Alphonse_tabouret
12 Octobre
Ville sest retrouvée, maison sest rhabillée.
Lescapade est finie, le temps des narcissismes aussi ; lAtlantique tient à la spirale dun coquillage, et lon a souri dune nostalgie en trouvant grain de sable égaré sur le plancher de Vésone au sortir dune botte.
Contrecoup des heures salées de septembre, des sèves qui poissent encore les mains de quelques souvenirs, Tabouret au sommeil déserté, sombre dune angoisse quil reconnait ; il flotte dans lair lodeur rance dun chèvrefeuille en putréfaction et la douceur de lédredon laccable dune fournaise avide.
As loud as hell
Aussi fort que l'enfer
A ringing bell
Retentit une cloche
Behind my smile
Derrière mon sourire
It shakes my teeth
ça secoue mes dents
And all the while
Et sans cesse
As vampires feed
Comme la nourriture des vampires
I bleed
Je saigne
Aussi fort que l'enfer
A ringing bell
Retentit une cloche
Behind my smile
Derrière mon sourire
It shakes my teeth
ça secoue mes dents
And all the while
Et sans cesse
As vampires feed
Comme la nourriture des vampires
I bleed
Je saigne
Fatigue sest muée en ces énergies blêmes, qui alimentent les muscles mais assèchent lesprit , et lâme régressant des perspectives à venir, Alphonse pris au piège des prémices dune crise nenvisage que léchappée en guise de support : quotidien sert son lot, son dû de patiences sans plus en ajouter à la liste et défaire la clarté dun sommeil blanc, alors, dans un silence de chat, le lit a été quitté, les affaires ramassées et lescalier descendu sans éventer le secret de son départ ; Vésone, comme les maisons que lon aime, sest vue percer de ses secrets , et cest dinstinct désormais que lon évite les deux marches qui grincent à chaque passage lorsque lon se fait silencieux.
Mots dressés hâtivement sont froissés dune colère qui peine à se retenir ; dextre embuée des contractions jumelles a serré la plume jusquà dénaturer le fil de lécriture et pousse lexaspération dune octave supérieure.
Lettres senchainent de nivelés hésitants si bien que lon pourrait les croire tracées par un enfant, cimentant aux tempes les remugles déliquescents de ces humiliations sismiques qui fêlent la parfaite maitrise des gestes que lon lui envie tant. Blasphème fend lair dune sentence en même temps que le vélin sexaspère dune existence, et porte se referme sur le bâillement dun chiot curieux qui viendra dormir contre son battant jusquau retour du maitre ; lon épargne maison de la viscosité de ses séquelles, ne laissant au témoignage dun sommeil qui pourrait se fendre dune absence, quune écriture grêlée annonçant insomnie et retour avant laube.
Enfoncée au fond dune poche, Senestre est muselée ; voilà plusieurs minutes déjà quAlphonse, mélomane averti, a essayé de faire taire les nerfs grippés de liminaires désaccords, la chair pincée de ses premières aigreurs, piquant de douleurs à laléatoire les sillons des cicatrices envahissant ses poignets.
En vain.
Périgueux vide à lheure bâtarde se remplit dune colère exsangue, vrillant jusquau pas qui chancelle et appuie la silhouette à la verticalité dune cloison. Trop tardive pour être encore entravée de quelques réunions aux tripots qui affichent devanture dans la rue principale, trop jeune pour que les premiers artisans ravivent les feux des fourneaux, nuit sest posée dun voile de silence que ne trouble que le pas nerveux de Tabouret et parfois le sifflement de ses poumons poissés.
Lon évite les caves de Saint Front, dos rond en passant aux courbes ahuries ennuageant lopaque de tuiles, culpabilité accélérant les battements névralgiques dun cur tachycarde ; Faust ne doit pas savoir.
Responsabilité est trop lourde pour la lui poser au front, le sevrage trop complexe pour lui demander dêtre antidote ; remède des diversions ne marche quà sa voix, quà sa souveraineté ouvrant de béance chaque porte de lâme pour espérer y filtrer le poison, quà la mélodie de ses mots, à la teinte des guèdes qui surplombent patiemment le néant jusquà trouver de la matière.
Non, Faust nen saura rien, prélat déjà accaparé de toutes parts, de tous côtés et de tous fronts, aux bouches avides de chacun, aux besoins de tous ; à cette heure, il dort paisible, insouciant, et fauve agité, honteux, Alphonse amoureux ly a laissé.
Prithee, my dear,
Je vous en prie, mon cher,
Why are we here
Pourquoi sommes-nous ici
Nobody knows
Personne ne sait
We go to sleep
Nous allons dormir
As breathing flows
A mesure que les respirations s'écoulent
My mind secedes
Mon âme se sépare
I bleed
Je saigne
Porte se pousse dune brusquerie sur une pièce vide et à labri des murs, Tabouret ose enfin sortir sa main de sa poche : frappée dun instant blanc contre les briques dun mur, elle tremble encore de saccades jusquà faire lézarder les écorchures de failles et de nappes ; vision se trouble dune lueur et le rouge envahit lhorizon dune lourde seconde.
Lon ne sent plus le chèvrefeuille en décomposition, lon est le chèvrefeuille et lon se décompose.
Il ny a plus de pensées, plus de fil rattaché et la seule voix qui perce le coton embrumé du monde est une litanie qui use les dernières résistances.
Tais-toi tais-toi, tais-toi, tais-toi, tais-toi
Percer dune douleur réelle celles qui nexistent quaux souvenirs devient à ces moments lextatique exutoire des cauchemars, la solution facile, celle que lon sait capable dhégémonie, alors, lon fouille la salle dune étincelle, dune idée qui semble résoudre chaque enfer, et quand Senestre se pose de force à la table, sétoile de soubresauts grotesques qui crispent la mâchoire dune concentration titane, Dextre se suspend au-dessus, tisonnier empoigné planant dune ombre rectiligne aux mouvances déjà ensanglantées.
Tais.
Toi.
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