Equemont
La monture soupirait si fort quon neut pu croire quelle allait crever sous la cravache acharnée du cavalier. Les cheveux aux vents, il hurlait de rage comme le fou quil était devenu. Les toits dAlençon apparurent au loin, la route était presque terminée. Peut-être la monture narriverait pas à terminer sa course. On lui avait indiqué quil devait se rendre à lhôtel de la Chasse. Quel délicieux nom pour y voir un cadavre. Il y parvint, laissant sa monture souffler après une si longue course.
On le reconnut de suite, peut-être à cause de la mine de déterré quil affichait. Le premier étage lui fut indiqué. Une pièce dont la fenêtre était ouverte, froide, avec un lit, sur lequel un minuscule petit enfant blanc était allongé. Les mains étaient croisées sur la petite poitrine. Le Salar tomba à genoux, dans un sanglot compulsif.
Isan, pardonnez-moi.
Tous sétaient retirés, sinon le petit Salomon, quil navait pas vu. Après un instant de prière Equemont se retourna, sentant une présence.
Mais...
Pourquoi vous ont-ils laissés ici ? Il ne le demanda pas, il nallait pas en plus faire de reproches. Toujours à genoux, il ouvrit ses bras pour y recevoir un Salomon en pleurs.
Mon fils, ça va aller. Nous allons devoir être forts.
Equemont se redressa et sécha ses larmes, puis il ouvrit la porte.
Messieurs, procédez.
Ils entrèrent et mirent lenfant dans un cercueil. Un prêtre vint bénir le corps, tandis que les hommes fermaient pour toujours la porte de bois. La procession mortifère ne se rendit pas à léglise, parce que lenfant navait pas été baptisé, mais directement au cimetière. Le trou avait été creusé. Un petit trou, à limage de la tragique petitesse de la boite quon allait y placer. Lopération fut vite réalisée, et les porteurs sécartèrent pour que le père puisse faire une dernière prière.
La terre tombait lentement pour faire disparaitre à tout jamais le petit corps. On scella la stèle préparée selon les consignes dEquemont.
CI GIT ISAN DU SALAR AP MAELWEG DE KERDRAON
Fruit de lamour, innocent envolé, regrets éternels.
Equemont avait fait partir des courriers pour apprendre la nouvelle à la mère. Il avait accompagné Salomon jusquaux portes de la Bretagne, où il était certain quil retrouverait sa mère. Puis était reparti avec une extrême lenteur vers Paris. Voyage ultime, chemin de croix ou montée au calvaire.
Arrivé à Paris, il rédigea son testament le fit attester, congédia tout son personnel, puis se prépara. Lheure du grand voyage était arrivée. Il avait pensé au départ, comme il avait déjà tenté de le faire, se pendre. Mais il avait réfléchi durant son chemin de retour et la violence du procédé lavait rebuté, non pas pour lui, mais pour sa famille et ceux qui le découvriraient. Le choix était rude, pour avoir en même temps le courage daller au bout. Une idée lui traversa lesprit et il finit par la choisir. Arrivé il avait monté sa grande arbalète au deuxième étage, dans une pièce vide qui avait le mérite d'avoir une fenêtre au dessus de la fosse à déjection de l'hôtel particulier. Il avait remonté l'arme, puis essayée une fois pour vérifier quelle était encore fonctionnelle. La force du carreau serait suffisante. Il la plaça sur le rebord de fenêtre avec un poids qui la ferait basculer dans la fosse une fois le tir effectué. L'arme s'enfoncerait dans la merde et les épluchures. Il coinça le déclencheur avec le poids. La chute de ce dernier se ferait donc en deux temps. Un premier coup pour déclencher le tir, un deuxième pour faire basculer larme. Il calcula la trajectoire. Tout était fin prêt.
Il shabilla et se coiffa dignement, pris un dernier repas. Il pensa un dernier instant que Lanceline avait quitté les appartements sans le prévenir, mais en même temps, il était parti enterrer son fils sans la prévenir. Il finit par se demander qui le retrouverait. Il faudrait bien quune personne le retrouve. Peut-être quune enquête serait diligentée puisquil était à la prévôté. Mais à vrai dire, il avait conscience que cela nintéressait plus personne. Mort ou vif. Cela ne changerait plus rien et justice serait faite. Une vie pour une vie.
Il se signa, mit une pichenette au poids qui amorça sa chute et alla rejoindre sa position de transition vers lEnfer. Ses genoux heurtèrent le sol avec un bruit sourd. Il regardait en face larme. Le carreau partit et pénétra la face dEquemont par loeil et ressortit de lautre côté de son crâne. La mort fut instantanée sans un cri. Le sang se répandit abondamment sur le sol.
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On le reconnut de suite, peut-être à cause de la mine de déterré quil affichait. Le premier étage lui fut indiqué. Une pièce dont la fenêtre était ouverte, froide, avec un lit, sur lequel un minuscule petit enfant blanc était allongé. Les mains étaient croisées sur la petite poitrine. Le Salar tomba à genoux, dans un sanglot compulsif.
Isan, pardonnez-moi.
Tous sétaient retirés, sinon le petit Salomon, quil navait pas vu. Après un instant de prière Equemont se retourna, sentant une présence.
Mais...
Pourquoi vous ont-ils laissés ici ? Il ne le demanda pas, il nallait pas en plus faire de reproches. Toujours à genoux, il ouvrit ses bras pour y recevoir un Salomon en pleurs.
Mon fils, ça va aller. Nous allons devoir être forts.
Equemont se redressa et sécha ses larmes, puis il ouvrit la porte.
Messieurs, procédez.
Ils entrèrent et mirent lenfant dans un cercueil. Un prêtre vint bénir le corps, tandis que les hommes fermaient pour toujours la porte de bois. La procession mortifère ne se rendit pas à léglise, parce que lenfant navait pas été baptisé, mais directement au cimetière. Le trou avait été creusé. Un petit trou, à limage de la tragique petitesse de la boite quon allait y placer. Lopération fut vite réalisée, et les porteurs sécartèrent pour que le père puisse faire une dernière prière.
La terre tombait lentement pour faire disparaitre à tout jamais le petit corps. On scella la stèle préparée selon les consignes dEquemont.
CI GIT ISAN DU SALAR AP MAELWEG DE KERDRAON
Fruit de lamour, innocent envolé, regrets éternels.
- Quelques jours plus tard
Equemont avait fait partir des courriers pour apprendre la nouvelle à la mère. Il avait accompagné Salomon jusquaux portes de la Bretagne, où il était certain quil retrouverait sa mère. Puis était reparti avec une extrême lenteur vers Paris. Voyage ultime, chemin de croix ou montée au calvaire.
Arrivé à Paris, il rédigea son testament le fit attester, congédia tout son personnel, puis se prépara. Lheure du grand voyage était arrivée. Il avait pensé au départ, comme il avait déjà tenté de le faire, se pendre. Mais il avait réfléchi durant son chemin de retour et la violence du procédé lavait rebuté, non pas pour lui, mais pour sa famille et ceux qui le découvriraient. Le choix était rude, pour avoir en même temps le courage daller au bout. Une idée lui traversa lesprit et il finit par la choisir. Arrivé il avait monté sa grande arbalète au deuxième étage, dans une pièce vide qui avait le mérite d'avoir une fenêtre au dessus de la fosse à déjection de l'hôtel particulier. Il avait remonté l'arme, puis essayée une fois pour vérifier quelle était encore fonctionnelle. La force du carreau serait suffisante. Il la plaça sur le rebord de fenêtre avec un poids qui la ferait basculer dans la fosse une fois le tir effectué. L'arme s'enfoncerait dans la merde et les épluchures. Il coinça le déclencheur avec le poids. La chute de ce dernier se ferait donc en deux temps. Un premier coup pour déclencher le tir, un deuxième pour faire basculer larme. Il calcula la trajectoire. Tout était fin prêt.
Il shabilla et se coiffa dignement, pris un dernier repas. Il pensa un dernier instant que Lanceline avait quitté les appartements sans le prévenir, mais en même temps, il était parti enterrer son fils sans la prévenir. Il finit par se demander qui le retrouverait. Il faudrait bien quune personne le retrouve. Peut-être quune enquête serait diligentée puisquil était à la prévôté. Mais à vrai dire, il avait conscience que cela nintéressait plus personne. Mort ou vif. Cela ne changerait plus rien et justice serait faite. Une vie pour une vie.
Il se signa, mit une pichenette au poids qui amorça sa chute et alla rejoindre sa position de transition vers lEnfer. Ses genoux heurtèrent le sol avec un bruit sourd. Il regardait en face larme. Le carreau partit et pénétra la face dEquemont par loeil et ressortit de lautre côté de son crâne. La mort fut instantanée sans un cri. Le sang se répandit abondamment sur le sol.
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