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[RP] La ballade des Pottoks

Cixi_apollonia
Goulées épanchant la soif d'enfer qui avait asséché sa gorge, Apollonia reprenait doucement les repères sensoriels d'un retour sur la terre ferme. Le gout du miel, du vin, la fraîcheur de l'eau. La rugosité des draps. La pesanteur de son corps sur la couche. L'odeur des chevaux. La gueule de Rameau. La froideur de ses extrémités.

Assimilant rapidement les mots de son voisin, les mirettes au fil de la litanie allèrent de Torchesac le grouillot à Rameau le médecin, jusqu'au paquet de lettres. Était-elle restée si longtemps hébétée qu'elle ne se souvenait pas d'avoir connu leurs noms et leurs voix là où pourtant elle connaissait la moindre aspérité de leurs mains? Spectatrice passive retrouvait soudainement son rôle en voyant la silhouette de Chevreuse et de Wayllander prendre forme près d'eux. Museau se secouant infiniment plus doucement qu'elle ne l'aurait souhaité, feulement de poumon percé échappa une protestation.



Non.. Pas Rubroek...

Dit-elle en agitant des jambes qui a son grand désarroi, restèrent de plomb, ne secouant qu'une rangée d'orteils. Dès semaines alitée sans pouvoir faire circuler le sang, faire travailler et détendre les muscles, et voilà que la Hase ne courrait plus dans les champs... Mouette à terre, ailes clouées. Il fallait réapprendre à marcher. Remarcherait-elle? Elle en douta tout à coup, suffocant de se retrouver en conscience sans la possibilité de se redresser seule. Si la machinerie n'était pas encore opérationnelle, l'esprit lui, semblait pétarader d'étincelles.

Dans un mouvement glissant, elle tenta de se lever, Mais dans une voyelle douloureuse, la main tournée vers l'extérieur, Leffe ne parvint qu'à saisir ses jambes de bois. Aurait-elle eu assez de forces physiques qu'elle aurait frappé sur elles de toute sa détermination avec rage.


Tanissa.
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Torchesac
Et de rattraper la gamine pour la réaliter.

Promis La Mouette. J'écrirai à l'Amirale, avant ... tout de suite.

Et de la laisser aux bons soins du Toubib Rameau, pour prendre la plume, à nouveau.

Tanissa.

Je secouai la tête, laissant filer les relents des rumeurs passées, de haines racontées, ...

Paroles paroles paroles ... celles qui ternissent, salissent, font du mal, font faire du mal, pour à la fin se révéler vent, fétus, riens, et nous laisser des remugles amers et rances en bouche.

Elle était loyale envers ses gens. Au moins la Mouette serait-elle sauve. Pour l'heure, c'était tout ce qui comptait ...

Je taillai la plume avec soin, jusqu'à ce que le biseau soit parfait.

Puis je pris l'encre, et la mélangeai, laissant remonter les parfums mêlés de fumée, de noix de galle, de sels et de gomme, auxquelles j'ajoutai quelques gouttes de vin et de miel pour la fluidité.

Je déroulai une feuille de papier, enduite de cire de Damas au verso.

Les parfums du passé ...

Mes mains avaient pris les cals de l'épée et de la pelle. La plume s'y logeait avec difficulté. Elle se mit bien au bout d'un moment, et je pris le temps d'écrire sobrement.




A l'attention de Tanissa de Honfleur, Amirale de France

De la part de Torchesac, frère cadet de l'Ordre Royal de l'Hospital de Saint Jean de Jérusalem


Bonser Amirale,

Je viens vous demander de l'aide pour une de vos marins blessée.

Il y a quelques temps déjà, nous avons recueilli une de vos marins, que nous avons nommée La Mouette faute de connaitre son identité, et qui est connue sous le nom d'Apollonia.

Vous êtes venue à son chevet en notre camp, à Angers. Nous n'avons pas pu nous rencontrer à ce moment.

Elle a repris connaissance, et vous a réclamée vivement.

Elle est encore fort blessée, et ne peut pas être déplacée.

Nous avons reçu ordre de faire mouvement demain. Elle ne pourra pas venir avec nous.

Je cherche une solution pour qu'elle reste bien soignée et protégée jusqu'à son rétablissement. Le Toubib Rameau restera auprès d'elle, ainsi que quelque uns de mes Pottoks. Mais j'ai peur que ce ne soit pas suffisant.

Pouvez-vous la prendre sous votre garde dès demain ?

Respectueusement,

Torchesac
Frère cadet de l'Ordre Royal de l'Hospital de Saint-Jean de Jérusalem

Fait et signé à Angers, le 27 décembre 1466



Sans doute pas mon plus beau texte. Mais elle était nette et sans bavure.

Je passai le papier à la poudre siccative, et soufflai. Il était prêt à l'envoi, et résisterait aux embruns.

Point de sceau pour qui n'en avait plus le droit, mais juste un point de cire pour en fermer le pli.

Je le remis à une estafette avec un simple ordre : Pour l'Amirale.

Et ... une nouvelle bouteille à la mer.
Cixi_apollonia
Un lancer.

Si Wayllander se pointait, c'en était fini. Fini la liberté. Fini la fierté. Fini les lettres pleines d'arrogance, où loin des yeux rimait avec va te faire foutre. S'il se pointait, comment réagirait-elle? Cette idée la tétanisait. Voir pour la première fois son père dans de telles conditions, cela la tétanisait. Dans un bruit mat, la lanière de cuir retomba dans l'espace vide entre elle et le plancher.

Un lancer.

Et Chevreuse? Si Chevreuse apparaissait? Même pas elle, un de ses hommes. Car c'est bien cela qu'ils feraient l'un comme l'autre. Comme on l'avait toujours fait avec elle. On ne venait pas en personne, l'on lui envoyait des émissaires. Des livrées bleues, des livrées rouges, des livrées noires... Les petites cohortes s'étaient succedées à sa rencontre sans jamais réussir à la saisir, Hase avait avant de se faire piétiner le pas alerte, l'oreille aiguisée et la ruse infinie. Désormais, seul son esprit de fer avait refait surface. D'un geste ample, elle lança de nouveau les rênes en boucle souple, tentant de viser l'encolure épaisse du Pottock. Si elle n'avait pas la force de se lever, lui avait la force de l'enlever. Nouvel échec.

Un lancer.

Tanissa tardait. Elle était partie lui chercher des onguents. Mais ça, Hase ne le savait pas. Le temps venait subitement de perdre sa densité épaisse et poisseuse, et Apollonia ne se trouvait plus engluée à sa convalescence, juste totalement prisonnière d'un retour à vitesse normale où il filait dangereusement contre elle... Torchesac absent, elle rugit lorsque son lasso de fortune glissa sur le poil dru de l'animal stoïque.

Un soupir.

Tu mens Grouillot. Les Mouettes s'en vont d'un coup d'aile quand elles sentent le vent tourner.

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Rameau
Rameau veillait, assis dans un coin.

Il ne connaissait de cette tente que les espaces, les chaleurs et les courants d'air.

L'odeur de Torchesac, de cuir, de fer, de savon, brave garçon.

Celle des Pottoks, de crin et de sueur équine.

Et celle de la Mouette, de ses blessures, de ses onguents, et de la fièvre qui se dissipaient, du vin avec laquelle Torchesac la lavait, et en dessous tout cela, une odeur de femme nubile, qui devait lui déplaire au plus haut point.

Elle avait dit, quoi, trois mots ?

Cela, et ses lettres. Merveilles !

Elle aurait dû les brûler. Et ceux qui ont une famille devraient avoir la force de les tuer tous pour s'en libérer. Et eux, ils auraient dû achever la Mouette quant il était encore temps.

Mais hélas, la Mouette n'avait pas brûlé ses lettres, ni tué tous les siens. Et ils l'avaient sauvée, lui, Torchesac, elle, et ce Dieu facétieux que tout le monde vénérait.

Et maintenant ... on attendait. Plusieurs pièces bougeaient sur l'échiquier du monde, et c'était à leur tour de jouer.

Et Torchesac avait retenu certains coups, mais il ne le pourrait pas trop longtemps sans risquer de perdre sa tête.

Il y eut un souffle ...

Puis un autre ...

Puis encore un autre ... et un soupir. Son quatrième mot.

La Mouette préparait déjà son évasion. Une autre pièce tentait de se mettre en branle.

Le Toubib sourit dans son coin, et recommença à penser, échafauder, en silence.

Attendre les prochains coups.

Il serait curieux de faire une partie d'échecs avec la Mouette, juste pour "voir" ... si elle était fou, cavalier, tour, reine ... ou une belle combinaison de tout.

Mais pour l'heure attendre. Et la laisser faire de l'exercice avec son bras et sa main.
Torchesac
C'était l'aube bleue. Tout le camp était en effervescence.

Les feux étaient ranimés, et la pitance du matin chauffait.

Partout, les gens s'affairaient à plier, trier, emballer ce qui pouvait l'être.

La ville d'Angers dormait encore. Les fours des boulangers de la ville étaient froids, pour la plupart. Aucune raison de se lever tôt ...

Je vins à la tente médicale pour y retrouver mes pottoks, le Toubib et la Mouette.


Bonjorn La Mouette ! Bonjorn Toubib ! Salut les amis !

L'air est piquant ce matin.

On commence par quoi ? Petit déjeuner ou toilette ?


Lorsque je m'approchai, la gamine se recroquevilla.

Je soupirai.


La Mouette, je t'ai vue et nous t'avons touchée partout où nous devions pour te soigner.

Je te promets de ne pas regarder ni tripoter. Je ne l'ai pas fait, et ce n'est pas ce matin que je vais commencer.

Tant que tu ne peux pas te manger, te panser, te laver, chier et pisser toute seule, tu auras besoin de quelqu'un d'autre pour t'aider à le faire.

Ça peut être moi, ou un autre, comme tu veux.

Ce que tu sais faire seule, tu le feras. Ce que tu ne sais pas faire, je le ferai, jusqu'où tu voudras ou jusqu'où le Toubib me dira. Et si vous n'êtes pas d'accord, vous réglez ça entre vous.

Cela te convient ?
Cixi_apollonia
Elle l'avait salué d'un mouvement de tête, un peu désabusée par la situation, et immédiatement elle s'était raidie. Docile, parce que c'était lui, son bienfaiteur, cet inconnu qu'elle n'avait même pas remercié pour son temps et son dévouement à une cause quasi perdue: Elle. Docile parce qu'elle n'avait pas le choix de l'être, si elle tenait à être propre et à recouvrer un tout petit peu de dignité. Fermer les yeux, garder les naseaux tendus comme ceux des Pottocks, le corps tendu comme une arbalète. Serrer les dents, attendre que ça passe et finalement lâcher un ...

Pourquoi? Votre temps est plus précieux.

Alors pourquoi Torchesac, tu le perds avec moi? Ta femme t'attends, tes frères lèvent le camps. Le camps. T'etais de ceux qui me sont tombés dessus c'est ça? Disent les yeux, avant de se détourner.


Levez-moi.

Marcher. Courir. Voilà la seule idée obsédante qui martèle ses tempes. Et ses orteils qui dansent, et ses muscles qui frémissent comme la cuisse des chevaux fourbus, son buste qui dodeline de ne plus en pouvoir de rester au lit. Allez putain. Donne-moi ton épaule et fais moi prendre l'air. Je suis entrain de m’atrophier comme une poire confite, et le bateau est parti sans moi parce qu'un marin à l'horizontale c'est pas de bon augure. Mais je suis pas finie bordel. Je le sens dans ma chair, elle palpite et remue, elle frissonne et trémule.


S'il vous plait...
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Torchesac
Le temps ... c'était tout ce que nous avions.

C'était ce que nous lui avions offert.

C'était ce que nous lui avions pris. Avec quelques petits morceaux ici et là.

Le Toubib le tint le bras en acquiesçant.


Allez, viens la Mouette. Viens voir le jour.

Et de l'aider à se lever, encore incertain de ce qu'elle pouvait faire.

La laisser venir, à son rythme. Et la voir fléchir.

Je la pris dans mes bras, assez pour la laisser se maintenir, juste en équilibre à la limite de ses forces.

D'un ordre, faire ouvrir un pan de la tente ... et laisser la lumière entrer.

Le soleil était encore un peu en dessous de l'horizon.

Il y avait quelques nuages bas, qui portaient des tons roses dégradés magnifiques.

L'air était très froid, piquant, sec.

Le givre couvrait tout.

Les braseros rougeoyaient encore.

Et partout devant nous, des gens affairés allaient et venaient, sortant des ombres de l'aube pour y retourner.


Nous partons ce soir.

L'Amirale n'a pas encore répondu. Ni la Régente.

Et je n'ai pas encore eu le temps d'écrire aux autres que tu étais éveillée.

Le Toubib Rameau restera. Il m'a pris quelques onguents pour toi, qu'il t'a donnés. Tu devrais aller mieux, un peu plus vite que prévu.

Et nous laisserons un peu de matériel ici. Et des amis restent aussi. Et un Pottok de monte, et deux autres de bât, dont un avec une civière.

Il ... disons que nous nous disputons souvent. Il a la liberté à cœur. Moi la justice et la paix.

Et nous faisons chacun des choses terribles ou absurdes pour cela.

Comme blesser une jeune femme, puis la ramener d'entre les morts et la soigner envers et contre tout.

Ou donner des onguents à une jeune femme qui doivent l'aider à guérir, et pourraient la rendre fertile ... et apte aux appétits dynastiques de sa famille.

Si un jour tu veux te venger, viens me voir.

Et si tu veux juste venir me voir, tu seras la bienvenue aussi.

Le Toubib m'a laissé entendre qu'il pourrait bien se perdre en chemin avec toi. Ou quelque chose comme ça, que je n'ai pas tout à fait bien entendu ni compris, bredouillage d'aveugle. Rien que je doive raconter ce soir à un Rubroek.

J'aurais aimé mieux te connaitre, La Mouette.
Cixi_apollonia
Quelle sensation. Pantin aux mains fortes des deux hommes, Hase retrouva ses jambes de coton, flageolantes et incapables de tenir debout plus de quelques secondes. Il faudrait des promenades de ce genre quotidiennes pour qu'elle ne finisse pas par ronger le bois de son lit. Sûr.

Observer le ciel, dire qu'elle aurait pu ne jamais revoir ce spectacle. Sentir les brûlis, enfin autre chose que le savon de cendre, la pisse et les Pottocks. Sans parler des affreux onguents de Rameau, qui malgré tout faisaient bien leur oeuvre. Les plaies avaient été refermées et n'étaient plus que cicatrices tirant et grattant. Leur douleur était désormais minime. Rien à voir avec la douleur des os de sa main, qui trop sollicités de crispations machinales lui rappelèrent qu'elle n'était pas prête de tirer seule sur des rênes. Jouer du lasso était du temps perdu. Senestre l'empêcherait encore longtemps de faire tout ce qu'elle désirait. Et que dire de sa gueule, toute balafrée à faire peur le premier qui croiserait son regard. Il lui faudrait un gant pour oublier cet outrage, mais rien ne ferait l'affaire pour sa joue.

Aux mots de Torchesac, elle resta silencieuse. Que pouvait-elle répondre, à son bourreau parmi ses bourreaux, et le seul qui avait eu la miséricorde de tenter de réparer ses erreurs? Son erreur. Elle. Le jour était beau dans sa robe de vin diluée, elle y gonfla un peu ses poumons, savourant l'air frais qui changeait de son huis clos quotidien. Elle ne regarda pas les hommes s'affairer. Seul cette ligne rougeoyante caressée par la cime des hauts arbres avait ses faveurs. Happée , peut être momentanément partie. Jusqu'à sentir que le poids de son corps contre la pression qu’exerçaient les mains de Torchesac en entrave endolorissait sa chair.


N'écrivez plus. Surtout pas. Tanissa va revenir.


Une certitude? Même pas. Un espoir, mince mais réel. Tanissa devait revenir... L'Apollonia n'avait pas mis de côté malgré l’embûche violente d'Angers son projet de prendre la mer. Fechter aurait eu un petit sourire à l'entendre, s'il avait été là. D'ailleurs, Torchesac n'avait pas parlé de Fechter, et elle se félicita qu'il n'en sut rien. Fierté mal placée reprenait ses droits. La Justice et la paix n'étaient pas encore des notions que son âge affectionnait. Tout ce qui l'importait depuis qu'elle avait retrouvé un peu de ses capacités, c'était de partir avant que Rubroek ne débarque en ville.

A propos de son ventre mort, elle ne dit rien. Se contenta d'indiquer que cela suffisait pour aujourd’hui. Une fille qui ne donnait pas d'héritier rendait forcément son père moins pressé de la retrouver. Il n'y avait aucune deuil à faire là, et sa main brisée l'alarmait bien plus que son utérus inutile. S’enchaîner d'un enfant ou non n'avait aucune sorte d'importance à quinze ans, quand la seule préoccupation résidait en la découverte des premières libertés. Des premières victoires personnelles. De l'émancipation crâne.


Dieu ne cautionne pas la vengeance. Mais l'apprentissage par nos erreurs
.

Pieuse Hase demeurait. Une facette de sa personnalité qui surprenait parfois.


Si Tanissa ne revient pas sous deux jours, Rameau et moi irons nous perdre...


Aquiesça-t-elle doucement en jetant un rapide coup d'oeil à celui qui n'en avait plus vraiment. Les deux hommes avaient compris.

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Tanissa
[Sentiers battus du Domaine Royal, retour à Angers]

L'Amiral balançait imperceptiblement sur son trône improvisé, un vieux tronc posé près du feux de camp, en regardant pensive la danse des flammes et étincelles qu'éclairaient le nuit. Près d'elle Floriantis vérifiait l'intégrité des ampoules d'onguents récupérés de sa réserve "on ne sait jamais!" Et heureusement qu'il avait sa réserve, car trouver des onguents en ces jours de guerre s'était révélé une mission presque impossible. Pas loin le reste du convoi: les trois guerrières des Highlands qui s'étaient offertes l'escorter s'occupaient des montures. En face à l'Amiral, assis près du feu, un jeune et mince marin d'origine italienne, qui cherchait d'étudier en lui lançant des rapides regards le "Tartan Titan" qui en chantonnant une berceuse en patois celtique aiguisait doucement sa hache.

Roy. Tanissa sourit vers le géant du visage tatoué que le destin avait voulu remettre sur son chemin aujourd'hui, après cinq ans depuis les guerres de Glasgow et du Galloway quand lui, ancien général écossais avait mis son épée et son armée au service de la cause de la corsaire. On aurait eu des vieilles histoires à rappeler...


- We will leave tomorrow, at the crack of down. Horses need a rest.*

Son anglais n'était pas mieux que son français, quand meme lui permettait de se faire comprendre aisément de l'hétérogène équipe des marins.
La lettre de Torchesac l'avait mise dans un état d'inquiétude: même en fouettant les chevaux à sang elle n'aurait pas pu rejoindre Angers le jour suivant. Lalla, le quartermaster avait reçu indication de veiller sur la nouvelle recrute jusqu'à son retour, et surement dans son état elle n'aurait pu aller loin mais... un sentiment bizarre, une légère anxiété était remontée et ne voulait pas la quitter.

Peut-être car cette gamine lui rappelait profondément sa fille Sarah, peu plus âgée d'Apollonia, maintenant de l'autre coin du monde à la recherche de sa liberté.


*On part demain à l'aube. Les chevaux ont besoin de reposer

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Rameau
Le 27 décembre 1466 au soir.

Il y eût tout un ballet de montures et de bâts, des adieux rapides.

L'au revoir de Torchesac dura le temps d'une accolade. Il sentait le chaudron déjà.

Les feux furent éteints en une symphonie de grésillements.

Puis il y eût un concert de pas et de sabots, ponctué des cliquètements des licols ... qui s'étiolèrent doucement dans la nuit.

Le Toubib était resté là avec les Pottoks promis, la Mouette sanglée sur une civière, un peu de matériel monté sur les brels, et le silence.

La froideur de la nuit montait.

L'Amirale avait promis à Torchesac la venue d'un "Quartermaster". Ce pouvait être un fourrier, un marinier, ou ... quelque chose d'autre.

Les pas de deux humains s'approchèrent ... des hommes récemment descendus du pont d'un navire. L'un l'interpella dans une langue latine approximative, mâtinée d'arabe. L'autre dans une langue latine tout aussi approximative, entrecoupée de mots flamands et gaéliques. Les marins se faisaient comprendre par des gestes là où la langue faisait défaut. Avec Rameau, ce serait moins aisé.

Il fallait les suivre. Il préféra éviter le moment où se faire comprendre avec des coups deviendrait nécessaire.

Il suivit avec le convoi, vers le port d'Angers, remerciant une nouvelle fois in petto le bottier qui l'avait chaussé ... sa canne lui permettait d'éviter les gros obstacles, mais la merde ...

Ils arrivèrent au sentier de bois qui bordait le port. Cela sentait le goudron et le calfat, les odeurs de renfermé des navires qui étaient restés trop longtemps en mer, celle des déchets que les gens rejetaient au port, et ces parfums de limon de la Loire qui couvraient tout.

Il y avait des gens affairés partout. On entendait les grincements des grues et les grognements des hommes de charge, les coups de maillet des charpentiers, les glissements des rabots et les tranchants des herminettes aussi. Les jurons, beaucoup, dans toutes les langues du monde connu et d'au delà. Le parfum des laines et des cotons des voiles. Les craquements des coques et des gréements. Les claquements des navires à quai. Et celui des sabots des Pottoks sur les quais.

Puis les courants d'air et la résonances des pas des Pottoks changèrent. Ils étaient à l'intérieur ... d'un entrepôt sans doute. Cela sentait fort le goudron, le chanvre huilé, le chêne aviné des fûts ... et d'autres marchandises et fournitures.

Les marins qui les conduisirent furent brusques, à défaut d'être prévenants. On le fit asseoir dans un coin, et la civière de la Mouette fut installée juste à côté.

Une torche grésillait non loin.


Tu connais ces gens, La Mouette ? Quelles sont leurs couleurs ?
Cixi_apollonia
Ja. Ze zijn koninklijk *. Pas un français, parce que les Marins n'ont pas de pays.


Dit-elle en les observant . C'était la première chose que l'Amirale lui avait appris. Tanissa était revenue. Cette fois, en s'assurant que d'une façon ou d'une autre, la Hase soit embarquée propre, sans égratignure. Elle resta silencieuse à côté du vieux, attendant de voir apparaître le grand chapeau caractéristique de l'Amirale de France. Mais Tanissa n'apparut pas. Sans doute trop occupée pour l'heure, à régler les formalités du départ, à ravitailler les quatermasters, les matelots, à vérifier que tous les équipages étaient prêts. Pieuvre Maitresse à la tête de dix caraques de guerre. Le ton sûr et ferme mais chaleureux.

On remit à Rameau un sac d'or, en guise de remerciement. Quelqu'un déposa sur la civière un paquetage neuf. Celui qui manquait à tout marin pour embarquer. Le message était on ne peut plus clair; c'était ici qu'ils se quittaient.

La jeune femme s'était redressée, assise, et malgré son silence une prière muette s'était répétée, échoique, entre ses temps brunes. "Pourvu qu'ils ne me collent pas dans une cabine entre quatre murs de bois ". Allitée depuis plus d'un mois déjà, l'idée d'être enfermée dans un espace exigu comme dans une tombe fit galoper son palpitant. Les yeux finirent par se détacher de la fourmilière pressée pour se poser sur celui qui n'en usait plus. Rameau avait été un de ses gardien. Comme Torchesac. Comme Fechter. Ganwyn. Bastian. Inscrit à jamais aux honneurs de sa reconnaissance. Quand elle toucherait terre de nouveau, qui sait, elle pourrait peut être revenir les remercier.


Dankjewel , Toubib... Il s'en fallut de peu que je ne serve de terreau au charnier... Je ne vous oublierais pas. Prenez-le sans sourciller, c'est sans aucun doute de la part de Tanissa, l'Amirale de France...

Dit-elle en secouant un peu le sac pour y faire tinter les écus, et attirer l'esgourde du vieux qui sans qu'elle ne le sache avait dejà au son une idée du montant reçu. L'Amirale avait la réputation fondée d'être d'une grande générosité. Elle ne l'avait pas oubliée, et prenait en charge le reste de ses jours de jeune recrue. La rendait Apatride, inaccessible. Entité des mers, entêtée des mers.

La main tordue vint se poser au flanc de Rameau, avant que deux hommes taciturnes n'élèvent la civière et l'emportent dans le cri des mouettes. Cette fois, elle s'en allait vraiment. Réduite, mais plus déterminée que jamais. Il n'était pas écrit que la Hase ne croise pas un autre jour un de ces hommes qui avaient permis sa survie. Peut-être seraient-ils surpris de la retrouver ... Différente. Forgée comme un sabre de marin. Polie comme un galet des plages. Libre comme un oiseau du large. Plus âgée. Et plus endurcie que jamais.

    *Oui. Ils sont royaux

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