Axelle


Un « si besoin est » avait suffit. Un vague hochement de tête gitan avait répondu, et une chambre de la maison basse avait été préparée pour l’accueillir « au cas où ». Si Axelle se refusait à étirer sa grossesse au sein du lupanar, préférant préserver leur précieuse indépendance, l’attention du Flamand l’avait émue bien plus qu’elle l’aurait voulu. Et si elle rechignait à y séjourner, sa curiosité n’avait pas manqué de la chatouiller et son museau fouineur s’était égaré dans la chambrée. Aucune décoration outrageuse ne l’avait rebutée en entrouvrant la porte, Alphonse avait le gout des choses simples mais élégantes et raffinées, preuve en était de cette perle ne quittant plus son cou brun, mais une douce chaleur au parfum d’immaculé l’avait séduite avec délice. Les draps blancs et le duveteux de l’édredon donnaient des envie de siestes paresseuses et le fauteuil niché au coin de la cheminée des idées de rêveries. Un sourire amusé arqua les lèvres de la brune devant la coiffeuse où trônaient un broc et une cuvette de faïence délicats sur lesquels elle glissa un doigt rêveur. Sur le bureau nu, un bouquet de fleurs fraiches dont une fois de plus la provenance la laissa stupéfaite. Mais de tout, ce fut certainement le haut miroir qui l’intrigua le plus.
Peu encline, voire complètement réfractaire à toute forme de coquetterie superflue quand depuis son naufrage elle s’adonnait soir et matin à une toilette tant méticuleuse qu’elle s’avérait parfois brutale. Pourtant, elle pouvait passer des heures à prendre soin d’elle par simple soucis d’hygiène, entretenant avec un soin particulier ses mains ou sa peau ambrée qu’elle oignait avec application. Coquette, alors peut-être, à sa façon, dans les soins attentifs et discrets qu’elle apportait à chaque recoin de son corps. Mais celui ou celle qui lui ferrait admettre cette possibilité n’était pas encore né. Raison pour laquelle, jamais elle ne s’était égarée à se regarder dans un miroir plus que nécessaire, ne voyant là qu’une débauche de vanité. Et pourtant, ce jour ci, son regard s’attarda sur son reflet. Indifférente aux boucles dégoulinant à ses reins, peu attachée à étudier son regard charbonneux, ce fut sur le léger renflement de son ventre que ses yeux s’abimèrent. Et prise d’un étrange élan subjugué, elle se dévêtit prestement, rejetant le rouge d’un geste dédaigneux dans un coin de la chambre.
Par deux fois déjà, la gitane avait vu son corps se transformer par la grossesse, sans pourtant n’y prêter la moindre attention, tout juste agacée par ce ventre rond qui entravait ses mouvements et l’essoufflait au moindre effort. Mais là, devant son reflet, elle se mit de profil, scrutant longuement cette poitrine légèrement gonflée, mais surtout ce ventre qui, lentement, étirait sa peau d’un bombé presque incongru ainsi opposé à ses jambes, à ses bras, à sa taille qui s’entêtaient à rester menus. Echassier en devenir. Elle sourit doucement, émue par ce petit ballon qui se gonflait passivement. Délaissant son reflet, son regard s’abaissa, couvant ce ventre qu’elle découvrait neuf et le caressa du bout des doigts, avec une délicatesse infinie comme si d’un coup, il ne lui appartenait plus et se parait d’une fragilité la dépassant. Un sourire brisé de tendresse s’invita à sa bouche et à son plus grand étonnement, si tant était qu’elle fut en état de se rendre compte de son laisser-aller inhabituel, chuchota. 'jour… j’crois qu’on va devoir s'supporter un bon bout de temps toi et moi, mais promis, j’essaierai d’pas être trop mauvaise. Remontant la tête, ahurie de sa propre attitude, ronchonnant devant ce qu’elle jugeait d’une mièvrerie sans nom, elle repassa sa robe et déboula échevelée dans le couloir, cherchant Alphonse dans le labyrinthe de portes. Hors de question de courir les étals des tisserands, l’incartade estivale avait été bien assez pénible pour ne pas renouveler l’expérience de sitôt. Il devait lui prêter des chemises, et des braies aussi, tout de suite ! Hors de question de risquer que le petit se voit écrasé par une robe trop serrée ! Mais de cela, elle n’en dirait rien au flamand, supposant d’avance une taquinerie. Non, elle lui dirait juste se sentir déjà engoncée.
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Peu encline, voire complètement réfractaire à toute forme de coquetterie superflue quand depuis son naufrage elle s’adonnait soir et matin à une toilette tant méticuleuse qu’elle s’avérait parfois brutale. Pourtant, elle pouvait passer des heures à prendre soin d’elle par simple soucis d’hygiène, entretenant avec un soin particulier ses mains ou sa peau ambrée qu’elle oignait avec application. Coquette, alors peut-être, à sa façon, dans les soins attentifs et discrets qu’elle apportait à chaque recoin de son corps. Mais celui ou celle qui lui ferrait admettre cette possibilité n’était pas encore né. Raison pour laquelle, jamais elle ne s’était égarée à se regarder dans un miroir plus que nécessaire, ne voyant là qu’une débauche de vanité. Et pourtant, ce jour ci, son regard s’attarda sur son reflet. Indifférente aux boucles dégoulinant à ses reins, peu attachée à étudier son regard charbonneux, ce fut sur le léger renflement de son ventre que ses yeux s’abimèrent. Et prise d’un étrange élan subjugué, elle se dévêtit prestement, rejetant le rouge d’un geste dédaigneux dans un coin de la chambre.
Par deux fois déjà, la gitane avait vu son corps se transformer par la grossesse, sans pourtant n’y prêter la moindre attention, tout juste agacée par ce ventre rond qui entravait ses mouvements et l’essoufflait au moindre effort. Mais là, devant son reflet, elle se mit de profil, scrutant longuement cette poitrine légèrement gonflée, mais surtout ce ventre qui, lentement, étirait sa peau d’un bombé presque incongru ainsi opposé à ses jambes, à ses bras, à sa taille qui s’entêtaient à rester menus. Echassier en devenir. Elle sourit doucement, émue par ce petit ballon qui se gonflait passivement. Délaissant son reflet, son regard s’abaissa, couvant ce ventre qu’elle découvrait neuf et le caressa du bout des doigts, avec une délicatesse infinie comme si d’un coup, il ne lui appartenait plus et se parait d’une fragilité la dépassant. Un sourire brisé de tendresse s’invita à sa bouche et à son plus grand étonnement, si tant était qu’elle fut en état de se rendre compte de son laisser-aller inhabituel, chuchota. 'jour… j’crois qu’on va devoir s'supporter un bon bout de temps toi et moi, mais promis, j’essaierai d’pas être trop mauvaise. Remontant la tête, ahurie de sa propre attitude, ronchonnant devant ce qu’elle jugeait d’une mièvrerie sans nom, elle repassa sa robe et déboula échevelée dans le couloir, cherchant Alphonse dans le labyrinthe de portes. Hors de question de courir les étals des tisserands, l’incartade estivale avait été bien assez pénible pour ne pas renouveler l’expérience de sitôt. Il devait lui prêter des chemises, et des braies aussi, tout de suite ! Hors de question de risquer que le petit se voit écrasé par une robe trop serrée ! Mais de cela, elle n’en dirait rien au flamand, supposant d’avance une taquinerie. Non, elle lui dirait juste se sentir déjà engoncée.
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