Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
"De nuit et on vit, Sur cette lune on danse. C’est à ces moments qu’on sent nos vies, La verve qu’on avait restant les fonds, Le fleuve qu’on atteindra plus jamais." (Coeur de Pirate - Oublie-moi)

[Rp] Au delà du réel

La_h


Je suis revenue.
En fait, je ne suis jamais vraiment partie. J'ai juste un peu changé de forme. Un peu. Pour le reste, je suis réellement revenue. Auprès des miens. Christopher, mon fils adoré, et son petit bébé tout nouvellement né. Susi qui n'est pas bien loin, à quelques jours de marc...de vol. La fille de Susi aussi doit avoir bien grandie. J'avais promis d'aller la voir, elle aussi, Mais même sous mon état fantômatique, je crois que j'arrive encore à ressentir de la peur. Peur de voir dans quel état elle est, si la mort de sa mère l'a affectée autant que son divorce. Encore un poids qu'il me faudrait porter sur mes frêles épaules volatiles. Il est des sentences familiales qu'il est difficile à endurer.
Les jours coulaient doucement, et je n'avais encore trouvé aucun moyen de communiquer avec mon fils, sa famille ou ses bestioles. Parfois Meko semblait réagir quand j'essayais de tirer sur son crin. Une fois j'ai failli prendre une ruade. Je suis transparente, parfois j'oublie. J'ai eu la trouille de ma vi… de ma mort. Mais je n'ai rien senti.

Vous pensez qu'un fantôme peut se sentir désespéré ? En fait, il me semble bien que c'est le sentiment principal d'un fantôme coincé dans le monde des vivants, non ? Et bien figurez-vous que j'ai ressenti ça… Cent fois plus que le sentiment général qui m'accable. A cause de ce foutu cheval. Même si elle sentait – peut-être ! - ma présence, elle finissait par tenter de m'éjecter de là. Finalement, c'était peut-être juste une guêpe qui l'avait piquée. Proserpine non plus ne semblait pas me reconnaître. De toutes façons, proserpine changeait régulièrement de forme, de taille et de couleur. Quand à savoir pourquoi, vous imaginez bien que j'avais d'autres chats à fouetter. En parlant de chats, les deux chats réagissaient plus que bien, eux. C'est sans doute pour ça qu'ils sont assimilés aux sorcières. Je vous jure qu'en essayant de les gratouiller, y'en a un qui s'est mis à soupirer, et l'autre qui a remué des moustaches ! Et quand j'ai essayé de les chasser, de crier, de faire du vent, tout ce qui me passait par la tête, le plus gros chat s'est levé avec les oreilles en arrière, comme très énervé, et il est allé se coucher plus loin, ailleurs, avant de faire rageusement sa toilette. Si ça ce n'est pas une preuve qu'il a réagi à mes stimulations ! Vous connaissez les chats, pas vrai ? Alors avouez que j'ai raison !

Ce qui m'étonnais ici, c'est que malgré la ménagerie, je ne voyais pas de chiens. Moi qui aimait ça, et qui en avait assez pour tenter de monter un chenil avec Samsa…
Samsa !! Que devenait-elle ? Où était-elle à présent ? Tous nos projets devaient être tombés à l'eau. Et son mariage bien avancé avec Shawie. Son rôle de secrétaire royale prenait-il bonne tournure ? Et ses filles ? Tout un tas de questions me noya l'esprit, quand je sentis que le sentiment de désespoir fut remplacé, ou recouvert, par celui du vide, à nouveau. Ce vide que je sentais quand l'impression de n'avoir pas abouti quelque chose arrivait. Puis le manque, à égale force, arriva.
C'était étrange d'être un fantôme. Ces sentiments que je refoulais en étant vivante, par la force, par la volonté, par l'action, toutes ces sensations m'assaillaient et semblaient m'entourer comme une nappe de coton dans laquelle j'aimais m'enfouir, me nourrir de cette délicate douleur, repos égal à la torture infinie que je devrais subir ici. Et lentement, je sombrais dans l'oubli du présent.

Nouveau voyage. Nouvelle volonté inconsciente qui me guide je ne sais où. Le vent, le noir, le blanc, le vide. J'avance sans le savoir. Je bouge involontairement vers cette idée qui m'assaille. Et au bout d'un temps, inconnu, long peut-être, peut-être pas, les formes réapparaissent, les couleurs se reforment lentement. Je suis… Je suis en Alençon. Sur les murs de ce qu'on a appelé « notre futur chenil ». C'est le calme plat. Je n'entends pas les oiseaux qui chantent au petit matin. Je n'entends pas le bruit des brouettes des cerfs qui vont au travail, je ne sens toujours pas l'odeur du pain qui sort du fournil. Ni celui de la rosée qui humidifie le sol. Je vois tout en jaune et gris, un peu de marron par ici, et là du bleu, peut-être le ciel derrière cet arbre noir.

Puis une silhouette. Assise dans l'herbe, rêveuse. Une silhouette grise et blanche, mais pas ce gris et blanc d'un manque de couleur. Un blanc sale, passé, un blanc tissus qui a vécu des années de combats acharnés. Un gris brillant, acier. Un gris qui agresse de force et de volonté. Et des cheveux auburn qui flottent au vent. Cette tinte que je reconnaîtrais parmi tant d'autres.

Elle est là. Le regard dans le vide, et je m'étire vers elle, portée par le vent de la volonté, cherchant à lui faire face pour voir son visage. Elle est de dos, elle ne peut me voir. Mais… Je suis sotte. Même face à elle, elle ne pourra me voir. Et cette idée me rend nerveuse. Frustrée. Les fantômes ne pleurent toujours pas, et pourtant j'ai l'impression de sentir mes yeux s’inonder de rage, et mes mains se volatiliser d'impotence.
Samsa… C'est moi… Je suis là. Comment pourrais-je te faire savoir que je suis là ?... Il faut que tu saches que je ne t'abandonne pas. Je suis là… Oh ! Grands dieux je vous en supplie ! Laissez-moi une seconde ! Juste une seconde.
Peut-être que… Son cerbère ! Si je touche le cerbère de bois que je lui ai offert, elle saura que je suis là !
Parce qu'elle sait, forcément, elle sait que je ne suis plus vivante. Ça se voit sur ses traits fatigués.
Tu sembles si épuisée ma Samsa… La vie continue de ne pas t'épargner…
La figurine. Il faut que je touche la figurine...


--Cerbere


    "Peut-être que nous sommes victimes du destin ;
    Souviens-toi lorsqu'on faisait la fête,
    On buvait et on était drogué jusqu'à pas d'heure,
    Et maintenant nous sommes tout seuls.
    Les cloches du mariage ne sonneront pas,
    Avec nous deux, coupables d'un crime,
    L'un et l'autre condamné au temps ;
    Et maintenant nous sommes tout seuls."*




Le temps est calme en ce début de matinée. La rosée est fraîche, le ciel se pare doucement de teintes roses et la brume pèse encore dans l'ambiance la nature. Ici et là, des sifflements et des cris se font entendre, signe que les Hommes s'éveillent pour aller travailler aux champs, aux établis ou aux comptoirs, et Samsa les écoute distraitement. Son regard est fixe, porté au loin, farouchement déterminé mais désespérément vide, le visage drastiquement fatigué malgré sa force qui contient un peu les traits dans leur discipline martiale. Samsa aussi travaille. Elle travaille à se relever après les morts qui ont manqué de faucher sa propre vie, qui l'ont sans doute fauché gravement, dans un sens. Chaque fois qu'un être aimé de Samsa s'en va, c'est un morceau d'elle qui part aussi.
Quelque part dans son âme, "Cerbère" se repose, couché, et travaille en même temps. L'avantage d'avoir trois têtes. Une tête dort pendant que les deux autres se chamaillent un morceau de tissu sur lequel s'anime la projection d'un souvenir. Les crocs immenses déchirent, broient, expédient le tout dans l'être canin, là où jamais le conscient de Samsa ne pourra aller les rechercher. "Cerbère" est en train de détruire les souvenirs de Samsa avec Yohanna, effaçant petit à petit jusqu'au souvenir même de son existence. Il faut protéger Samsa, c'était le but de "Cerbère". Il avait ses techniques, souvent excessivement radicales, mais il n'était voué qu'à sauver la Baronne d'elle-même. Il l'avait protégé à la mort d'Eldearde et de Maximilien, abattant un nombre incalculable d'arbres pour la soulager, à l'abri des regards. Récemment, "Cerbère" avait dû cesser de se cacher dans l'ombre car il avait compris que jamais Samsa ne devait apprendre la mort de Yohanna ; sa mort serait celle de trop. "Cerbère" s'était dressé entre elle et la réalité, attaquant Isaure qui avait osé en parler et cracher sur l'amie tant aimée de la Baronne. A présent, il détruisait son souvenir pour ne plus que l'esprit royal ne s'interroge sur le devenir de son amie, qu'elle ne lui écrive plus jamais pour ne plus jamais s'inquiéter d'une absence de réponse. "Cerbère" érigeait un mur insurmontable entre Samsa et la réalité. Assise dans cette plaine qui aurait dû accueillir un chenil, Samsa n'y voit pas des chiens mais des armées ; "Cerbère" redirige ses pensées vers quelque chose qui peut la relever, lentement. La chute a été grave pour Samsa. Soudain, la troisième tête endormie de "Cerbère" remue la truffe et les oreilles, et les deux yeux couleur charbon s'ouvrent. Il se passe quelque chose d'anormal. La tête se relève alors que les deux autres s'interrompent dans leur combat canin. Elles ont senti elles aussi. Une âme étrangère tente de pénétrer l'esprit royal. Immédiatement, "Cerbère" se lève et prend sa position de Gardien, faisant changer l'ambiance jusqu'ici estivale.

Pour Yohanna, le ciel s'obscurcit rapidement : des nuages s'invitent tout d'abord dans le décor, presque innocents, puis ils virent au gris foncé et au noir, masquent le ciel. Un vent étrange amène un brouillard épais mais pas tout à fait opaque. Derrière le rideau brumeux, il est possible de distinguer une silhouette qui semble apparaître et se lever en même temps, gigantesque, et, lorsque le brouillard s'amincit jusqu'à disparaitre, c'est "Cerbère" qui est là. Il se tient debout, et Samsa assise, immobile, lui arrive tout juste à l'ergot.

"Cerbère" est un chien dont le physique ressemble au dogue argentin, mais le Gardien est de couleur noire. Seule une tâche blanche sur son poitrail rappelle le Cerbère Blanc présent sur le blason Treiscan et son fond par conséquent bienveillant. Enfin ça dépend pour qui. Sa taille est immense et sa musculature puissante. Les trois gueules de "Cerbère" abritent des crocs gigantesques qu'il est possible de voir lorsque l'une des têtes retrousse les babines. En l'instant, deux. La troisième gronde, les babines plissées mais pas plus encore. A l'arrière, la queue, contrairement à celle du Cerbère sur le blason, n'est pas un serpent mais une simple queue de dragon qui fouette l'air de quelques mouvements secs et irréguliers. Les pattes énormes se repositionnent brièvement et lourdement pour mieux encadrer Samsa, et les trois têtes descendent au niveau de Yohanna. Dans cette dimension surréaliste, elle n'est pas aussi petite par rapport à "Cerbère" que ce qui aurait pu être attendu, mais l'animal reste un monstre. Les grondements canins résonnent dans l'air comme de proches coups de tonnerre et, finalement, la rare voix de "Cerbère" se fait entendre, faisant trembler l'air autour mais ne dérangeant nullement la vie réelle qui suit son cours, loin de ces considérations irréelles, voire même imaginaires. La langue parlée est spirituelle, particulière aux esprits, ce qu'est "Cerbère". Et ce que n'est pas Yohanna. Pour autant, le ton et l'attitude de l'animal mythologique ne laisse aucun doute : elle n'est pas la bienvenue.



* = paroles traduites de Placebo - Protect me from what I want


_________________
La_h
D'accord. Donc Samsa veut me bouffer.
Ou plutôt cet… espèce d'avatar qui la représente si bien.
Oui, au début j'ai cru qu'elle avait acheté trois gros chiens pour commencer notre chenil. J'y ai cru. J'ai voulu y croire. Jusqu'à ce que je voie les trois têtes n'avoir qu'un seul corps. Au fond, j'aurais pu lui gueuler « Hé ! On avait pas pour projet de se lancer dans les animaux de foire ! Ni dans les bestioles handicapées ! » Mais elle ne m'aurait pas entendue. Et pour tout vous avouer, quand j'ai vu les crocs de la bête, j'ai arrêté de penser à des trucs stupides. J'ai plutôt pensé à quelque chose de très sensé… Qui s'est révélé lui aussi tout à fait stupide : survivre.
Je suis toujours un fantôme. Je suis donc déjà totalement morte. Que pouvait donc bien me faire cette bestiole ? Enfin, le lien entre l’emblème de Samsa et cet animal se fit au fond de mon crâne de fumée. Il est comme moi. Il n'est pas réel. Enfin croyez-moi, je l'ai trouvé extrêmement réel. Je sentais même son haleine de viande tournée me souffler dans le nez. C'est fou comme les bonnes choses n'ont plus d'odeur quand on est mort, par contre, tout ce qui est à moitié pourri ou décomposé, ça, on le sent bien ! Un conseil, ne mourrez pas. La mort, ça pue.
Bon et lui alors ? Vivant ? Mort ? Ses crocs avaient une couleur luisante qui semblait aussi effrayante que la lame de la grande faucheuse. Même morte, je me sentais un peu…. Morte de trouille. Et puis cette ambiance glauque, avec des gros nuages noirs partout.. Brrr ! Ca y était, j'étais enfin transportée en enfer lunaire. Je le savais. Il me fallait faire un dernier adieu à ceux qui le méritaient et pouf !
Bon alors par contre, faudra que je fasse parvenir un message à neveu Théodoric. Merci à Sainte Guilberte, mais par contre ce sont les grecs qui ont raison. Quand on meurt, on se retrouve en enfer devant cerbère ! Pas du tout sur la lune. Pas. Du. Tout.

Le voilà qui se met à gronder d'une façon tout à fait étonnante. Peut-être qu'il me pose des questions pour mon passage de l'autre côté ? Non, on dirait plutôt qu'il a envie que je fasse demi-tour. Mais… Pourquoi je suis là, moi, déjà ?
Hey ! Samsa est toujours derrière toi ! Laisse moi passer chien crapuleux ! Je dois lui parler avant de partir de ce monde ! Non ?
Graaaouaaaaarrhhhoaaahhh ? Pardon ?
Bah faut savoir ! T'es là pour me laisser passer ou pour me bouffer ? Laisse moi juste essayer de lui parler ! Mais de toutes façons ça ne marche avec personne ! Laisse moi au moins la regarder…
Giarf ! Ma main ! C'pas parce que je suis morte qu'il faut me bouffer la main là ! Oh !

Quelque chose clochait. Ses dents avaient frôlé ma main, je l'avais presque senti. La tiédeur de ses babines, l'humidité de sa langue. Il n'était pas vivant comme Samsa. Mais pas mort comme moi. Et pourtant, il semblait… Capable d'être dans mon univers. Ou moi dans le sien. Tout portait à croire qu'il était le gardien de mon amie. Mais s'il m'empêchait de l'approcher, c'est qu'au fond, je pouvais y arriver ! Oui ! Malgré tous mes essais, je n'avais encore rien trouvé pour communiquer avec les vivants. Mais lui détenait peut-être la clef !

Il me fallait lui parler. En premier lui, lui montrer que je n'avais aucune intention de nuire à Samsa. Puis, essayer de communiquer avec lui. Et si les sortes de bruits qu'ils poussaient étaient son langage ? Malheureusement, parmi les bouquins étudiés sur terre, j'avais eu Grec, Latin, mais pas Cerberus Mortadelus. Pourtant, je devais essayer coûte que coûte.


Premier essai.
Boooonjouuuuuuuur Cerbèèèèèreuuuuuuh. Pourraiiiiiiis-tuuuuu me laisseeeeeer passsssssserrrr saaaans meuuuuh bouffer la maaaaiiiiiin ??…. *

Longue attente du résultat, la bouche en cœur et les yeux qui auraient pu paraître humides… Je me sentais pleine d'espoir.


* Pardon pour le WTHeck. Mais tout le Rp n'en est-il pas?


Cerbere


    "Il n'y a plus rien là où il s'allongeait d'habitude,
    Mon inspiration s'évapore,
    C'est ce qui est en train de se passer, tout va mal, je suis en mille morceaux.
    J'ai perdu tout espoir, c'est ça ce que je ressens.
    J'ai froid et j'ai honte, allongée nue sur le sol ;
    Ce n'est pas parce que j'en rêve que cela deviendra réalité.
    Non je ne rêve pas, et pourtant même le ciel bleu me semble orageux
    J'ai perdu tout espoir, c'est ça ce que je ressens.
    J'ai froid et j'ai honte, pieds et poings liés, anéantie sur le sol ;
    Tu arrives un peu trop tard, je suis déjà dévastée."*



"Cerbère" n'est pas vraiment un esprit, un fantôme encore moins, il est une facette de Samsa, un hôte dans son esprit, dans son coeur, dans sa nature, un envoyé du Très-Haut ou du Sans-Nom, qu'importe ; il est son Gardien, il est sa Force. Sans lui, Samsa n'est rien de plus qu'une petite femme comme les autres, avec des rêves mais pas d'ambition, avec une épée mais sans capacité d'action. A l'inverse, "Cerbère" ne tient sa force et sa puissance que de ce que Samsa veut bien lui donner et depuis la mort d'Eldearde et de Maximilien, depuis qu'il l'avait protégé de celle de Yohanna, "Cerbère" était presque aussi imposant que lorsque la Baronne avait perdu Zyg pour sombrer totalement dans la schizophrénie. Yohanna devait partir, partir avant que Samsa n'apprenne la terrible vérité et ne puisse plus se relever, que lui non plus ne puisse plus la relever. Alors que la Hache tente de s'approcher, une des têtes de "Cerbère" lance ses crocs en avant pour la mordre, la saisir pourquoi pas et l'envoyer voler loin mais elle n'est que transparence, fumée. Pourtant le croc qui la frôle n'a pas frôlé du vent ; ils sont du même monde et différent à la fois. La deuxième tête s'insurge de ce mouvement soudain, inattendu, et tente de mordre sa voisine, provoquant querelle entre les deux. La troisième à son tour rentre dans le débat et remet les autres à leur place. Dans le concert de grognements et d'aboiements sauvages qui a grondé, "Cerbère" s'apaise. Il n'était rien de plus que l'illustration des différentes facettes de Samsa, ces différents tempéraments qui l'habitaient : la Protection, la Fierté et le Calme. Comme les couleurs primaires, en les mélangeant, on pouvait obtenir toute la palette des réactions de la Baronne.

L'animal mythique revient à la Hache qui lui parle étrangement -bien que ce soit lui qui ait commencé. Il aurait dû s'attendre à une telle réaction de Yohanna ; c'est son amie aussi, après tout. C'est elle qui a manqué de le faire flancher, la nuit du Nouvel An. Yohanna a éveillé le coeur de Samsa, c'était son Âme Soeur, non pas au sens amoureux -encore que- du terme, mais au sens purement existentiel. Elles étaient semblables, elles se comprenaient, elles allaient au même endroit en empruntant des chemins différents mais parallèles. C'est parce qu'elles avaient ce lien si unique que "Cerbère" refuse de la laisser s'approcher. C'est parce que Samsa a perdu trop de ces liens particuliers qu'il ne peut pas laisser la Hache en rajouter une couche ; il ne pourrait alors plus la protéger, plus la sauver. "Cerbère" a épuisé ses ressources, joué ses dernières cartes jusqu'à l'as dans sa manche, mais il aime Yohanna. Alors le monstre se couche. Samsa entre ses pattes, le gigantesque chien est devenu calme mais alerte car il n'est toujours pas permis d'approcher la Baronne, les crocs qui se découvrent aux tentatives en témoignent.


-Tu ne passeras pas.

La voix de "Cerbère" est infiniment grave et caverneuse, comme venue d'outre-tombe. Il y avait quelque chose de terrifiant à se dire que Samsa avait pu avoir un semblant de cette voix face à Isaure. Une des têtes de "Cerbère", la première -la Protection- descend au niveau de l'épaule de Samsa, bienveillante envers elle, un peu moins envers Hache mais en tout cas pas agressive.

-Nous la protégeons de ta mort pour qu'elle ne sache jamais.

Au coin d'une babine de la tête proche de Samsa, la plus à portée de Yohanna, un morceau de tissu est coincé de la querelle précédant l'arrivée du fantôme. Il a l'apparence d'un bout de lin mal tissé sur lequel s'agitent, comme un film, des souvenirs de Samsa et Yohanna. Sur celui-ci, leur première rencontre, la soirée de leur échange de vie pourrie, le début de leur indéfectible amitié. "Cerbère" avalait ces moments, les détruisant de la mémoire consciente de Samsa mais pas de son subconscient puisqu'il était lui-même une partie de l'esprit de Samsa. Un jour, peut-être, elle serait assez forte pour savoir mais en l'instant, le risque qu'elle se demande où était la Hache, qu'elle la cherche, apprenne la vérité et en meurt était trop grand.

-Qu'est-ce que tu veux ?


* = paroles traduites de Natalie Imbruglia - Torn



_________________

La_h
Il parle correctement. Enfin... Correctement est un bien grand mot. Disons qu'il parle correctement pour un chien à trois têtes. Je ne sais finalement pas s'il parle correctement, ou si c'est moi qui me suis mise à le comprendre, mais ça reste une voix d'outre-tombe. Et le premier instant de stupeur passé, je me rends compte qu'il n'est pas là pour me faire changer de monde et passer en Enfer, mais juste pour protéger Samsa. Son attitude ne laisse aucun doute, il veut la protéger de moi. Mais pourquoi ? S'il est, comme je le pense, une partie d'elle, son inconscient qui me parle, pourquoi m'empêche-t-il d'approcher ? Que s'est-il passé pour que je n'aie plus accès auprès d'elle ? Elle dont j'ai vu les plus beaux aspects. Elle qui, mon double, ma complice, mon idéal, ma baronne, aurait pu être tout pour moi si nos destins ne s'étaient pas croisés si tard. Elle qui pourtant a noyé ma vie de bienfaits et a tenté de redresser le chemin tortueux que j'avais dessiné. Nos vies étaient parallèles parce que tu as accroché mon cœur à ton destin, Samsa. Pourquoi ne puis-je passer ?
Sait-elle que je suis morte ? Serait-ce pour ça que le chien ne veut pas me laisser passer ? Il ne veut pas qu'elle souffre...

Oui, c'est ce qu'il dit lui-même, peut-être ressent-il mes pensées, ou les lit-il sur mon visage fantomatique. Mais cet aveu me glace. Je le regarde, longuement, tétanisée. Elle ne sait pas, et il ne veut pas qu'il sache. Pourtant, elle finira bien par l'apprendre. D'une façon ou d'une autre. Comment pourrait- il pour toujours le lui cacher ?

Ce que je veux ? Que répondre ? Je suis là pour voir comment va Samsa. Prendre de ses nouvelles, lui dire que je suis toujours là. Mais si elle ne sait pas, peut-être que la laisser encore un peu dans l'ignorance n'est pas une si mauvaise idée. J'espérais secrètement qu'avec le lien qui nous unissait, elle aurait trouvé un moyen... J'aurais trouvé un moyen de dire à tous que je suis encore là. Mais je ne m'attendais pas à ça...
Pendant que je cherche une réponse, mes yeux se posent sur les dents desquelles je me méfie encore malgré l'agressivité retombée du canidé à trois têtes. Et parmi ses babines, je vois le tissus. Je vois toujours un peu flou tout ce qui m'entoure, et plus étonnant encore ici, je vois avec des couleurs tout à fait étonnante. Toi lecteur, tu peux facilement comprendre si je te dis que je vois en négatif. Mais moi je ne sais pas encore ce que c'est. J'ai du mal à reconnaître les visages, les lieux... Sauf avec un peu de concentration.
Soudainement je vois, je sais, je comprends. C'est elle et moi. Je reconnais cet apparemment où nous avons passé la nuit à mon retour du bout du monde. Je vois la cheminée. Je pourrais presque entendre encore les dialogues, même s'ils sont dans ma tête. Encore une fois, j'ai envie de pleurer, mais rien ne vient. Aucune larme. Sauf la colère qui m'inonde. Cette colère froide que je manifestais souvent en décrochant ma hache de con lien de cuir. Cette menace sourde que les gens présents pouvaient lire sur mon visage.
Et le lin disparaît entre les babines. Il les avale.


Qu'est-ce que tu fais ? Que fais-tu de ces souvenirs ?! Réponds ! Tu les détruits ?!


Ma vie. Mon existence même, partagée avec mon adorée, il la fait disparaître d'un goulu coup de lange de l'esprit de Samsa. Comment ose-t-il s'arroger le droit de faire disparaître ces moments si précieux ? Comment peut-il agir en toute impunité ? J'ai envie de tout casser. Ma fureur gronde, et j'ai l'impression que le temps change, pas uniquement dans notre environnement factice. Le vent se lève. La pluie suivra bientôt. Et les humains ne trouveront pas ça anormal, en Alençon...




Cerbere



    "Maintenant que tu es partie,
    Je réalise que mon amour pour toi était fort
    Et tu me manques maintenant que tu es partie ;
    Est-ce la façon dont c'est censé se passer ?"*



A la colère de Yohanna, ce sont les crocs de "Cerbère" qui répondent en se découvrant de sous les babines. Il est une partie de Samsa, il est radical, extrême, il ne s'embarrasse pas des conséquences de ses actes mais il ressent, il ressent la peur de la Baronne, son amour, sa colère, beaucoup. Tout le temps. Lui aussi il pourrait accuser Yohanna d'être morte, comme les autres, d'avoir laissé la Baronne là, seule, suicidée comme les autres. Mais il sait que ce n'est pas vrai ; "Cerbère" a entendu ce qu'a dit Isaure, contrairement à Samsa. Il est une partie d'elle, il ne peut rien détruire d'elle de façon définitive ; il ne peut pas se détruire.

-Tu ne sais pas, toi, dans quel état de faiblesse et de fragilité elle est. Elle a perdu son Frère, Maximilien, suicidé. Elle a perdu celle qu'elle appelait sa Soeur de Vassalitude, suicidée. Elle ne pouvait pas te perdre toi aussi et tu es morte.

Ce soir-là, dans cette taverne, quand elle a entendu que tu n'étais plus, nous l'avons vu. Nous avons vu la vague, immense, plus gigantesque que nous, arriver sur elle. Nous avons vu l'éclat de la Faux lorgnant de trop sur le fil ténu de sa vie. Alors, avant qu'elle ne l'atteigne, nous lui avons sauté à la gorge et nous l'avons mise à terre. Samsa ne peut plus apprendre que tu es morte, désormais ; nous veillons à ce que ces lames mortelles ne l'atteignent plus. Mais Samsa est ce qu'elle est de nature : un danger pour elle-même. Nous ne pouvons pas la protéger de ses propres questions, de ses propres interrogations ; elle pensait à toi. Qu'aurions-nous fait le jour où elle t'aurait écrit pour savoir comment tu allais ?


"Cerbère" est le protecteur le plus extrême de Samsa mais il n'en est pas moins bienveillant, notamment auprès de ceux qui ont su lui parler, le calmer. Yohanna faisait partie de ce groupe, en peloton de tête. L'animal relève sa tête précédemment abaissée et continue son récit, terrible par cette décision qu'il a prise et dont il parle sans regret. Parce qu'il n'y a rien à regretter.

-Nous détruisons ses souvenirs de toi de son conscient. Nous les avalons pour que jamais elle ne tombe sur les lambeaux au détour d'une pensée fugace, pour que jamais elle ne les trouve si elle les cherchait. Mais nous ne les détruisons pas de son esprit.

Nous sommes Cerbère, son Protecteur et Gardien. Nous sommes Chien. Nous lui rendrons quand elle sera prête de nouveau, un jour, à affronter un deuil. Ton deuil. Elle en est loin. Très loin.


Les énormes pattes ont entre elles la carcasse imposante mais en l'instant si frêle de Samsa. Son visage est soucieux, inquiet, fatigué, au bout, gris et pas seulement parce qu'il n'y a pas de couleurs pour Yohanna. Le chien soumis, nullement intéressé par le pouvoir -contrairement à d'autres voix ponctuelles dans les moments critiques-, abaisse ses trois têtes au niveau de la Baronne, bienveillant, et regarde Yohanna de ses trois paires d'yeux sombres.

-Elle ne survivra pas à la nouvelle de ta mort. Son coeur n'y survivra pas. Tu ne le savais pas ? Tu n'as pas vu ? Tu ne l'entends pas ?

"Cerbère" sait, lui. Il sait que Samsa souffre d'arythmie cardiaque de façon ponctuelle, de plus en plus souvent. Il sait, il entend, son coeur qui fatigue, se recroqueville, s'érode, se détruit. Il sait que la Baronne ressent trop d'intensité dans ses sentiments et que cela en est la cause : elle vit et se donne cœur et âme, au sens propre. "Cerbère" le sait parce que Samsa le sait sans le savoir, parce qu'il fait partie d'elle et de cette partie qui ne veut pas savoir. D'un mouvement de queue ample et souple, le monstre fait silence autour de lui : plus de vent, plus de respiration, plus aucun bruit ne trouble leurs oreilles. Plus rien, sauf ces battements de cœur. Ils sont réguliers au début mais des épisodes irréguliers apparaissent, plus ou moins longs. L'origine même des saignements de nez de Samsa quand elle n'allait pas bien par un chagrin trop grand ou une colère trop fulgurante, l'explication évidente au fait qu'un jour, au début de sa relation avec Shawie, elle se soit littéralement évanouie alors qu'elle était en furie contre Pherea. Les battements disparaissent peu à peu, comme un bruit que l'on éloigne.

-C'est parce qu'elle revivrait Zyg, et qu'elle ne peut plus le faire, qu'elle ne survivrait pas.
C'est parce qu'elle ne t'a pas tout dit, qu'elle n'y survivrait pas.



* = paroles traduites de Basshunter - Now you're gone



_________________

La_h
Suicidé. Suicidée.
Deux personnes que je ne portais pas dans mon cœur, l'un deux que j'abhorrais sans le cacher, même. Mais qui comptaient tellement pour Samsa. La nouvelle fait vaciller ma colère, et je peux presque ressentir la peine que doit vivre Samsa à l'heure qu'il est. Je comprends mieux la démarche du chien qui veut la protéger. Un instant, mon caractère hautain et égocentrique prend le dessus. Je ne me suis pas suicidée, moi ! J'ai eu le courage de vivre, moi ! Bon d'accord, j'arrivais à finir tous les soirs ivre morte et je me suis lancée dans une guerre complètement folle qui aurait pu me couter la vie tous les jours pendant un bon mois. D'ailleurs, j'en suis morte, et de la façon la plus pitoyable qui soit, alors je vais tenter de ne pas trop la ramener.
Mais je ne peux pas supporter l'idée qu'il veuille m'effacer de la mémoire de Samsa. J'étais revenue justement pour lui prouver que je ne suis pas partie bien loin. Que je suis toujours là pour elle.

Zyg. Samsa m'en a parlé quelques fois. Toujours avec cette même douleur dans les traits, cette mélancolie qui l'habitait et ressortait à l'évocation de cette tendre amie. Pourquoi me parlait-il d'elle ? Elle ne m'a pas tout dit ? Qu'est-ce que cela signifie ?
Mais le débat serait trop long, et déjà une petite idée est en train de faire son chemin pour alléger la peine de Samsa.
J'hésite, je pèse, je soupèse, et pendant quelques longues minutes de silence, qui s'installe entre la bête et moi, j'hésite. Et si... et si...?


Tu dis que... Enfin vous... dites... qu'elle se posait des questions ? Mais vous ne pouvez pas tout effacer ! Ne serait-ce que ce pendentif qu'elle a lié à son arme. Vous comptez aller jusqu'à tout remplacer ? Les registres qui nous ont lié dans les armées? Les personnes qu'on connaît et qui lui parleront de moi ? Et tout le reste qu'on garde tout au fond de soi....

Plus besoin d'en rajouter, l'idée ferait le chemin dans l'esprit du chien. Il ne me reste plus qu'à lui laisser le temps de faire la part des choses avant de lui proposer mon idée qu'il ne pourrait pas refuser.


Voici ce que je vous propose. Je suis déjà partie loin, à l'autre bout du monde. Elle a beaucoup souffert de cet éloignement, je le sais, mais elle sait aussi que je suis du genre à repartir facilement loin et sans prévenir personne. Si elle pouvait croire que j'étais à nouveau partie ailleurs, loin, sa souffrance n'aurait pas à être.

Oui je sais, vous vous demandez déjà comment on pourrait faire ça ?
Dites-moi... Vous qui êtes... Une part d'elle... Pouvez-vous contrôler son esprit ? Ses gestes ? Si oui, c'est la solution....
il faut qu'on s'allie pour la protéger. Plutôt que se battre pour quelque chose qui la fera encore plus souffrir.... Faites moi confiance. On va la protéger.



Cerbere


    "Pense à tous les jours que tu as gaspillé à t'inquiéter, te demander, à espérer,
    Pense à tout le temps avant, n'hésite pas, contemple, non il n'est pas trop tard.
    N'as-tu jamais voulu plus ? Tu ne sais pas tout ce qu'il y a de plus.
    Tu dois garder ton esprit grand ouvert à toutes les possibilités,
    Tu dois vivre avec tes yeux ouvert ;
    Crois en ce que tu vois."*


Le Chien ne répond pas aux questions de la Hache fantomatique. Il a déjà réussi à effacer Yohanna de beaucoup d'endroits : quand Samsa compte des noms et que celui de son Amie apparait, automatiquement elle le saute, et ses comptes deviennent faux. Un mal pour un bien. Récemment, c'est une lettre de Lucie que Samsa a brûlé sous l'impulsion de "Cerbère", parce que sa suzeraine y évoquait la mort de Hache. De cela, la Baronne n'en a pas le moindre souvenir, devenant un automate pleine de déni quand la vérité tente de s'imposer à elle. L'animal tranquillement couché ne semble pas être touché par la détresse même de ce fantôme devant lui : Hache n'est pas son problème. Si elle doit souffrir pour que Samsa soit préservée, "Cerbère" n'aura aucun scrupule. Mais alors qu'elle lui propose une autre solution, il se demande s'il doit ne serait-ce que prendre la peine d'écouter, s'il peut considérer ne serait-ce qu'un instant qu'il y a bien une autre option.

-Nous pouvons contrôler sa mémoire et des gestes à courts termes. Comme brûler une lettre où ta mort est évoquée. Par exemple.

"Juste un exemple comme ça, pris au hasard..."

La fumée de hache voit à son ton que le tri-chien n'a pas l'air très coopératif. Il reste sur la défensive bien qu'ouvert au dialogue. Il faut donc qu'elle lui vende l'idée mieux que ça. Petit tour de cadran pour chercher une idée, une solution, un "truc" qui servirait de déclic incontournable.
Brûler une lettre où sa mort est évoquée ? Mais de quoi parle-t-il ? Quelqu'un parle d'elle ? Oh!... Oui, bon, ce n'est pas réellement le moment de se gorger de fierté là ! Un peu de sérieux.
Si sa mort est évoquée, c'est que beaucoup de monde en parle. Yohanna n'avait pas que des amis, plutôt surtout des ennemis qui doivent se réjouir de sa mort... L'idée serait de faire croire qu'elle n'est pas réellement morte... Ce serait extrêmement tentant... Oui mais voilà, ce ne serait pas assez crédible, et Samsa en pâtirait plus qu'autre chose. Non, il fallait trouver une idée qui ne la protègerait, qu'elle, de cette mort qu'elle ne pourrait pas supporter.


-Du court terme hum? Dommage... Je pensais que vous étiez plus forts et plus doués que ça... On aurait eu besoin de la contrôler une dizaine de minutes, vous voyez ? Le temps de mettre en place quelque chose... Comment expliquer... Le but serait.. Qu'elle reçoive une lettre de moi. Crédible, hein ! Une lettre où elle apprendrait que je suis partie loin, pour fuir, en bateau, mais que surtout elle doive garder ça secret. Le coup du voyage à l'autre bout du monde je lui ai déjà fait. C'est crédible. Le coup des ennemis mortels, elle me croira. Bien sûr elle voudra m'aider, mais si je suis loin elle ne pourra pas. Et si elle me croit en sécurité, elle ne s'inquiétera plus.
Mais pour ça, il faut que quelqu'un prenne la plume... Moi, je n'y arrive pas...


Son regard se posa lourdement sur la silhouette de son amie, toujours avec cet air d'être hors du temps. Il ne restait plus qu'au fantôme à attendre l'avis du chien. Contre une petite croquette peut-être ?


Si "Cerbère" avait pu hausser les sourcils, il l'aurait fait. Des idées de merde, il en a entendu beaucoup -la plupart venant de Samsa elle-même- mais celle-ci on en tenait une bonne. Lentement, les trois têtes de "Cerbère" se rapprochent de Hache, presque jusqu'à la toucher de la truffe.

-Et qui lui répondra quand elle t'écrira ? Et quand on lui dira que t'es morte, elle devra en rire, c'est ça ? Ou feindre un deuil qui est à réellement à faire. Et comment l'idée va parvenir aux oreilles des vivants ?

On reconnaissait là l'esprit pragmatique de Samsa. En vérité l'idée était alléchante mais excessivement casse-gueule car si Samsa apprenait qu'on l'avait trompé sur un sujet aussi important, le résultat ne serait pas plus glorieux que si elle apprenait la mort de Hache maintenant. Pour autant, les bénéfices n'étaient pas négligeables, notamment pour la santé de la Baronne, qu'elle soit physique ou mentale. Il n'y aurait plus besoin de rester sur le qui-vive, d'enfoncer l'esprit dans le déni et dans l'amnésie ; le subconscient prenait les coups du réel.

-Ton idée est dangereuse si elle échoue, là où la notre ne peut pas échouer. Mais nous imaginons que nous serons son filet. Traduction : "là où toi tu ne le seras pas, puisque tu es morte." Alors, quel est le plan ?

Vexée. Elle est vexée comme une pie qu'il rejette aussi facilement son idée. Elle n'avait jamais vu une part aussi orgueilleuse, chez Samsa. Ce chien était-il réellement une part d'elle, ou bien un truc qui commençait à devenir bien trop indépendant ? Et voilà qu'après avoir craché sur toutes les idées, en enfonçant bien dans la tête de la H qu'elle n'était plus bonne à grand chose, il demande quand même le plan. La blague.
Elle croise ses bras faits de néant et son expression devient dure. Oui, le fantôme de Yohanna est parfaitement elle depuis toujours et encore pour longtemps.


Faut savoir, on le fait ou pas ? Et puis votre idée est bien plus instable et fragile que la mienne. Je vous l'ai déjà dit. Que dira Samsa quand on lui demandera une réponse à une lettre sauvagement brûlée ? Et si un soir elle évoque les souvenirs de l'Anjou avec ses amies ? Elle a beaucoup d'amis angevins. Et je suis détestée là bas, tout le monde me connaît. Je viendrais sans cesse sur le tapis. Vous comptzs réellement avoir à agir à chaque instant, ainsi, jusqu'à épuisement ? Il y aura bien des moments où son esprit se rebellera de vos actions pour finalement lui faire encore plus de mal. Mon plan est bien plus logique et il ne souffre d'aucune faille.
Il faudra qu'elle croie que je me fais passer pour morte aux yeux de tous. Elle sera la seule à "savoir" que ce n'est pas vrai. Ainsi, tout le monde lui parlera de ma mort, et elle n'en souffrira pas. Il faudra qu'elle croie que j'ai manigancé ma mort. On trouvera bien une excuse, pas vrai ? J'étais en pleine guerre contre le domaine royal. On pourrait même lui faire croire que je fais ça pour elle. Pour ne pas entacher son nom quand les gens saurons l'affection qu'elle me porte.
Si elle m'écrit, là encore cela pourra passer. Je serais loin, les courriers n'arrivent pas forcément. Et puis elle sait mon habitude à ne répondre aux courriers qu'une fois tous les Saint Cyprien
- comment ça cette expression n'existe pas ? et alors ? - Et puis ce sera bien plus facile de lui écrire une fois de temps en temps plutôt que guetter tous les instants où elle va avoir affaire à mes souvenirs, vous ne croyez pas ?

Gentil chien chien. Encore un peu et elle lui aurait fait des groutgrout aux oreilles. Si elle avait eu trois mains.

Alors ? Croyez-vous pouvoir la contrôler assez de temps pour lui faire écrire une lettre factice? je vous la dicterai.


A ce stade, ce n'est plus du culot, ni même de la témérité. C'est bien au-delà, c'est inqualifiable, aucun mot n'existe pour cela. L'idée en elle-même mais également la Hache qui a l'air tout aussi déterminée à ne pas comprendre que "Cerbère" EST l'esprit de Samsa, en tout cas à moitié ; c'est juste qu'il dort la plupart du temps. Bien sûr qu'il s'épuiserait pour Samsa, bien sûr que ça pourrait être son arrêt de mort à elle aussi, mais serait-ce vraiment sa faute ? Ne serait-ce pas plutôt la faute de la vie et de ceux qui, comme l'eau érode la pierre, n'auront pas cessé de grignoter la vie en elle ? La première tête gronde en découvrant les crocs, la deuxième aboie et repart dans une chamaillerie agressive pendant que la dernière tête s'invite pour les dominer. L'animal se lève afin de mieux se battre. Visiblement, l'idée fait dissension. Rien d'étonnant.
Pour autant, la victoire finit par arriver, toujours à la Raison. Le Cœur de Samsa, aussi grand soit-il, n'était jamais victorieux. Sauf rares exceptions afin de confirmer la règle. C'est une tête quelque peu écorchée sur un côté par les crocs voisins qui revient près de Yohanna alors que le Gardien se recouche, protecteur.


-Très bien. Ainsi nous ferons. Nous veillerons à son esprit. Mais nous ne le faisons pas pour toi ; c'est pour elle que nous le ferons.

"Cerbère" n'a aucune garantie de pouvoir contrôler de façon aussi consciente, sans danger immédiat, la Baronne pendant autant de temps mais il y voit la possibilité d'un échappatoire à la situation où il s'est enfermé, où il a enfermé Samsa. La nouvelle prison n'en serait qu'une autre de déni et de d'oubli ; elle serait simplement en or, contrairement à celle-ci.


Écrit à 4 papattes avec JD Yohanna-mourue ♥
* = paroles traduites de AnnaSophia Robb - Keep your mind wide open



_________________

See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)