Klouska_parci_parla
Au cur de la Champagne, l'automne était d'ores et déjà bien avancé, tant est si bien que certaines nuits, le gel recouvrait les prés environnants le domaine de Champigneulles-en-Bassigny, terres seigneuriales qu'avait acquit Klouska d'Hauterroche bien des années plus tôt.
Aussi, ce matin qui semblait encore plus froid que les précédents, la jeune femme, d'une petite trentaine d'années -bien tassées oui.. chut!- se réveilla en grelottant au creux de son lit.
C'est en ronchonnant qu'elle sortit de sa couche en maudissant l'âtre où le feu ne brûlait plus.
Elle aurait pu rejoindre les chaudes cuisines, nul doute que son maître-queue était d'ores et déjà affairé à préparer le petit-déjeuner.
Au lieu de cela, elle gagna l'étage supérieur afin de dénicher quelques couvertures supplémentaires dans l'un des placards.
Hors de question de revivre un réveil pareil prochainement..
Sauf que le butin semblait bien planqué ! Une véritable chasse au trésor.
Il faut dire qu'auparavant elle n'eut guère besoin de drap en flanelle.. son homme était une véritable bouillotte ! Sauf que .... il n'était pas là.. plus là ?! depuis quelques semaines déjà..
Bref !
C'est dans un énième placard qu'elle trouva enfin. L'objet de sa convoitise se trouvait malheureusement très haut, et bien qu'elle ne fut pas si petite, elle eut pourtant bien du mal à lattraper. Aussi, lorsque du bout des doigts elle en chippa un morceau, elle tira si fort que le contenu entier de létagère lui tomba dessus.
Elle s'était protégée la tête tout en tombant, séant sur le sol. Et lorsqu'elle rouvrit les yeux, elle découvrit un coffret de bois dont une planchette s'était détachée et 3 vélins qui essayaient de s'en échapper.
Elle le reconnu presque à l'instant. Objet datant, conservé et oublié là. D'ailleurs, elle n'avait jamais réussi à ouvrir cette fichu boite. Mais cette petite mésaventure lui en délivrait enfin ses secrets.
Klouska attrapa la première missive et l'inspecta.
L'écriture ne lui était pas familière mais le plis était adressé à son père, "Sire Gavriel D'Hauterroche".
Elle la lu rapidement. Puis, une nouvelle fois plus lentement pour en mesurer tout l'impact d'une telle révélation.
Choc.
Elle reposa la missive et prit le temps de remettre en ordre ses pensées.
Comment pourrait elle croire cela ? après tout, elle ne portait aucune confiance en cette .. femme ! Mais en même temps.. si tout cela n'était que mensonge.. pourquoi son père aurait il prit la peine de conserver caché un tel document au lieu de le bruler tout simplement.
Klouska prit le 2eme document. Dessus figurait une esquisse d'un pendentif qu'elle n'avait encore jamais vu et dont le symbole qui y était gravé ne lui parlait pas non plus.
Elle attrapa ensuite le dernier plis.
Cette fois, la missive avait été écrite par son père lui même. Et même si la signature en attestait, elle en avait reconnu l'écriture immédiatement.
A sa lecture, quelques larmes roulèrent sur les joues de la jeune femme.
Partagée entre diverses émotions.. la rancur contre son père pour une telle trahison, un tel mensonge.. mais aussi une joie dissimulée pour la nouvelle que cela lui apportait.
S'il avait encore été de ce monde, elle se serait empressée d'aller lui demander des comptes, qu'il s'explique de tout cela. Mais jamais elle n'en aurait l'occasion.
Par contre il fallait qu'elle prévienne Iscambe. Sa sur devait connaitre la vérité elle aussi. Et peut être, prévoiraient elles un voyage pour partir à 'sa' recherche.
Elle attrapa les vélins, le remit soigneusement dans le coffret qu'elle serra contre elle, se leva, et regagna ses quartiers... laissant là les couvertures qu'elle était venu chercher.
A son bureau, elle relu une dernière fois les plis ; puis prit plume, encre et vélin vierge et commença à rédiger.
A toi, Iscambe, ma surette adorée !
J'espere que tu te portes bien.. et j'espere surtout que tu t'es assise pour lire mes mots. Si ce n'est pas le cas.. fais le !
Aujourd'hui je ne t'écris pas pour te raconter mes petits tracas, ni mes petites joies de la vie. Non. Cette fois c'est plus sérieux. Très sérieux.
Si sérieux que je ne sais même pas comment aborder cela en douceur.. aussi excuses moi pour cette vérité que je te lâche sans détour.
Ce matin j'ai retrouvé d'anciennes missives de feu notre père.
Apparemment, il se trouve que notre père dans les années 1438/43 etait devenu commercial et a parcouru le monde.. et.. lors d'un de ses voyages en Grèce, à Sparte apparemment, il a rencontré une femme.
J'ai ici une lettre qu'elle lui a envoyé. Elle se nomme 'Pénélope Sparta'.
Dans ce plis, elle lui donne des nouvelles de son fils.. de 'leur' fils !
Non mais tu te rends compte !!
Au début j'étais septique quant à la véracité de l'information.. sauf qu'avec ce courrier j'ai trouvé un vélin écrit et signé de notre père. Missive qu'il n'a jamais envoyé.. j'ignore pourquoi. Mais dans lequel ses mots confirment tout. Et où il demande si elle a bien pris soin de faire porter le médaillon au petit en souvenir de lui.
Dans le coffret j'ai d'ailleurs trouvé une esquisse du médaillon en question..
J'essaye de te reproduire le symbole ici :
J'aurais préféré pouvoir parler de tout cela avec toi, en face a face, mais je ne peux pas quitter la Champagne pour le moment.. tu le sais.. et je ne pouvais pas non plus te cacher cette découverte...
J'espère avoir bien fait.
Dans tous les cas, je t'embrasse fort et espère te lire prochainement.
Savoir ce que tu en penses.. ce que l'on va faire après cela..
Car, honnêtement, si nous avons un frère quelque part, j'aimerais le connaitre.. le retrouver. Serais tu d'accord pour programmer un voyage en Grèce l'an prochain ?
A très vite
Milles Bises
le 23ième jour du mois de novembre de l'an 1465, à Champigneulles.
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