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[RP] Ouvert - Hôtel Rue Montorgeuil : Cabinet du Barbier Fou

Vivia
Premier client entré et avancé jusque dans la salle de soin, quant à la seconde, Vivia profite de l'occasion pour la zieuter d'un coup d'oeil rapide alors qu'elle s'adosse au châssis de la fenêtre.
S'attendait-elle a être prise d’assaut dès l'ouverture, assurément. La Cour regorge de rats, de cas désespérés, de vermines et de cas intéressants. Un lieu idéal pour un Barbier Fou et pour son héritage.

S'avançant alors vers la salle de soin, la Corleone tapota la table recouverte d'un socle en verre. Le contact froid et neutre de l'élément a toujours tendance à surprendre les patients, mais il avait l'avantage de faciliter le nettoyage. Après tout, il était plus aisé de passer un coup de chiffon imbibé d'huiles essentielles désinfectantes sur une épaisse couche de verre que sur les divers rainures d'un bois vieillis dans lequel le sang a tendance à s'infiltrer.

Alors oui, j'ai tendance à soigner les cas désespérés. D'un autre côté, qui mieux qu'une misérable peut soigner d'autres miséreux, hum ?

S'approchant d'une bassine pleine de fleurs saponaires, Vivia les frictionne, ajoute un léger filet d'eau pour nettoyer ses mains et ensuite passe ses phalanges dans une bassine contenant des huiles essentielles de lavande, de bois de rose, citron et girofle. Une fois fait, elle regagne la patiente et pose le plat de sa main contre son front, constate cette température, observe ses traits tirés, son teint grisâtre et enfin, prend son pouls.

Qu'est-ce qui vous amène ici, hormis cette mine usée, ce teint de mauvaise augure et ce pouls assez lent ? Avez-vous des difficultés particulières, à vous nourrir, vous reposer, voir vous activer en général ? Comment sont vos humeurs ? Et enfin...Vous êtes ?

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Owenra
    Mais la porte s'ouvre de nouveau derrière elle, d'instinct Renarde tourne le museau, histoire de s'assurer qu'on n'intenterait pas à sa vie quand elle a le dos tourné. L'attitude de la jeune lui apporte l'information qu'elle ne lui est pas hostile. Peut-être cherche-t-elle aussi une personne ayant les connaissances nécessaires à une possible guérison. L'attention d'Owen' se reporte sur le dos de la médicastre du coin lorsque celle-ci prend la direction d'une salle un peu plus à l'écart. Invitation implicite, la Rousse emboîte le pas de l'hôte. Méfiante éternelle, les pupilles acérées détaillent les lieux, la table qui trône au milieu, austère et à la surface probablement aussi froide que la peau grisâtre de celle qui retire le lourd mantel trompeur de silhouette. Ce dernier s'échoue sur le sol sans cérémonie aucune laissant place au corps malingre ceint de la chemise en soie habituelle, du bustier de cuir et des éternels collants qui ne laissent guère plus de doute sur la maigreur générale que le visage. La main blonde exhorte au corps galeux à prendre place sur le verre. Curieuse table. Probablement chère à l'achat. La malade approche quand la réponse à la question est donnée. Face à la rhétorique, l'Owen' observe le mutisme posant le bout des doigts sur la table d'examen. Effectivement, le contact est froid et soudain, elle se souvient de la cause de son aversion pour les médecins : ils sont tous aussi froids que leur matériel. Avec une lenteur calculée, elle hisse sa carcasse sur le verre qui, une fois assise au bord, les pieds pendants dans le vide, la fait frissonner. Silencieuse, Renarde galeuse observe le lavage des mains qui s'effectue avant que l'une de ces dernières ne s'invite sur le front d'une Azur sceptique. Les sourcils se froncent de constater les quelques parties touchées. Et l'interrogatoire commence.
    Owen' sait pourquoi elle n'aime pas les médecins : elle a toujours l'impression d'être passée à la questionnette face à un bourreau qui ne demande pas l'autorisation pour toucher. Un peu comme s'il s'agissait d'un conjoint marital qui ne s'embarrasse des ressentis de son épouse mais qu'il faut payer en plus. Bon gré mal gré, elle se décide à répondre.


Le repos, j'connais pas. C'qui m'amène ici, ça s'localise là.

    Elle pointe sa trachée du bout des doigts de la main qui n'était pas au prise avec les doigts compteurs de battements.


Elle me fait mal, au point qu'il m'arrive de ne pas pouvoir me nourrir plusieurs jours de suite. La boisson passe quelques fois, avec difficultés. Et... .

    Elle s'interrompt lorsqu'un chatouillement annonciateur de toux, la prend soudainement. Aussi détourne-t-elle le visage avant d'expectorer sous la pression ressentie au tréfonds de la gorge lésée. Senestre s'amène aux lippes pour limiter la propagation des crachats tandis qu'une vingtaine de toussotements se font entendre. Des sons gras, intenses qui la laissent essoufflée, épuisée quand enfin ils s'arrêtent. Senestre regagne le bord de la table pour empêcher au corps de chuter. Le verre arbore une couleur carmine, tout comme le contour des babines, suintantes d'hémoglobine. La respiration est recherchée avant qu'un profond soupir ne soit poussé. En reposant les iris vers leurs homologue, les lippes esquissent un sourire en coin habituel, un brin narquois.


Et c'est là qu'tu vas m'dire qu'j'suis déjà fichue et qu'tu vas m'tendre la note.

    Un rire jaune lui vient. Par le Sans-nom, qu'elle hait sa propre faiblesse. Pourquoi est-elle venue jusqu'ici déjà ? Ah oui... Parce que les siens ont l'espoir qu'elle n'a plus elle-même. Faites parti d'un clan qu'ils disaient. Mais il lui faut encore répondre à la dernière question. Nouveau silence. Devrait-elle user d'une de ses nombreuses fausses identités histoire de ne pas porter atteinte à la réputation del Cielo ? Nouveau soupire quand elle songe que, de toutes façons, ici, on la connaissait généralement plus qu'ailleurs :


Owenra del Cielo Azzurro.

    Voilà, c'est dit. La sœur de la Matriarche marche au bord de la falaise de la vie. Prête à sombrer à tout moment dans le monde souterrain.

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Vivia
La gorge. Passerelle très utile qui permet de faire passer les fluides, le souffle et les cris. Un organe si souvent malmené à la Cour, qui lors d'une étreinte ou d'un guet-apens est aussitôt trop prisonnier phalanges et oppressé. Pourtant là, aucune marque de strangulation sur cette gracile gorge, juste une toux rauque, vibrante, perturbante qui affaiblit le corps de la Rousse et abandonne par la même, entre deux souffles, un amas de carmin. Comme si finalement, le feu de sa chevelure cherchait également à s'échapper de ses lippes. Aussitôt, le Barbier et la Corleone ne font qu'un entre ses tempes. Discussion intérieure entre brides de maux, de folie et savoir amassé durant des années. Les maladies, les faiblesses sont disséqués, analysés. Soucieuse, elle ne laisse rien paraître. Elle n'a finalement que faire du vécu de la Rousse, seul le "cas" l'intéresse. Sous les mèches Siciliennes disparate et bicolore, les symptômes sont alignés sur un vélin imaginaire, elle cherche à comprendre, les liens de causes à effets, à regrouper tous ces maux en une seule et même souffrance.

D'un geste, elle saisit l'arête la mâchoire rousse et l'invite d'un regard à ouvrir la gueule renarde. La bougie est saisie, elle fait la lumière sur le Mal, cette rougeur, cette forme aqueuse et ce Mal qui se dessine dans le fond de la gueule. Il semble que cette chose ait saisit toute sa gorge et qu'elle pointe déjà le bout de son nez. Elle n'en voit qu'une infime partie, pourtant cela éveille la curiosité de la Blonde. Hum...Interessant... Pour sûr, ça l'était, pas tous les jours que les rats de la Cour permettait à son esprit de s'activer de la sorte. Il n'était pas aisé de la sortir de ces sutures, de ces chaudes pisses, pneumonies et autres maux courant. Pour une fois, la schkoumoune des Roux se retournait contre son hôte. Triste ironie.

Grattant sa tignasse mécaniquement, le Barbier marque une pause avant de s'approche de sa bibliothèque. Elle saisit plusieurs ouvrages, les éventre sèchement et murmure à voix haute, des propos entremêlés de souffle, soupire et d'exclamation étranges. Elle fulmine, elle boue. Enfin, sa matière grise est sollicitée. Elle potasse, relit ses notes, celles de son père et celles des confrères traditionnels. Le temps s'écoule sans qu'elle ne daigne ne lui apporter de l'intérêt, laissant même la patiente sécher quelques instants sans culpabiliser le moins du monde. Soudain, le nom de la Rousse est prononcé et la Corleone marque une pause. Le minois se relève, le regard se fait pervers, rusé.


- Que ce nom est doux à nos tempes.
- Tu ne crois pas si bien dire, c'la donzelle de la Azzuro.
- Voilà qui va arranger nos affaires..Voilà notre pour parler..
- Qui mieux qu'une douce mourante pour attirer l'attention de la chef des Azzuro..

Le dialogue intérieur s'interrompt alors que le regard s'abat sur les notes de son père, elles sont un peu usées, maladroites mais elle en entend l'essence. Le livre est saisi dans une main, tandis que de l'autre elle rapproche les notes d'un confrère officiel. Les maux correspondent et si l'un n'a fait qu'analyser les maux d'un cadavre, son père lui, eu la bonne idée d'étudier cela sur un cas encore..vivant, bien que peu fiable. Les lignes sont lues, retenues et pourtant, comme si la pression était trop grande, elle s'abat sur la finalité, la conclusion, la chute de cette étude.

- Merde...
- Ouep..On va pas pouvoir faire des miracles là. Mais on peut...
- ..Toujours proposer à la Azzuro, en échange de sa particupation de soulager ces maux..
- ..De faire en sorte que sa décadence dure quelques mois de plus..
- A défaut de quelques semaines.

Le minois se retourne, les ouvrages sont fermés, claqués pour mieux abattre la sentence. La Rousse avait au moins raison sur un point, elle allait bien lui annoncer qu'elle...

Vous allez mourir...


Admirez le tact d'un médecin fou et dénoué de compassion. Pour sûr, c'est efficace. Allez, on met un peu de miel pour faire digérer. Votre Mal est sournois, tenace, robuste.. Il n'existe aucun moyen de freiner sa propagation. S'il a touché votre gorge, il a très bien pu saisir d'autres organes. C'est comme..Une araignée qui tisse sa toile dans votre machine, elle se repaît de votre gorge mais la toile est large et vous en êtes déjà...prisonnière. Aucun des confrères, ni même moi ne pouvons vous ôter cette merde qui corrompt tout votre corps. La seule chose que je puisse faire...C'est...couper certains fils de cette toile, les ébranler pour vous permettre de mieux vous substanter, de vivre tout simplement encore quelques mois...

Juste quelques mois...Il est temps d'admettre que son corps est déjà de l'autre côté, qu'elle ne peut que retenir sa main pour lui éviter de chuter dans les limbes prématurément. Vous avez déjà un pied dans les limbes, Owenra. Votre corps va aller de mal en pis. Je préfère être franche, vous vivez les derniers mois de votre vie et encore, cela n'est valable que si vous vous battez contre ce Mal et que vous tolérez ces traitements... Ces placebos même..Car rien n'est assurément efficace à cette époque limitée.

Doucement, elle l'observe, la laissant digérer les informations malgré sa gorge foutue pour commencer à prépare les différents remèdes de cheval qui vont pouvoir lui être proposés..
Le traitement est onéreux..Mais je peux vous fournir quelques semaines de répit pour votre bourse, en échange d'une présentation. J'ai besoin de voir, ta sœur...Ta compagne. Il va me falloir lui parler de médecin à proche.. Quelle ne s'offusque pas de cette indiscrétion, les bruits courts à la Cour, pire que du vent qui s'abat dans les ruelles, les rumeurs se perdent sans mal jusqu'aux oreilles des rats..Et nombreux sont ceux qui ont les bourses limitées et pour qui, il est plus agréable d'avouer, de balancer et de fournir quelques informations en échange de soins.

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Owenra
    Sans grand étonnement pour l'Owen', la blonde bicolorée reste silencieuse. Oh comme on sait que le silence d'un médecin est signe de mauvais augure. La quinte laisse une Renarde séchée se faire manipuler, ouvrir la bouche comme l'acheteur ouvrant la gueule d'une monture pour s'assurer de sa dentition. Comme le négrier vantant le nouvel arrivage d'esclave venu d'un pays lointain, inconnu du commun des mortels. Les yeux verts pâles transpirant la fatigue n'ont de cesse d'observer la tignasse jaune se faire malmenée par un grattage automate avant que le corps savant ne s'embarque en direction d'une bibliothèque remplie d'un millier de richesse culturelle. Rousse penche la tête sur le côté, la laisse reposée sur une épaule tandis qu'elle n'arrête pas de regarder la soignante en pleine recherche.
    Quand le nom franchit les lèvres écarlates, c'est sans grande surprise que le barbier s'interrompt et relève le visage. L'Owen' note le changement de regard. Alors elle spécule intérieurement, les formulations d'hypothèses internes sont l'une de ses spécialités. Que va donc lui demander la fillotte du barbier taré en échange de quelques soins ? Des faveurs ? La protection du clan ou de la Matriarche ? Un arrangement financier ? Quelques fournitures pour des expériences potentielles ? Le droit d'exclusivité sur le futur cadavre de la Renarde ? Un accord ? Une rencontre avec la Borgne ? Un contrat ?
    Un léger soupir s'échappe des babines qu'elle tente d'essuyer d'un revers de poignet, quitte à glisser la bavarde sur les taches sanglantes qui lui parsèment la peau. Elle patiente. Elle s'amuse à dessiner du bout d'un doigt dans les gouttes de sang qu'elle a fait tomber sur la surface du verre, en les reliant entre elles, les unes à la suite des autres.

    Pour finir, elle ne redresse la tête que lorsque la fermeture des livres lui parvient aux ouïes. Alors la sentence s'abat comme le couperet sur la nuque d'un condamné.


Vous allez mourir...

    Bravo pour cette déduction Hippocrate. L'Azur en tire un sourire qu'on pourrait presque assimiler à de l'amusement. Intérieurement, elle intègre la nouvelle pas si nouvelle que ça. Les explications qui lui parviennent sont, tout bonnement et superbement méprisées, délaissées pour ne laisser la place qu'à ces trois mots tournant en boucle dans l'encéphale. C'est une chose de savoir qu'on va mourir, se l'entendre dire et confirmer en est une autre. Les médecins sont aussi froids que leur matériel, Vivia en est la parfaite incarnation. Renarde galeuse pose les pupilles sur elle sans trop la voir. Le corps présent dans le cabinet, l'esprit ailleurs. Où ça d'ailleurs ? Parti dans un néant distordu que seuls quelques mots du discours scientifiques parviennent à franchir. Ces quelques mots qu'elle se répète :


"Vivre quelques mois"... Hin hin.

    Elle secoue la tête de droite à gauche en faisant glisser son corps pour que les pieds touchent terre. Là, elle se redresse le temps que l'esprit voyageur se recentre sur l'instant. Elle prend un inspiration puis reporte toute son attention sur la blonde en tirant un sourire en coin. Comme d'habitude. Ne changeons pas cette coutume. Même quand le marcher est proposé et que sa relation avec sa sœur est évoquée. Ce n'est pas un secret, d'ailleurs, l'Owen' a appris à vivre pleinement cette relation incestueuse, quitte à outrager les bien-pensants, ce qu'elle adore faire, évidemment. Depuis et pour toujours.


Cette faculté d'annoncer la mort prochaine de quelqu'un... Je l'admire. J'imagine que toute cette froideur n'a dû s'acquérir qu'après moult blessures internes. Serait-ce une protection ? Probablement. Ceci dit, tout le monde meurt un jour, heureusement.

    Cette phrase déclamée sans une once d'émotion n'a aucun trait de moquerie. Peut-être la Rousse est-elle sincère. Peut-être l'utilise-t-elle aussi pour s'offrir un semblant de protection face à l'Autre.


"Parler de médecin à proche"... Serait-ce une manière dissimulée de dire que tu veux passer un marcher avec elle ? Du genre : "Accorde-moi ceci en échange d'un sursis de quelques mois auprès de ta Renarde galeuse" ?

    À nouveau, elle secoue la tête de droite à gauche en tirant un sourire amusé.


Quelle vile créature tu fais-là. Va. J'accepte de te présenter à ma chère sœur. Mais je veux que tu me donnes de quoi me soulager, maintenant. Oh et puis ton nom, que je sache qui annoncer lorsque je rejoindrai la Matriarche.

    Si la ruse n'a pas épargné la Corleone, il est certain que l'Azur en est dotée également, après tout, le surnom cliché des roux qu'on lui a attribué ne vient pas du néant. Elle contourne la table pour pouvoir récupérer son mantel et le remettre sur ses épaules en attendant. À présent que l'auscultation est terminée, le froid la gagne.


Si je survis jusqu'au terme des quelques semaines de répit que tu accordes à ma bourse, quelle générosité, en passant. Alors tu me diras ton prochain prix.
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Vivia
 "Accorde-moi ceci en échange d'un sursis de quelques mois auprès de ta Renarde galeuse"

Diable, ainsi donc les roux étaient à même de servir le Malin et de l'être en même temps. Futée la rousse, elle avait tout compris. Ainsi donc, si sa gorge était en vrac, le cerveau lui était encore bien fonctionnel, malheureusement pour elle d'ailleurs. Assister à sa propre décadence et en être consciente était de loin le pire des symptômes.

Tu as tout compris.

Après tout, il était inutile de la lui faire à l'envers, entre raclures de la Cour, il fallait être honnête. Ainsi donc, alors que la Renarde prépare déjà ses effets, comme si l'annonce l'avait invitée à prendre congé plus rapidement pour, profiter des mois restants, la Sicilienne elle s'active pour lui préparer ce remède. En soit, des teintures et décoctions d’écorces de lapacho. Un arbre de ces contrées lointaines d'Amérique du Sud, très coûteux voir hors de prix de par l'importation et dont l'utilité contre l'araignée était tantôt efficace, tantôt controversé. Quoiqu'il en soit, ses vertus pour renforcer l'organisme et assurer ses humeurs n'étaient plus à démonter. Une fois les fioles prêtes, elle s'empare d'un petit sac de toile afin de les rangées dans ce dernier.

On ne m'appelle pas le Barbier Fou pour mes bons sentiments, Owenra. Tu dois t'en douter. Quant à mon passé, je préfère ne pas l'évoquer avec une patiente. Froide ? Elle l'est, c'est un fait voir une évidence. Doucement, elle se rapproche de la Renarde et lui tend le sac de toile, offert.

Il faut que tu boives une tasse, trois fois par jour de la décoction. Il y a de quoi dynamiser tes humeurs et renforcer ton corps. Plus résistant, il saura mieux se défendre contre cette araignée de merde. Tu as également la teinture, plus concentrée, celle-ci. Présente alors la fiole sur laquelle est inscrite "teinture". Bois cela quand ta gorge te lance, qu'elle te démange au point au de vouloir t'arracher à main nue la trachée..Cela va apaiser le Mal. Puis, perverse, elle lui tend de la résine d'opiacé, en bonne quantité, qu'elle ne réserve qu'aux clients les plus fortunés de l'Opium. Je suis sûre que tu sauras en faire, bon usage. J'en vends à l'Opium mais, il est rare et onéreux. Ceci dit, je préfère que tu profites à fond des mois qui te restent. C'est offert...simplement, sans contrepartie. Geste de bonté ou simple perdition entre camées ? Qui sait. Elle ne souhaite nullement s'étaler sur les raisons qui motivent ce don, mais il n'en reste pas moins que plonger d'autres âmes dans les abysses la distrait. Elle se sentira moins seule dans ces bas-fonds et Owenra, aura en plus l'avantage de préparer le terrain..

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Owenra
    "Patiente", ce qu'elle est et ce qu'elle fait. Attendre. Attendre que la blonde finisse de préparer les nouveaux meilleurs amis de la Renarde. Attendre que l'araignée la ronge de l'intérieur. Attendre la Mort. Elle note cependant dans un coin de son esprit l'intitulé qu'elle devra utiliser "Barbier Fou". Au moins la fillote du Barbier qui a repris le nom du parternel a-t-elle l'avantage d'être honnête quand ses plans sont révélés. Et l'Owen' soupire intérieurement, priant pour qu'on ne pousse pas sa sœur à accepter un quelconque plan foireux en échange de quelques mois de survie. Blonde bicolore revient avec plus de douceur qu'elle n'avait été capable de montrer jusqu'alors et tend un sac vers la Rouquine qui écoute les recommandations, hochant mécaniquement la tête à chaque indication. Trois tasses par jours d'herbes à boire, ça va être dégueu. La fiole à boire en cas de douleur : probablement dégueu aussi. Mais le dernier "cadeau" l'interpelle. Alors elle reporte son regard dans celui de Vivia, sourcils roux légèrement froncés. Inspire-t-elle autant pitié ? Adieu fierté. Elle en ricane en se déridant légèrement.
    Le sac tendu est attrapé puis la tête de nouveau inclinée pour introduire quelques mots :


Mon orgueil en prend un coup. Mais l'opium l'apaisera. Alors merci. Nous nous reverrons bientôt.

    Simple, concis. Après tout, c'est ce qu'Owen' sait faire de mieux. Un dernier soupir puis elle prend congé, se retournant vers la sortie si bien repérée en entrant. Connaissant le chemin, elle passe devant l'autre patiente, ouvre la porte et rejoint Midia et Magdelon à l'extérieur. Là, elle les regarde avec un sourire en coin et leur annonce de but-en-blanc :


Grâce à des herbes ultra-coûteuse, mon espérance de vie passe de quelques semaines à quelques mois. Voilà, satisfaites ?

    Et sans attendre de réponse ni de l'une, ni de l'autre. Renarde se sauve. Elle ira à l'Opium ce jour-là. Elle ira s'enfumer et rencontrer la dame-au-crapaud. Elle n'aura qu'une envie : celle de se perdre et de ne jamais émerger. Pourtant, elle n'y parviendra pas. Pauvre elle.

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Vivia
L'Orgueil s'apprivoise...

Ce sont les mots qu'elle abandonne, comme une conclusion à cette rencontre qui finalement, s'étalera au delà des quartiers Azzuro. L'intérêt est ainsi, il s'adapte également aux clients, aux demandes mais également à cette nouvelle vague qui étreint le palpitant de leur mère à tous, de cette Cour qui enfin s'anime, se réunit et s'organise.

La rousse partie, le Barbier Fou range de nouveau le cabinet puis se lave les mains avant de retrouver le comptoir et la salle d'attente. Posée devant la fenêtre, une brune, qu'elle zieute sans aucune discrétion et invite d'un hochement de tête à s'avancer.

En soin avec Eldearde


A Vous. Alors dites-moi tout...Nom, prénom..Age..Antécédents..Raison de votre venue..Nous allons étudier cela ensemble...

Doucement, la Sicilienne s'avance vers un registre qu'elle sort du placard d'une armoire et qu'elle commence à remplir par habitude. Tout y était noté sur ses clients, lui permettant ainsi d'avoir un suivit sérieux, régulier mais également de faire le point sur les soins ordonnés et l'efficacité de ces derniers. Ha oui et puis, cela reste une mine d'information importante, surtout pour une Maîtresse des Rats...

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Vivia




L'ordre est lancé, la bourse tendue et le corps de la Grise est déposé dans sa salle de réunion. Place est faite et silence est espéré. Les Rats sont invités à faire place, le cabinet vérouillé et la bouteille débouchée. Seule face au corps embaumé de la Décharnée, Vivia laisse enfin tomber le masque au rythme de ces gorgées. La tignasse est libérée, les mèches volontairement désorganisées. Les bottes sont ôtées et c'est, pieds nus qu'elle défait légèrement les liens de sa robe pour augmenter l'amplitude des étoffes. Liberté. Silence. Confidences.

Lentement, elle se rapproche du corps de son Amie et abandonne une caresse sur la tignasse rousse qui, jour après jour, n'a de cesse de perdre son éclat. La Mort n'a jamais été aussi à son aise qu'à son cabinet. Dans sa cave, le corps de son père gît, agonisant et impuissant sur la couche dont il est prisonnier depuis bientôt un mois tandis qu'ici lieu, dans les hauteurs, c'est une putain qui repose, embaumée, digne et parfumée sur cette table. Le contraste n'est que le pale écho de cette folie, de cette considération et de cette haine que le Barbier est à même d'éprouver et qui sans limite, sans raison, se façonne et se mue en divers finalité, en deux opposés.

Tu auras su me faire chier jusqu'au bout Owenra. Avais-tu conscience des risques que je prenais en revenant quérir ton corps. Du courage qu'il m'a fallu pour préparer ton corps tout en sachant que peut être, ces maréchaux me refoutrait en geôle ? Je ne suis ni embaumeur, ni suicidaire, ni transporteur de corps et encore moins...apte à veiller sur lui. Lasse, usée, les mots sont lâchés alors qu'elle tire une chaise et s'installe à ses côtés, caressant mécaniquement la tignasse rousse alors que le culot de sa bouteille et de nouveau invité à ses lippes.

Te souviens-tu de nos échanges..De cette pique que tu m'as lancé, lorsque tu m'as demandé...Qui veillerait sur moi lorsque je serai mal en point... Un rictus s'échappe, froid alors qu'elle n'ose interrompre son introspection, ce dialogue en tout point morbide. Je crois que la réponse est personne. De ma vie, je n'ai eu de cesse de veiller sur les autres, de ramener certains des limbes, de répondre à leurs caprices, d'en faire plus que nécessaire juste parce qu’au fond...Je suis loin d'être aussi froide qu'il y paraît. Tu l'as deviné et pour cause, tu étais ainsi...Nos rires, nos moqueries, nos piques...Notre carapace. Ce que j'ai fais pour toi, je ne l'aurai fait que pour de rares personnes dont cette autre rousse qui m'a contraint à toute les haïr de peur de m'y brûler à nouveau. Nouvelle gorgée. Le corps s'enlise dans le fauteuil alors qu'elle se contente d'animer ses traits fades et usés par un sourire sadique en coin. Triste autodérision.

Je ne sais si tu as pu avoir ma missive mais, promets-moi simplement de veiller sur Alyss. D'ailleurs, je te remercie de ne rien avoir...balancé aux autres..Je n'aurai pas supporté d'être blâmée pour tes maux pour un dessein que j'essaye de fuir depuis que je suis gosse... La main abandonne la bouteille qu'elle repose à côté des effets de la Grise et c'est mécanique, inconscient qu'elle s'appose sur son ventre, renouant avec cette vie qui n'est plus. Mon père est à la cave, pourrissant depuis plusieurs semaines...Je cache l'odeur par quelques artifices. J'ai acheté le silence d'un Rat de confiance pour taire cette folie qui est mienne, cette vengeance que tu m'as permis d'accomplir. Tu as été témoin de ce Mal qui m'a rongé des années durant...Témoin de cette facette que tous ignorent et dont, finalement..tous se fichent. Les Rats sont vraiment tous ingrats...Tu soignes..Tu aides...Pour quoi finalement..Pour n'être qu'un écho..

Le corps se relève, s'étire, reprenant la bouteille pour en boire plusieurs gorgées coup sur coup. Dit-le si je te saoule..Hinhin. Regard moqueur est adressé aux lippes éternellement closes, dont finalement, elle ne peut plus se gorger de cet éclat et cette amertume qui l'apaisait..Je vais me faire chier lorsque tu auras quitté mon cabinet...Mais qui sait, je viendrai peut être te voir après tout. Ma fille me manque...Et mis à part n'être que celle qui soigne, veille, materne...Je suis lasse de tout cela. Et pourtant...Je suis incapable de laisser tomber cette Cour, de vous laisser tomber...Mère et Fêlée..A croire que ce besoin de materner et de protéger les siens est une tare de Corleone...Jeni a le même trouble...

- Jeni au moins fut mère au moins une fois contrairement à certaine...
- ...Merci de cette délicatesse Barbier.
- Dis-moi les psychanalyses, c'pas devant un spécialiste ? Non car j'suis pas sûr que le cadavre d'Owenra soit en mesure d'acquiescer ou d'infirmer tes conneries.
Et puis, ces Rats là...Tu comptes les aider jusqu'à quand finalement ? Judicael t'a t-il remercié ? Tarentio ne t'a t'il pas sauté au cou lorsque tu es revenu prendre de ses nouvelles ? Ton frère ne t'a t-t-il pas laissé lorsque tu en avais le plus besoin ? Ho et que dire de Montparnasse...du Barbu...Bon, à la limite Ansoald paye en nature c'pas plus mal mais bon...Tu attends quoi d'eux ? N'es-tu pas lasse d'attendre une estime, une reconnaissance, cette part d'estime ?

- Je n'attends rien..
- En apparence...Ta lassitude parle pour toi...Tu es déçue. Toujours Naïve hein...
- Alors disons plutôt qu'il faut que j'apprenne à ne rien attendre de ceux que j'aide.
- Tu t'en sortiras mieux ainsi...C'est usant d'attendre des autres quelque chose qui ne viendra pas...Tu le sais, tu n'as jamais été mieux servie que par toi même.

Le Masque est replacé. Vestige insipide de cette morne vie, de cet héritage qui tout aussi intéressé que d'autres se place, s'accroche sur les traits Siciliens. Réponse froide à cette déception évidente, à cette attente jamais contentée, à cette introspection plutôt décevante mais néanmoins, évidente...Veille juste...sur Alyss. C'est la seule chose que je te demanderai et que j'exige Owen'. A chacun..son intérêt...

Désormais..Il ne reste plus qu'à attendre...Que ta famille s'amène..Que je retrouve finalement...Mes habitudes et mon intérêt.
Message est alors rédigé à l'attention de celui, à même de récupérer et de joindre Kelel pour s'assurer qu'elle n'aurait pas à être le dindon de la farce.

Citation:
Judicael,

[....]

Au vu ta répartie, il semble que tu ais les moyens de te surpasser. Auquel cas, préviens Kelel et bouge-toi, car je vous laisse 2 jours ouvrés pour récupérer le corps encore digne d'Owenra à mon cabinet. Au delà de ce délai, le corps de cette dernière retrouvera la fosse.

Le Barbier Fou.


🇩​🇪​🇺​🇽​ 🇯​🇴​🇺​🇷​🇸​....🇵​🇦​🇸​ 🇺​🇳​ 🇩​🇪​ 🇵​🇱​🇺​🇸​..

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Judicael.
Citation:
À Vivia

Tu as sauvé qui, héros que tu es? Owenra est morte et tu ne tiens que son cadavre entre les mains.... Tu devais la protéger. N'espère aucune gratitude. Son corps au charnier ? Est ce que tu as pris quelques drogues pour cracher ainsi sur la mémoire de la rousse? De kelel ?

Je ne sais pas ce qui s'est passé la bas, mais amuse toi bien avec tes acolytes à Troyes ou que sais je. Le corps sera récupéré sous deux jours et nous n'aurons plus rien à nous dire après. Tu seras mon ennemie et celle de tous les miens. Tu veux jeter ma sœur au charnier... Tu veux la Jeter au charnier...

Je ne l'oublierai pas.



Les mots avaient été durs. D'un coté comme de l'autre. Blessé dans sa chair, Judicael n'avait pas supporté les mots d'une Vivia blessée dans son orgueil. Comprendrait-elle que dans la douleur, il n'est pas l'heure de ménager l'égo? Si Judicael n'arrivait pas à se ménager lui-même, à digérer la perte si chère, il n'était certainement pas capable de ménager les autres. Les congrats et les hourras viendraient en leurs temps, ils étaient pour l'heur absolument mal venus.

Renard n'avait pas su. Pas vu. Pas vécu les mêmes choses que ceux restés en Champagne. Judicael avait laissé une Owen au seuil de sa tente, s'habiller pour la nuit, et le regret de ne pas l'avoir franchi cette nuit là le suivrait toute sa vie. Il aurait payé cher pour remonter le temps et profiter de ce dernier instant près d'une Owenra qui s'apprêtait à quitter les siens pour se donner à l'ennemi. Renard avait été violemment arraché à des adieux. De sa libération grâce à Vivia? Il n'en avait rien su. Relégué comme une ordure à la campagne où les villageois avaient achevé de le battre et de le molester, il s'était trainé longtemps avant de trouver une main secourable... De retrouver l'Anjou. Sa femme. Kelel, et la lettre dans son bliaud. La guérison d'un corps mutilé, des brûlures multiples avaient apporté un apaisement factice; dont l'achèvement se trouvait derrière cette porte.

Il est tôt. Des ombres se sont approchées du cabinet du barbier des Miracles. Face à l'ultimatum mal digéré, le silence a fait place à l'aigreur, et le chemin a été long et bordé de silences trop bavards. Midia, Kelel, Hel, Judicael. Ils avaient pris la route aux premières lettres pour venir chercher la leur. Enfermée dans le cabinet de Vivia Corleone.

Qu'allaient-ils trouver? Quelles allaient être leur réaction? Deux coups furent frappés à l'huis tandis que la bruine commençait à tomber sur Paris. Tensions palpables, regards échangés, tous ont quelque chose au ventre qu'ils gardent pour eux.

Le visage est fermé depuis longtemps. Judicael n'a pas sourit depuis des semaines. Et les coups reçus, les sévices n'ont pas été les plus difficiles. L'annonce de la perte d'Owenra... Un crève coeur. Le déni connait ses limites le jour où la vérité vient le faucher de plein fouet. Face à l'évidence, la vérité prend tout son sens. Les yeux réclament leur sentence, bien qu'au fond, Renard a compris.

La main force la porte, elle demeure fermée. Le roux se tourne vers Kelelorna. Midia l'avait mis en garde contre les réactions imprévisibles d'une amante, d'une soeur qui ne supporterait plus ni l'attente ni la perte. Côte à côte, les Miraculés échangèrent un dernier silence.

Deux jours. Humainement impossible. Retard était largement entériné, au vu de la distance qui séparait l'Anjou des Miracles.

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Recueil
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Vivia
Imposer une date butoir. Imposer qu'ils se plient à cet ordre afin que le corps d'Owenra soit récupéré avant que les soins prodigués soient vains. Ainsi, lorsque le courrier de Judicael fût reçu, l'esprit du Barbier eut quelques difficultés à s'assouplir. Lasse, usée, blessée dans cet orgueil, elle entend alors l'écho de double qui partage ces tempes et qui, narquois et insipide, se plaît à lui rappeler que ces actes ne se heurtaient qu'à des maux plus ingrats que l'indifférence elle-même. Ainsi donc, la réponse est rédigée et envoyée sans délai au cortège.

Citation:
Judicael, 

Je peux entendre que le deuil et la nouvelle te soit insupportable. Mais vois-tu, ce n'est pas à moi d'encaisser ces sautes d'humeurs et cette haine que tu sembles vouer à la vie. 

Si tu as la mémoire courte, soit. Je te rappelle alors que si tu es là, c'est parceque par 2 fois, j'ai sauvé ta carcasse. Ais-je eu, un merci ? Une once de reconnaissance ? de Considération. Rien. 

Quant à Owenra, sache que le "héro" ne peut faire des miracles. Elle était condamnée et à défaut de quelques semaines d'existence, elle a pu profiter de toi et de Kelel quelques mois durant. Le savais-tu ? Peut être pas. 
Elle a préréré mourir dignement plutôt que de se voir entretenir par moi dans ces derniers jours de déchéance. Elle a eu sa mort digne. Soit en sûr. 
Owenra m'a demandé d'aller chercher son corps et de le remettre à Kelel. Et vois-tu de tous..C'est celle qui a eu à mon égard, le plus de respect. Je suis allée chercher son corps au campement des soldats de champagne malgré ma crainte d'être foutue en géôle pour y être torturée et violentée comme ce fût le cas pendant plus de 8 mois. Son corps s'est vu offert, une fin, décente digne d'une Reyne pour que vous puissiez garder d'elle, une image digne et que ses traits apaisés restent ainsi et que vous puissiez entendre que son choix, fut le bon pour Elle. 

 A sa demande, je suis donc allé jusqu'au domaine où Kelel fut absente. Je devais rendre son corps à Kelel en personne. Résultat, le corps est en attente chez moi et Kelel a été informée par les siens. 

Néanmoins, ce fut notre échange, cet intérêt et cette image putride que tu as de moi qui m'a convaincu de revoir mes actes, d'entendre que ces derniers étaient peut être ceux d'une donzelle que l'on farcie. 
Si tu penses que j'aurai réellement pu foutre son corps à la fosse, c'est que tu n'as jamais réellement pris le temps d'entendre qui j'étais réellement et d'entendre ce que j'ai pu faire pour toi ou Owenra.
Vois-tu, je n'ai jamais attendue grand chose de la vie ou des Miraculés, sinon..un peu de respect. 

Tu souhaites me haïr, me voir en ennemie. Soit, c'est ton choix et tu es libre - désormais-. 
Mais j'ose espérer que tu sauras te faire moins orgueilleux pour entendre ce qui a été fait et qui est à ce jour, baffoué. 

Vivia.  


A ce courrier, la réponse apportée fut plus raisonnée, plus posée et le respect espéré fut inscrit à travers le vélin. Si Judicael était plus jeune, plus fougueux, il n'en restait pas moins que malgré cet orgueil et cet attachement très fort aux siens, il était à même de se remettre en question et de reconnaître ses torts. Une qualité que peu de Miraculés détiennent et qui font de ce confrère, de cet associé, l'esquisse d'un Ami en devenir.

Avisée de l'arrivée du convoi par un Miraculé, la Mère des Rats prit soin de vérifier que la présentation du corps d'Owenra serait à l'image des moyens que Torchesac et elle, mirent en œuvre pour lui apporter cette dignité retrouvée. Ainsi, elle se rapproche une dernière fois du corps et effleure la joue froide et encore rosée de la Grise grâce à ce rafraîchissement à base de vin et de teintures. Puis, ce n'est qu'une fois, la robe et les étoffes qui la recouvre jusqu'au buste lissés qu'elle descend pour ouvrir à ces Autres.

La porte est alors ouverte et un regard entendu est adressé à chacun d'eux, sans s'attarder d'avantage sur l'un au profit d'un autre. Impassible, elle le reste car après tout, le décès était chose courante pour le Barbier et qu'elle se devait d'être ou du moins, de retrouver cette carapace impassible.

Elle est au troisième au étage...

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Kelel
Paris. La Miraculée, enfin, et ce malgré le désir de faire demi-tour; renier la réalité jusqu'à ce que le coeur s'arrête pour ne plus avoir à accepter. Le trajet fut long, bien trop long pour ne pas engendrer chez la Pâle un quelconque sentiment de profonde torpeur. Un silence se mêlant à un corps inerte. Triste tableau que celui s'étant peint aux yeux de qui les avait croisés sur les routes. Ce jour, à cette heure, la lutte se faisant en interne pourrait bien être la dernière. Une bataille faisait rage dans le crâne de la Blanche. Que faire, désormais ? Quand l'âme soeur n'était plus et que le palpitant s'affolait, cherchant à s'extirper de la cage thoracique en forçant le passage. Qu'allaient-ils découvrir ? Etait-ce définitivement une mauvaise blague ? En un sens, elle l'espérait. Malheureusement, la boutade semblait bien ne pas en être une. Pire encore, quand l'Unique découvrit le faciès de celle venant les accueillir. Vivia. Oiseau de mauvais augure. La première fois que leurs routes s'étaient croisées, c'était pour découvrir une blonde marchandant quelques semaines de vie de la Flamboyante contre une venue de l'Azur à une réunion des plus chiantes. La seconde fois, c'était en Champagne, entre deux batailles. Puis, aujourd'hui, pour la possible mort d'Owenra. En définitive, celle se faisant surnommer Barbier Fou n'en avait que le nom, masquant vraisemblablement une réalité nettement moins glorieuse. Peut-être Azur devrait-elle approfondir, d'une manière ou d'une autre, ses connaissances sur cette femme.

Troisième étage avait-elle déclaré en découvrant les mines assombries de Goupil et Vipère. Triste binôme venu quérir des réponses et, dans le cas d'une funèbre vérité, récupérer le corps de celle qui fut, à n'en pas douter, plus qu'une compagne pour eux deux. Un hochement de tête à l'égard de la jeune femme annonça le début de l'ascension. Ascension, oui, tant la difficulté pour gravir les marches était grande. Et à chaque nouveau pas, le poids affligeant la Pâle prenait de plus en plus d'ampleur. Ce couperet infâme trônant fièrement au-dessus de la miséreuse n'avait jamais été aussi proche de tomber. Finalement, après un effort considérable, la troisième portion de l'escalier fut franchie. L'escalade terminée, l'heure de la chute ne tarderait plus à venir. Et quelle chute. Au fond de son Être, l'Azzurée ne parvenait à prévoir sa réaction quand son oeil se retrouverait face à la Conclusion d'une vie. La fin d'un ouvrage au nombre de pages trop infime pour lui convenir, sans qu'aucune ligne ne puisse, à son grand dam, être ajoutée. L'hésitation était-elle que, un court instant, Kelel songea à se débarrasser de cette charge dont elle ne souhaitait pas; partir au plus loin, tous les quitter, pour ne jamais avoir à prendre conscience de la gravité de la situation. Cette dernière était plus grande qu'on ne le croyait. Qui, désormais, se chargerait de veiller sur l'état mental de la Borgne ? Midia n'en aurait pas la force; Larah n'était que fougue propre à sa jeunesse. La Matriarche se voyait-elle ainsi mise dans la plus délicate des positions possibles ? Probablement.

Par l'interstice d'une porte entrebâillée émanait une atmosphère lourde, pareille à un brouillard épais au point de pouvoir être coupée au couteau. L'odeur de la mort planait pour qui connaissait son parfum. Fourbe fragrance que celle-ci. Du genre à vous prendre par la gorge et à imprégner vos tissus, pour mieux vous traîner dans les limbes sans que rien ne puisse vous sauver. Une chute inévitable pour qui ne savait braver l'absence. " Ne fais plus un pas. Ne m'y oblige pas. Je ne te désire pas. " La Pâle, figée devant le bois patientait, mutique, observant de son oeil unique ce qu'il était possible d'entrevoir. Puis, enfin, la main restait jusque-là en suspens s'anima et enfonça la poignée, troquant la maigre ouverture contre un plein accès. La vérité pourrissant là ne prit pas plus d'une seconde à atteindre le cerveau miraculée. Et quand le déni laissa place à l'acceptation, ce fut le corps tout entier de la Blanche qui sembla s'écrouler. Plus aucun mouvement ne fut fait, sinon ceux d'une respiration saccadée que l'on chercherait à masquer du public. La poigne ne décrochait pas du fer -bien que tristement résignée au fait qu'il ne s'agisse pas d'un genre aiguisé pour en finir d'une plus digne manière.

Enfin, quand le courage fut suffisamment grand pour que la main daignât lâcher sa faible prise, ce fut au tour de la Borgne tout entière de s'animer. Se mouvoir dans un spectacle qu'on ne souhaitait voir mis en place n'avait rien d'alléchant. C'était à gerber de devoir se produire dans un théâtre aussi grotesque que glauque où on ne voudrait jamais avoir été convié. Ce jour était jour de première et dernière à la fois. Une seule représentation pour tous. Il n'y en aurait pas pour tout le monde. C'était à voir ou à fuir, mais on ne pouvait rester ignorant de la situation. Au-devant de la silhouette Azurée en gisait une autre. Inerte. Froide. Dénaturée. Le faciès de la Reyne Folle resta de marbre, comme figé dans le temps. Un arrêt sur image à faire pâlir un mort. La Blanche surface restait imperturbable malgré la proximité nouvelle des deux blafardes. Un " Impossible ... " fut lâché tandis qu'une main courait déjà sur le corps décharné. Les distales semblaient chercher de la chaleur où il n'y en avait plus depuis longtemps. Depuis la taille jusqu'aux épaules, pour finir -non plus depuis la paume, mais sur le dos- sur l'une des joues émaciées.


Ô toi ... Et l'oeil Azur se perdit sur le corps décharné de celle qui fut, jusqu'à il y a peu encore, sa bien-aimée. Ma Douce Amie, comment as-tu pu ainsi en terminer ? Sous le coup, je l'espère, fatal d'un champenois. Il ne te méritait pas. Aucun être sur cette Terre n'aurait pu mériter de te retirer la vie. Te tirer un dernier râle n'était bon que pour le Malin en personne. Rien de moins. Moi-même, je n'ai été digne de toi, et si j'avais su l'avenir s'ouvrant à toi, sans doute aurais-je agis différemment. Plus présente; l'esprit moins absent. Et ton corps, alangui, contre le mien quand tombait la nuit aurait eu pour signification bien plus qu'un simple accomplissement de mon désir incestueux de te posséder. Oh, Owenra, ma chère ... Comment aurais-je pu deviner, le jour où je t'ai croisée pour la première fois, que nous en serions là, aujourd'hui ? Toi, l'Impassible Renarde sur son perchoir, bouffarde au bec, prenant plaisir à épier les convives d'une miteuse taverne perdue dans le fin fond de l'Artois. Ah ! Comme tes grands airs ont pu me faire chavirer. Toi, que tous voulaient sans jamais rien obtenir de plus que du dédain avant ta répartie cinglante. Tu m'en auras fait voir de toutes les couleurs durant ces dernières années. Mais comme ses souvenirs sont doux. Je les chérirai et les garderai en sûreté, loin de ces lambeaux qui font mon quotidien. Te souviens-tu, ma Tendre, de ces éclats de rire qui faisaient nos jours et nos nuits ? Quand nous étions tous là, autour des feux de camp, à nous chicaner comme des chiens mal-léchés à la moindre opportunité. Tu as toujours été, même si je ne te l'ai jamais dit, celle qui nous liait. Toujours là, à veiller dans l'ombre au bon déroulement des choses. Tu étais et resteras la seule véritable Reyne de cette Cour. Tous, du moins les moins cons du lot, te respectaient. Renarde, ma douce Renarde, sais-tu seulement ce dans quoi tu as pu nous abandonner ? Que veux-tu que je fasse, sans toi à mes côtés ? Plus personne pour me guider, ou me tenir. Que vais-je devenir, sinon celle que l'on pense ? Bête folle. Ecervelée. Butée. Arrogante. Traîtresse. Hérétique. Folle à lier. Putain vérolée. Owenra, qu'as-tu donc fait ? Nos chatons ne pourront survivre sans toi à leurs côtés. J'irais jusqu'à les tuer pour les sauver, et ça, tu le savais. Néanmoins ... J'ose espérer, ma Douce, que la paix soit venue à toi. Puisses-tu avoir trouvé la quiétude à laquelle tu aspirais ces derniers mois. Les tumultes ne t'ont pas réussi. Je n'aurais jamais dû te traîner jusqu'à ce champ de bataille. Peut-être était-ce le combat de trop. Peut-être aurions-nous dû nous retirer dans une bourgade tranquille et reprendre une vie plus simple. Loin de toute cette merde et de ces couards, tu aurais pu voir l'aurore sous un autre jour. Encore et encore. Ta disparition prématurée ne saurait être ignorée et ... Ô Toi mon Aimée, je ne te laisserai pourrir sans rien tenter. Les vers ne dévoreront pas ta chair, j'en fais le serment. L'amertume dans un sourire se fit alors sentir. La main caressait désormais la chevelure terne de la Rousse; Renarde avait toujours eu le poil brillant, avant de mourir. C'était déchirant de la voir ainsi, malgré l'effort fait par la Barbier pour entretenir l'éclat de la défunte.



" Des images me reviennent
Comme le souvenir tendre
Une ancienne ritournelle
Autrefois en décembre

Je me souviens, il me semble
Des jeux qu'on inventait ensemble
Je retrouve dans un sourire
La flamme de mes souvenirs

Doucement, un écho
Comme une braise sous la cendre
Un murmure à mi-mots
Que mon coeur veut comprendre

Je me souviens, il me semble
Des jeux qu'on inventait ensemble
Je retrouve dans un sourire
La flamme de mes souvenirs

Et, au loin, un écho
Comme une braise sous la cendre
Un murmure à mi-mots
Que mon coeur veut comprendre

Une ancienne ritournelle
Loin du froid de décembre "


Loin du Froid de Décembre - Anastasia
| Russian Version
🖤




Barbier, ce geste est salvateur. " Pour toi, Vivia, pas pour la blonde. " Tu en as pris soin. " Si on laisse de côté l'coup d'vouloir larguer l'cadavre sous un coup de sang. " Je vais avoir besoin de quoi la transporter. " Pour sûr qu'elle pèse son poids, maint'nant qu'elle a les dents sèches ta greluche ! 'pis pas qu'les dents. Hé. T'l'imagines, l'aut' moitié de blonde, là, 'vec les mains se baladant sur les courbes d'ta Vulpes ? T'devrais quand même méditer l'tout. 'L'charnier tout d'même ! " Le plus rapidement serait le mieux. " J'comprends, j'comprends. Tu veux pas causer ni m'écouter la Blonde. N'empêche, quand on y r'pense, c'la troisième qui crève par ta faute. Y a eu l'espèce de chieuse Meri là, pis là Rousse que t'as pas sauvé des griffes de ta cinglée d'Alice. " Ca ne l'est pas. " Sûr. Elle a quitté Péronne sans raison. Elle s'est retrouvée en Champagne sans raison. Mieux ! Elle a eu toutes ces emmerdes l'ayant affaiblie sans raison. " Sans ... rrraison. Ouais. Et l'Unique passa du corps de feue Malingre à Maistre Goupil. Le cimetière ne lui conviendra pas. La vermine ne l'aura pas. Je souhaite un brasier. " Un, deux, trois ... " Dodelinement par-ci, dodelinement par-là. Je vais avoir besoin de toi. Pour Elle. Elle mérite le mieux, et non pas de voir ses boyaux enfler sous la pourriture. " Quatre, cinq, six ... " Bloquée. La caboche penchée sur un côté resta en l'état. Puis-je ... compter sur toi ? " Sept, huit, neuf ... " Un morne sourire fut offert avant que l'émeraude n'aille se faufiler jusque sur l'hôtesse de maison. Toi, tu en as déjà assez fait pour elle. Le minois de la Pâle retourna à celui de sa bien-aimée. Un baiser. Un dernier baiser fut déposé sur ses lèvres. Que le Malin veille sur toi, succube de mes nuits. Bientôt ... " Nous connaissons toutes les deux la vérité. N'est-ce pas ? " Un premier pas en arrière, puis un second et encore un autre, jusqu'à creuser l'écart entre elle-même et son Autre. Un feu, pour le plus ardent des Lycoris.
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Larah_
    La nouvelle avait été apprise par Yaha. Les talons s'étaient tournés sans un mot. Le corps et l'esprit se sont isolés pour laisser la peine et la colère s'exprimer. La nouvelle n'était pas une surprise, mais la confirmation lui avait fait l'effet d'un coup de poing dans le ventre. Le souffle a été coupé et la douleur s'est insinuée dans le corps, laissant des blessures vives et invisibles. Larah avait l'espoir que sa tante revienne sur sa décision pour mourir avec plus de douceur, mais elle avait décidé de mourir en beauté. La jeune fille comprenait le choix de sa tante. Celui de choisir sa propre mort avec dignité. La Mort lui avait sourit, alors elle avait sourit à la Mort, en allant s'offrir à Elle au moment qui lui semblait le plus opportun. Larah espérait qu'elle était partie sans haine de la part de ceux qui lui ont ôtés la vie et que sa mort était rapide, sans souffrance inutile. Elles n'avaient jamais été proches et pourtant, la jeune fille savait qu'elle perdait quelqu'un d'important dans sa vie, car vers les derniers temps, Owenra offrait une douce stabilité, même si elle n'avait pas toujours été comme ça. La jeune fille avait une admiration secrète envers sa tante qui était, à ses yeux, une femme forte qui ne se laissait pas marcher dessus par les hommes et qui arrivait à s'adapter dans un milieu qui était parsemé de danger jusqu'à s'imposer comme une figure importante des Miracles.

    Elle aurait tellement voulu lui dire au revoir en face, mais est-ce qu'elle l'aurait laissé partir en sachant que sa destination serait fatale ? C'était une question auquel il était difficile de répondre. De toute façon, il était trop tard. Elle ne pourrait jamais remonter dans le passé pour y répondre. Le doux souvenir de celle qui fût sa tante émergea dans son esprit. Avant son mal envahissant, sa tante était très belle. Petit à petit, son corps s'est amaigri, son teint est devenu blafard, ces cernes sont venues marquées son faciès et ses joues se sont creusées. Toutes les caractéristiques d'une maladie qui ronge de l'intérieur étaient là et pourtant, la jeune fille avait préféré le confort du déni plutôt que de voir la réalité en face. Sa tante était juste fatiguée et elle la regardait comme de si rien n'était. Comme si elle allait vivre éternellement. O regrets... Pourquoi s'était-elle enfermée dans un mensonge qui rassurait plutôt de voir la vérité dérangeante en face ? Pourquoi n'avait-elle pas cherché à se rapprocher un peu plus d'elle ? Mille question se bousculent dans sa tête et aucune n'a de réponse. Certains diraient que c'est la vie et que ce qui est fait est fait mais même si c'est vrai, c'est une belle connerie. Parce que la mort d'un proche rappelle que combien le sort du commun des mortels est misérable, allant jusqu'à souhaiter qu'ils reposent en paix, mais d'un autre côté espérer que leur ombre demeure et guide chacun de leur pas vers l'avenir.

    Le corps d'Owenra était chez le Barbier et Kelel avait été invité à récupérer le corps. L'Hésitation avait duré un certain temps. Rejoindre le cabinet du Barbier pour aider à la récupération du corps ou bien, rester assommée par la douleur en s'isolant un peu plus. Cruel choix. Et elle a opté pour le premier. Elle ne s'est pas pressée, car au fur et à mesure qu'elle s'approchait du cabinet du Barbier, une forte angoisse montait. Elle voulait faire demi-tour mais elle se le refusait. Ce serait lâche. Il était temps d'affronter la réalité en face, même si son esprit dans un possible désir de la protéger, refuser encore de réaliser la mort d'Owenra.

    Les pas de Larah s'arrêtèrent devant le cabinet, se mettant en retrait. La boule qui s'était logée dans son estomac la figeait sur sa place et elle était incapable de faire un pas de plus. Était-ce la peur ? Sûrement. Regarder le cadavre d'un étranger ne lui aurait pas poser de problème mais là, c'était différent. Elle ne savait pas comment elle allait réagir et comment il fallait réagir. Elle savait qu'elle devait trouver le courage de s'avancer et frapper à la porte, mais elle rassemblait ses esprits. Des silhouettes s'avancèrent devant le Cabinet du Barbier et elle les reconnut. Lentement, elle s'avança pour les suivre et emboîter le pas. Elle ne salua personne et ne dit rien, car ils devaient être autant tristes qu'elle. Elle accompagnait le silence déjà pesant. Les marches étaient un supplice, mais elle les montait en rivant le regard vers elles. La gorge se nouait et les larmes menaçaient de pointer de nouveau leur nez, mais Larah refusait de montrer ses émotions en public. C'était un principe qu'elle suivait à la lettre. Elle serra sa mâchoire au moment d'arriver vers la porte. L'odeur était particulière et reconnaissable. L'odeur de la mort. Une odeur qui imprègne les lieux comme témoignage de sa présence, rappelant au commun des mortels qu'elle est à leur trousse. Et devant la Faucheuse, nul roi, nul misérable, mais uniquement des mortels égaux et impuissants devant les bras funèbres qui s'offrent à eux.

    Kelel ouvre la porte après avoir semblé s'écrouler mais la jeune fille ne s'approche pas. Elle ne s'y risquerait pas et elle était en proie d'une certaine sensation d'oppression. La porte s'ouvre et la vision est une nouvelle claque. Owenra était là. Du moins, son enveloppe charnelle était là. Il suffisait de la voir pour savoir qu'elle ne se réveillerait pas. Son sommeil serait éternel. Les larmes brûlent les yeux de la jeune Azur, mais elle était comme assommée. Elle détourna les yeux avant de les reposer sur le corps de sa tante. Un savant mélange d'émotion tourbillonnait chez la jeune fille. Colère, tristesse, culpabilité et confusion. Face à la scène qui se déroulait devant ses yeux, Larah était désorientée et avait l'impression que le sol se dérobait sous ses pieds. Mais le sol était bien là et ses pieds étaient posés sur le sol. Pour l'heure qu'une seule question tournait en bouche dans l'esprit de la jeune fille : "Pourquoi ? " Pourquoi la vie est injuste ? Pourquoi la mort l'a appelé à elle ? Pourquoi... Pourquoi... Pourquoi Elle ? Parmi toutes les âmes minables qui peuplent ce Royaume, pourquoi l'avoir arraché précocement ? La mort se serait-elle lassée des misérables pour avoir l'audace de cueillir une âme qui en valait mille ?

    Un brasier ? Avait-elle bien entendu ? L'attention se porte sur Kelel. Elle acquiesça pour elle-même. Oui, un brasier pour un... Ultime hommage.

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Judicael.
Voilà longtemps que celle avec qui j’ai dormi.
Ô Seigneur! a quitté ma couche pour la vôtre,
Et nous sommes encore tout liés l’un à l’autre,
elle à demi vivante et moi mort à demi.
- Victor Hugo -



LE DEUIL.


Un seul être vous manque, tout est...

Dépeuplé.

Le terme était exact. Se sentir dépeuplé parmi les siens. Dépossédé. Dénaturé. Désolidarisé du commun.

Judicael avait gravit les marches sans un mot. Observé la douleur de Kelel sans un mot. Posé ses yeux froids sur ce corps froid sans un mot. Il n'y avait pas de mots. Il n'y aurait plus de mots avant longtemps. Parler de ses peines, c'était se consoler. Judicaël n'était 'pas capable d'être consolé'. La mort tombait dans sa vie comme une pierre dans un étang : d’abord, éclaboussures, affolements dans les buissons, battements d’ailes et fuites en tout sens, le Déni. Ensuite, grands cercles sur l’eau, de plus en plus larges. Enfin le calme à nouveau, mais pas du tout le même silence qu’auparavant, un silence, comment dire...

Assourdissant.

Il avait mis du temps à franchir ce seuil, ligne imaginaire, frontière entre ses craintes et leur matérialisation. Le déni l'avait mené loin, très loin dans des délires opiacés où Owenra, non contente d'être une mère, une amie, un corps chaud dans son lit, était immortelle . Les immortels n'avaient pas besoin de Dieu. Dieu n'avait pas besoin d'eux. Les verts restèrent posés sur ce corps inerte. Puant et dégradant de son terne l'irradiation que représentait la Renarde dans sa vie, avant. Plus rien ne serait pareil désormais. mécaniquement, il avait opiné à la question de Kelelorna, se demandant comment elle, arrivait à respirer. L'air venait soudain à se raréfier. Une chape de plomb sur leurs épaules voûtées.

Lorsqu'il avait été libéré des geoles, s'était trainé en Anjou plus mort que vif, avait eu lecture, illétré qu'il était, de la lettre d'Adieu de l'Owen, Judicael avait été brisé. Plus que les coups de fouets reçus. Plus que les humiliations des Lorrains. Plus que jamais, la disparition annoncée de la main de celle qui allait rendre son dernier soupir à un ennemi qui ne le méritait pas l'avait brisé. Sa démonstration de colère violente, de refus, d'indignation avait été faite loin des yeux du groupe. Il n'avait pas mis d’obstacle au mouvement de sa douleur. S'était arraché des poignées de cheveux. Avait flageolé sans honte, dans une rigole sale de la rue, dans un sanglot de bête agonisante. Et l'avait laissée mûrir. Longtemps. Jusqu'à ce jour, où, figé et froid, le visage encadré d'une barbe hirsute il se présentait à sa compagne comme un enfant à sa madone.

On disait aux miracles que 'nul ne peut atteindre l'aube sans passer par le chemin de la nuit'. C'était vrai. Judicael avançait dans une nuit perpétuelle, sous une lune rousse immense qui semblait le suivre partout, le dévorer des yeux. L'étranglant d'angoisses muettes. D'apathies terribles. De colères démentielles. Judicael était l'ombre de lui-même, et tout le monde le voyait. S'ils étaient tous, aux miracles, confrontés à la mort, personne en vérité ne savait s'en faire une compagne.

Personne.

Il avait laissé les autres s'approcher. Avait laissé les effusions se diluer aux minutes interminables. Par respect ou par incapacité de les saisir? Puis, quand enfin il avait amorcé un pas, posé ses doigts sur les joues creuses et froides, s'était brisé une seconde fois. Tremblants alors, ces doigts s'étaient engouffrés sous le dos raide de la renarde, poids plume, quantité négligeable au souvenir démesuré, tremblantes, les jambes avaient supporté tout le désespoir d'un millier d'hommes en emportant Owenra dans les escaliers, et avait frémit d'une vérité nouvelle: Rien n'était plus vivant qu'un souvenir.

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