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[RP] Leçon n°1 : Reconnaissance du terrain.

Axelle
Une chose était certaine, depuis son arrivée à Bouillon, la manouche se la coulait douce. Ici, malgré l'austérité des lieux, elle s'en mettait plein la panse. Le jambon était bon et le vin tout autant. La cellule dans laquelle elle dormait était certes spartiate, mais le lit confortable. Bref, si le temps dans ces contrées n'avait pas été si pourri, elle aurait presque pu se croire en villégiature. Elle savait néanmoins que cela ne durerait pas. Elle se demandait même si ce n'était pas une tactique bien huilée pour rassurer les nouveaux avant de les manger tout cru. Pourtant depuis son arrivée, elle arborait sur la trogne un petit air de même pas peur. Fanfaronnade qui se cassa aussi sec la figure quand elle reçu la convocation de son Chevalier. Et somme toute n'avait-il rien du chevalier servant. Vrai que le bonhomme ne semblait guère commode, avec son bandeau sur l’œil et l'autre luisant tel celui d'une vipère. Quant au bâton sur lequel il s'appuyait, la gitane ne pouvait que se demander s'il ne lui servait qu'à s'aider à marcher. Et au vu de la missive qu'il lui avait envoyée en réponse à sa demande de se mettre sous sa férule, l'interrogation pouvait être légitime.

Ouais, elle n'en menait pas large, quand jour dit, elle glissa dans les méandres de Bouillon pour rejoindre la salle indiquée. En avance, comme à chaque fois qu'elle était dans ses petits souliers.

Assise toute droite sur un banc de bois, sans le moindre rouge pour agacer l’œil, elle attendait donc, se jurant de ne pas faire le moindre geste au risque sinon de provoquer la bévue. Pourtant, un petit couinement attira le tympan de son oreille droite et, sans tourner la tête, les mirettes noires filèrent dans le coin de la pièce.


Non.

Curieuse, elle ne broncha pourtant pas, venant retrouver la tache sur le mur qu'elle avait entrepris d'étudier avec le plus grand sérieux. Tout aurait dû se passer ainsi si le couinement n'avait retenti de nouveau. Si la manouche avait horreur la plupart des bestiaux, sans parler de ces affreuses choses rampantes, les rongeurs avaient une petite tête et de grands yeux qu'elle aimait bien. Rat mis à part, évidemment. Il ne fallait pas abuser non plus. Aussi, après avoir jeté un coup d’œil vers la lourde porte, s'assurant qu'aucun pas n'approchait, elle se leva et fila dans le coin pour y assouvir sa curiosité et, fesses en l'air et joue à même le dallage, commença à inspecter un petit trou dans la pierre.
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Simeon.charles
Bouillon, cathédrale de l’austérité, royaume de terreur mené par la Reine de Fer.

Ce matin le vieux chevalier s’était levé avant le soleil. Plus il vieillissait, plus les levés étaient tôt, ce qui n’était pas forcément vrai pour les couchés, sauf les soirs où il avait un peu trop arrosé la meule. Ce qui n’était pas le cas de la veille. Bien au contraire, Siméon était frais dès le matin et motivé plus que d’habitude. En effet, ce jour était un peu spécial puisqu’il devait s’entretenir avec Axelle, son écuyère. Ce jour commençait son dur labeur, puisqu’il fallait l’avouer, servir le bâtard artésien n’était pas toujours gage de plaisir.

Assis devant le miroir, unique décoration de sa chambre, il retira son bonnet de nuit écru et le jeta sur le lit. Un peu à l’image une jeune femme faisait sa toilette pour être belle, le vieux routier s’appliqua à se frotter du charbon sur les mains avant d’étaler la fine poussière noire sur son visage. Non, lui ne cherchait pas à se rendre beau, mais cherchait à se rendre miséreux. Puis ses mains encore un peu noires ébouriffèrent ses cheveux poivre et sel avant de les coiffer grossièrement d’un chignon mal serré. Sur son œil gauche, tout aussi vif et vert que le droit, il appliqua sa fronde qui le faisait passer pour un borgne.
A peine debout, il ceintura son ventre plat et musclé d’un linge roulé sur lui-même, se donnant ainsi une apparence légèrement bedonnante. Puis il passa sa toge noire rapiécée par-dessus sa chemise blanche et son « ventre ».
C’est d’un pas félin qu’il se dirigea vers la porte devant laquelle l’attendait son bâton de marche. A peine était-il appuyé dessus, qu’il raidit sa jambe gauche comme si elle était rongée par l’arthrose.
Passer pour miséreux était une tactique qu’il employait chaque jour. D’abord car on ne tranche pas la gorge d’un pauvre pour le dérober, car un pauvre n’a rien à dérober. Ensuite, on ne prête pas vraiment attention à l’éclopé, on préfère regarder le riche bourgeois ou encore le noble orgueilleux et fier.

C’est donc sur ses trois pattes qu’il se dirigea vers la cantine et pris pour déjeuner quelques mirabelles qu’il décida d’aller manger dehors. C’est là qu’il croisa un jeune garçon de 7 ou 8 ans, fils du marchand et bourgeois qui venait livrer le château en eau. Alors que le garçonnet le regardait d’un air suspect, le Saint Just, montrant les mirabelles, lui lança un :
« Je ne partage jamais, pas la peine de me regarder. »
« M’en fous, j’ai mangé de la soupe ce matin ! » Rétorqua le marchand en devenir.
« Bien fait pour toi, tu n'avais qu’à être sage. » Siméon diplomate ? Non pas vraiment. De toute manière il n’avait pas le temps pour la causette, l’heure de son « rendez-vous » approchait à grand pas.

Il n’avait mis guerre longtemps pour rejoindre le lieu et sans attendre il poussa la porte et découvrit une écuyère en une position des plus étranges.


Hum…. Je me demande comment je dois prendre cela. Est-ce une invitation silencieuse, mais très explicite, à copuler ? Une tentative de me montrer que vous savez mettre en avant vos arguments tout en servant votre chevalier ? Ou alors vous tentez de rentrer là-dedans ?

Il pointa le trou de souris de la pointe de son bâton.

Quoi qu’il en soit, vous êtes trop grosse pour rentrer et c’est trop tôt pour le reste.

Il marqua une courte pause avant de reprendre.

Puis j’aimerais, si cela vous sied, discuter avec votre tête plutôt qu’avec vos fesses. Ceci dit, merci d’être venue.
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Axelle
La joue écrasée contre le froid du dallage, mirettes plissées de concentration, la manouche étirait un index curieux dans le trou étroit, cherchant à débusquer son petit occupant. Idée idiote quand la bestiole ne faisait certainement que de s'enfoncer un peu plus dans sa cachette. Et nul doute que la souris présagée dû être fichtrement contente que le doigt fouineur ne se fige d'un coup et arrête de grattouiller son petit intérieur.

La voix raisonnant dans son dos, la manouche ne la connaissait encore que bien peu, mais n'avait guère besoin de la connaître davantage pour savoir de quelle bouche elle s'échappait. Les yeux agrandis d'un grand « m*rde » clignotant au fond de ses prunelles, la Casas ne broncha pas un cil de plus. Si elle avait su rougir, alors ses joues auraient pu éclater de s'empourprer trop. Sa bouche s'ouvrit sur les remarques légitimes, se referma et se rouvrit, prête à ânonner quelques excuses gênées. Sauf que celles-ci risquaient encore d'aggraver son cas. Soit, elle avait commis une lourde bourde en levant son cul du banc, cul qu'elle présentait maintenant au chevalier qui devait la former, mais quelque chose lui murmurait à l'oreille qu'il valait mieux, pour se tirer de cette situation embarrassante, assumer la tête haute - ce qui pour l'heure restait difficile – que de s'embourber dans une explication hasardeuse en se tordant les doigts comme une gamine idiote prise en faute.


Aussi, reniflant, elle se releva avec lenteur malgré l'envie de bondir sur ses pattes et épousseta ses braies noires avec application avant de remonter le museau vers Siméon. Chassant une boucle félonne agaçant ses yeux sombres, le visage travaillé à la va vite pour se parer d'un semblant de dignité, la voix rauque égraina avec aplomb.

C'est ainsi que souvent les hommes espèrent faire ma connaissance, mais je n'espérais pourtant pas me présenter à vous de cette façon. Je vous remercie donc de préférer ma tête à mon cul.

S'avançant d'un pas, elle observa un instant le visage aussi sale que les mains, fronçant un sourcil devant le renflement du ventre pointant sous la toge plus que fatiguée. Quelque chose l'intriguait chez cet homme sans qu'elle ne parvienne encore à trouver de quoi il s'agissait. Mais l'heure n'était pas là. Quoiqu'il en soit, vous connaissez à présent ce qui passe pour être mon meilleur argument. Et somme toute, ce n'est pas complètement faux. Ainsi, c'est fait.

Puis s'avançant d'un second pas, hocha la tête, un air bien plus convenable accroché à la figure. Ceci dit, je vous remercie de m'avoir convoquée et acceptée comme écuyer. Si, toutefois, vous ne changez pas d'avis.
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Simeon.charles
Je ne doute pas un seul instant que la gente masculine lorgne sur votre postérieur et le convoite bien avant de vouloir connaître votre nom. Je veux d’ailleurs bien croire que votre « argument », dois vite transformer les mignons en fiers coquelets quand ils les croisent. Mais, je ne sais si cela vous rassurera, je ne suis pas un foutu coquelet, mais un putain de loup. Ce qui m’intéresse donc chez vous ce sont votre tête et vos tripes.

Puis d’un geste du menton il l’invite à faire quelques pas avec lui à travers le château.
Siméon n’était pas du genre à pouvoir rester assis calmement pour avoir une discussion. Durant les séances de conseil avec la noblesse de Toulouse il avait tendance à se tenir debout et faisant les cent pas comme un lion dans sa cage.
D’ailleurs les seuls moments où on pouvait voir un Siméon calme et relaxé c’était quand il était au bord de lors à tenter de ferrer la truite ou le brochet.

Ce fut donc d’un pas décidé qu’il ressortit par où il était venu afin de déambuler dans les couloirs tout en ayant la conversation qu’il souhaitait. Le cadre fut à peine passé que le courant d'air se faisait sentir sur les joues et dans les cheveux des deux "corbeaux". Ce n'était pas désagréable en cette saison chaude.


Comme je vous le disais, c’est d’abord votre tête qui doit me plaire. Les premières impressions, si vous voulez le savoir, me rassurent dans mon choix de vous prendre pour écuyère. J’aime les esprits vifs et réfléchis. Les gens cultivés me passionnent, les artistes me séduisent.

Il marque une pause afin de braquer son œil de vipère sur elle. Expert dans l’art de la tromperie, le chevalier à la vipère afficha une mine souriante et joyeuse pour mettre en confiance Axelle, alors que son œil lui était inquisiteur et chercherait chaque mensonge qu’elle avancerait. L’interrogatoire commença à ce moment.

Avez-vous quelques talents ? La poésie ? La littérature ? Les mathématiques ? Une autre science ? Le chant peut être ?

Oh oui, si nombreux hommes aimeraient dénudée la gitane, lui c’est son âme qu’il cherchait à mettre à nu. La connaître, mieux que la deviner.
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Axelle
Siméon avait une réputation qui n'était plus à faire. C'était bien la raison pour laquelle elle avait désiré apprendre de lui. Pourtant, l'image qu'elle s'en faisait semblait dévier en partie de la réalité. Elle le pensait aussi tranchant que sa lame, dur et acerbe, mais le découvrait avec soulagement à l'écoute et même clément. « Il ne semble pas si terrible ». La pensée traversa l'esprit manouche comme une évidence. Pourtant, la Casas la ravala aussi vite. Non pas qu'elle pensait se tromper vraiment, mais car elle ne devait pas se sentir trop à l'aise, au risque sinon de prendre quelques liberté et de paraître trop familière. Cela aurait été bien trop vite. Bien trop tôt, devant le Loup qui se tenait devant elle. Et, attentive, chaque mot qu'il prononçait se gravait dans sa mémoire pour ne plus en ressortir, avec tout le poids de leur signification, un soupçon teintée de mise en garde.

Hochant la tête, elle marcha à ses côtés, intriguée encore par ce petit détail sur lequel elle ne parvenait toujours pas à mettre le doigt, mais qui l'interpellait confusément. Il semblait vouloir jouer cartes sur table et la manouche, pas un instant, n'eut la volonté de feinter. Cela aurait été idiot. Le moindre mensonge de sa part pourrait se révéler fatal quand elle serait amenée à combattre derrière lui. Aussi, laissant glisser une main distraite sur le mur qu'ils longeaient, secoua-t-elle la tête, un brin amusée, un brin dépitée.

Pourtant, il me faut bien vous l'avouer. Je suis bien plus impatiente et impulsive que réfléchie, je le crains. Cela m'a joué quelques tours. Elle tordit sa bouche d'une grimace pleine de souvenirs. Et parfois même imprudente. Clichy et Eddard en sont les témoins. Et je n'apprends pas toujours de mes erreurs. Quant à être cultivée, je ne le suis guère non plus, mais... relevant la tête, un léger sourire aux lèvres en plongeant dans l’œil d'un vert exacerbant la curiosité, j'apprends vite, je crois. Même si tout le monde dit ça.

Malgré sa mine et ses mains sales, le chevalier ne sentait ni la pisse rance ni la sueur macérée. Voilà, voilà ce qui intriguait les sens gitans depuis qu'il était entré dans la pièce. Furtivement, elle fronça des sourcils interrogateurs, se demandant soudain qui elle avait vraiment face à elle sous la flopée de questions qui assaillaient sa langue. Elle ne permis cependant à aucune de franchir le seuil de sa bouche. Pour l'heure, c'était à elle de répondre.

Et bien... Je sais danser, mais, ça, je dirais que c'est plus un héritage. Quoique si vous me demandez de chanter comme les miens le font si bien, le couac dans l'héritage risque de vous arracher les tympans. Siffler, à la limite. S'il faut que ce soit fort et sans la moindre mélodie. La poésie, j'avoue ne même pas savoir l'apprécier en la lisant simplement. Les mathématiques, hum, suffisamment pour gérer mes affaires. Non, en fait, si j'ai un talent, c'est le dessin et la peinture. Je me débrouille assez bien. D'ailleurs j'ai ouvert un petit atelier à Bouillon.
Et penchant la tête pour le regarder par en dessous. J'pourrai vous montrer s'vous voulez.

Et paf! Les mots bouffés reprenaient le dessus dès lors qu'elle se sentait plus à l'aise, trahissant le lit dans lequel elle était née.

Enfin, je veux dire, si vous le souhaitez.
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Simeon.charles
Il l’avait écoutée sans en perdre une miette, mais plus que les paroles c’était la perception des mimiques, expressions et autres détails physiques qui réveillaient sa curiosité. Non pas que la manouche était bourrée de tocs, mais comme tout humain, les paroles pouvaient dire une chose, mais le regard une autre. Il avait besoin de connaître ces détails afin que plus tard il puisse la comprendre sans l’entendre.
Un sourire des plus francs s’étira sur son visage quand elle parla de son impulsivité, puis son sérieux vint à nouveau se figer sur son faciès quand elle aborda son héritage et ses talents.

Il l’avait guidée jusqu’à la Tour d’Autriche, cette énorme tour ronde accolée à la petite tour de guet qui surveillaient la Sémois au Nord Ouest.
Ce fut lorsqu’il commença l’ascension des marches arrondies par le temps qu’il reprit la parole de sa voix enraillée.


Lors de la guerre contre l’empire je me suis retrouvé isolé en pleine campagne Lorraine avec une petite troupe composée de certains de nos frères corbeaux et de mercenaires huguenots répondant aux ordres du Marquis d’Arlons.
Si les consignes des maréchaux de France et le bon sens souhaitaient que nous nous dirigions vers Reims afin de chasser l’allemand, notre impulsivité nous a guidés droit en Germanie, à Baden Baden pour être précis. Nous avons attaqué la capitale allemande de nuit avec quelques chevaliers et mercenaires transformés en alpinistes. Certes, nous avons, au final, échoué, mais nous avons toujours la réussite du bout des doigts. Nous aurions eu deux soudards de plus et nous prenions la capitale, la reine des allemands et la plus grosse place forte des germains.
Nous pouvons dire que notre impatience nous a fait perdre cette bataille, mais si nous avions réussi à rançonner Reine, Baden et tous les vivres destinés aux allemands, est ce que cette même impatience aurait été « néfaste » ?

Cultivé votre impatience, votre fougue, mais maitrisez les sujets sur lesquels elles vous portent.


Et de s’appuyer plus lourdement sur son bâton de marche. Il avait répété ce geste des milliers de fois afin qu’il semble des plus naturels et fasse passer le chevalier pour un éclopé. Puis il sauta du coq à l’âne afin de reprendre une partie qui l’avait fortement intéressé.

Le dessin dîtes-vous… Cela me plait et je serai ravi de voir votre atelier. Enfin vous m’ouvrez une porte par laquelle je ne peux que m’engouffrer. Comme vous le savez je suis « Corbeau » le héraut de l’ordre. Je dois tenir registre, faire recherches héraldiques et peindre les armoiries. Cependant, je dois avouer, que ma vue baisse, mes mains tremblent parfois et rester trop longtemps derrière un pupitre m’est douloureux au niveau du dos.
J’allais donc me chercher un blasonier afin de peindre les couleurs et armes de nos nobles et chevaliers.
Vous en sentez-vous capable ? Et êtes-vous intéressée par cela ?


Il poussa alors la lourde porte qui menait à la plateforme de la tour. L’air frais chargé des parfums de la canopée chassa de ses naseaux l’air humide et renfermé des escaliers qu’ils venaient de gravirent. D’ici, tout Bouillon et ses alentours étaient visibles. Le vieux corbeau y montait souvent afin d’y trouver l’inspiration, mais aujourd’hui il y cherchait son écuyère.

Mais…. Dites-moi avant toute chose, me faites-vous suffisamment confiance pour être mon écuyère ? Une confiance aveugle ? Etes-vous prête à m’être fidèle tout le temps ? A me confier corps et âme ?

N’importe qui pourrait voir que le visage du vieux brigand était devenu aussi dur que la roche.
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Axelle
Les pas en cadence malgré cinq battements en place de quatre, les yeux au sol, la manouche, l'esprit à la concentration, avait écouté le récit plein d'audace. La question le concluant était de toute évidence purement rhétorique et n'attendait pas de réponse tant celle-ci coulait de source. Non, cela n'aurait pas été néfaste. Et d'un premier conseil, la première leçon fut apprise. Pleine de sens, en quelques mots concis. D'ailleurs, aurait-elle voulu réagir qu'il ne lui en laissa pas le temps, enchaînant aussi sec sur un sujet tout autre. Les yeux relevés vers la volées de marches de pierre, la Casas se laissa quelques instant de réflexion. Ayant déjà fourré son museau dans l'atelier de Zoyah, elle savait exactement ce qui l'attendrait et répondit donc avec précision.

Je ne suis pas certaine de faire un très bon blasonier. Le dessin de blasons demande bien de la rigueur et que je préfère laisser plus de liberté à mes pinceaux. Je sais aussi que cette discipline est soumise à des règles très précises que je ne connais pas, ou très peu. Je ne connais pas non plus les termes s'y reportant. Il faudrait donc que vous m'appreniez. Par ailleurs, je réserve le dessin à mon seul temps libre et donc ne peux certifier tenir des délais impératifs ou courts. Cependant, maniant avec précision pinceaux et mines de plomb et ayant certaines connaissances en géométrie, je saurai suivre vos consignes. Mais en seule exécutante tant, sincèrement, faire des recherches m'ennuie profondément. Si tout cela peut néanmoins vous convenir, si vous ne pensez pas y perdre finalement plus de temps que vous n'en gagnerez, je veux bien tenter de vous seconder.


Peut-être aurait-elle pu continuer à babiller sur la difficulté de découper la matrice d'un blason en trois ou tracer un bandeau du tiers de la hauteur totale et le positionner au trois quart quand, au bout des marches, la vue qui s'offrit à elle, enfin, la fit taire. Lentement, elle s'approcha du parapet, mains posées à plat sur la vieille pierre et, fermant les yeux, inspira longuement l'air plein de sève. Petit moment insouciant et léger avant qu'une question, et non des moindres, ne la cueille au vol.

Mirettes noires de nouveau bien ouvertes, fixant l'horizon, sa voix prit des teintes plus graves.
La confiance n'est pas une chose que l'on donne à la légère ni sur un coup de tête. Je donne la mienne assez rarement. Avec le temps. Avec beaucoup de temps. En Anjou, durant tous ces longs mois, j'aurais dû vivre avec la peur et l'angoisse accrochées au ventre. Me poser des questions sans fin sur ce qu'il me serait demandé le lendemain. Ce ne fut pourtant pas le cas. Aussi, si quand j'ai décidé...

Elle arrêta net le flot de paroles inutiles, penchant la tête vers le vide vertigineux ouvrant sa gueule béante sous ses yeux. Qu'importait finalement qu'avec son visage sale, il ne pue pas. Tournant la tête pour poinçonner un regard limpide à la pierre du Chevalier, elle ne laissa finalement qu'un mot bref franchir ses lèvres.

Oui.
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Simeon.charles
Oui… Vous venez de dire oui. Cela inclus votre « plus bel argument » vous le savez ? Vais-je jouer au vieux satire et vous l’envahir ? Puis, se faire « lustrer le casque » par son écuyère me semble des plus à propos lorsqu’on est un chevalier.
Vous ne regrettez toujours pas votre choix ?


Puis le visage rieur, qui lui faisait ressortir ses pattes d’oies et qui était apparu lors de ses propos graveleux, s’effaça. Il n’était pas venu pour chercher une courtisane, mais une écuyère d’une fiabilité sans pareil. Il était venu chercher celle qui le suivrait dans la bataille, là où les combats faisaient rage, là où les corps et la ferraille se mêlaient avec fracas.

Mais Ganélon n’avait-il pas promis de défendre les intérêts du Grand Charles Ier avant de faire tomber le gant du pouvoir ? Oh, je sais que je ne suis pas Charlemagne et je ne vous ferais pas l’insulte de croire que vous pourriez discuter avec Marsile, cependant les actions ont plus de poids pour moi que les mots.

Prouvez moi que vous me confierez votre vie, tout comme je pourrais compter sur vous lorsque le moment se fera sentir.

Il fit quelques pas en direction des merlons Nord de la tour, là où c’était le plus haut. Son œil vert vipère se braqua sur les roches et la Sémois plus bas. L’eau serpentait paisiblement aux pieds de la citadelle. Toujours, en contre plongée sur le paysage il s’adressa à nouveau à Axelle.

Savez-vous que c’est ici qu’Eusaias fixa le sort de son cousin ? Après lui avoir repris la citadelle, il semblerait que le premier corbeau a voulu voir si son traitre de cousin savait voler.
La réponse était non.


Puis son attention se reporta sur la gitane. Il tendit son bâton afin que l’extrémité soit à hauteur de poitrine de son écuyère. Le regard était désormais sévère. De son autre main il défit la corde qui lui servait de ceinture.

Moi j’aimerai que vous preniez cette corde et que vous vous y cramponniez fort. Je veux vous voir gigoter à son extrémité, les pieds dans le vide alors que je tiens l’autre bout malgré mes mains vieilles et tremblantes. Je veux voir si vous me faites suffisamment confiance afin de placer votre vie entre mes mains.

Et maintenant, tu me confies toujours corps et âmes ?
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Axelle
C'est la fin
Retiens ton souffle et compte jusqu'à dix
Sens la terre bouger et ensuite
Entends mon cœur éclater à nouveau

Traduction extraite de Skyfall – Adèle


Elle ne s'était pas attendue à des plaisanteries graveleuses. Non, pas un instant et, si elle haussa d'abord un sourcil surpris, les pattes rieuses au coin de yeux du Chevalier lui remirent rapidement les idées en place. Il ne faisait pas de doute qu'habituée à ce genre de loisir, elle aurait enchéri aussi sec, sauf que, le devinant peut-être, il ne lui en laissa pas le temps, figeant à nouveau son visage de sérieux. Cet homme semblait insaisissable tant les expressions se suivaient et s'échangeaient sans qu'elle ne puisse vraiment en saisir une pour s'y conforter.

Déjà suivait une leçon d'histoire face à laquelle, si elle ne comprenait que peu, elle hocha la tête, se peignant un air entendu sur la trogne quand pourtant Marsile et Ganélon n'étaient que des noms aux sonorités inconnues, bien que tintant agréablement à l'oreille. Mais ce qui suivit, oui, ce qui suivit, elle aurait pu le parier, même si elle n'aurait pas imaginé qu'il aille si loin dans le défit qu'il lui lançait. Un bref instant, elle eut envie de lui rire au nez pour mieux le traiter de cinglé. Que s'il avait une case en moins, elle n'était pas encore complètement folle pour suspendre sa vie au bout de ses bras. C'est sans doute ce qu'elle aurait dû faire et, somme toute, cela aurait été le plus sage si elle n'avait été si fière. Bien trop fière. Alors, elle ne pipa mot, refusant à ses yeux de se perdre encore sur le paysage s'étalant à sa contemplation. Parce que soudain, il n'avait plus rien de beau mais puait la mort. Sa propre mort. Paysage à couper le souffle dans le sens le plus primaire du terme.

Avec lenteur, elle écarta la cane qui la pointait du doigt et saisit la ceinture de corde, laissant ses mains glisser sur l'enchevêtrement rugueux et, quand elle fut assurée de cette solidité-là, en passa le bout pendant par-dessus le parapet. Si elle devait prouver sa confiance, elle n'avait aucune envie d'illustrer un imaginaire penchant suicidaire. Avec la même lenteur, le visage concentré et refermé, elle retira ses bottes, l'une après l'autre et, sans le moindre regard vers son tourmenteur, enjamba le parapet. Les yeux tout occupés à choisir chaque prise de ses mains, ses pieds nus tâtant chaque pierre pour y dénicher le meilleur appuis, la corde lui chatouillait le nez dans une complète indifférence. Enfin, lorsque qu'accrochée à la paroi comme une de ces vilaine araignée, elle se sentit prête, elle releva le visage vers Siméon.


J'vous préviens qu'suis pas d'humeur à prendre un bain glacé. Si vous m'lâchez, z'avez pas fini d'm'entendre râler.


Annonça-t-elle bravache, plus pour se rassurer elle-même qu'autre chose, un sourire forcé accroché aux lèvres. Avec une application décuplée, sa dextre saisit la corde, la tirant pour y enrouler son poignet de deux tours avant de refermer solidement sa main dessus. Ne pas faire de gestes trop brusques. Soit, un saut de l'ange aurait été des plus romanesque et magnifique, mais si elle refusait de penser à la composition des bras du Corbeaux auquel elle se remettait corps et âme, elle doutait avoir elle-même assez de force pour faire face à l'élan du moindre saut. Finir fracassée sur les rochers serait déjà assez moche sans y ajouter une main arrachée. Oui, étrangement, bien que suspendue dans le vide, ses pensées n'en restaient pas moins terre à terre.


Et elle tira encore sur la corde, comme pour lancer le coup d'envoi.

Si tout jusque-là n'avait été que lenteur, après une inspiration qui sembla ne pas finir, sa senestre encore accrochée à la sûreté de la pierre se décrocha de son abris de fortune pour, d'un geste vif, saisir la corde rappeuse alors que ses pieds abandonnaient le refuge du mur. Vitesse salvatrice pour ne surtout pas réfléchir. La corde se serra sur son poignet, lui arrachant un cri de douleur.

Il était des choses à ne pas faire, mais elle les fit. Si la manouche s'amusait souvent à jouer les funambules sur les toits de Notre Dame pour embrasser le museau des gargouilles de ses boucles brunes, toujours ses pieds, ou du moins un, restaient bien posés sur la pierre. Et quand elle baissa bêtement la tête, elle les vit flotter, impuissants, au-dessus des rocs menaçants et gloutons, si bas. Trop bas pour ne pas vouloir la happer. L'intérieur de ses cuisses soudain fut inondé d'une coulée chaude. La terreur qu'elle avait ravalée jusqu'alors dégoulina sur ses joues, s'engouffra dans sa gorge en saccades de sanglots étouffés par une respiration chaotique et affolée. Alors, les jambes bataillant le vide quand elle s'était jurée de résister à la panique pour tenir mieux, elle remonta un visage ravagé vers Siméon, incapable d'articuler le moindre mot tant les gémissements arrachaient sa gorge aussi sûrement que la corde écorchait la peau de son poignet, la paume de ses mains et le A qui s'y trouvait tatoué.

A comme abandon.

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Simeon.charles
Elle ne s’était pas démontée, et il aimait cela. Il pouvait lire la terreur dans son regard et cela le soulageait. La mort était terrifiante et la jeune manouche allait devoir la côtoyer souvent, la donner régulièrement, l’affronter de nombreuses fois. La peur était chose normal, tous les hommes la connaissaient, certains étaient pétrifier, d’autres reculaient et une dernière partie l’utilisaient pour survivre.

La corde commençait à lui dévorer le poignet avec voracité et le sang imbibait le chanvre avant de perler sur sa vieille main. La leçon était terminée et Axelle venait d’obtenir la note maximale.

Bien que vieillissant, l’artésien avait de beaux restes et sa force physique, bien que déclinante n’avait, quant à elle, rien à envier aux jeunes chevaliers. Il bonda tous les muscles de ses bras et de son dos afin de hisser la jeune femme jusqu’aux créneaux. Un deuxième effort lui permis de lui saisir solidement les poignets afin de la faire glisser jusqu’au sommet de la tour.


Saine et Sauve.

Il fit comme s’il n’avait pas remarqué les larmes et autres signes de peur qu’elle avait laissés échapper. Il s’adossa à un merlon les jambes repliées de manière à ce que les genoux soient à hauteur de poitrine. Haletant.

Vous ne reculez pas, même prise de peur. Je sais que désormais je peux compter sur vous en tout temps.

Puis de son œil vert il chercha son regard. Allait il y lire de la haine à son égard ?

Ne m’en voulez pas trop. Désormais je ne douterais plus de vous et je vais faire de vous un grand chevalier. Je vous libère pour aujourd’hui, demain nous commencerons avec l’art de la guerre.
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Axelle
À peine hissée comme un paquet de linge en haut de la tour, la manouche se laissa tomber sur le sol, aussi tremblante qu'une feuille. Recroquevillée comme un enfant apeuré. Sonnée comme si elle avait reçu un vilain coup, les oreilles bourdonnantes d'un sang peinant à retrouver son calme.

C'était fini. Malgré morsure de la corde flânant à ses mains. Rien d'autre ne comptait vraiment. Sous elle, c'était bien la pierre. Dure. Froide. Solide. Rassurante. Elle voulait le silence, mais le Chevalier parlait. Elle aurait dû se gorger de satisfaction aux paroles glissant des lèvres mâles, lui sourire un brin complice déjà peut-être, mais en relevant la tête pour le regarder, elle n'avait qu'envie de lui frapper la poitrine de ses poings, de lui hurler combien, en cet instant, elle lui en voulait. De lui cracher à la figure toutes les insultes qu'elle connaissait et, en ce domaine, elle était foutrement cultivée. Mais devant sa pose jumelle à la sienne et ses poignets à vif, tout se cassa la figure et elle secoua lentement la tête.


Si je viens de gagner quelque chose, c'est une réponse. Sa voix sonna sourdement à ses oreilles. Parce que sans ça, jamais je ne pourrai être vraiment celle que vous souhaitez. Comment pourrai-je vraiment me battre à vos côtés, être votre ombre dans la bataille si... Si vous vous cachez de moi ? Si je ne le sais pas qui vous êtes ? Vraiment. Son regard balaya les créneaux avant de revenir cueillir l’œil vert. Votre visage et vos mains sont noirs de crasse, pourtant vous ne puez pas.

Oui, peut-être ne gagnerait-elle comme réponse qu'une volée de bois vert, mais après s'être balancé dans le vide, pouvait-elle vraiment la craindre ?
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Simeon.charles
Une réponse ? Il l’écouta attentivement regardant ses propres mains pleines de crasses. La jeune femme était attentive, c’était une bonne chose. Il se demandait comment il allait formuler son affaire. De l’ongle de son pouce gauche il chassa la crasse coincée entre l’ongle de son pouce droit et la peau du même pouce.

Si je suis sale sans puer, c’est que je n’avais plus de crottin de cheval à frotter sur l’intérieur de mes habits.

Alors qu’un sourire espiègle s’étirait son visage aux joues à la pilosité mal-semée il reprit.

Avez-vous déjà vu une vipère faire la morte ? Gueule ouverte, langue qui pend, mauvaise odeur ? Si elle le fait c’est pour que ses proies tout comme ses prédateurs ne s’intéresse pas à elle, elle garde ainsi la vie sauve ou chasse plus facilement.

Si je parais estropié, sale et mal coiffé, je passe pour un pauvre. On prête moins attention à moi, je suis plus libre de mes mouvements, je peux me rouler dans la terre pour écouter une conversation, me glisser dans une botte de foin pour épier quelqu’un. Puis on ne tranche pas la gorge d’un pauvre, on ne se pose pas de question en le voyant rentrer dans une taverne malfamée.

Et plus bas, sur le ton de la confidence.

Quand votre adversaire se présente face à vous, boitant, borgne et à moitié tordu par l’âge… Ne prenez-vous pas le combat plus à la légère ?
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Axelle
Instinctivement, à peine la question posée, elle s'était un peu plus pelotonnée contre le mur. Craignait-elle finalement davantage un mot acerbe ou un refus que de se balancer dans le vide ? Non. Tout de même pas. Mais qu'un âpre combat, certainement.

Mais de refus, mais de mots durs et courroucés, il n'y eut aucun. Et elle tendit la cou vers lui, au fur et à mesure que les mots s'écoulaient de la bouche du chevalier. L'envie lui piquait le bout des doigts de relever la fronde barrant le visage noirci pour s'assurer qu'elle comprenait bien tout. Ou pour simplement, le temps d'un clignement de paupières, le regarder dans les yeux, vraiment. Elle n'en fit pourtant rien, se promettant pourtant, qu'un jour, elle découvrirait si le second œil était tout aussi vert que celui qu'il lui livrait. Alors, elle pencha la tête, sourire aux lèvres en prenant cette confiance d'une autre nature, mais si précieuse, qu'il lui accordait, avant de réfléchir quelques menues secondes.


Si. Si je crois bien que je serai moins en alerte. Puis dans une grimace navrée. J'aurai mieux fait de vous demander avant... J'aurai peut-être évité de me pisser dessus. Et levant des mains dégoûtées, se redressa, soudain pressée d'aller se laver et foutre ses frusques à la flotte. Refermant soigneusement la parenthèse qu'elle garderait pour elle seule, elle enchaîna. Je serai à l'heure demain mais... Jetant un œil anxieux par-dessus son épaule. Est-ce que la leçon pourrait se dérouler dans un endroit moins... Haut ?
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