Leorique
- [Arrivée en Armagnac, une nuit de sommeil merité]
Ses difficultés pour dormir n'avaient jamais été un grand secret d'État. Souvent en proie aux pensées persistantes et lancinantes, celles qui vous lâchent difficilement quand le soleil se lève, Leorique passait parfois des nuits blafardes, la tête pointée vers les astres, appréciant tout simplement le contact des étoiles. Parfois même, pour s'occuper il écrivait à la lueur d'une maigre bougie ou alors il parcourait sa chambre d'un pas fatigué, songeur. Il ne comptait plus les nuits qu'il avait passées à s'user les yeux sur quelques lignes de parchemin, à essayer de s'accorder avec le bruit de ses propres pensées qui le tenaient éveillé. Il ne savait réellement si cela faisait partie des abysses spécifiques au Lisreux, mais il lui semblait que c'était une caractéristique de la famille : sa grande sur Zoé elle non plus ne dormait jamais très bien.
Pourtant, la présence d'une autre personne, parfois, changeait tout. C'était peut-être idiot, ou romantique, ou simplement cela faisait partie de ce qu'il était, mais depuis qu'une certaine blonde était entrée dans sa vie, et surtout dans ses bras la nuit, trouver un sommeil réparateur était devenu d'une facilité relativement déconcertante. Pourtant, le voyage jusqu'en Armagnac n'avait pas été facile. Rongé discrètement, mais profondément par son inquiétude pour ses surs, pour ce qu'il allait trouver en arrivant, lempêchait de profiter de quelque repos tout à fait serein. Sans la Slave qui partageait ses nuits, il aurait été plus que probable que le Lisreux se soit effondré de fatigue au milieu de la route, incapable de trouver le sommeil. Une fois arrivé, tout lui était tombé dessus et le jeune homme avait peiné à supporter l'intégralité de la journée pour, finalement, trouver le soir avec bonheur le confort d'un lit, satisfaction bien trop rare durant leur voyage. Il s'y était plus ou moins effondré délicieusement avec la Novgorod, résolu de passer la matinée suivante, voire même laprès-midi à se reposer vraiment. Après tout ses surs ne risquaient désormais plus la mort, et il avait bien mérité quelques vrais moments de sérénité.
Il se réveilla au milieu de la nuit, sans trop de raison, peut-être par habitude. Tout contre lui, une Nikita endormie. Délicate crinière d'or ruisselant, éparpillée sur un oreiller qui s'harmonisait magnifiquement avec le visage féminin aux traits fins, pâles apaisé, ensommeillé. Respiration régulière qui imprimait à son buste de ces mouvements propres à émouvoir ce spectateur admiratif qui la tenait au creux de ses bras. Dans un état de grâce endormie, elle était belle. De cette beauté fragile qui sait toucher l'âme, bien supérieure à celle physique et qui avait su s'imposer, s'ancrer doucement, mais fermement dans l'esprit du jeune Lisreux, et peut être même son cur. La nuit, Leorique gardait précieusement la blonde contre lui, porté par quelques adorables effluves de jasmin. Les yeux verts du jeune homme étaient capables souvent de guetter, contempler sans gêne : ils possédaient un magnétisme qui n'était pas tout à fait explicable autrement que par la force tranquille qu'ils reflétaient souvent. Occupé à détailler la jeune femme, il se figeait parfois quand elle remuait légèrement, ou échappait des petits bruits de gorge.
Il savait bien sûr qu'elle n'allait pas aussi bien qu'elle ne laissait paraitre, mais il ne savait pas vraiment quoi faire de plus que de veiller doucement sur elle, comme il faisait. Prévenant, attentionné, il savait l'être, mais lui aussi avait parfois des craintes sur leur relation unique. Alors, il était possible que cela soit ce qui le travaillait brièvement cette nuit. Mais un petit soupire féminin, poussé dans son sommeil, l'interrompit, dans ses réflexions, et il esquisse un léger sourire amusé, ironique. Fallait-il qu'il complique toujours les choses, il pouvait simplement apprécier la beauté de ce qu'il avait entre les bras, sans se soucier du reste. Plus tard, peut-être quand il ne serait pas si fatigué. Il referma les yeux, doucement, en laissant son esprit lâcher prise, doucement, sur des pensées plus innocentes, le sommeil ne tardant pas à le gagner avec une facilité qui le surprenait à chaque fois.
Cette nuit, ce matin, cet après-midi, il se reposerait, passerait du temps avec elle. En plaisantant, ils avaient parlé de se séquestrer dans leur chambre, cela semblait bien. Ils se feraient livrer dans leur chambre le repas du midi peut être ...
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merci à JD Dôn pour la bannière et l'avatar