Yohanna.
- Mon fils,
Je ne suis pas en Bourgogne, mais en Champagne. En réalité, dans une ville rendue franche de Champagne. Parce qu'il n'est plus en bourgogne, mais en Champagne. Et c'est dangereux, oui. Mais tu connais ta mère, elle passe à travers tout. Rien ne l'arrête, et elle survit à tout !
Enfin bon, rassure toi, j'arrête. Je prends ma retraite. Je crois que j'ai envie de venir couler des jours paisibles auprès de mon fils, ma fille leurs enfants. Oui, on me dit souvent que je suis trop vieille à présent, et que je devrais profiter de la vie. En réalité, je me sens encore pleine d'énergie et prête à manger le reste du Royaume, mais si je veux devenir Impératrice du monde avec toi, il faudrait que je pense à d'abord commencer par être au moins dame, ou Baronne pour de bon
Donc je rentre. Je viens te voir.
Tu as du déjà effectuer ton séjour chez Susi, s'est-il bien passé ? Es-tu déjà revenu ? Comment va-t-elle ? Vous me manquez tous les deux.
Depuis la Valahia déjà je ne supportais plus d'être loin de toi, mais à présent que je peux revenir, j'en meurs d'envie. Je viens vous rejoindre. Faites moi une petite place, promis je serais sage.
Rien n'est plus important pour moi que tu sois heureux dans ta vie. Avec ton amoureux, et avec ta petite famille qui grandit. Prends soin de vous. J'arrive aussi pour vous donner ma bénédiction à toi et lui. Même si on s'entend mal, je le fais pour toi, tu le sais.
Je suis fière que tu sois mon fils.
Je t'aime.
Et je te promets que je viens dès maintenant pour voir ton petit machin d'enfant qui va bientôt pointer son nez.
Evite de trop le noyer dans la graisse de mouton, sinon je ne lui ferai pas de mamours de grand-mère !
- Yohanna.
La rédaction de la lettre est définitivement fastidieuse. Elle semble interminable, et pourtant la H met toute sa tendresse dans chaque mot, s'applique sur chaque lettre pour le pas laisser percevoir sa souffrance dans le tremblement de la plume. Cette douleur ne peut se percevoir que par son front en sueur et contracté sombrement. Au point final, la plume est presque jetée. La main tremble et ne veut plus rien à tenir. Jamais. Depuis deux jours elle souffre le martyr, d'avoir à nouveau cogné ses doigts cassés sur un tonneau trop solide. Cette fois, les os sont broyés et ne se ressouderont plus correctement. Et pourtant, elle s'est forcé à écrire comme si tout allait bien. Car c'est ce qu'elle veut afficher. Tout va bien.
La lettre confiée au messager avec une somme rondelette, la brune se dirige à présent vers l'église abandonnée et brûlée sur la moitié. Elle pourrait préférer la chapelle qu'ils n'ont pas détruite, mais on se sent plus proche du Très-Haut dans un monument qui va vers lui. Agenouillée sur les dalles froides, elle prie.
Ses lèvres chuchotent une psalmodie monotone qui ne résonne même pas. Et elle repense à tous ses crimes. Surtout les derniers. Ces crimes d'enfants qui en ont poussé d'autres à la torture, à la vengeance plus terrible encore. Elle devait pourtant faire le bien, se racheter. Mais non, jusqu'ici elle n'a agi que toujours plus salement. Cette fois, cette fois elle va tenter de réellement arrêter. Léorique l'a dit. Ce n'est pas elle qui agit ainsi. Il faut qu'elle cesse avant de sombrer. C'est décidé. Cette fois elle sera à la hauteur.
Mais pour l'instant, il lui faut du pavot. Ou toute autre façon de faire taire cette douleur lancinante dans la main. Retour à la chambre d'auberge pour fouiller toutes ses affaires. Elle n'a plus rien. Sa dernière fiole bue dans la journée, et la main trop douloureuse pour envisager d'en fabriquer. Il n'y a plus personne en ville. Plus Vivia pour la soigner, les bouchers ont déserté, l'apothicaire aussi. Elle a l'impression d'être plus seule que jamais. Et Trinita ne lui sera d'aucune utilité. Tiens, il faut qu'elle pense à l'adopter pour de bon celui-là. Le sujet n'a pas été évoquer avec Christopher. Dans la prochaine lettre, sans doute. Puisqu'elle voyagera avec le jeune homme, elle aura tout le temps de mettre tout ça à jour. Avant, il faudra sortir du domaine Royal sans encombre.
Un peu de poudre de mandragore. Pourquoi pas ? Une toute petite quantité atténuera la douleur. Une plus grande pourrait être dangereuse. Bien qu'elle y soit accoutumée à présent, la plante peut rester mortelle. Mais la douleur est bien trop vive, elle a envie de hurler au moindre mouvement. Il faut qu'elle sapaise. Tant pis. Elle prend la dose pour une douleur simple. Et une seconde dose, par folie. Par désespoir. Pour faire taire cette main qui l'empêche de réfléchir.
Et maintenant que la nuit est tombée, elle va aller se changer les idées en allant faire sa promenade quotidienne sur le tour des petits remparts. Regarder au loin si l'armée champenoise arrive enfin. Ou bien les renforts Ou bien le courage de fuir avec le gamin et l'angevin Le courage, elle le trouve surtout dans la bouteille d'Arnagnac qu'elle traîne avec elle. Jusque là, elle avait réussi à ne pas l'ouvrir. Mais la bière devient rare dans la ville franchisée, et le bon alcool aussi. C'est sa dernière. Elle n'a jamais été autant à court de bon alcool qu'aujourd'hui. Et il lui faut sa dose.
Sur le rempart, elle retrouve son petit coin. Quasiment le plus haut. Mais bien à l'abri des regards qui viennent tant de l'extérieur que de l'intérieur. Là, Yohanna peut se laisser aller à sa méditation. Ses rêveries qui la portent inlassablement vers le passé, vers ses regrets. Tout y passe, ils reviennent tous, ceux qu'elle a aimé. La liste relativement courte se voit pourtant rallongée d'un nouveau fantôme, le plus douloureux puisque le plus récent. Ils passent tous, les un après les autres, ne laissant qu'un seul toujours présent à les regarder. Ce blond au teint sombre qui les scrute de son regard hautain. Même son fantôme arrive à se comparer aux autres, à les juger pour les rabaisser et se moquer. Même là elle a envie de le tuer. La bouteille vide vole en éclat, dissipant l'illusion, mais réveillant la douleur à la main, et celle à la tête. Il faut qu'elle retourne en bas avant que la nuit soit trop avancée pour ne plus voir où elle met les pieds.
En se redressant, la sensation de l'effet combiné entre une drogue trop forte et un alcool trop vite bu se fait sentir. Elle tangue. Outch. Résistante à l'alcool, elle a moins l'habitude des mélanges aléatoires. Habituellement trop consciencieuse avec ses plantes, cette fois, il lui a manqué la sagesse, étouffée sous le besoin de soulagement. C'est maintenant qu'elle se rend compte de son erreur. Mais trop orgueilleuse pour se l'avouer, elle avance à pas prudents sur le bord des remparts. Ca va aller. Ca va aller. Le mur n'est pas bien haut, elle voit déjà le petit passage pour retrouver la première taverne ouverte.
Son regard s'y porte, d'ailleurs, quand la lanterne extérieure se voit allumée par le propriétaire. Et derrière lui, Nemyt.
Non, elle rêve. Ce ne peut être elle ! Elle était partie, pour de bon ! Elle l'a chassée ! Battue ! Elle l'a poussé à ne jamais revenir, et aucune réponse n'a été donné à ses lettres pour ne pas raviver son désir de la revoir. C'est fini ! Fini !
Nemyt ! C'est elle ? Ou bien une illusion due à son état ?
Ca ne peut être vrai, et pourtant ! Elle doit savoir. La rattraper. La retrouver dans les ruelles et Lui parler. La prendre dans ses bras. Des larmes forcent le passage pour inonder ses yeux. Non, pas encore
Plus qu'un escalier qui la sépare de sa belle. Elle a envie de sauter. De courir, de voler jusqu'en bas. Son état lui donne même cette impression. Elle vole.
D'ailleurs son pied ne trouve pas le sol. Si ! Enfin ! La marche était plus basse que prévue.
La marche. Couverte de liquide. Peut-être un chien qui est venu uriner là, sur la touffe d'herbe qui pousse contre le muret. La botte de Yohanna glisse sur la flaque et part en avant. Premier réflexe, chercher un appui pour reprendre l'équilibre. Sa main se pose sur le muret brutalement, et la douleur vive jaillit tel un coup de poignard. Mouvement de recul en pleine chute.
Le corps part en arrière tandis que son poids lentraîne vers le bas des marche. La nuque et l'échine cognent de tout le poids d'une mercenaire sur les angles des pierres. Crac. Bruit de mort. Bruit de fin. Le souffle de la H est coupé avant d'avoir pu emmètre le moindre cri. La douleur devient silence une seconde, avant de se propager partout. Partout. Jusqu'au vide. Total.
Dans l'escalier, on n'entend plus que le bruit d'un sac mort tomber jusqu'en bas. Poupée désarticulée.
C'est con la vie.
Elle a toujours rêvé de mourir dans les bras d'un homme.
Elle a tenté plusieurs fois de mourir héroïquement.
Elle a essayé plusieurs fois de mourir avec classe.
Elle a souvent parié qu'elle aurait une mort moche ou stupide.
Elle était persuadée qu'elle finirait par mourir dans son vomi.
Mais la mort est beaucoup trop cynique pour laisser le choix.
"je te promets que je viens dès maintenant pour voir ton petit machin d'enfant"
Encore une promesse qu'elle ne tiendra pas.
Rp ouvert à tous ceux qui connaissaient Yoh, l'aimaient ou la détestait, et même les autres! Si quelqu'un a envie de mettre sa petite idée sur le Rp, ce sera avec plaisir que je lirai.
Bon jeu à tous et, comme le dirait Truman :
"au cas où lon ne se reverrait pas dici là Je vous souhaite une bonne après-midi, une bonne soirée et une excellente nuit !"
Bon jeu à tous et, comme le dirait Truman :
"au cas où lon ne se reverrait pas dici là Je vous souhaite une bonne après-midi, une bonne soirée et une excellente nuit !"
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