Ogh
Assis en tailleur sur la terre humide, au bord d'un étang, Ogh fixe un os de poule qu'il a ramassé en début de journée. Un petit os robuste en forme de « V » ; pour certains, y paraît que ça porte bonheur de le casser. Ogh se souvient, marmot, en train d'essayer de séparer les deux branches du « V », les doigts pleins de graisse, sur le point d'incanter un vu préparé depuis la veille au soir. Sur sa paillasse, il avait pesé chaque mot, en avait changé l'ordre des dizaines de fois pour ne pas se faire avoir par une erreur de syntaxe ; parce qu'on allait pas la lui faire, au petit Ogh, il avait entendu plein de contes et il savait qu'un mot mal placé pouvait transformer une bonne intention en malheur. Il en était donc là, à tirer de toutes ses forces pour briser en deux ce machin, lorsque la voix de son grand-père retentit du bout de la table :
« Bah qu'est-ce tu fous !? Casse pas l'os de la poule ! Mais il est con comme une galette ce gosse ! »
Devant l'air abruti du petit-fils que le destin lui avait mis dans les pattes, le grand-père crut bon de rajouter :
« C'est un hameçon nounouille ! »
Dans l'après-midi, une fois les gamelles lavées, ils étaient allés pêcher, et le vieux avait montré à Ogh comment on fait un hameçon d'un os de poule, et comment l'on peut attraper ainsi toutes les merveilles qui vivent dans les profondeurs d'un lac, carpes, perches, gardons et autres joyeusetés. Bref, pour cette première fois, ils revinrent bredouilles.
Quelques années plus tard, Ogh essayait d'hameçonner, non plus un poisson, mais une jeune fille fraîche, comme lui, qui avait grandi entre de hauts sapins, comme lui, et dont le minois était parsemé de ces boutons rouges et blancs qui marquent la fin de l'enfance... oui, comme lui. Il lui avait offert une poularde, qu'ils avaient dévorée (cuite, rassurez-vous) à la lueur des premières amours. Quand elle tendit au jeune Ogh ce fameux os pour qu'ils le brisent ensemble, il lui répondit spontanément qu'elle était con comme une galette, et les espoirs de romance tombèrent à l'eau des deux côtés.
« Non, je l'ai peut-être inventé ce dernier souvenir... »
On s'en fout, tant que tu arrêtes de parler tout seul.
« Pas faux.»
Cours de pêche pour les nuls :
Un tige de bois ; ici, une branche.
Un hameçon ; ici, un os.
Un appât ; ici, un lombric.
Et plouf.
« Pourvu qu'ça morde. »
« Bah qu'est-ce tu fous !? Casse pas l'os de la poule ! Mais il est con comme une galette ce gosse ! »
Devant l'air abruti du petit-fils que le destin lui avait mis dans les pattes, le grand-père crut bon de rajouter :
« C'est un hameçon nounouille ! »
Dans l'après-midi, une fois les gamelles lavées, ils étaient allés pêcher, et le vieux avait montré à Ogh comment on fait un hameçon d'un os de poule, et comment l'on peut attraper ainsi toutes les merveilles qui vivent dans les profondeurs d'un lac, carpes, perches, gardons et autres joyeusetés. Bref, pour cette première fois, ils revinrent bredouilles.
Quelques années plus tard, Ogh essayait d'hameçonner, non plus un poisson, mais une jeune fille fraîche, comme lui, qui avait grandi entre de hauts sapins, comme lui, et dont le minois était parsemé de ces boutons rouges et blancs qui marquent la fin de l'enfance... oui, comme lui. Il lui avait offert une poularde, qu'ils avaient dévorée (cuite, rassurez-vous) à la lueur des premières amours. Quand elle tendit au jeune Ogh ce fameux os pour qu'ils le brisent ensemble, il lui répondit spontanément qu'elle était con comme une galette, et les espoirs de romance tombèrent à l'eau des deux côtés.
« Non, je l'ai peut-être inventé ce dernier souvenir... »
On s'en fout, tant que tu arrêtes de parler tout seul.
« Pas faux.»
Cours de pêche pour les nuls :
Un tige de bois ; ici, une branche.
Un hameçon ; ici, un os.
Un appât ; ici, un lombric.
Et plouf.
« Pourvu qu'ça morde. »