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[RP] Donisaure

Isaure.beaumont

"Je tuerai un poulet pour vous, s'il le faut, Dana !"

Il s'étirait, comme le brouillard autour de Périgueux. Il s'étirait et se tortillait, pour s'extraire de cette galerie creusée avec patience. Le ventre tendu par toute cette terre avalée, il venait de s'échapper de son trou et rampait désormais vers d'autres humus riches en gourmandises. L'oeil vif, elle s'était abattue sur lui, sans pitié et le bec aiguisé. Le brouillard n'avait pas suffi à le protéger de la voracité affûtée d'une impitoyable poule rousse, qui caquettant de plaisir se dirigeait déjà vers d'autres victimes: une fourmi par-ci, une limace par-là. Dans le flot de ses camarades blanches, blondes et noires qui s'agitaient également, grattant le sol frénétiquement de leurs griffes acérées et picorant sans hésitation aucune tout ce qui passait à proximité, elle ignorait qu'à son tour, elle serait la proie.

- Laquelle voulez-vous ?

La Beaumont, petit canif en main, avançait à la suite de la bretonne, s'appliquant à marcher dans les traces que la première laissait sur la terre meuble. Se stoppant à sa suite, elle arracha son regard des poules pour regarder en arrière: une seule série d'empreintes apparaissait comme si elles n'avaient été qu'Une. Elle contempla longuement la marque superficielle de leur passage, un sourire ravi venant éclairer son visage. Elles évoluaient de nouveau dans les pas l'une de l'autre. Leur renaissance était loin désormais mais elles avaient enfin réussi, ou plutôt était sur le point de le faire: Périgueux les verrait s'élever, comme leurs sangs l'avaient acté bien des mois plus tôt.

- Celle-là ?

Si elle pointa une poule blonde, son regard fut rapidement attirée par une poule rousse bien portante.

- Ou plutôt celle-là. Quitte à la saigner, autant en retirer quelques satisfactions.

Jamais la Saint Peyrus n'avait mis à mort de bestioles, mais pour cette soeur de coeur, elle était prête à relever l'exploit. Et l'idée de trucider de la rousse, aussi gallinacée était-elle, lui procurait un grand plaisir.

Edit fautes et tout le tralala

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Don.

Grand plaisir éprouvé par son Autre aussi, évidemment.

Oui. prenons celle-ci. Elle est parfaite. Il paraît qu'il est sot de s'attacher à pareille petite bête, mais la nommer Héloïse avant de l'occire me semble tout à fait opportun.

Ainsi baptisée, l'appétit lui revenait. Si depuis des mois - trois pour être honnête - Dôn n'avalait rien de plus que quelques soupes et pelures d'oignon, l'idée d'engloutir un passé décomposé l'enthousiasmait suffisamment pour destiner son ventre à subir contorsions et souffrances. Oh, une Bonnetain allait farcir les mûres récoltées par le pauvre Archibald, quelques jours plus tôt, de quoi se réjouir pour les années à venir. Et de réjouissances, notre seconde protagoniste en aurait bien besoin, car si son estomac ne pouvait plus rien ingurgiter, il parvenait à dissimuler un nouvel invité, s'imposant et imposé à la joyeuse troupe que composait Isaure, Dana, Archibald, Cassian et Théodrik.

Je crois qu'après il me faudrait une truie. J'avais bien songé à un porc, mais les femelles sont plus tendres, dit-on.

Qui le disait ? Cela restera un mystère car il était temps. Il était temps d'ôter à cette maudite gallinacée, tout espoir de vie terrestre. Précédant la Beaumont, Kerdraon s'élance donc et si le désir d'en finir rapidement est là, le destin en aura voulu autrement. Seulement deux pas de plus sont entamés, qu'un obstacle se met en travers de sa route. Les plus avertis remarqueront l'étrange pierraille dissimulée sous un minuscule amas de terre, les autres ne constateront qu'avec effroi, la chute lente du corps Dônien. Elle s'écroule. Elle semble fondre, à même le sol, barrant ainsi le passage et empêchant à Isaure le moindre déplacement supplémentaire. La dégringolade paraît être interminable, lévitation curieuse d'une silhouette pourtant suffisamment lourde pour s'échouer rapidement. Et enfin.. Le rire. Le dos étendu contre le terrain tourbeux, Dana rit. Si fort qu'elle s'en tient les côtes, si vivement que le souffle lui manque et que les larmes montent à ses yeux. La jeune femme ne voit plus qu'une Isaure d'en dessous, à l'air si ahuri que les gloussements de son amie ne peuvent s'éteindre avant de longues minutes encore.

Ma doué ! Du désir de meurtre je suis privée et même le seigneur semble vouloir m'en soustraire !

Il fallait pourtant s'y mettre, et même si se relever lui paraissait difficile, rien n'égalerait l'embarras de l'écroulement précédent.
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Isaure.beaumont

Tout se passa si vite : dans un absurde ralenti, elle vit son autre s’étaler sur la glaise et les fientes acides, lamentablement. Elle resta bêtement les bras ballants à observer la déchéance de l'amie, sans penser un seul instant à esquisser un geste pour la retenir. Ce ne fut qu’une fois la bretonne allongée par terre qu’elle comprit ce qui venait de se dérouler sous son nez. La surprise laissa très vite place à l’inquiétude. N’était-elle pas en train de convulser dans la fange ? Quelle mort indigne d’elle !

- Dana !!!!

Ses jambes avalèrent en une microseconde les quelques mètres qui les séparaient et son visage affolé s’interposa entre le ciel brumeux et le regard brouillé de la bretonne.

- Dana, grand dieu, vous allez bien ?

Elle se laissa tomber à genoux à ses côtés, et se pencha terriblement inquiète et l’air ahuri sur son amie. Ce n’est qu’alors qu’elle compris que les spasmes qui l’agitaient n’étaient rien d’autre qu’un fou rire saisissant, et bientôt contagieux. Il était rare d’entendre le rire de la Saint Peyrus et les rares fois où il s’était invité à la partie, toujours timide au démarrage, c’était que Dana avait su le provoquer. Riant de concert, comme deux folles liées et à lier, Beaumont & Roykness restèrent quelques secondes l’une dos contre sol, l’autre genoux dans la boue, offrant un effroyable tableau.

Posant les mains au sol, Isaure se releva et après avoir essuyé rapidement ses mains sur ses jupes désormais souillées, elle avait aidé la manchotte à se redresser à son tour.

- Votre désir ne sera pas vain, Dana. Je vous ai promis une poule. Et elle sera rousse. Laissez-moi faire : de nous deux, je suis l’experte.

Experte à trois deniers, oui. Il lui fallut de longues minutes, ralentie par le rire communicatif de son amie, pour se saisir de la poule. Elle était enfin parvenue à la coincer dans un coin et l’avait saisie en lui bloquant les ailes. Ailes que la malheureuse condamnée était parvenue à déployer et agitait désormais furieusement, arrachant un cri de surprise à la noble qui se transforma en cri d’horreur.

- Dana… Dana… Faut-il que cette poule soit possédée ??!

Elle parvint enfin, avec beaucoup de courage – preuve s’il en fallait une de son incommensurable dévouement à la cause bretonne – à saisir l’animal par les pattes, le faisant basculer tête en bas.

- Dana, il faut que vous la teniez ainsi. Fermement. Ne la lâcher sous AUCUN prétexte. Il est l’heure de procéder au sacrifice.

Une fois la victime en prise de l’unique serre bretonne, Isaure resta un instant sans savoir par où commencer. La pauvre poule se débattait, cacquettant d’angoisse et battant frénétiquement des ailes.

- Croyez-vous que nous devrions dire quelques mots ? Une prière ? Un remerciement pour son sacrifice ? Que ce meurtre ait quelque chose de plus solennel… non ?

Elle interrogea sa siamoise du regard, le canif déjà en main, prête à opérer le sacrifice.

- Ou.. Oui, je peux le faire. Je vais le faire. Alors. Mmh.

La bretonne se racle la gorge avant d'énoncer ce qu'elle pense être le plus judicieux, en cet instant T.

- Héloïse. Nous sommes ici aujourd'hui, pour rendre au ciel ce qui est au ciel.
Héloïse, par ton sacrifice aujourd'hui, le désir d'une femme sera comblé. le besoin d'une mère sera euh.. Rassasié.
Héloïse. Petite poule rousse. Que ton sang soit... Dônifié. Que ton venin s'échappe par les plaies que nous allons t'infliger.
Héloïse, tu as pu vivre dans l'abondance, désormais il est temps pour toi d'offrir ce que tu as pu entamer sans un regard, sur toi, posé.
Héloïse. Crève. Mais jamais ne te relève.

La prière semble s'éterniser, et celle qui la récite, paraît s'y perdre petit à petit.

- Tu as cru pouvoir le récupérer ! C'est ça ! Et quand t'as dit euh.. Oui, si " ah, DIT-ELLE" je m'en souviens ! "Dit-elle" quoi hein ? Il n'était pas là pour l'entendre mais moi si, j'étais là et j'disais bien ce que tu disais que je "dit-elle" !
C'est bon Isaure, égorgez-moi cette enfant de pu.. Bonnetain ! Qu'elle y reste une bonne fois pour toute !

Isaure s'était religieusement tu tout le long de la prière danesque. Et quand elle eût enfin terminé, elle se signa et termina:

- Amen !

Enfin, il fut temps. Comme elle l’avait vu faire si souvent, elle vint se saisir du cou au plumage doux, immobilisant la tête de l’animal et d’un geste qu’elle voulut assuré, elle planta la lame dans la gorge offerte. C’était une chose de voir l’abattage d’un animal, c’en était une autre d’être celui qui donnait la mort. La main tremblante, elle retira l’arme de la plaie. Les deux meurtrières furent instantanément repeinte de pourpre : le sang giclait en dehors de la plaie béante, et l’animal, dans une dernière tentative de fuite, précipita son évidement. Le battement des ailes ralentit, les cris faiblirent. Et bientôt, ce fut le calme plat. A leurs pieds, les comparses indignes se pressaient pour s’abreuver du sang de la sacrifiée, se bousculant, les plus effrontées arrachant quelques plumes aux plus faibles pour avoir la meilleure place. Isaure n’osait plus bouger : immobile, elle grimaçait de dégoût. Tout ce sang chaud sur sa peau, cet or rouge, poisseux. Elle eut envie de pousser un cri à son tour, mais il resta bloqué au fond de sa gorge et regardant Dana, elle conclut :

- A croire qu’elles aussi ont une bien mauvaise opinion des rousses. Elles ne la pleurent pas… elles célèbrent sa fin. Comme nous.

Feat Jidédôn

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Don.

Deux silhouettes avancent péniblement sur le bord d'une route parsemées de gravillons plus chauds que les braises réchauffant la fonte d'une marmite. Tel un parcours du combattant, le chemin semble interminable pour les amies en galère. Le sang ayant coloré leurs robes, est lourd. Si lourd, qu'à chaque avancée, les cuisses souffrent du poids que les jupons souillés imposent.

Isaure, je n'en peux plus ! Jamais nous n'y parviendrons. Abandonnez-moi, là. Ici. Poursuivez votre route ! Je préfère mourir que de poursuivre à pied !

Essoufflée, la comtesse déchue abandonne et n'attend pas d'entendre la réponse de sa sœur, pour se laisser choir au sol et refuser d'avancer. Son Autre poursuit à peine lorsque soudain un son en provenance de leurs arrières,se fait entendre.

Ha ! Voici l'Ankou ! Entendez Beaumont ! Entendez ! Sa carriole arrive, elle grince et annonce notre mort prochaine. Ma prière pour Héloïse n'aura pas été utile, elle est crevée et nous n'allons pas tarder à la rejoindre.
Disgrâce ! Trahison ! M'entendez-vous ! ISAURE !

Cette dernière se retourne et fait face à Dana, qui toujours au sol s'interroge sur le silence soudain, imposé par l'absence de répartie que lui offre son amie.

Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a ?

Suivant le regard aimé, la bretonne pivote lentement et voit venir au loin, un chariot. Ce dernier n'a rien à voir avec celui dédié au serviteur de la mort, mais semble transporter moult sacs et malles en nombre conséquent.

Notre sauveur ! C'est notre sauveur !

Sans attendre, position verticale est retrouvée et ce sont deux bras qui s'agitent, lorsque les pieds tantôt douloureux sautillent suffisamment haut pour que le conducteur du transport à venir, ne puisse les ignorer.

Ho hey ! Ho hey ! Nous sommes là ! Venez-nous en aide ! Venez-nous en aide !

Malheureusement, si l'homme s'arrête une fois à leur hauteur, ce n'est guère pour accéder à la demande des jeunes femmes en détresse.

C'que j'peux point vous prend' mes m'zelles, j'a d'ja bin d'la mar'dise à l'arrière.

En effet, l’œil celte vérifie les dires du paysan par un regard circulaire. Des centaines de pommes ! Des rouges, des vertes, des jaunes, des mûres et des plus fraîches ! Mais pas la moindre chance d'obtenir une place au beau milieu d'une pareille cargaison. Aussi, le sang de Roykness ne fait qu'un tour et c'est bien décidé à changer leur destin, qu'un élan de courage vient lui enlacer les reins.

Une manche est relevée, lentement. Les bleus sont ombrageux et les deux incisives consacrées au bonheur plantent la lèvre asséchée par la marche que leur propriétaire vient d'accomplir. Foi de Dana, elles ne repartiront pas à patte ! Plutôt mourir !
Kerdraon s'élance vers les pieds du pauvre livreur de reinettes, d'une main avertie une cheville est tirée vers le bas, la victime est tout à fait surprise et cela arrange bien la manchote, qui profite de ce trouble pour venir faire basculer le corps entier et l'aider à s'écraser sur le sol. En quelques petites acrobaties, l'effrontée se retrouve aux commandes de la charrette, prête à claquer du fouet, et détendre les rênes, laissant aux chevaux l'autorisation d'avancer.

Dépêchez vous Isaure ! Montez !
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Isaure.beaumont

La brume s’était levée. Elle s’était inclinée devant l’ardeur du soleil et s’était consumée sous sa chaleur, jusqu’à parfaite évaporation. Les rayons avaient réchauffé le sol et les cailloux blancs réfléchissaient douloureusement leur blanche lumière. Les yeux plissés, portant de nouveau le cadavre de poule repris à son autre pour laisser libre son unique main, Isaure suivait la bretonne. Elle avait chaud, terriblement chaud. L’atmosphère était étrangement lourde pour une matinée, et la température ne cesserait d’augmenter au cours de la journée.

En vérité, ce n’était pas le sang de l’animal qui pesait lourd, mais bien les épaisses couches de tissus qui recouvraient pudiquement chaque parcelle de leur peau. C’était la pruderie de leur époque qui leur pesait et leur tenait chaud. Se liquéfiant sous sa robe, Isaure traînait tout autant la patte que sa siamoise. Les pieds endoloris, elle peinait à remonter le chemin et fut bien heureuse de voir la bretonne s’arrêter et de la dépasser enfin.

Elle poursuivait son ascension à vitesse d’escargot, le cadavre plumé pesant de plus en plus lourd à son bras. Elle écoutait Dana mais se cantonnait au silence pour économiser ses forces : elle savait qu’au premier mot prononcé, un terrible point de côté surgirait. Alors elle l’écoutait simplement, lui répondant dans sa propre tête quand elle ne priait pas pour que survienne un miracle.
Et miracle il y eut. Les efforts de l’épouse Roykness ne furent pas vains. Rebroussant chemin, Isaure arriva à temps pour être aux premières loges de la scène qui ne dura en tout et pour tout qu’une poignée de secondes.

- Grand dieu ! Dana !!!

La manchotte venait de mettre à terre le pauvre fermier et se hissait déjà à son poste de commandement. Interdite, Isaure ne monta pas tout de suite à ses côtés. Elle vit alors l’homme furieusement délogé se relever tout en pestant dans un odieux patois, avant de venir à son tour se saisir de la cheville bretonne, prêt à faire subir à la jeune femme le même affront. Ne réfléchissant pas, Isaure vint l’assommer d’un bon coup de poule morte et profitant de le voir sonné et reculer de quelques pas, elle donna des coups de pieds, de poings et de poule. Elle continua ainsi quelques secondes, même lorsqu’il fut au sol. Le piétinant un peu, elle l’invectiva.

- Ne touchez plus JAMAIS à Dana, espèce de fils de… de…. de fils.. de PAYSAN !!

Et alors qu’elle donnait un dernier coup de pied, une bourse roula jusqu’ son soulier poussiéreux. Elle se pencha sur l’homme inerte, la récupéra, vida les quelques écus dans sa main pour mieux les ranger dans sa propre bourse et jeta la peau tannée sur son propriétaire….

- Cela compensera notre poulet que vous avez abîmé !

Elle prit alors conscience à cet instant que l’homme était inerte.

- Foutremouille ! Dana ! Qu’ai-je fait ?! Je l’ai tué ! Nous sommes des meurtrières !

L’homme se relèverait bientôt, endolori et la bourse vide, mais tout cela, nos protagonistes l’ignoraient. A peine eût-elle le temps de s’installer aux côtés de son amie que déjà le chariot s’ébranlait. Les chevaux, comme piqués par des taons, s’étaient élancés à une vitesse bien trop rapide pour leur chargement et l’état du chemin. Regardant en arrière, elle vit s’éloigner puis disparaître la silhouette de la carcasse humaine. Un homme et une poule. Elle avait tué deux êtres vivants dans la même journée. La poule coincée entre ses cuisses, elle regarda ses mains pleines de sang séché, mais elle n’eût pas le temps de s’appesantir sur leur état. Elle dût s’accrocher pour ne pas tomber. Elles étaient lancées à vive allure sur un chemin étroit, et leurs fessiers se soulevaient pour retomber lourdement sur les sièges à chaque cahots.

- DanahahahAHAhAHA, il n..nou...nous f...f...fauuut ralent…t…t ….ir, sans qu…qu…quoi nous finirons dans le fossé !

A quelques mètres devant, le chemin se séparait en fourche.

- Prenez à dr…droiiiiAaaAAAhhhte !

Et de tirer sur les rennes que détenait sa compagne, tandis que cette dernière, tout aussi obstinée, tirait dans l’autre sens. Les chevaux, perturbés par les ordres contraires, ne surent plus où donner de la tête, tant et si bien qu’au croisement, ils allèrent tout droit. Hors piste, ils continuèrent à tracer leur chemin. L'herbe haute et la terre meuble rendaient difficile leur avancée et bientôt le terrain fut plus pentu, donnant encore un peu plus de vitesse. Les chevaux semblaient paniqués et tentaient de prendre une direction opposée. Le système d'attache ne résista pas à la tension générée par les deux bêtes de traie et bientôt, chacun d'eux fila d'un côté et de l'autre, tandis que le chargement et les deux femmes continuèrent tout droit. Dans leur malheur, les deux inconscientes eurent de la chance: le terrain vallonné leur offrit une légère côte qui parvint à ralentir la machine. Et quand enfin l'étrange équipage se renversa, propulsant les deux passagères et la cargaison au sol, le choc ne fut pas aussi terrible qu'il aurait pu l'être.

Beaumont et Roykness furent quelques peu étourdies, mais ce n'était rien à côté de la compotée de pommes.

- Grand dieu ! Dana ! Vous saign... Ah... non... non, tout va bien... tout va bien...

Elle se releva, tituba un peu, encore sonnée par l'accident et tendit enfin une main secourable à la jeune femme encore alanguie dans l'herbe grasse. Isaure constata les dégâts: le charriot détruit, les pommes toutes écrasées et les chevaux enfuis. Elles avaient tout gagné. Le poulet gisait un peu plus loin et à côté de lui, alors qu'elle se penchait pour le ramasser, elle découvrit deux pommes intactes.

- OH ! regardez ! Nous sommes sauves. Il nous reste deux pommes... Nous ne mourrons pas de faim si nous ne parvenons pas à rejoindre Périgueux avant la tombée de la nuit.

Un coup d’œil rapide vers le ciel lui indiqua qu'il devait être un peu plus de midi et qu'elles peineraient à rejoindre Périgueux avant l'heure du souper si elles ne trouvaient pas de moyen de locomotion rapidement. Après quelques bribes de disputes dont on vous épargnera, les deux jeunes femmes reprirent la route, traînant péniblement leurs souliers dans les prairies périgourdines. Elle atteignirent enfin un chemin.

- Avez-vous faim ?

Dans ses poches, bien à l'abri, les deux juteuses survivantes les attendaient.
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"Je tuerai un poulet pour vous, s'il le faut, Dana !"

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