Nikkita
C'est un endroit calme, comme elle les aime.
Un petit coin frais et parfumé de sous-bois bordé par le débit lent et fluide de l'Aurence qui ira se jeter un peu plus loin, amante fusionnelle, dans les bras de la Vienne. Tamisé par l'exubérance des grands arbres, le soleil de ce matin loin de tout joue en fragments lumineux sur ces habits qu'elle a voulus, dans leur teinte solaire, porteurs de vie.
Prenez soin de vous.
Tutoyé ou vouvoyé, le conseil revient, lancinant et presque émouvant leitmotiv, énoncé par diverses bouches, trempé dans diverses encres. Nikkita pourtant s'applique, depuis qu'elle a émergé de ces bois proches de Ventadour pour se fondre à la vie de la capitale, à se fixer des objectifs, proches ou moins proches, importants ou minimes, jour après jour, comme une ligne de vie.
Cette dette qu'elle s'est engagée à payer, parole donnée à celui qui n'est plus. Cet appartement où elle a logé son fils, écrin d'une pierre unique offerte par les montagnes helvétiques... Infiniment précieux minéral qu'elle lui confiera, en même temps que son histoire, quand il sera temps. Cet autre enfant, si petit, enlevé à Fanette, et pour lequel elle patrouille nuit après nuit, insomniaque volontaire, les alentours de la ville. Revoir Clo, un jour, cette femme qu'elle a si longtemps, de Genève à Montpellier, abreuvée de saux d'eau glacée, avant de s'en laisser apprivoiser. Retrouver, ici ou là, Eleo, Sub, Ober, Ali, Laeti, ces piliers de vie qui traversent le temps et ont laissé leur encre s'inscrire, indélébile. Et ce cabinet médical qu'elle projette d'ouvrir, passionnée par cette subtile chimie des plantes qui apaisent les maux et éloignent la mort...
Mais ni habits ni plantes n'éloignent jamais vraiment celle qui rôde, trop présente depuis bientôt deux ans déjà, autour de Nikkita. L'épuisant combat d'une Rôdeuse et d'une Vagabonde charrie et malmène la menue brune et l'a jetée tour à tour, des ineffables fragrances de l'Eden jusqu'aux plus sombres profondeurs des Enfers. La mort habillée de son cortège de deuils semble prendre un malin plaisir à s'installer à ses côtés comme une compagne trop encombrante.
L'incessante lutte n'est pas finie, la vagabonde est endurante et têtue, et d'autres ont besoin d'elle, comme elle s'est découverte, elle si solitaire, avoir besoin d'Eux. Certains sont là, improbables rencontres et heureuses retrouvailles dans une ville improbable, magie des chemins qui se croisent et s'entrelacent avant de reprendre leur cours, pour se croiser encore et s'entrelacer peut-être, un autre temps, un autre jour, un autre ailleurs.
Non, l'incessante lutte n'est pas finie, mais l'épuisement brouille les iris limpides de Nikkita, chiffonne et pâlit l'ovale délicat du minois aux pommettes finement dessinées.
Est-ce la fatigue, la vision de son fils trop proche à son goût des bords de l'Aurence ? Les yeux rivés sur l'enfant, la menue cueilleuse de simples l'appelle d'une voix calme en raflant d'une main pour une fois inattentive la besace posée dans les hautes herbes :
Aimé !
Foudroyants, les deux crocs de l'aspic plongent au dos de la fine menotte et s'y incrustent, inoculant leur venin.
La Mort n'est-elle finalement, que cette tête triangulaire aux pupilles froides, ce long corps souple et ondoyant qui s'éloigne déjà ?
Le cri mélangé de surprise et de douleur traverse l'air pur d'un matin, finalement, comme les autres...
Un petit coin frais et parfumé de sous-bois bordé par le débit lent et fluide de l'Aurence qui ira se jeter un peu plus loin, amante fusionnelle, dans les bras de la Vienne. Tamisé par l'exubérance des grands arbres, le soleil de ce matin loin de tout joue en fragments lumineux sur ces habits qu'elle a voulus, dans leur teinte solaire, porteurs de vie.
Prenez soin de vous.
Tutoyé ou vouvoyé, le conseil revient, lancinant et presque émouvant leitmotiv, énoncé par diverses bouches, trempé dans diverses encres. Nikkita pourtant s'applique, depuis qu'elle a émergé de ces bois proches de Ventadour pour se fondre à la vie de la capitale, à se fixer des objectifs, proches ou moins proches, importants ou minimes, jour après jour, comme une ligne de vie.
Cette dette qu'elle s'est engagée à payer, parole donnée à celui qui n'est plus. Cet appartement où elle a logé son fils, écrin d'une pierre unique offerte par les montagnes helvétiques... Infiniment précieux minéral qu'elle lui confiera, en même temps que son histoire, quand il sera temps. Cet autre enfant, si petit, enlevé à Fanette, et pour lequel elle patrouille nuit après nuit, insomniaque volontaire, les alentours de la ville. Revoir Clo, un jour, cette femme qu'elle a si longtemps, de Genève à Montpellier, abreuvée de saux d'eau glacée, avant de s'en laisser apprivoiser. Retrouver, ici ou là, Eleo, Sub, Ober, Ali, Laeti, ces piliers de vie qui traversent le temps et ont laissé leur encre s'inscrire, indélébile. Et ce cabinet médical qu'elle projette d'ouvrir, passionnée par cette subtile chimie des plantes qui apaisent les maux et éloignent la mort...
Mais ni habits ni plantes n'éloignent jamais vraiment celle qui rôde, trop présente depuis bientôt deux ans déjà, autour de Nikkita. L'épuisant combat d'une Rôdeuse et d'une Vagabonde charrie et malmène la menue brune et l'a jetée tour à tour, des ineffables fragrances de l'Eden jusqu'aux plus sombres profondeurs des Enfers. La mort habillée de son cortège de deuils semble prendre un malin plaisir à s'installer à ses côtés comme une compagne trop encombrante.
L'incessante lutte n'est pas finie, la vagabonde est endurante et têtue, et d'autres ont besoin d'elle, comme elle s'est découverte, elle si solitaire, avoir besoin d'Eux. Certains sont là, improbables rencontres et heureuses retrouvailles dans une ville improbable, magie des chemins qui se croisent et s'entrelacent avant de reprendre leur cours, pour se croiser encore et s'entrelacer peut-être, un autre temps, un autre jour, un autre ailleurs.
Non, l'incessante lutte n'est pas finie, mais l'épuisement brouille les iris limpides de Nikkita, chiffonne et pâlit l'ovale délicat du minois aux pommettes finement dessinées.
Est-ce la fatigue, la vision de son fils trop proche à son goût des bords de l'Aurence ? Les yeux rivés sur l'enfant, la menue cueilleuse de simples l'appelle d'une voix calme en raflant d'une main pour une fois inattentive la besace posée dans les hautes herbes :
Aimé !
Foudroyants, les deux crocs de l'aspic plongent au dos de la fine menotte et s'y incrustent, inoculant leur venin.
La Mort n'est-elle finalement, que cette tête triangulaire aux pupilles froides, ce long corps souple et ondoyant qui s'éloigne déjà ?
Le cri mélangé de surprise et de douleur traverse l'air pur d'un matin, finalement, comme les autres...