.

    Et je suis vraiment heureux qu'Artémis remplisse ses promesses. Je l'ai trouvée faite pour vous, et il me plait de lire que vous vous entendez bien. Gardez bien en vous ce sentiment d'être vivante, et conservez le jusqu'à nos retrouvailles. Car il est bien hors de question que nous ne nous revoyions pas !

    Je devrais savoir que les boutades ne nous réussissent pas, je vais donc m'exprimer plus clairement : bien sur que je vous reconnaitrais ! Une grande blonde, aux yeux d'un noir charbon, une poitrine menue et des boucles qui ne parviennent pas à masquer vos attentives mais décollées oreilles. Votre long nez qui surplombe des lèvres charnues, vos taches de rousseur...

    Comment vous oublier enfin !

    Je plaisante. JE PLAISANTE Isaure. Je me rappelle fort bien de vos traits. Et j'ai hâte de les voir un jour s'encadrer dans le chambranle d'une porte qui s'ouvrirait sur une taverne dans laquelle je serais, à vous écrire, surpris et ravi de vous découvrir là !

    Quant à votre dernière question, comment vous refuser ce souhait ? Ce sera un honneur que d'accompagner notre douce Caia à son entrée dans la famille aristotélicienne. Et je me fais une joie d'y revoir ma propre marraine. D'ailleurs, pourquoi ne l'êtes vous pas ? Ne me dites pas que Caia a appris à écrire "Non, pas Isaure marraine, Caia veut Dana" ?

    Je crois que mon groupe s'impatiente, et que les filles commencent à lancer des cailloux sur mes fenêtres. Elles n'ont aucun respect... et ça prétend diriger un Comté ? Je vous assure, on donne le poste à n'importe qui ! Une chance pour moi, peut être.

    Je vous souhaite de longues et belles promenades enivrantes.

    Je ne vous oublie pas.

    Que le Très Haut vous ait en sa bonne garde et vous délivre de ce procès rapidement.


Octave.


Le sourire aux lèvres, il redescend les marches quatre à quatre pour retrouver la petite troupe qu'il est chargé de mener jusqu'à Saint Bertrand et au-délà. Ah, Isaure... Diantre ce qu'elle lui manque.
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