Ludwig..
À l'étage de l'Aphrodite, des pas résonnent à une heure où, même lorsque l'on a le quotidien d'un courtisan, on est supposé dormir. Brusques et pesants, passant et repassant aux mêmes endroits, on ne fait visiblement pas l'effort de se faire discret. Et si le moindre employé de l'établissement osait quitter sa chambre et protester contre ce tapage nocturne, il y a fort à parier qu'il y aurait une personne de trop hors de son lit, et que tu le lui ferais comprendre. Car toi, tu es le seul autorisé à arpenter les couloirs de long en large, en pleine nuit, à la lueur d'une chandelle vacillante. Tu es le seul à avoir le droit d'être loin de tes draps cette nuit. Car cette nuit, tu as la meilleure raison de l'être. Tu es en manque. Il faut que tu fumes.
Te vendre, c'est la seule chose que tu saches faire et que tu aies toujours faite. Mais, Ludwig, ce nouveau boulot, plus prenant que ce à quoi ressemblait ton quotidien avant ton arrivée ici, vient de te conduire à commettre l'irréparable : ne pas vérifier tes stocks de came. Cette nuit, tout est vide. Et ce couloir, et ta pipe, et ton âme. Tous les recoins parisiens connus ont été inspectés sans que tu ne parviennes à mettre la main sur tes fournisseurs habituels, ni même sur les inhabituels. Alors te voilà, mâchoires serrées et rage au ventre, ne cessant de faire passer de tes lèvres à tes mains une pipe superflue et stérile. Tu n'as jamais été aussi anxieux, ni aussi pressé, ni aussi tendu, ni aussi agressif. À dire vrai, si un curieux sortait voir ce que tu fabriques, tu ne lui ferais pas comprendre qu'il doit retourner se coucher, non. Tu lui éclaterais le crâne contre un mur. Rien que pour oublier l'envie de fumer, le besoin de fumer, et l'idée qu'une vie sans fumer manque cruellement d'intérêt. Il faut que tu fumes.
Peut-être devrais-tu aller te coucher, avec l'espoir fou que tes songes te fourniront ce que le chanvre t'apporte le reste du temps. Mais tu ne dormirais pas. On le sait, tu le sais, tout le monde le sait, inutile d'en discuter. Alors ne te reste plus qu'à poursuivre ton activité nocturne : errer. Comme si faire les cent pas, inspecter et mémoriser chaque imperfection de chaque porte, t'arrêter un instant, plaquer ton front contre le mur, tenter de ne penser à rien, et puis reprendre ta marche frénétique, pouvait mettre fin au manque. C'est vain, et les heures qui passent ne font que te rappeler à quel point ton besoin de drogue est vif, violent, impatient, impérieux. Il faut que tu fumes.
Encore, face à la porte d'une chambre close, tu t'interromps. Les lieux ne sont pas suffisamment connus pour que tu puisses connaître l'occupant de cette chambre et, finalement, peu importe. De toute façon, tu n'as eu l'heur de croiser que peu de monde pour l'instant. Toujours est-il qu'il y a probablement plus d'un amateur de fumette ici. Qu'importe ce qu'on aura à te fournir, du chanvre, du tabac, un bout de feuille, une poussière, n'importe quoi fera l'affaire, pourvu que ça se fume. Alors tu lisses un peu ta chemise, quoiqu'il soit totalement illusoire de croire que tu pourras te défaire de l'air totalement débrayé de tout homme qui toque au hasard en pleine nuit, tu remplis tes poumons d'une inspiration désespérément oxygénée, et enfin tu frappes quelques coups. Ça a intérêt à s'ouvrir. Et vite. Il faut que tu fumes.
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Bannière by LJD Gysèle. Merci ♥
Te vendre, c'est la seule chose que tu saches faire et que tu aies toujours faite. Mais, Ludwig, ce nouveau boulot, plus prenant que ce à quoi ressemblait ton quotidien avant ton arrivée ici, vient de te conduire à commettre l'irréparable : ne pas vérifier tes stocks de came. Cette nuit, tout est vide. Et ce couloir, et ta pipe, et ton âme. Tous les recoins parisiens connus ont été inspectés sans que tu ne parviennes à mettre la main sur tes fournisseurs habituels, ni même sur les inhabituels. Alors te voilà, mâchoires serrées et rage au ventre, ne cessant de faire passer de tes lèvres à tes mains une pipe superflue et stérile. Tu n'as jamais été aussi anxieux, ni aussi pressé, ni aussi tendu, ni aussi agressif. À dire vrai, si un curieux sortait voir ce que tu fabriques, tu ne lui ferais pas comprendre qu'il doit retourner se coucher, non. Tu lui éclaterais le crâne contre un mur. Rien que pour oublier l'envie de fumer, le besoin de fumer, et l'idée qu'une vie sans fumer manque cruellement d'intérêt. Il faut que tu fumes.
Peut-être devrais-tu aller te coucher, avec l'espoir fou que tes songes te fourniront ce que le chanvre t'apporte le reste du temps. Mais tu ne dormirais pas. On le sait, tu le sais, tout le monde le sait, inutile d'en discuter. Alors ne te reste plus qu'à poursuivre ton activité nocturne : errer. Comme si faire les cent pas, inspecter et mémoriser chaque imperfection de chaque porte, t'arrêter un instant, plaquer ton front contre le mur, tenter de ne penser à rien, et puis reprendre ta marche frénétique, pouvait mettre fin au manque. C'est vain, et les heures qui passent ne font que te rappeler à quel point ton besoin de drogue est vif, violent, impatient, impérieux. Il faut que tu fumes.
Encore, face à la porte d'une chambre close, tu t'interromps. Les lieux ne sont pas suffisamment connus pour que tu puisses connaître l'occupant de cette chambre et, finalement, peu importe. De toute façon, tu n'as eu l'heur de croiser que peu de monde pour l'instant. Toujours est-il qu'il y a probablement plus d'un amateur de fumette ici. Qu'importe ce qu'on aura à te fournir, du chanvre, du tabac, un bout de feuille, une poussière, n'importe quoi fera l'affaire, pourvu que ça se fume. Alors tu lisses un peu ta chemise, quoiqu'il soit totalement illusoire de croire que tu pourras te défaire de l'air totalement débrayé de tout homme qui toque au hasard en pleine nuit, tu remplis tes poumons d'une inspiration désespérément oxygénée, et enfin tu frappes quelques coups. Ça a intérêt à s'ouvrir. Et vite. Il faut que tu fumes.
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