Lorsque l'on vint trouver la florentine dans les bureaux de la Chambre Royale, pour lui faire parvenir un message, celle-ci était perdue entre rêveries et pensées parasites, accoudée sur sa table d'écriture, et le nez levé vers le plafond. Le tambour à la porte, aussi brutal qu'inattendu, la fit se redresser soudainement, prenant l'air très sérieux de celle qui était en pleine séance de travail, puis récupéra le pli sans un mot.
Alzo était persuadée qu'il s'agissait là d'un mot de son compagnon, essayant de briser la glace survenue au cours de la soirée de la veille, mais rapidement mesura son erreur. Le sceau comme l'écriture ne lui disait absolument rien, un peu comme le motif d'ailleurs.
Ce matin, en habillant la Reine, celle-ci ne lui avait rien laissé deviner. Comme souvent, elles avaient un peu bavardé un peu du temps du jour, des jumeaux royaux, et des potins de la Cour entre deux lacets à resserrer, mais rien concernant cette cérémonie.
Et puis un détail, et pas des moindres, lui sauta aux yeux comme un diable en boîte.- Ahhh ! Mais .. mais ... on est le 15 !!!
Pas le temps de tergiverser plus longtemps ! La journée était entamée et refuser de se présenter à une convocation royale officielle, ce n'était pas du tout envisageable.
La brunette récupéra de sous sa chaise les souliers qu'elle avait ôté pour être plus à son aise, les remit dans un exercice d'équilibriste improvisé mais contrôlé grâce à la chance du débutant et sortit dans les couloirs.
Grâce au Ciel, Vittorina arpentait le Louvre depuis plusieurs mois maintenant et le connaissait assez au moins pour ne pas se retrouver à tourner en rond dans les galeries, à revenir sur ses pas, ou à devoir demander son chemin comme une touriste paumée.
Quand elle croisait des figures de noblesse ou d'autres officiers, son pas se faisait tranquille, serein, gracieux, avec en sus moult sourires et salut de la tête, mais quand il n'y avait personne d'autre qu'elle ou des valets et des servantes, son allure se pressait, à mi chemin entre le trottinement et le véritable pas de course, quitte à prendre le risque d'une cascade mémorable.
C'est donc essoufflée qu'elle arriva, courrier en main en guise de Laissez-Passer, et pénétra la grande salle, les joues teintes encore de sa course folle.
En un rapide coup d'oeil, Vittorina remarqua l'absence de la Reine, n'était-elle pas encore arrivée ou au contraire déjà partie ?
Pour le reste de l'assemblée présente, ils lui étaient pour la plupart inconnus. Elle se souvenait un peu de Coleen, pour avoir assisté à un plaid commun, forcément de la Dauphine - le minimum syndical, non ? - un doute sur Samsa dont elle se demandait si elle ne l'avait pas déjà croisée à Limoges et ... c'était tout.
Cela ne l'empêcha pas évidemment de les gratifier d'un " Bonjour " timide, assez audible pour ne pas paraitre impolie, mais discret pour ne pas attirer l'attention, et d'oser sourire à ceux dont elle pourrait croiser le regard.
A pas mesurés désormais, et l'air de rien, la florentine s'approcha d'une jeune femme que le hasard désigna comme étant Liloia, puis tout en lissant sa jupe et remettant de l'ordre dans une coiffure bousculée, lui souffla discrètement.- C'est terminé ? La Reine est déjà partie ?
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"Dans un monde où le paraître est roi, être peut tuer."
Vittorina Gloria A.