Alphonse_tabouret
I can't feel 'cause I'm numb
I can't feel 'cause I'm numb
What's the worth in all of this?
Sing to me
So what's the worth in all of this?
If the child in your head
If the child is dead
Sing to me
Blur
Avril sonnait le glas dun anniversaire dont il naurait jamais cru venir à bout, et cétait pourtant debout, vivant, quil affrontait devant lui lépitaphe sommaire qui ornait le sépulcre, au prise de ces instants où les temps se mêlaient, se superposaient et existaient tous à la fois , cueillant sans plus attendre les bribes de pensées pour les précipiter dans une conversation qui navait de logique quau cur des amputés.
Cest moi.
Les encres grasses dun soleil crépusculaire parsemaient un ciel où seffilochaient de rares lambeaux de nuages, filigranes à venir dune nuit venteuse dont les enfants sages nauraient pas de souvenirs et qui sétoffait du clignotement diffus de quelques rares étoiles déjà suspendues à lheure encore jeune. Dans son dos, à quelques pas, il devinait la présence de la gitane, compagne tempétueuse de ces instants endeuillés, témoin involontaire du voile mortuaire qui sétait posé à son visage, tenant dans ses bras la silhouette emmaillotée dAntoine dont les yeux noirs curieux trouvaient à une boucle brune maternelle plus de panache quau cimetière qui les accueillait.
Un an.
Un sourire tendre ségara à ses lèvres, égayé de milles souvenirs, bousculé par le vide immédiat qui leur succédait toujours aussi immanquablement même si, au fil des mois, labime sétait résorbé, sattardant dans le pli dune infinie tristesse aux accents acceptés, tandis quil entamait son monologue, privilège réservé à ceux qui ont perdu, se relèvent et avancent .
Un an que tu es parti.
Vois, je ne dis plus que tu mas quitté.
Je progresse.
Je ne suis pas venu souvent Jamais, tu as raison
Je me mange peu, me couche tard, me lève tôt, bois parfois trop, parfois pas assez, baise jusquà en perdre le souffle, me perds rarement, mégare souvent, survole constamment Dit comme cela, il ny a pas grand-chose de changé nest-ce pas ?
Et pourtant Quentin, pourtant
La pulpe de ses doigts fourmilla doucement dune envie, et saccroupissant à hauteur de la stèle, le chat laissa courir ses doigts encore attelé de leur séjour à la cour des miracles sur la pierre sobre qui lui faisait face, comme sil avait pu au travers dun mètre de terre, sentir la chaleur du lion, tapi dans la pénombre des gravats mortuaires, en proie à un manque égoïste pour la première fois depuis longtemps.
pourtant, tout est différent.
Vois derrière moi
Le visage dAntoine cisailla lespace pour sinterposer succinctement au visage anglais sans quil ait besoin de se retourner, la chair à ce point enorgueillie de cet enfant sublime quil en gardait les contours avec une précision pleine, emportant à chaque pas, cet odeur si caractéristique des nouveaux nés, et le grain de leur peau duveteuse.
Il est à moi Ne ris pas, il parait que tous les nouveaux nés ont lair davoir respirer de labsinthe
Oh dailleurs jai fini ta bouteille
La gorge se serra un instant, au prise avec ce geste définitif quil avait eu, affranchi, se découvrant incapable de le regretter quand un soupir franchissait ses lèvres, flirtant avec cette sensation davant où tout était si simple et cet instant précis ou les choses le redevenaient, somme dun changement de perspectives, dun angle différent, dun pas fait en dehors des chemins auxquels il avait cru avec limbécile gout de linfini.
LAphrodite va bien je crois que jen ai fait ce que tu voulais peut être un peu ce que je voulais aussi
Le sourire sépiça dune fragrance insolente, dessin tant de fois opposé au Lion jusquà lui faire perdre la patience et la tête et nouer les corps dans la lutte comme dans létreinte, au chaud de ce soliloque insensé dont il percevait chaque silence comme un dialogue.
Trop tard pour grogner, nest-ce pas ?...
Un instant il tempéra ses pensées, laissant les bruits alentours prendre le pas sur eux, emportant au loin, le bruit dun coche, un esclandre éclatant plus loin dans une rue jouxtant lenceinte, son propre souffle
Tu sais pourquoi je viens nest-ce pas ?
Je croyais bêtement que nous nous étions dit adieu lannée dernière, mais je métais trompé
Quand tu es mort Quentin, je suis mort avec toi. Tu as emmené dans ta tombe lessentiel de mon monde jusquà me laisser le gout du caveau plus que celui de la vie et jai cru, jai cru longtemps, je te le jure, que la vie aurait le gout des cendres, lexpression de ton visage quand je tai trouvé, et le son du silence que tu mimposais
Foutu égoïste Pas moi, toi
Laccusation fendit le dessin de ses lèvres en étirant un sourire pale en coin.
Moi moi je suis un imbécile Jai cru que parce que tu étais irremplaçable, je me mettais à boiter mais je boitais déjà avant de te rencontrer. Il ma fallu tellement de temps pour me rendre compte dune telle évidence que je men voudrais presque de tavoir accusé de tout quand tu nétais coupable de rien
Jaime. reprit-il enfin au dialogue de ses pensées.
Non. Pas elle, bien que je laime aussi, follement, démesurément, mais pas de cette façon et elle préfère ça elle aussi
La dextre se desserra, révélant, miroitant doucement, léclat argenté dun médaillon niché en son sein.
Jaime quelquun qui nest pas toi, qui ne le sera jamais Jaime un vivant, avoua-t-il en accusant un air soucieux, grave, à lunisson de la violence qui unifiait le chaos son âme quand le visage Etienne simposait à ses tempes, rassurant dans sa fureur, sincère dans sa rage, fidèle dans ses noirceurs.
Est-ce que cela veut dire que je ne taime plus, toi ?
Hérésie.
Comment pourrais-je ne plus taimer quand tu mas sauvé de lennui de mon esclavage, des projets auxquels javais pour coutume de me plier, dune vie sans sel
Je taime Quentin, mais plus à men noyer, plus à my perdre je taime sans concession, mort, loin, muet, désormais indifférent et impuissant au bonheur que je forge jour après jour. Je taime comme jaime le soleil qui se lève, le parfum dune brise dété ou la fraicheur dun fruit lui, je laime sans comparaison possible
Les doigts desserrèrent leur geôle jusquà laisser pendre au bout de chaine dargent, larrondi du bijou, révélant, bosselées, les armoiries du lion anglais, cliquetant doucement sur la pierre épaisse à laquelle le jeune homme le déposa.
Je ne tapprendrais pas quon ne peut aimer quune chose à la fois et je ne voudrais pas quil te casse la gueule
Cest ça, ricane Il en serait capable
Il égrena au temps passant dans sa contemplation les fils étroits des secondes senchevêtrant, avant de se relever, le velours des prunelles fixées au médaillon abandonné, la senestre abimée retrouvant le confort de la poche quand il pivotait, lançant la dextre vers la silhouette féminine , un sourire usé mais épuré au visage, consumé et en paix au seuil de cette vie nouvelle.
Excuse-moi de tavoir fait attendre.
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I can't feel 'cause I'm numb
What's the worth in all of this?
Sing to me
So what's the worth in all of this?
If the child in your head
If the child is dead
Sing to me
Blur
Avril sonnait le glas dun anniversaire dont il naurait jamais cru venir à bout, et cétait pourtant debout, vivant, quil affrontait devant lui lépitaphe sommaire qui ornait le sépulcre, au prise de ces instants où les temps se mêlaient, se superposaient et existaient tous à la fois , cueillant sans plus attendre les bribes de pensées pour les précipiter dans une conversation qui navait de logique quau cur des amputés.
Cest moi.
Les encres grasses dun soleil crépusculaire parsemaient un ciel où seffilochaient de rares lambeaux de nuages, filigranes à venir dune nuit venteuse dont les enfants sages nauraient pas de souvenirs et qui sétoffait du clignotement diffus de quelques rares étoiles déjà suspendues à lheure encore jeune. Dans son dos, à quelques pas, il devinait la présence de la gitane, compagne tempétueuse de ces instants endeuillés, témoin involontaire du voile mortuaire qui sétait posé à son visage, tenant dans ses bras la silhouette emmaillotée dAntoine dont les yeux noirs curieux trouvaient à une boucle brune maternelle plus de panache quau cimetière qui les accueillait.
Un an.
Un sourire tendre ségara à ses lèvres, égayé de milles souvenirs, bousculé par le vide immédiat qui leur succédait toujours aussi immanquablement même si, au fil des mois, labime sétait résorbé, sattardant dans le pli dune infinie tristesse aux accents acceptés, tandis quil entamait son monologue, privilège réservé à ceux qui ont perdu, se relèvent et avancent .
Un an que tu es parti.
Vois, je ne dis plus que tu mas quitté.
Je progresse.
Je ne suis pas venu souvent Jamais, tu as raison
Je me mange peu, me couche tard, me lève tôt, bois parfois trop, parfois pas assez, baise jusquà en perdre le souffle, me perds rarement, mégare souvent, survole constamment Dit comme cela, il ny a pas grand-chose de changé nest-ce pas ?
Et pourtant Quentin, pourtant
La pulpe de ses doigts fourmilla doucement dune envie, et saccroupissant à hauteur de la stèle, le chat laissa courir ses doigts encore attelé de leur séjour à la cour des miracles sur la pierre sobre qui lui faisait face, comme sil avait pu au travers dun mètre de terre, sentir la chaleur du lion, tapi dans la pénombre des gravats mortuaires, en proie à un manque égoïste pour la première fois depuis longtemps.
pourtant, tout est différent.
Vois derrière moi
Le visage dAntoine cisailla lespace pour sinterposer succinctement au visage anglais sans quil ait besoin de se retourner, la chair à ce point enorgueillie de cet enfant sublime quil en gardait les contours avec une précision pleine, emportant à chaque pas, cet odeur si caractéristique des nouveaux nés, et le grain de leur peau duveteuse.
Il est à moi Ne ris pas, il parait que tous les nouveaux nés ont lair davoir respirer de labsinthe
Oh dailleurs jai fini ta bouteille
La gorge se serra un instant, au prise avec ce geste définitif quil avait eu, affranchi, se découvrant incapable de le regretter quand un soupir franchissait ses lèvres, flirtant avec cette sensation davant où tout était si simple et cet instant précis ou les choses le redevenaient, somme dun changement de perspectives, dun angle différent, dun pas fait en dehors des chemins auxquels il avait cru avec limbécile gout de linfini.
LAphrodite va bien je crois que jen ai fait ce que tu voulais peut être un peu ce que je voulais aussi
Le sourire sépiça dune fragrance insolente, dessin tant de fois opposé au Lion jusquà lui faire perdre la patience et la tête et nouer les corps dans la lutte comme dans létreinte, au chaud de ce soliloque insensé dont il percevait chaque silence comme un dialogue.
Trop tard pour grogner, nest-ce pas ?...
Un instant il tempéra ses pensées, laissant les bruits alentours prendre le pas sur eux, emportant au loin, le bruit dun coche, un esclandre éclatant plus loin dans une rue jouxtant lenceinte, son propre souffle
Tu sais pourquoi je viens nest-ce pas ?
Je croyais bêtement que nous nous étions dit adieu lannée dernière, mais je métais trompé
Quand tu es mort Quentin, je suis mort avec toi. Tu as emmené dans ta tombe lessentiel de mon monde jusquà me laisser le gout du caveau plus que celui de la vie et jai cru, jai cru longtemps, je te le jure, que la vie aurait le gout des cendres, lexpression de ton visage quand je tai trouvé, et le son du silence que tu mimposais
Foutu égoïste Pas moi, toi
Laccusation fendit le dessin de ses lèvres en étirant un sourire pale en coin.
Moi moi je suis un imbécile Jai cru que parce que tu étais irremplaçable, je me mettais à boiter mais je boitais déjà avant de te rencontrer. Il ma fallu tellement de temps pour me rendre compte dune telle évidence que je men voudrais presque de tavoir accusé de tout quand tu nétais coupable de rien
Jaime. reprit-il enfin au dialogue de ses pensées.
Non. Pas elle, bien que je laime aussi, follement, démesurément, mais pas de cette façon et elle préfère ça elle aussi
La dextre se desserra, révélant, miroitant doucement, léclat argenté dun médaillon niché en son sein.
Jaime quelquun qui nest pas toi, qui ne le sera jamais Jaime un vivant, avoua-t-il en accusant un air soucieux, grave, à lunisson de la violence qui unifiait le chaos son âme quand le visage Etienne simposait à ses tempes, rassurant dans sa fureur, sincère dans sa rage, fidèle dans ses noirceurs.
Est-ce que cela veut dire que je ne taime plus, toi ?
Hérésie.
Comment pourrais-je ne plus taimer quand tu mas sauvé de lennui de mon esclavage, des projets auxquels javais pour coutume de me plier, dune vie sans sel
Je taime Quentin, mais plus à men noyer, plus à my perdre je taime sans concession, mort, loin, muet, désormais indifférent et impuissant au bonheur que je forge jour après jour. Je taime comme jaime le soleil qui se lève, le parfum dune brise dété ou la fraicheur dun fruit lui, je laime sans comparaison possible
Les doigts desserrèrent leur geôle jusquà laisser pendre au bout de chaine dargent, larrondi du bijou, révélant, bosselées, les armoiries du lion anglais, cliquetant doucement sur la pierre épaisse à laquelle le jeune homme le déposa.
Je ne tapprendrais pas quon ne peut aimer quune chose à la fois et je ne voudrais pas quil te casse la gueule
Cest ça, ricane Il en serait capable
Il égrena au temps passant dans sa contemplation les fils étroits des secondes senchevêtrant, avant de se relever, le velours des prunelles fixées au médaillon abandonné, la senestre abimée retrouvant le confort de la poche quand il pivotait, lançant la dextre vers la silhouette féminine , un sourire usé mais épuré au visage, consumé et en paix au seuil de cette vie nouvelle.
Excuse-moi de tavoir fait attendre.
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