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Baptême sous l'auspice du Lys et de l'Aigle

Arnarion
[Baptême - Auguste Charles Guise de Castelmaure-Frayner]




Le jour se levait sur la cité parisienne, et les premières lueurs du soleil qui annonçaient un jour éclatant, perçaient doucement les ouvertures de l'imposante cathédrale. Peu à peu, la lumière se fit dans la pénombre des alcôves et des hautes voutes, et les statues de pierre et les gargouilles allèrent enfin se reposer, fatigués de leur longue veille. Les rayons du soleil s'engouffraient à présent dans les chapelles latérales et gagnaient ensemble la nef, propageant par le filtre coloré des imposantes rosaces, une douce lumière bleutée qui donnait au saint des saints une odeur d'imaginaire et d'iréel.
Mais au milieu de ce spectacle enluminé, déjà l'homme s'affairait. Les premiers chanoines levés depuis Laude récitaient leurs heures et tandis que les uns rendaient grâce, les autres, repentant d'une longue nuit, la demandaient. Le train de la routine s'installait dans la cathédrale aristotélicienne. Mais pour la créature de Dieu sous le ciel douée de curiosité, l'imposante bâtisse n'avait pas l'aspect des jours communs.

Un bonhomme en rouge, galero sur la tête et canne en main, assis sur un banc à l'extrémité du choeur, contemplait le spectacle matinal du réveil d'une cathédrale. Le regard portant au-devant de lui par-delà le jubé de pierre, il observait avec attention les allées et venues du peuple de Dieu en pensant à la raison de sa présence ici. Le Prince avait été invité afin d'officier un baptême aristocratique en France, et il l'avait accepté, ne refusant jamais ses services à quiconque les solliciterait. Il avait même fait le déplacement depuis Rome, qui le retenait depuis quelques temps au détriment de Strasbourg qu'il rejoindrait bientôt avant de gagner sa cathèdre de Besançon. Car ce baptême allait être bicéphale. Aujourd'hui, sous le regard de Dieu, le Lys rencontrait l'Aigle et ce, plus que n'importe quelle cérémonie, se promettait d'être un évènement, du moins symbolique.
A cette occasion, l'allée centrale de la nef fut élargie et deux imposantes chaires munies de part et d'autres de leurs faudesteuils attitrés, trônaient devant le baptistère de Saint-Jean-le-Rond, et d'imposantes et lourdes tentures de laines frappées aux armes et couleurs de France et d'Empire pendaient accrochées aux murs.
Entouré par son secrétaire et les membres de son conseil, le cardinal de Saint-Jean patientait.

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--Percy_aelis
Un pas, puis un autre.
La démarche est légère, tout en petits bonds de chat, dans un silence le plus parfait.
Elle a réussi à se soustraire à la houlette maternelle, et à se glisser furtivement dans cette bâtisse sujet à mille curiosités pour la gamine.
C'est si facile de lâcher la main de mère alors que le monde affluait et que cette dernière s'en trouvait incommodée, faut bien dire que la menotte est bien plus aisée à se défaire que celle de sa "Nanou" qui vieille sur la petite arlonnaise comme un cerbère à mille paires d'yeux.

A s'en rompre son petit cou, elle lève les yeux sur la magnificence de la cathédrale, elle, la petite huguenote, fille des plus encharnés réformés se trouve subjuguée par la lumineuse beauté qui se dégage du lieu.
Il est vrai que la petite en a plein les mirettes, ce n'est pas dans les humbles temples de sa religion qu'elle croiserait pareille opulence de dorure et de statues, ni toute cette atmosphère appesantie d'encens.
D'un oeil circonspect, elle rabaisse son regard à niveau d'hommes, observe comme elle sait si bien faire ce qu'il s'y passe.
Le va et vient et les gens statiques, tout y est passé au crible, d'un pas menu, elle remonte par le bas côté jusqu'à rejoindre le choeur, s'émerveillant en silence du spectacle qui s'offre à elle.

Enfin son voyage commence a être digne d'intérêt, cette visite en la Capitale des français ne cesse de la ravir dans son insatiabilité de curiosité et c'est à grand mal que la petite jeune fille conserve son visage impassible, l'oeil la trahissant en pétillant de plaisir.
Il y a tout ce pan de monde dont elle ignorait l'existence et qu'enfin elle découvre, avide de savoir et à la parfin ce baptême qui la laissera entrevoir quelques spécimens de sa famille qu'elle n'a jamais à ce jour croisé ni même entendu parler.
Ceci étant une spécialité de sa mère, hermétique à tout questionnement, comme si l'évocation de ce sujet est de fait, tacitement tabou.

Pas un seul instant, on n'a prêté attention à elle.
Après tout, ce n'est qu'une enfant, si petite qu'elle se faufile comme une souris entre les grands qui ont tant à faire.
Elle frôle un homme de rouge, se retourne, ne dit mot, les lèvres scellées dans une moue sévère qui n'est pas sans rappeler sa mère.
Elle abaisse son regard sur lui, de grands yeux d'un bleu glacial, perçant et perspicace, loin de la naïveté que l'on pourrait attendre d'une enfant de six ans.
Elle le scrute un instant, le détaille avec ceux qui l'entoure et en fait la déduction que l'homme est important.

Le genou ploie légèrement tandis que la nuque oscille dans une gracile révérence, l'ample cotillon d'un bleu presque noir se gonfle telle la corolle d'une fleur en éclosion.
Relevée, elle garde le front haut et la mine altière, de sa mère elle n'a pas hérité que sa chevelure mais par la male heure, la suffisance de son caractère.


    Séhner, qu'elle dit avec son bel accent d'Oc, verbiage qu'elle partage avec sa mère, c'est vos le mèstre d'ici ?


Et même si la parole s'en trouve presque chaleureuse par l'Oc qui l'orne, il n'y a pas l'ombre d'un sourire qui court à ses lèvres enfantines, juste un iris bleu et froidureux pour accueillir le bonhomme au galero.
Charlemagne_vf
Toute la haute société du royaume de France avait été invitée. On fêtait la naissance de l'héritier de deux des familles les plus anciennes de France et d'Empire. La maison royale de Castelmaure, arbre creux dont les branches, sans s'étendre largement, remontaient haut, assez pour que sa noblesse soit des immémoriales. De Henri Ier de Castelmaure à Charlemagne, il y avait le premier comte de Toulouse, la première reine de France à succéder aux Lévanides, ducs, pairs, toisonnés d'or. De Long John Silver à Charlemagne, il y avait des empereurs, des cardinaux, des rois aussi. Puis, héritier d'un empire à soi-même, Auguste Charles, fils de l'Aiglon, petit fils de l'Implacable.
L'Infant espérait que cette créature aurait des von Frayner l'orgueil, le port, la froideur, le crime et l'extravagance ; que des Castelmaure, il aurait la sagesse, l'éloquence et l'opulence. Il avait fabriqué un miroir de lui-même en cet enfant : il règlerait désormais sa vie pour que chacun puisse se mirer dans l'autre, pour faire d'Auguste un nouveau Charlemagne, un aigle comme il ne pouvait en être un lui-même.

Au matin du 14 novembre, sous les frimas d'un hiver prématuré, le premier prince du sang partit de Nesle avec un cortège qui longerait la Seine jusqu'à l'Île de la Cité, où l'on offrirait à Dieu la progéniture sacrée. La folie des grandeurs du prince l'avait poussé à ourdir un coup de maître : réunir dans la capitale des rois de France, la reine de ce royaume, et l'empereur tout voisin. Les deux maîtres du monde, au sortir d'une guerre dont le crépuscule tardait à venir, réunis autour d'un nouveau-né, pour lui promettre de l'aider, de le soutenir, et de le guider vers la paix pour son salut. Symboliquement, Lafa de Bussac et Elias de Chéroy, deux enfants de France, deux monarques souverains, viendraient faire figure de père et de mère à celui qui était son fils, à lui.
Toute la cour princière était réunie : les maisons dont il était le patriarche devaient répondre présent ; mais de toutes ses terres, des émissaires furent dépêchés. A Mantes, à Nevers, capitale du Nivernais, à Bolchen, à Thuillières, à Baudricourt, à Laurac-le-Grand, à Chablis, à Laigne, à Chastellux, à Montauban d'Ouvèze, aux Arzeliers, à Chatillon d'Azergues, à Nomeny, on célébrait avec liesse l'événement : la naissance du futur seigneur. On avait dépêché de là des émissaires aux couleurs des lieux, qui apporteraient des présents qu'on présenterait à Nesle dans l'après-midi, au gré d'une cérémonie profane où le vin de Bourgogne coulerait à flots.

Sur la route, on jeta des pièces au peuple : c'était payer sa réjouissance, le récompenser de montrer au monde que le nom de Charlemagne de Castelmaure-Frayner n'était pas vain. Quand les princes du sang poussaient comme les fleurs au printemps, et qu'on cessait de les regarder avec la déférence due, il importait que jamais l'on oublie qu'il existait des dynasties pures, dont le sang bleu l'était plus que celui des autres, et se perpétuait encore et encore.

On arriva sur le parvis gelé de Notre-Dame. Dans le cortège du prince, ses vassaux. Ils feraient une haie à leur futur suzerain, au suzerain de leurs fils. Auguste héritait certes d'un nom, et de terres, mais aussi et surtout d'un réseau ; celui que Béatrice et Guise avaient légué à leur aîné. Et sans l'entretenir beaucoup, jamais il ne l'avait laissé péricliter.
En tête le marquis de Nemours et la duchesse de Chartres, derrière la duchesse de Remiremont et celle du Nivernais, pâle comme un linge et à l'orée de la mort ; derrière encore, les seigneurs qu'il s'était attachés : Charlemagne portait son fils emmitouflé dans des langes brodées d'aigles et de lys. L'enfant piaillait peu. L'Aiglon l'abandonnait sitôt qu'il devenait bavard ou pleurnichard. Mais soit que ce fut le hasard, soit qu'il fut déjà au fait de son devoir - brave petite chose -, il se taisait alors. Peut-être pas pour longtemps.

Le prince et sa suite s'arrêta sur le seuil de la cathédrale : il attendait, pour y pénétrer, de le pouvoir faire un pas derrière les deux monarques qui, il n'en doutait guère, ne tarderaient pas à arriver. L'Empereur logeait à Nesle, mais l'on avait préféré qu'il eut son propre cortège ; la Reine en face, au Louvre, était à Paris chez elle.
Se tournant alors vers Aimbaud, l'Infant lui dit.


Monsieur mon vassal, présenterez-vous votre futur gendre à leurs Majestés ?
Je dois, moi, saluer mes invités.


Car à peine la naissance avait-elle été annoncée que Nemours et Nevers avaient choisi de fiancer leurs progénitures.
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S.A.R. Charlemagne Henri Lévan de Castelmaure-Frayner
Premier prince du sang.
&c.
Jenifael..luna
    Castelnau-Montmiral avait reçu l'invitation, en Lyonnais, dans son appartement. Elle l'avait montré à Asdrubal, puisque leurs vies étaient communes depuis plusieurs semaines en Lyonnais. Avant de partir, la fillette, car tel été la réalité, une fillette qui avait grandi, mais en posséder encore parfois l'innocence, la naïveté, attitude et manière, lorsqu'elle n'avait pour désir qu'un câlin de l'éternelle Précieuse, lorsqu'elle tenter de comprendre les subtilités du langage masculin, sur la virilité qu'ils se lançaient parfois, sans qu'elle ne comprenne réellement où été l'insulte ou le compliment, ces temps-ci, néanmoins, c'est un autre sujet que l'état de son amie Tempérance, ou son ennui profond de fonction, qui s'était imposer dans sa vie. Son sujet, maintenant, était son nombril. Ou plus précisément, ce qu'il pouvait se trouver sous la peau délicate et pâle, et qui ne tarderait pas à lui provoquer nausées et maux divers, puis enflerais pour déclencher de nouveaux maux, jusqu'à la naissance. Malgré tout, la louve était de ces femmes à qui le mariage était bénéfique, elle n'avait pas hérité d'un homme froid, distant, irrespectueux, laid et impatient. Ils partageaient sourires, amusements, gestes tendres, respect et bien d'autres choses, toutes ces choses avaient permis à la jeune femme de calmer ses appréhensions, et même d'être plus sage. Leur mariage été basé sur le respect, cela avait été le premier sentiment évoqué et éprouver pour les époux, lui avait le respect du sang de la jeune femme, qui été plus noble que le sien et elle, avait le respect des titres qu'il posséder. Elle été également admirative de la sagesse du Castillan.

    Le voyage entre le Dauphiné et Paris avait été prévu pour arriver un jour avant à l'hôtel de la maison de Castelmaure, qu'elle occupait avec Asdrubal. Au matin, la jeune femme était allé se cacher derrière son paravent, habitude désormais acquise, jamais l'époux n'avait vu sa femme nue, celle-ci refusant toujours. Il avait surement deviner les formes sous ses mains ou avec la chainse, mais la brunette refusait encore qu'on ne la voit nue. Après avoir serré une chainse épaisse, sa femme de chambre vint l'aider pour revêtir la robe du jour. Elle avait prévu quelque chose de spéciale, pour le baptême de ce petit aiglon, se sentant un peu plus âgée, jusqu'à présent, c'était eux - ses cousins et elle - la dernière génération, l'avenir de la maison, mais à présent, tous devraient s'effacer pour les enfants à venir. Tant celui de l'Aiglon, de l'Altesse, promis à un grand avenir, qu'à ceux de la jeune femme. La Maison Royale de Castelmaure n'était pas grande, non, mais son rayonnement était plus large que bien d'autre, touchant tant la France, que l'Empire et la Castille. Charlemagne pouvait se targuer d'avoir dans ses vassaux l'un des conseillers du roi Castillan, puisque roi d'Armes de son pays. Une première chemise longue et revêtue, légère, presque transparente et aérienne puis une cotte blanche est revêtue, celle-ci est d'un éclatant brocard d'argent, délicat, dessinant des motifs de roses et de lys mêler. Rappelant discrètement, tant sa condition de Dame de Lazer, vassale de Tempérance et Charlemagne, que de leurs appartenances à la première des Maisons Royales du royaume. Rappelant que le baptême été celui d'un être qui n'aurait pas à baisser la tête. À cette cotte, longue, somptueuse, elle ajouta des gants blancs, rare étaient les moments où elle en portait, mais les circonstances l'imposer ici. Enfin, pour parfaire la tenue, c'est sa cape de zibeline, longue, douce, noire et chère, qu'elle mit. Il était absolument hors de question, pour la jeune femme d'avoir froid, elle qui avait toujours froid. Les longues et folles mèches brunes à reflets roux étaient recouvertes d'une voile blanc, tout aussi fin que la chemise et rassembler dans un filet d'argent. Elle n'avait aucune couronne, trouvant la couronne bien vaniteuse, pour un lieu sacre et sa médaille réformée soigneusement cacher entre sa robe et sa chemise. Le couple avait pris la route, pour se rendre jusqu'à Nesle, rejoignant la suite de Charlemagne, comme vassaux, avant de se retrouver sur le parvis de Notre-Dame. La main gantée été dans celle d'Asdrubal et la moue boudeuse close.

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Madeleine_df
Coche qui tressaute sur le pavé parisien. Il n'y avait que quelques mètres à peine entre l'hostel de Chaalis et Notre-Dame, mais afin de ne point bouleverser les habitudes de l'époux, ils avaient choisi d'y aller en carrosse. L'un et l'autre sont enveloppés dans un épais mantel de fourrure, ours pour lui, menu-vair pour elle. Mais contrairement à leur interminable trajet pour Rome, pour le mariage de la duchesse de Chartres et du Grand Maître de France, cette fois l'encore duchesse du Lyonnais-Dauphiné n'eut guère le loisir de s'enfoncer dans la douce brume du sommeil. Et c'est avec un faciès tout roide qu'elle observait son seigneur et maître.

Elle avait un peu perdu de cette pudeur des premiers jours. A présent plus aucune gêne dans le fait de dévisager, et en fermant les yeux elle se rappellerait de chaque trait de son visage impavide. Dédain, dont le souvenir hantait ses heures oiseuses le jour, et la nuit, ses rêves. Son énigme d'époux qui jamais ne faisait rien comme le commun des mortels, ni manger ni se vêtir, plus encore, ni simplement toucher. Elle désespérait de le percer à jour. Ou de comprendre seulement les origines de sa singularité. Un instant, elle sentit son regard se poser sur elle. Elle lui sourit en retour.

Un baptême. Celui du fils de Tempérance. Nouveau coup d'oeil sur Dédain. Et elle se demanda quel visage pourrait bien avoir leur héritier, à eux, s'il devait un jour en advenir un. Les cheveux blonds, sans doute, les yeux des Firenze, le menton Deswaard de Noldor. Mais ce qu'elle craignait le plus était qu'il soit de faible constitution, et ne survive pas à quelques neiges, lui qui serait pourtant enfant d'Hivernal. Elle soupira. De toute manière, avant de l'avoir, il fallait le faire, et ce n'était pas à l'ordre du jour.

Par contre...


- Préparez-vous à subir les questions sur la venue de notre héritier.

Elle dit cela, et le coche s'arrêta face à Notre-Dame. Elle en descendit la première, sans attendre qu'on l'aide, et rajustant ses fourrures à son col, attendit que Dédain ne la rejoigne pour monter les quelques marches du parvis, et aller s'installer en silence, après les génuflexions et autre signes de rigueur.

Edit : Manquait un bout de phrase huhu

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Asdrubal1
Les jours passaient à Lyon, capital du duché où son épouse vivait et lieu où Asdrubal avait décidé de rester tout l'hiver, puisqu'il n'y avait pas en Castille d'importantes affaires qui lui empêchent d'être avec Jenifaël. Ainsi, le temps passait tranquille, le castillan profitait pour apprendre sur son conjoint, sa ville, ses coutumes, en définitive, sa manière d'être, des choses que celui de la Barca ne connaissait pas beaucoup. Ignorance qui avait pour conséquence normalement une erreur en ses mots ou dans ses réactions, cependant, le comte n'avait pas difficulté en le retenir des détails, et malgré les difficultés que produisait la langue. Dans une de ces journées, la Castelnau a reçu une lettre, on traitait de l'invitation au baptême du fils de son cousin, le prince Charlemagne, et son conjoint Temperance, celui qui était en outre sa suzeraine féodale, qui aurait lieu dans la cathédrale de Notre Dame à Paris.

De cette manière, les conjoints ont été mis en chemin à la capital de la couronne de la France, où ils sont allés à l'hôtel de la maison de Castelmaure, où ils sont passés la nuit. Dans le matin suivant, Asdrubal a réveillé et a vu comme son conjoint était changé de vêtement, le castillan n'avait jamais insisté sur voir le corps de la jeune française, s'il y avait quelque chose qui caractériserait celui d'Olite, était la patience. De cette manière, Asdrubal a ébauché un sourire et il a été levé, il devait choisir que habiller. Normalement, il utilisait des couleurs obscures, principalement le noir, mais puisque c'était un baptême, aurait été peu adéquat d'aller de manière égale qu'à des funérailles. Ce pourquoi Asdrubal a pris une chemise rouge et une pourpoint rouge, avec les chausse doré et ses bottes de cuir noir, il a laissé, toutefois, sa croix réformée sous ses vêtement, et il a pris le collier de l'ordre de fisterre, qu'il a placé sur sa poitrine, celui-ci était rendu avec des coquilles d'argent et terminé dans une croix de égal matériel avec un corbeau taillée en lui. Finalement, il a pris aussi un manteau, rouge, avec lequel éviter le froid.

Ainsi, des préparations, tous les deux se sont réunies avec la suite de leurs suzeraines féodaux, chemin à la cathédrale où le baptême serait célébré.

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Elias.
L'escorte impériale était clinquante, vingt quatre cavaliers, d'origine allemande pour la plupart, fait d'or et d'ombre, ouvrant la voie le long des routes de Champagne menant à la capitale parisienne. Qui officiait? Son Secrétaire, le Cardinal Arnarion de Valyria, cela rééquilibrait quelques peu les cartes en terre Française, telle qu'il ne regrettait point d'avoir quittées il y a bien des années.

La France était un beau royaume, son peuple fier, inventif, mais divisé quelque peu. Ses mauvais souvenirs, ce qui le hantait, les blessures et les parjures n'étaient jamais venues que de sa famille ou du pouvoir, et de ces échanges de poignards il ne fut jamais le premier agresseur. Ainsi, en son coche, le regard quelque peu vivace, se perdant sur les échanges de champs et de clairières, le souverain prend le temps de repenser ce qui appartient au passé, et ce qui est à venir.

De grandes désillusions attendent ceux qui le sous estime ou le penseraient trop consensuel, il est d'ailleurs présent en tout premier par raison privée, d'abord il est le parrain de ce jeune prince..et puis, il a toujours entretenu un certain respect pour l'Altesse, qui sans jamais avoir cherché ou agit pour obtenir un quelconque pouvoir coercitif, a toujours su manœuvrer avec une finesse fort diplomatique dans les situations difficiles, ce qui n'est pas pour déplaire à l'Ancien Chancelier Impérial.

D'ailleurs c'est par son tout premier rôle d'ambassadeur qu'il a rencontré le dit Castelmaure, il y a bien des années lorsque lui même était plutôt juvénile, à l'aube de sa dix-septième année. Il avait quelque peu d'innocence en ce temps, mais cela n'altérait point son intelligence ou sa perception, et ces deux qualités avaient bien remarquées qui était Charlemagne von Frayner.

Aujourd'hui le jeune ambassadeur avait laissé la place à l'Empereur mûr, quoique plus jeune que l'intégralité de ses prédécesseurs. Et alors que les premières demeures montraient que l'escorte terminait ledit trajet depuis Strasbourg, il ferma un brin les paupières, les jambes entrecroisées, à l'égal de la position relaxée qu'il pu avoir en des soirées comtoises révolues, bien des années auparavant. Inclinant légèrement la tête à l'un de ses valets, sans pour autant rouvrir le moindre iris:

Prévenez moi lorsque nous seront devant la cathédrale.
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Sabaude
La femme serait-elle la plus grande faiblesse de l'homme ? Telle est la question que le cavalier encore dressé sur sa monture non loin du parvis de Notre Dame se pose. Messey, qui ne cesse de promener ses doigts gantés sur la lanière de cuir usée par le temps, n'a aucune raison d'être là en dehors du service à rendre. Le regard couché sur les moutons blancs d'un ciel de novembre l'atteste. Une cathédrale, imposante, austère et froide, de ces lieux où l'on s'engouffre avec l’oppressante sensation non pas de s’élever mais d'être écrasé. Le baptême d'un rejeton princier, amas de chair morveuse agité de mouvements désordonnés, capable d’émettre des sons plus discordants et aigus qu'une paire de roquets. Le père, ou celui qui se désigne ainsi, Charlemagne de Castelmaure-Frayner, n'est pour Renard qu'un visage aperçu en Anjou, jadis ; des nuits à Brissac racontées par une Anaon au sommeil arraché par deux oiseaux bruyants, et le qu'en-dira-t-on attaché au fretin comme aux gros poissons et dont il se moque éperdument. Quant à la mère, il ne sait rien, pas même un nom.

Rien ne justifie sa présence en ce lieu à cette heure si ce n'est la sympathie qu'il éprouve pour Elianor. Dans un premier temps elle fut à ses yeux l'épouse d'un von Frayner aussi sagace que volage et absent, puis jeune noble forte et décidée enveloppée d'un voile de douceur et d'inconnu. De l’événement il n'a cure, un mioche est un mioche, et le beau linge le laisse froid comme l'endroit, mais de ce frêle et petit bout de femme il se préoccupe et se plaît, honoré, à l'accompagner, dut-il faire fi de la circonstance.

Sur un signe de tête à son homme de main et une caresse sur l'encolure de sa jument, Sabaude met pieds à terre et remet ses rênes à ce dernier. L'épée et le poignard suivent discrètement le même chemin. Prudent mais pas inconvenant. Point besoin d’échanger des paroles, les consignes sont connues de celui qui veille sur lui depuis des années, l’entraîne, l'écoute, le conseille et subit ses remarques pince-sans-rire. D'un geste ample et sec sa cape de voyage est remplacée par une autre de belle facture, grenat, pétale sanguin drapé sur sa redingote de cuir souple brodée de fils d'or. La broche au renard dressé sur ses pattes vient ponctuer la tenue.
D'une pichenette au menton le sourire goguenard de son aide est invité à disparaître. Si l'effort vestimentaire est palpable, il n'est pas question pour le jeune homme de s'en laisser conter.

Avancé de quelques pas sur le parvis, il guette l'arrivée de la Vergy, prêt à lui offrir son bras, son attention et sa protection.

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Sancte
"Je vous fous mon billet que ce n'est pas lui le père."

C'était plus ou moins ce que lui avait dit la Reyne en aparté et c'était effectivement le genre de doutes que, si l'on pouvait s'abstenir de commenter, il était difficile de contenir en une âme suspicieuse. Ce genre d'allusions aux mœurs de son frères, forcément situées au-dessous de la ceinture, il y a eu droit un certain nombre de fois, pour ce qu'elles constituent un moyen de discrédit très prisé. Arrivé sur place en compagnie de la Reyne de France, il guigne les individus déjà rassemblés sur le parvis, certain d'y trouver les détestables membres d'une famille dont il s'éloigne chaque jour un peu plus. Mais la famille, ce n'est pas une charge. Contrairement à ce que certains pensent, la démission n'y est pas envisageable. Elle est, et il faut faire avec, c'est tout.

En arrivant, il reconnaît bien vite la Duchesse du Lyonnais-Dauphiné, celle-la même auprès de laquelle visiblement, la soeur de la Fraternité Galadrielle l'Archange a décidé de contracter un emprunt en vue de recevoir suffisamment de liquidités pour s'offrir ses services. Peut-être auront-ils un moment à eux pour aborder la chose. Ou pas.

Sorti en premier, il ouvre la portière de la Reyne de France, et dès lors, sa physionomie change pour dégager une incontestable aura de brutalité, comme si le Prince venait de renouer avec ses instincts primitifs de molosse sans muselière. Il peut effectivement supporter l'avanie que constitue la présence auprès de lui de certains membres de la famille, mais en qualité de Capitaine de la Garde, le sens du devoir reprend déjà le dessus, et avec lui, ses penchants naturels pour l'exercice de la violence, de l'intimidation, et de la tyrannie.

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Melchiore
Le monde est encore dehors, et sur lui, Malicorne porte une pèlerine beaucoup trop grande. Non qu’elle touche le sol –quoiqu’un peu maculée de la boue du voyage qui l’a conduit de la taverne huppée du coin jusqu’à la cathédrale- mais elle semble éminemment large. Soit qu’il redoute le froid, soit qu’il l’a volé à un plus gros bœuf que lui, Montmorency semble flotter littéralement dans ses frusques chaudes. Plus déployé qu’à l’accoutumée, son bras droit s’étend jusqu’au prolongement de sa canne. C’est qu’il a le pied bot, c’est d’ailleurs un peu laid, quand on le regarde de pied en cape. C’est une anomalie sur le tableau. Un coup de pinceau raté. Mais Melchiore ne se soucie pas davantage de ses chausses orthopédiques que du benêt nivernais qui tente de lui faire la conversation, là dans la petite foule qui se presse.

L’homme a le visage aussi large que ses mains, et le sourire gras qui tâtonne sa lippe s’étire davantage vers l’oreille gauche que la droite. Il porte une collerette du dernier laid et son visage est truffé de rougeurs. À chacune de ses syllabes, il renvoie à Melchiore une haleine pimentée portée par de petites fumerolles de vapeur. Le nivernais lui rapporte un discours plein de gratitude, que Melchiore feint ne pas comprendre. En son for toutefois, la Buse reconnaît parfaitement l’individu. C’est un homme de Nevers. Le propriétaire d’une grande ferme aux abords du château de Castelmaure. Il avait jadis pour voisin un autre homme, propriétaire de presqu’autant de terres, mort d’une mauvaise grippe un an et demi plus tôt. Il y avait eu une histoire d’héritage dans laquelle il avait fallu tremper, avant qu’elle n’en fût venue à une guerre intestine aux portes de Nevers. C’était une époque, un peu lointaine, où Montmorency avait pris les rênes de l’intendance après le départ de Bisac, lequel n’avait pas su se faire convenablement succéder. Il en a résulté, pour l’homme à la collerette, l’obtention du double de ses terres, et l’apport pour Castelmaure d’un moulin qui vaut de l’or. L’été durant, il fournit aux greniers princiers une surproduction exclusive, et exclusivement destinée à garnir les greniers princiers, dans l’attente d’un hiver trop rude puis d’un printemps stérile, un jour peut-être.

Le paysan lui fait donc, là, sur le parvis, une apologie soutenue par les hochements de tête de sa femme, accrochée comme une tique au dos de son époux. Puis il achève d’admettre avoir fini par vendre toutes ses terres pour devenir commerçant. À présent, c’est un bourgeois dont les manches ne refoulent plus que des As. Et dans les yeux pernicieux de sa femme, Melchiore croit lire l’ambition et la soif toujours plus grande d’une condition toujours meilleure. Montmorency soupire in peto, puis feint de regarder derrière lui, avec cet air un peu désuet qu’on se donne, quand on se demande si c’est bien à nous qu’on parle. Dix secondes passent, où la gêne s’installe grassement entre le couple bourgeois et Melchiore. Dix secondes au bout desquelles, finalement, l’homme s’excuse en déclarant s’être adressé à la mauvaise personne. C’est que
Melchiore ressemble à Melchiore, vous comprenez. - Oui, oui. Là. Y’a pas d’mal.

Ils s’éloignent, et au-dessus des têtes, on entend le bruit infernal d’un vol d’étourneaux migrants qui dansent par centaines. Ils forment un nuage opaque qui se dilue et revient, pour mieux se consolider. Parfois, ils cachent le soleil déjà gris. Melchiore, alors, soupire. Ce n’est que pour prendre un peu d’élan.

Il s’engouffre dans la masse, et tâtonne la foule, pas si opaque, jusque vers les marches que nul n’a encore gravi. Ainsi passe-t-il de la boue aux pavés, et sa canne retentit. Il dérange cinq fois quelques gens, en refusant chaque fois de raccrocher son bras droit vers son corps. Il semble sous l’emprise d’un poids nouveau. Un poids qui, sans le faire ployer tout à fait, l’empêche cependant de reployer son bras. La Buse marche comme si elle avait les ailes trop longues. Et sans doute est-ce le cas. Il est lent, et se perd un peu dans la foultitude de petits nobles d’abord, puis de grands ensuite. C’est alors qu’il entend le mugissement succinct de l’enfant à baptiser. Il a trouvé son chemin. Il doit bousculer un peu rudement un dernier groupuscule avant de surgir, comme incidemment, à quelques mètres de Castelmaure et sa plus proche cours. L’espace y est plus clairsemé, et l’on n’y peut plus se cacher.

Le bruit de sa canne qui frappe le sol, c’est quelque chose de familier à qui sait l’entendre. Et les plus familiers, singulièrement, y sont tant habitués, que jamais plus ils ne l’entendent. Et c’est un peu triste, de surgir comme ça d’entre le néant. Et si le regard de Melchiore s’appuie si fort sur Auguste, c’est pour ne pas voir Castelmaure, comme un dernier coup qu’on ajuste.
La peau de l’angevin a pâlit un peu, depuis l’automne. Les étourneaux miment un ciel orageux, et leurs milliers de piaillements tonnent. Dans sa capeline trop grande, sur sa canne trop longue, Malicorne rappelle davantage Maléfique qu’une bonne fée. Mais la Garde de Castelmaure connaît son visage. Aussi n'a-t-elle jugé utile d'intervenir, habituée jusqu'alors à voir la Buse dans leurs abords. Là dans le froid, Melchiore argote dans son natal angevin, parce qu’il le doit bien.


- Tu sais qu’Aristote laisse mon âme roide. Mais j’ai moi aussi un cadeau pour Auguste, s’tu veux bien.

Et c’est vrai, qu’il en a un, dans sa main gauche, on entend quelque chose qui tinte. Alors il regarde Castelmaure, finalement. Sous l’enfer assourdissant des étourneaux en légion, on n’aura même pas entendu que la Buse a tutoyé l’Aiglon. Il tend la main, comme pour recevoir l’enfant. Melchiore a déjà porté Auguste. Deux ou trois fois. Puis aussi le fils de Miriella. Il sait qu’il n’est pas si maladroit, quand on sait placer en lui un peu de bonne foi. Et ceux qui se sont un jour trouvé sous la coupe de la Buse ont eu de quoi se réjouir parfois. En témoignerons quelques sujets de Castelmaure. En témoignera peut-être la bonne volonté de Castelmaure lui-même, devant Melchiore qui tend un bras.

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Charlemagne_vf
C'était étrange, d'avoir ressenti un picotement au bout des doigts, à la naissance de cet enfant. Qu'est-ce que c'était, après tout, cette créature effectivement geignarde, pas trop belle, pas toute finie ? Et puis, ça risquait aussi de mourir avant l'âge de huit ans. Et les enfants, il n'avait jamais aimé ça. Mais celui-là, il le faisait d'autant plus sien que sur toutes les lèvres, on se le demandait, dans toutes les oreilles, on l'entendait : était-il bien sien, cet héritier ?
Voyons le scandale : Charlemagne de Castelmaure-Frayner, chantre des sang-purs, pourfendeur de la bâtardise et des extractions médiocres, affublé d'un fils adultère, qui aurait pu n'être pas le sien. Et de fait, on ne le saura jamais vraiment. Tempérance, la mère, n'avait jamais vu son époux à la faveur de la nuit. Peut-être même n'était-il pas son époux, en réalité. Quand un homme l'avait touchée, une, deux, trois fois, ça n'avait jamais été que dans une obscurité totale, dans un silence mortel. Mortel. Tout était mortel, dans cette union : de l'ennui au plaisir. L'épousée et l'épousé ne s'étaient pas vus. S'étaient-ils touchés ? On ne saura pas. D'aucuns chuchotaient que le prince de Clichy avait œuvré pour son jeune frère ; et c'était peut-être vrai, comme ça pouvait être faux. Ceux qui savaient le secret de la conception d'Auguste n'en diraient jamais rien ; et l'Aiglon même n'affirmerait jamais rien d'autre que la paternité certaine de la petite chose qu'il tenait dans ses bras. Fût-elle un artifice complet.
Une légère bruine vint, passa, comme une sorte de baptême avant l'instant.
Les moins gargotiers de ceux qui aimaient à parler se disaient qu'après tout, quand on a le sens des devoirs, de la noblesse et de la légitimité aussi chevillé au corps que l'a le prince, on ne déroge pas à la descendance : on la fait, sans plaisir, mais pour le sacrifice. D'autres prétendaient que ce sens du devoir et de la grandeur, il l'avait depuis longtemps cédé à la décadence la plus complète. Et ça, c'était un peu vrai.

Tempérance regardait son mari avec fureur. Il n'en allait plus autrement depuis l'accouchement. Melchiore regardait son mari sans le regarder. Il n'en allait plus autrement depuis l'accouchement. Charlemagne était seul, encore. Seul et drapé dans sa hauteur, arraché à ses pulsions suicidaires ou meurtrières par les sirènes de la gloire retrouvée. Qu'il avait été sot d'aimer l'un, d'épouser l'autre. Mais encore là, sous les regards des saints qui gardaient la cathédrale, il était l'époux de l'autre, et l'amant de l'un.
Sur le pavé, les carrosses royaux et impériaux se firent entendre : nul, pourtant, n'en descendit encore. On vit arriver des princes, et quelques bien nés. La bourgeoisie s'amassait en quête d'un regard : c'est bien parce qu'aucune altesse royale ne daigna jamais accorder le moindre air bienveillant à ces envieux des bourgs qu'un jour, plus tard, il se souleva.

La Buse avait un cadeau pour Auguste. Mais les cadeaux, on avait dit qu'on les recevrait plus tard. Melchiore le savait. Il savait tout, et mieux que le prince qui ne s'était jamais beaucoup soucié de ses affaires. Dans l'ombre, le Montmorency était bien davantage que le favori : il était le maître des lieux, partout. Dans les douze fiefs de Charlemagne, il s'était imposé : on l'y respectait, on le révérait un peu, et on célébrait sa venue autant que celle du Fils de France revenu avec indifférence en sa demeure. Jamais personne ne se trouvait appauvri quand l'angevin était passé. Il rétablissait les contentieux, faisait la justice avant que le Castelmaure ne la rende, signait les traités, surveillait les caisses avec l'habileté d'un helvète. Et on ne le remerciait jamais pour cela.
Il avait donc un cadeau, pour y revenir. Les lèvres de l'Aiglon se serrèrent, réprimant un spasme.
Il regarda son épouse, qui désapprouvait. Elle lui dit, même, mégère, de ne pas y penser. Et parce qu'elle eut cette effronterie, le prince eut celle de céder le nourrisson. Melchiore, faire du mal à Charlemagne, même par inadvertance ? Allons. S'il ne lui faisait pas confiance, pourquoi lui avait-il sacrifié tant d'années, sa réputation et son prestige ? Alors, des bras molletonnés de velours noirs du prince, Auguste glissa doucement dans ceux de Melchiore. Drôle de drame. L'enfant ne remarqua même pas qu'on le passait des bras d'un père à ceux d'un autre.

Allégé du poids de sa descendance tout entière, le duc de Nevers se sentit un peu étourdi. Le froid, sans doute, et l'immobilité, l'incommodaient. Il tendit son bras à son épouse.


Vous vous sentez faible, Madame. Allons, rentrez vous asseoir : vous ne manquerez à personne.

C'est lui qui, en vérité, se sentait soudain faible. On ne l'eut pas dit à sa pâleur, car elle lui était naturelle. S'il n'eut été bien élevé, il eut vomi dans un bénitier.
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S.A.R. Charlemagne Henri Lévan de Castelmaure-Frayner
Premier prince du sang.
&c.
Melchiore
Auguste, petite créature, et grand malheur. Il n’existe pour consolider le siège de Castelmaure pour deux ou trois décennies après que l’Infant aura péri. Après les enfants, vient la ruine. Et quand on vieillit, soudain, on n’est plus rien. Le baron de Malicorne le sait pour avoir encore un père. Sans éprouver pour lui qu’un amour filial décoloré, il patiente jusqu’au jour de son trépas, qui n’en finit pas de ne plus tarder. Il sait qu’il n’existe que pour posséder un jour le Comté de Gennes. Et quand ce sera fait, on attendra de lui qu’il meurt aussi. Parricides, disait l’Aiglon un jour. Il avait raison. Auguste né, Melchiore s’est senti délaissé dès la première heure. Paranoïa, sans doute. Montmorency n’admet pas de ne plus être utile, lui qui n’a pour toute ressource que son habileté et son ingérence dans tous domaines financiers. Bailler des contrats et rendre justice, ça ne le passionne pas. Il sait le faire, et c’est tout. À quoi bon se vanter de ces talents-là ? C’est d’un ennui mortel. S’il avait été valide, Montmorency aurait choisi la voie du fracas et des armes, dût-il n’être qu’un piètre reitre.

Mais Auguste, paisible, ignore qu’il est un élément perturbateur. Perturbateur pour certains, prodige pour d’autres. Il ne sait pas que le poids des charges n’attend que son âge pour lui alourdir les épaules. Melchiore cesse un peu de regarder Charlemagne pour en venir au fait d’Auguste. Il cesse de regarder Charlemagne pour ne plus le trouver beau, ni sien. Il le relègue au néant. Juste le temps de faire son singulier don. Parce que la Buse n’entrera pas dans l’église. Et au bout de la chaine qu’il tient, c’est une amulette aristotélicienne qui pend. On ne verra pas aujourd’hui qu’il y est gravé, en lettres infimes : Auguste de Castelmaurency.
Au loin, les nuées d’oiseaux se posent comme un grand drap sur la toiture de la cathédrale, accidentée de quelques tours qui sortent de terre, comme savent en faire faire les prélats aristotéliciens. Le bâtiment en est intégralement recouvert et noirci. Puis il y a un coup de froid, et Melchiore, au prétexte d’enfiler l’amulette dans les plis des langes brodés du nourrisson et de le protéger du froid se faisant, le caparaçonne dans sa grande pèlerine. Un instant, il semble prier pour l’enfant. Peut-être une malédiction, ou un vœu de rébellion et de liberté, comme les mots qu’ont les angevins au profit de leurs enfants. Tu seras libre, fils. Et tu mangeras du lys au petit-déjeuner. Tu insulteras les mainois lorsque tu en verras, et tu joueras à qui caillasse le plus fort lorsqu’un tourangeau, tu rencontreras.

Qu’importe ce que marmonne Melchiore. Il rend à Charlemagne la charge de cet enfant dont il ne veut pas. Il lui rend en lui serrant un peu le bras, en guise de prière. Il lui rend en se désolant que le temps soit mauvais, et qu’après tout, on ne peut défaire ce qui est fait. Melchiore lui rend un Auguste qu’il élèvera seul, sans doute, et jette un œil à la Duchesse de Nevers, plus en souffrance que jamais. Melchiore ne la regarde que le temps de détourner les yeux d’elle.

Qu’Auguste soit, avec Charlemagne pour père. Et Melchiore d’achever d’une voix qui se fait murmure, un peu las, un peu vain.


-Fais de lui un bon aristotélicien, si t’y tiens. Garde-le des humeurs qui te conduisent au bord des fenêtres. Et remercie Calpurnia pour moi.


Alors, Montmorency remonte sur le visage de l'enfant un bout du linge qui lui fait son lange d'apparat, pour ne pas qu’il attrape froid, sans doute. Et avant qu’il ne s’éloigne, on peut sans doute lire dans son regard un peu gris une vieille lueur qui vacille toujours, un peu de regret, et la folie d’un angevin qui a accompli son dessein. Sa capeline toujours ample, il laisse-là Charlemagne et repart dans la nuée des gens, alors que les premiers pieds apparaissent sans doute aux portes des carrosses. Il ne repart pas seul, cependant. Dans son ample vêtement, il y a une poche assez grande pour accueillir un nourrisson tel qu’Auguste. Ce qu’il a laissé à Charlemagne, ce n’est qu’un ersatz de fils, un changeling. Un enfant assez ressemblant peut-être, parce que tous les enfants, à cet âge, se ressemblent. Un enfant paisible pour l’heure et le visage emmitouflé, assagi par du lait de pavot plus tôt ingéré. Auguste, le véritable, ira à Gennes, avec pour baptême celui qu’on réserve aux Spinozistes.

Les étourneaux découvrent la cathédrale et vont danser ailleurs.

Là.

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Arnarion
Le Prince observait avec attention les détails ciselés sur les murs rebondis et taillés de la cathédrale. Elle était vraiment magnifique et pour un peu, il aurait été jaloux de l'art architectural gothique français qui lui manquait dans les régions septentrionnales de l'Europe, où fleurissait le gothique rhénan, plus dur, plus carré plus ... germain, quoi.

Il était encore à contempler les divers éléments architecturaux lorsqu'une voix sortant de nulle part, le fit sursauter. Non que la surprise fut grande, quoi que n'importe qui le fut en ne s'attendant pas à être interpellé. Non, cette voix inconnu avait un quelque chose de déjà entendu ... un timbre reconnaissable sur lequel, sans vraiment savoir pourquoi, il juxtaposait la couleur rouge. Pourtant lorsqu'il se retourna ni rouge ni rien. Juste un enfant.

Le cardinal était déjà occupé et prendre garde d'enfant lui aurait plus désservi qu'autre chose. Néanmoins, il se retourna et abaissa son regard sur sa jeune interlocutrice. Elle avait le parler des gens du Sud de ce Royaume, comme celui de l'Archidiaconesse de Bourges, Ariana, qu'il aspirait à voler comme secrétaire à l'Azayes. Et pour dire bonjour, généralement, elle disait ...elle disait ...

Adishatz, mon enfant. Dit-il avec son suuuuperbe accent comtois à couper au couteau qu'il avait contracté dans son parler à lui, à force de stationner en son Archevêché de Besançon. Le mèstre de ces lieux ? Non, moi je suis juste un bonhomme en rouge avec un chapeau qui attend qu'on s'occupe de lui. Il monta son index vers la voûte. Le mèstre de ces lieux, c'est le patron, mon patron, qui est aussi le tien. Le Bon Dieu.

Il lui sourit. Ce temple est à lui et tout ce que tu vois, produit du génie de l'homme, est tourné en son honneur, pour lui rendre grâce de sa magnificence. Il haussa des épaules. 'Menfin c'est juste du visuel ... le vrai trésor, c'est ta petite prière à toi pour lui.

N'empêche que cette petite lui disait vaguement quelque chose. Bon déjà ce n'était pas son enfant, ça c'était plus ou moins certain. Non, c'était certain. Mais cette voix d'Oc et cette bouille lui rappellait fortement quelqu'un. La petite était trop grande pour être une bâtarde de l'ex-Archevêque de Tour dont la réputation de coureur de jupons n'était plus à faire, et mis à part lui, il ne connaissait personnellement aucun clerc de petite vertu. Ce qui enlevait certaines possiblités au jeu du trombinoscope. Alors voyons, procédons par élimination. Elle n'était pas d'Empire, avec cet accent. Ou en tout cas pas originaire, sinon elle aurait ingéré un de ces accents héritiers des peuplades franco-germaines de Bochie occidentale. Son accent inclinait plus pour le Royaume de France ... la Frankreich ... le Sud même, s'il pouvait en juger. Et en France, il y a ... des français. Donc elle était française, mais française de ce pays où l'on parle la langue d'Oc. Et là cela se corsait, parce qu'il ne connaissait quasiment personne là-bas à part sa cousine qui travaille chez la Reine à Paris. Il connaissait bien Mélian, mais il ne l'imaginait pas avoir des rejetons. A force de songer, il perdit le fil et finit par jeter l'éponge. Il avait toujours été nul au jeu du trombinoscope de toute façon.

Dis-moi, petite, comment t'appelles-tu ?

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Lafa_
Elle avait secoué l'office des atours, il lui fallait une tenue qui claque !
Non pas qu'elle ait envie d'impressionner le père ou la mère du futur baptisé mais la brune était toujours un peu en représentation dans ce genre de cérémonie ... Surtout quand le parrain était Empereur et que la royale brune était légèrement en froid avec l'homme. Il fallait montrer le faste, le luxe de la Couronne française.
C'est donc apprêtée et au sommet de sa forme que la Bussac était montée dans le carrosse avec le capitaine de la Garde.
Elle n'en démordait pas et c'était devenu presque un jeu entre eux. Enfin surtout pour elle car elle imaginait bien que Clichy était largement saoulé de ses suppositions toutes aussi farfelues les unes que les autres... Ou pas.


Je vous assure Iohannes je suis sûre que cela s'est passé comme ça. Vous voulez les détails ? Vous ne me croyez pas ?

Arrivés devant Notre Dame, elle descendit du carrosse et se tourna vers son capitaine prenant son bras et l'entraînant avec elle.

Détendez vous Iohannes, la seule personne que vous pouvez craindre ici, c'est moi.

Un sourire en coin, limite taquin, elle s'était amusée de la situation et du lien qu'il y aurait avec Elias désormais. Elle se devait de rester polie et souriante, un effort de tous les instants ces derniers temps et elle savait que si elle dérapait légèrement, Sancte saurait la remettre sur le droit chemin.
Elle tenait légèrement relevés ses jupons afin qu'ils ne traînent pas au sol et après avoir salué de la tête les uns et les autres s'avança vers le père de l'enfant, croisant alors un homme qu'elle avait connu il y a quelques temps. Son regard suivit Melchiore l'espace d'un instant puis se posa sur le père de son futur filleul lui signifiant ainsi sa présence.

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--Percy_aelis
Elle reste droite à l'observer, dans cette stature un peu roide qu'a sa mère coutumièrement et qu'elle sait imiter à la perfection.
L'impassibilité s'effrite à l'entendre usiter de l'Oc, l'enfance reprend ses droits, et son minois s'illumine d'un sourire sincère, juste le temps d'un instant.
A son propos, la petite Montjoye réfléchit un petit.
Elle n'est pas du genre bavarde la petite, plutôt parcimonieuse en parole.


    Maire dit que l'Unique n'a qu'un seul temple...


La petite infante d'Arlon s'efforce de bien prononcer les mots français, ayant peu le loisir de le pratiquer quotidiennement elle y trouve néanmoins le plaisir d'user une langue quelque peu étrangère pour elle.

    ... c'est le còr !

Son index, encore un peu potelé désigne le centre de sa poitrine tandis que la damoiselle énonce sa vérité.
Le front se plisse légèrement alors qu'elle fronce les sourcils.

    Prier ? Ici ? Ne sabi pas.

Qu'elle se dit à elle même, jaugeant la situation tout en jetant un regard circulaire à la cathédrale.
C'est une bâtisse d'impie après tout et Dieu la punirait sûrement pour ce geste, sans escompter que Mère l'étranglerait de ses propres mains tout en criant au blasphème.
Pour couper court, elle prend un raccourci et exécute à nouveau une gracile révérence.


    Perceval Aélis de Montjoye, séhner. Enfadiada ! Y vos ?
    Votre chapeau me plaît bien en tout cas.


Les lèvres s'ourlent d'un sourire dont seul les enfants ont le secret.

Traduction : Maire = mère / còr = coeur / ne sabi pas = je ne sais pas / Enfadiada = enchantée / y vos = et vous
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