Sabaude
Quatre mains.
Était-ce cela qui différenciait lamitié de lamour? Cette sincérité pleine dhumilité que lon livrait à lappétit de lautre, au fil dune inquiétude trouble et qui pourtant trouvait assez de force pour se présenter au regard sans craindre le jugement?
Chat solitaire dont les rares amitiés avaient été à ce point décevantes quelles avaient condamné les chemins les plus simples de lattention féline, émiettant dans leurs pas quelques accents de méfiance qui avaient fini par enfler jusquà devenir poison, viciant lair jusquà nécessiter la survie la plus élémentaire Dabord Thomas, puis Dacien, tour à tour abandonné et trahi, laissé sans plus la moindre précaution à la ferveur de ses propres démons, senchainant volontairement à la rassurante solitude dêtre seul maître à bord et dans ce jeu de quilles, Renard venait galoper sans conscience des dégâts quil pouvait provoquer, attisant une curiosité neuve en contemplant la facilité déconcertante avec laquelle il effleurait lâme sans la plier à ses réflexes les plus immédiats. Lalchimie était commune, inexplicable tout autant quinextricable, et si les plaisirs de la chair avaient permis aux deux jeunes hommes de brûler les étapes menant vers le lien de lintimité, ils nen avaient pas moins pour terreau une découverte mutuelle stupéfaite de ces sentiments amicaux irradiant les veines avec la même intensité sans pourtant en avoir la saveur, des amours passionnées.
Refermant le cocon de ses bras autour des épaules mâles, il réunit les corps en une étreinte paisible, rassurante, aux volutes de cette amitié juvénile, animal terrifié à lidée de donner en pâture la totalité de son âme mise à nue au regard vairon de cet insurmontable Amour par crainte dy lire la déception quand il ne redoutait plus de les livrer, lui et labomination vivante tapie dans son ventre, au regard du Goupil.
Jen serais digne, Sabaude, et de ton amitié, et de ta confiance, murmura-t-il à la façon de ses serments enfantins auxquels on joint la sincérité la plus forte et limmuabilité de la foi, le souffle ségarant dans le cou du jeune homme quil nourrit de quelques baisers avant de relâcher lenlacement pour chasser ce trouble éprouvé et rendre sa légèreté au Renard.
Ton premier gage consiste à te laisser ranger seul ce fatras , annonça-t-il dune voix trainante en se relevant, contemplant le désordre régnant dans le jardinet comme à chaque leçon que le vicomte dispensait, maître ayant à cur de prodiguer les meilleurs exercices à son élève, londe modulée de la morgue joyeuse et légitime du guerrier victorieux.
C'est un oisillon pantois, agité d'un frisson né de la chaleur féline remplacée par la fraîche caresse automnale sur sa peau nue qui exprima sa surprise à l'annonce du gage.
Quoi ?!Humph !Sale Matou exploiteur ! Moi qui pensais que tu avais oublié... Lança-t-il indigné en même temps qu'un pinceau en direction du vainqueur avant de s'avachir au sol de nouveau pris d'un fou rire. Bras écartés et yeux clos, Renard laissa le murmure bloqué aux tempes s'insinuer en ses veines, fouailler tout son être et se nicher en son sein pour attiser l'inespérée source de chaleur et de force qu'avait fait naître la rencontre, remplaçant peu à peu la vacuité maligne par une plénitude nouvelle.
La vigueur à ses membres revenue, lestement remis sur ses jambes, beau joueur il s'employa à rassembler les affaires sur le banc de pierre non sans imiter la placidité féline et jeter quelques coups dil désapprobateurs à son partenaire au moment de décrocher les cuissots. Travail effectué, c'est sa chemise en travers d'une épaule et celle d'Alphonse en main qu'il dut résister à l'envie de lui envoyer en pleine figure avant de se placer sous son nez et de la lui remettre. Ôtes-moi ce sourire de tes lèvres, badina-t-il alors que les siennes s'étiraient à leur tour et qu'une touffe de poils rouges vint l'air de rien cercler un nombril jumeau. Tête légèrement penchée sur le côté et prunelles pétillantes , la pulpe d'un pouce suivit la marque en travers de son torse, celle à sa joue puis le grimage faune. Nos talents d'artistes m'inspirent ton second et....malheureusement dernier gage, laissa-t-il en suspens avant de conclure. Même si j'aurais grand plaisir à te peindre intégralement, je préfère te confier le soin de laver nos corps avant que je ne doive partir. Mais si tu insistes je puis te barbouiller, ponctua-t-il en révélant l'émail, arme du crime levée.
Les doigts longilignes du chat se saisirent du vêtement tendu sans effacer de son museau, limpertinente satisfaction davoir surveillé le rangement sans y participer, accusant la revanche tardive du pinceau à sa peau en dévoilant un peu plus les crocs, altier désinvolte qui semblait dire jusque dans lexpression de son visage, quil ne sabaisserait point à une quelconque répartie quand la victoire lui ceignait le front aussi superbement.
Si les yeux noirs sourlaient dune malice joyeuse pour regarder le vicomte, ils se voilèrent dun appétit autre, écho des aveux portés par le désir vibrant mordant les veines du jeune homme, lorsque lesquisse de ses doigts inspecta les traces carmines disséminées sur les peaux laiteuses, accusant le gage réservé à son intention dun baiser aux lèvres qui lui faisaient face.
Jinsiste, répondit-il à lorée des lippes mâles provoquées dune morsure badine avant de séloigner vers la petite porte desservant le bureau dun pas volontairement lent. Quand tu auras fini de te faire faire la leçon par les cuisinières en leur portant des gigots ainsi abimés Et il savait, lanimal, quelles ne résisteraient pas à lenvie dasticoter le Goupil, Renard à ce point charmeur et jovial que même le personnel de cuisine se mettait à le gourmander comme sil eut fait partie des murs lorsquils mettaient fin à leur entrainement pour leur apporter les victuailles mises à contribution durant les exercices monte, poursuivit-il, sobrement, quand lintention était encore inédite, permettant lascension pour la première fois à ce royaume jalousement gardé hors de portée du monde alors que leur voracité les entrainait le plus souvent à consommer leur fièvre à la faveur dune chambre inoccupée au rez-de-chaussée ou de létuve moelleuse de la salle deau. Je vais demander à nous y faire couler un bain, conclut-il, se retournant vers le Renard une dernière fois pour lui adresser un sourire faune avant de disparaitre.
Et l'on vit alors un Renard singer un Chat à l'évanouissement de Sa Majesté.
Laissé seul au jardin, pinceau et épaules du perdant s'affaissèrent, prévisible renoncement du discipliné dont la provocation sans suite n'avait guère échappée au Matou aguichant. L'oeil dériva de la porte empruntée aux morceaux de viande à livrer, précédant la moue de contrariété vite remplacée par l'enthousiasmante perspective de se voir remettre de quoi apaiser sa faim. Un détail ou deux furent toutefois oubliés : la chemise et les traces rouges qui couraient sur sa personne.
Mais cessez de crier ! Je vais bien. Alphonse aussi... Lâchez-moi et rangez ce couteau !
Non...nous ne nous sommes pas battus....c'est de la peinture.
Arrêtez de me tâter puisque je vous dis que...Humph...C'est indécent là....sincèrement....
Ce fut un Goupil chapardeur de pain et de pommes qui séchappa ventre à terre des cuisines et s'arrêta net devant l'escalier, butin serré contre son torse, prunelles à l'assaut de l'obscurité. Parvenu silencieusement en haut, le jeune vicomte en proie à une soudaine agitation interne s'adossa au mur du couloir, à l'écoute de ces bruits d'activités humaines réservées à ce lieu qu'il soupçonnait intime.
Si l'amitié était née dans ce terreau d'enseignement libre tour à tour donné et reçu, allant grandissant, il n'en restait pas moins élève d'un guide délicat et habile au féroce appétit rapidement deviné et accepté. Le regard sur l'encadrement de la pièce fut sans équivoque, seuil franchi il n'y aurait pas de retour, l'abandon serait plein. Sur une profonde inspiration Phénix se redressa et pénétra dans l'antre faune, prêt à se faire lisser le plumage. Morceau de fruit entre l'émail, une main aux reins jumeaux l'autre encombrée des victuailles , la pitance fut remise d'un léger mouvement de langue aux lèvres rougies.
Maitre silencieux en son domaine cloitre, le chat avait perçu les pas de loiseau au moment même où il avait commencé à arpenter les marches menant à son sanctuaire, oreille connaissant chacune des rares silhouettes y montant, ajoutant, attentif, celle du vicomte à la courte gamme quil possédait. Larrêt, tout comme linspiration pris à la manière dune entrée dans larène, ne lui avaient pas plus échappé, nécorchant pourtant pas le geste mesurant dun index la température du bain dont les baquets avaient eu le temps dêtre déversés en nombre dans la vaste baignoire le temps que le Goupil affronte les cuisines.
La présence mâle dans son dos fut perçue avant que la main ne se pose aux reins, geste étonnamment tacite dont la douce brulûre parlait autant quelle subjuguait linstinct animal niché à son ventre, incitant le mouvement en guise de réponse à pivoter, pour trouver aux lèvres jumelles un morceau de fruit quil considéra dun il amusé avant de sen saisir, essaimant au frôlement de ses lèvres, le claquement sec de la machoire carnassière, étirant un sourire en contemplant le visage qui lui faisait face, haussant un sourcil narquois en jaugeant les vivres ramenées de son expédition.
Penses-tu que nous allons tenir un siège ?, le taquina-t-il en désignant du menton la miche de pain et les pommes savamment agencées, soumettant au dessin de ses lèvres un trait encore plus vif en inclinant le buste pour contempler lensemble, Renard et son butin, apologue tout autant que créature tangible, présence à ce point réconfortante quelle pansait le chat des blessures laissées par les autres, dénervant avec une facilité effroyable, la méfiance quil avait toujours liée à ceux que lon ose si souvent, à tort, appeler Amis.
Au silence paisible de la chambre, le chat acheva de se tendre vers Sabaude, cueillant les lèvres dun baiser plus alangui, goutant lhaleine acidulée de pomme avec une application telle quelle égara les ventres à linévitable communion de létreinte se consumant jusquà la patte féline courant au creux des reins pour lasservir à ses caresses, détruisant léquilibre habile dun fruit qui vacilla pour tomber au sol à la manière dune percussion sourde scellant linstant pour ramener les deux jeunes hommes à léther des volutes parfumées séchappant du bain.
Passant une langue gourmande à ses babines, les doigts du chat saventurèrent aux braies du Goupil, entreprenant de les délacer sans dénouer les regards qui se faisaient face, murmurant à ses lèvres sans se départir dun pli insolent à la commissure des siennes, comme sil avait en tête de ne laisser aller la suite que pour échapper à son gage :
Est-il vraiment nécessaire, ce bain ?
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Était-ce cela qui différenciait lamitié de lamour? Cette sincérité pleine dhumilité que lon livrait à lappétit de lautre, au fil dune inquiétude trouble et qui pourtant trouvait assez de force pour se présenter au regard sans craindre le jugement?
Chat solitaire dont les rares amitiés avaient été à ce point décevantes quelles avaient condamné les chemins les plus simples de lattention féline, émiettant dans leurs pas quelques accents de méfiance qui avaient fini par enfler jusquà devenir poison, viciant lair jusquà nécessiter la survie la plus élémentaire Dabord Thomas, puis Dacien, tour à tour abandonné et trahi, laissé sans plus la moindre précaution à la ferveur de ses propres démons, senchainant volontairement à la rassurante solitude dêtre seul maître à bord et dans ce jeu de quilles, Renard venait galoper sans conscience des dégâts quil pouvait provoquer, attisant une curiosité neuve en contemplant la facilité déconcertante avec laquelle il effleurait lâme sans la plier à ses réflexes les plus immédiats. Lalchimie était commune, inexplicable tout autant quinextricable, et si les plaisirs de la chair avaient permis aux deux jeunes hommes de brûler les étapes menant vers le lien de lintimité, ils nen avaient pas moins pour terreau une découverte mutuelle stupéfaite de ces sentiments amicaux irradiant les veines avec la même intensité sans pourtant en avoir la saveur, des amours passionnées.
Refermant le cocon de ses bras autour des épaules mâles, il réunit les corps en une étreinte paisible, rassurante, aux volutes de cette amitié juvénile, animal terrifié à lidée de donner en pâture la totalité de son âme mise à nue au regard vairon de cet insurmontable Amour par crainte dy lire la déception quand il ne redoutait plus de les livrer, lui et labomination vivante tapie dans son ventre, au regard du Goupil.
Jen serais digne, Sabaude, et de ton amitié, et de ta confiance, murmura-t-il à la façon de ses serments enfantins auxquels on joint la sincérité la plus forte et limmuabilité de la foi, le souffle ségarant dans le cou du jeune homme quil nourrit de quelques baisers avant de relâcher lenlacement pour chasser ce trouble éprouvé et rendre sa légèreté au Renard.
Ton premier gage consiste à te laisser ranger seul ce fatras , annonça-t-il dune voix trainante en se relevant, contemplant le désordre régnant dans le jardinet comme à chaque leçon que le vicomte dispensait, maître ayant à cur de prodiguer les meilleurs exercices à son élève, londe modulée de la morgue joyeuse et légitime du guerrier victorieux.
C'est un oisillon pantois, agité d'un frisson né de la chaleur féline remplacée par la fraîche caresse automnale sur sa peau nue qui exprima sa surprise à l'annonce du gage.
Quoi ?!Humph !Sale Matou exploiteur ! Moi qui pensais que tu avais oublié... Lança-t-il indigné en même temps qu'un pinceau en direction du vainqueur avant de s'avachir au sol de nouveau pris d'un fou rire. Bras écartés et yeux clos, Renard laissa le murmure bloqué aux tempes s'insinuer en ses veines, fouailler tout son être et se nicher en son sein pour attiser l'inespérée source de chaleur et de force qu'avait fait naître la rencontre, remplaçant peu à peu la vacuité maligne par une plénitude nouvelle.
La vigueur à ses membres revenue, lestement remis sur ses jambes, beau joueur il s'employa à rassembler les affaires sur le banc de pierre non sans imiter la placidité féline et jeter quelques coups dil désapprobateurs à son partenaire au moment de décrocher les cuissots. Travail effectué, c'est sa chemise en travers d'une épaule et celle d'Alphonse en main qu'il dut résister à l'envie de lui envoyer en pleine figure avant de se placer sous son nez et de la lui remettre. Ôtes-moi ce sourire de tes lèvres, badina-t-il alors que les siennes s'étiraient à leur tour et qu'une touffe de poils rouges vint l'air de rien cercler un nombril jumeau. Tête légèrement penchée sur le côté et prunelles pétillantes , la pulpe d'un pouce suivit la marque en travers de son torse, celle à sa joue puis le grimage faune. Nos talents d'artistes m'inspirent ton second et....malheureusement dernier gage, laissa-t-il en suspens avant de conclure. Même si j'aurais grand plaisir à te peindre intégralement, je préfère te confier le soin de laver nos corps avant que je ne doive partir. Mais si tu insistes je puis te barbouiller, ponctua-t-il en révélant l'émail, arme du crime levée.
Les doigts longilignes du chat se saisirent du vêtement tendu sans effacer de son museau, limpertinente satisfaction davoir surveillé le rangement sans y participer, accusant la revanche tardive du pinceau à sa peau en dévoilant un peu plus les crocs, altier désinvolte qui semblait dire jusque dans lexpression de son visage, quil ne sabaisserait point à une quelconque répartie quand la victoire lui ceignait le front aussi superbement.
Si les yeux noirs sourlaient dune malice joyeuse pour regarder le vicomte, ils se voilèrent dun appétit autre, écho des aveux portés par le désir vibrant mordant les veines du jeune homme, lorsque lesquisse de ses doigts inspecta les traces carmines disséminées sur les peaux laiteuses, accusant le gage réservé à son intention dun baiser aux lèvres qui lui faisaient face.
Jinsiste, répondit-il à lorée des lippes mâles provoquées dune morsure badine avant de séloigner vers la petite porte desservant le bureau dun pas volontairement lent. Quand tu auras fini de te faire faire la leçon par les cuisinières en leur portant des gigots ainsi abimés Et il savait, lanimal, quelles ne résisteraient pas à lenvie dasticoter le Goupil, Renard à ce point charmeur et jovial que même le personnel de cuisine se mettait à le gourmander comme sil eut fait partie des murs lorsquils mettaient fin à leur entrainement pour leur apporter les victuailles mises à contribution durant les exercices monte, poursuivit-il, sobrement, quand lintention était encore inédite, permettant lascension pour la première fois à ce royaume jalousement gardé hors de portée du monde alors que leur voracité les entrainait le plus souvent à consommer leur fièvre à la faveur dune chambre inoccupée au rez-de-chaussée ou de létuve moelleuse de la salle deau. Je vais demander à nous y faire couler un bain, conclut-il, se retournant vers le Renard une dernière fois pour lui adresser un sourire faune avant de disparaitre.
Et l'on vit alors un Renard singer un Chat à l'évanouissement de Sa Majesté.
Laissé seul au jardin, pinceau et épaules du perdant s'affaissèrent, prévisible renoncement du discipliné dont la provocation sans suite n'avait guère échappée au Matou aguichant. L'oeil dériva de la porte empruntée aux morceaux de viande à livrer, précédant la moue de contrariété vite remplacée par l'enthousiasmante perspective de se voir remettre de quoi apaiser sa faim. Un détail ou deux furent toutefois oubliés : la chemise et les traces rouges qui couraient sur sa personne.
Mais cessez de crier ! Je vais bien. Alphonse aussi... Lâchez-moi et rangez ce couteau !
Non...nous ne nous sommes pas battus....c'est de la peinture.
Arrêtez de me tâter puisque je vous dis que...Humph...C'est indécent là....sincèrement....
Ce fut un Goupil chapardeur de pain et de pommes qui séchappa ventre à terre des cuisines et s'arrêta net devant l'escalier, butin serré contre son torse, prunelles à l'assaut de l'obscurité. Parvenu silencieusement en haut, le jeune vicomte en proie à une soudaine agitation interne s'adossa au mur du couloir, à l'écoute de ces bruits d'activités humaines réservées à ce lieu qu'il soupçonnait intime.
Si l'amitié était née dans ce terreau d'enseignement libre tour à tour donné et reçu, allant grandissant, il n'en restait pas moins élève d'un guide délicat et habile au féroce appétit rapidement deviné et accepté. Le regard sur l'encadrement de la pièce fut sans équivoque, seuil franchi il n'y aurait pas de retour, l'abandon serait plein. Sur une profonde inspiration Phénix se redressa et pénétra dans l'antre faune, prêt à se faire lisser le plumage. Morceau de fruit entre l'émail, une main aux reins jumeaux l'autre encombrée des victuailles , la pitance fut remise d'un léger mouvement de langue aux lèvres rougies.
Maitre silencieux en son domaine cloitre, le chat avait perçu les pas de loiseau au moment même où il avait commencé à arpenter les marches menant à son sanctuaire, oreille connaissant chacune des rares silhouettes y montant, ajoutant, attentif, celle du vicomte à la courte gamme quil possédait. Larrêt, tout comme linspiration pris à la manière dune entrée dans larène, ne lui avaient pas plus échappé, nécorchant pourtant pas le geste mesurant dun index la température du bain dont les baquets avaient eu le temps dêtre déversés en nombre dans la vaste baignoire le temps que le Goupil affronte les cuisines.
La présence mâle dans son dos fut perçue avant que la main ne se pose aux reins, geste étonnamment tacite dont la douce brulûre parlait autant quelle subjuguait linstinct animal niché à son ventre, incitant le mouvement en guise de réponse à pivoter, pour trouver aux lèvres jumelles un morceau de fruit quil considéra dun il amusé avant de sen saisir, essaimant au frôlement de ses lèvres, le claquement sec de la machoire carnassière, étirant un sourire en contemplant le visage qui lui faisait face, haussant un sourcil narquois en jaugeant les vivres ramenées de son expédition.
Penses-tu que nous allons tenir un siège ?, le taquina-t-il en désignant du menton la miche de pain et les pommes savamment agencées, soumettant au dessin de ses lèvres un trait encore plus vif en inclinant le buste pour contempler lensemble, Renard et son butin, apologue tout autant que créature tangible, présence à ce point réconfortante quelle pansait le chat des blessures laissées par les autres, dénervant avec une facilité effroyable, la méfiance quil avait toujours liée à ceux que lon ose si souvent, à tort, appeler Amis.
Au silence paisible de la chambre, le chat acheva de se tendre vers Sabaude, cueillant les lèvres dun baiser plus alangui, goutant lhaleine acidulée de pomme avec une application telle quelle égara les ventres à linévitable communion de létreinte se consumant jusquà la patte féline courant au creux des reins pour lasservir à ses caresses, détruisant léquilibre habile dun fruit qui vacilla pour tomber au sol à la manière dune percussion sourde scellant linstant pour ramener les deux jeunes hommes à léther des volutes parfumées séchappant du bain.
Passant une langue gourmande à ses babines, les doigts du chat saventurèrent aux braies du Goupil, entreprenant de les délacer sans dénouer les regards qui se faisaient face, murmurant à ses lèvres sans se départir dun pli insolent à la commissure des siennes, comme sil avait en tête de ne laisser aller la suite que pour échapper à son gage :
Est-il vraiment nécessaire, ce bain ?
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