Rollin
*Rollin, très attaché aux usages anciens, fut heureux que l'hospitalité qu'il offrait au nom de la Corporation soit si bien accueillie. Débouchant la flasque de grès brun-vert, il versa une généreuse goulée de la liqueur dorée dans un petit godet de terre sombre. Des effluves de tourbe mêlées aux piquantes senteurs de l'armoise et à la fraîcheur de l'herbe des hauts-alpages emplirent bientôt l'air
et tout sembla soudain moins sombre, moins lourd à supporter. Le paysan tendit le godet à Thornton, se servit de même, puis s'assit à ses cotés auprès de la flambée chaleureuse. Le feu lui cuisait le dos, mais cela faisait disparaitre les vieilles douleurs qui se rappelaient à lui à chaque changement de saison, aussi ne bougea-t-il plus d'un iota.*
*Le cueilleur écouta chaque mots et chaque phrases du compagnon de Lavava, et un sourire triste arqua délicatement sa bouche, accentuant l'impression de lassitude et de fatigue qui se dégageait de son visage.*
Ne le prenez pas mal, Mes Thornton, j'ai pour habitude de montrer mon respect aussi dans mes paroles Mais puisque vous m'en priez si gentiment, je laisserai bas les titres de politesse
*Inspirant profondément, le paysan tourna ses yeux noirs comme la nuit vers le jeune Estriviers. Et à mesure que le flot de ses paroles se déversait, son accent rocailleux laissait place au parler-vrai qui fut le sien en d'autres temps... en d'autres lieux.*
Je suis désolé pour votre, intendant, Compaing Il semble que la Providence ait abandonné la Savoie pour un temps Après l'incendie du moulin d'Armavir, voici la guerre portée par les Génois, puis les menaces des brigands, et chez vous la mort qui frappe à la porte... Enfin Au moins votre Mesnie se porte bien, c'est déjà ça.
Oui, Thornton, je suis las las et soucieux. Le marché a été dévasté par les récents événements et tous semblent thésauriser plutôt que partager... et je ne parle même pas des tensions au Conseil ducal, à la Maison commune ou au sein même du peuple. L'air est lourd et irrespirable ces temps-ci dans la belle Sabaudia, Compagnon, espérons juste que le printemps rafraichira un peu tout ça!
*Les propos de Rollin, étonnamment défaitistes pour qui connaissait cet homme-là, lui paraissaient sortir de la bouche d'un autre tant cela ne lui ressemblait pas de se plaindre ou de faire doléance. Fermant les yeux un très bref instant, un sourire - véritable, cette fois - illumina ses traits fatigués.*
Allons! Rien ne sert de te plaindre, Rollin...
Excusez-moi de vous ennuyer avec ça, Thornton, je pense que je manque de sommeil. Pas étonnant, me direz-vous, entre la corvée de guet, la gestion de la Corporation, la préparation du verger et des champs et le chantier du moulin, je ne sais plus ou donner de la tête.
*Le paysan qui, malgré la fatigue, venait de retrouver le sourire, versa une seconde lampée de génépi dans leurs godets en adressant un clin d'il à Thornton.*
Allons, Compaing cueilleur, trinquons au retour des Seigneurs du Bourget, et à la Savoie!
_________________
Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.
*Le cueilleur écouta chaque mots et chaque phrases du compagnon de Lavava, et un sourire triste arqua délicatement sa bouche, accentuant l'impression de lassitude et de fatigue qui se dégageait de son visage.*
Ne le prenez pas mal, Mes Thornton, j'ai pour habitude de montrer mon respect aussi dans mes paroles Mais puisque vous m'en priez si gentiment, je laisserai bas les titres de politesse
*Inspirant profondément, le paysan tourna ses yeux noirs comme la nuit vers le jeune Estriviers. Et à mesure que le flot de ses paroles se déversait, son accent rocailleux laissait place au parler-vrai qui fut le sien en d'autres temps... en d'autres lieux.*
Je suis désolé pour votre, intendant, Compaing Il semble que la Providence ait abandonné la Savoie pour un temps Après l'incendie du moulin d'Armavir, voici la guerre portée par les Génois, puis les menaces des brigands, et chez vous la mort qui frappe à la porte... Enfin Au moins votre Mesnie se porte bien, c'est déjà ça.
Oui, Thornton, je suis las las et soucieux. Le marché a été dévasté par les récents événements et tous semblent thésauriser plutôt que partager... et je ne parle même pas des tensions au Conseil ducal, à la Maison commune ou au sein même du peuple. L'air est lourd et irrespirable ces temps-ci dans la belle Sabaudia, Compagnon, espérons juste que le printemps rafraichira un peu tout ça!
*Les propos de Rollin, étonnamment défaitistes pour qui connaissait cet homme-là, lui paraissaient sortir de la bouche d'un autre tant cela ne lui ressemblait pas de se plaindre ou de faire doléance. Fermant les yeux un très bref instant, un sourire - véritable, cette fois - illumina ses traits fatigués.*
Allons! Rien ne sert de te plaindre, Rollin...
Excusez-moi de vous ennuyer avec ça, Thornton, je pense que je manque de sommeil. Pas étonnant, me direz-vous, entre la corvée de guet, la gestion de la Corporation, la préparation du verger et des champs et le chantier du moulin, je ne sais plus ou donner de la tête.
*Le paysan qui, malgré la fatigue, venait de retrouver le sourire, versa une seconde lampée de génépi dans leurs godets en adressant un clin d'il à Thornton.*
Allons, Compaing cueilleur, trinquons au retour des Seigneurs du Bourget, et à la Savoie!
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Rollin, membre de la corporation des cueilleurs de fruits de Chambéry.