Cixi_apollonia
Honfleur
Le temps avait coulé longuement sur les mésententes intestines, les courriers perdus, les rendez-vous manqués. L'encre avait coulé, amère, jusqu'à en oublier la couleur. Décolorée au voyage. Tumultueuse. Tel était le terme que l'on aurait pu allouer à sa relation épistolaire avec son Père.
Pourtant, elle était là.
Un sbire avait rapporté sa présence au port de Honfleur alors qu'elle rentrait avec l'Amirale, en rameutant d'autres et pour une fois, elle n'avait pas cherché à le perdre. Le semer. Contrer ses intentions. Elle l'avait longuement dévisagé, quand fort de sa livrée évidente il avait détourné ses yeux du marchand qu'il questionnait pour les ancrer sur elle. Quand, sûr qu'elle allait détaler comme la Hase qu'on la disait, elle avait levé une main gantée en sa direction. Une main comme une frontière. Une frontière à ne pas dépasser.
On l'avait rapportée belliqueuse au point de s'abîmer. Fière au point de s'affamer. Tenace au point de s'entêter. Pourtant , elle resta là.
Rentrée en France après un long périple d'un an qui l'avait menée de Flandres, à Poitiers, de Poitiers à Angers, de Angers à ailleurs... Portugal. Castille. Italie. Valahia. Bursa Sancacagi, Alexandrie. Apollonia avait mûri en buvant de toutes les mer. Mer de Crète. Mer Ionienne . Mer Tyrrhénienne. Méditerranée. Baléares. Alboran. Du Bosphore à Gibraltar, jusqu'au retour en Atlantique. L'adolescente n'avait eu d'autre choix depuis la guerre du Poitou où elle s'était enrôlée avec Bastiann que de mûrir au soleil et au vent. Au sel et à l'amer. Mûrir à tout prix pour survivre.
Agitant un peu l'annulaire et l'index liés, elle incita la délégation à la suivre. Ce que les hommes, un peu hébétés, firent, sous le regard impassible des quelques marins présents. Il n'était pas question de la perdre de vue d'un côté. Pas question de les semer de l'autre. Pour une fois, la Hase ne joua pas avec les hommes de son père et contractait avec un dessein commun. Elle les fit investir l'auberge qu'elle avait choisi pour les jours à venir, retournant malgré elle à une vie à terre pleine de contraintes. Rien n'y était plus à portée de main. La caraque avait cela de pratique que l'on y trouvait le gîte et le couvert, la besogne et le chemin. Ici, tout était disparate. Morcelé . Éloigné. Lorsqu'elle s'enferma dans la modeste chambrine, elle ne fût pas surprise de constater à la fenêtre qu'en contrebas, deux hommes s'étaient postés juste en face. Pour une nuit alors, sa chambre devint navire, les gardes devinrent marée. Mouvants pour aller pisser, se désaltérer et alterner leur garde. Monter, descendre les escaliers. S'asseoir dans le couloir. Prendre repos d'un oeil.
Au matin, lorsque la porte s'était ouverte sur la jeune femme, le garde laccueillit d'un regard aussi méfiant quensommeillé. Étrange contraste. Lui tendant une missive roulée, elle lui dit simplement.
Apportez-cela à mon Père. Qu'il décide s'il me pardonne, ou si je continue mon chemin sans vous.
L'encre et la nuit avaient coulé longuement sur les hésitations intestines. le temps perdu, les mois manqués.
Pourtant, elle était là.
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Le temps avait coulé longuement sur les mésententes intestines, les courriers perdus, les rendez-vous manqués. L'encre avait coulé, amère, jusqu'à en oublier la couleur. Décolorée au voyage. Tumultueuse. Tel était le terme que l'on aurait pu allouer à sa relation épistolaire avec son Père.
Pourtant, elle était là.
Un sbire avait rapporté sa présence au port de Honfleur alors qu'elle rentrait avec l'Amirale, en rameutant d'autres et pour une fois, elle n'avait pas cherché à le perdre. Le semer. Contrer ses intentions. Elle l'avait longuement dévisagé, quand fort de sa livrée évidente il avait détourné ses yeux du marchand qu'il questionnait pour les ancrer sur elle. Quand, sûr qu'elle allait détaler comme la Hase qu'on la disait, elle avait levé une main gantée en sa direction. Une main comme une frontière. Une frontière à ne pas dépasser.
On l'avait rapportée belliqueuse au point de s'abîmer. Fière au point de s'affamer. Tenace au point de s'entêter. Pourtant , elle resta là.
Rentrée en France après un long périple d'un an qui l'avait menée de Flandres, à Poitiers, de Poitiers à Angers, de Angers à ailleurs... Portugal. Castille. Italie. Valahia. Bursa Sancacagi, Alexandrie. Apollonia avait mûri en buvant de toutes les mer. Mer de Crète. Mer Ionienne . Mer Tyrrhénienne. Méditerranée. Baléares. Alboran. Du Bosphore à Gibraltar, jusqu'au retour en Atlantique. L'adolescente n'avait eu d'autre choix depuis la guerre du Poitou où elle s'était enrôlée avec Bastiann que de mûrir au soleil et au vent. Au sel et à l'amer. Mûrir à tout prix pour survivre.
Agitant un peu l'annulaire et l'index liés, elle incita la délégation à la suivre. Ce que les hommes, un peu hébétés, firent, sous le regard impassible des quelques marins présents. Il n'était pas question de la perdre de vue d'un côté. Pas question de les semer de l'autre. Pour une fois, la Hase ne joua pas avec les hommes de son père et contractait avec un dessein commun. Elle les fit investir l'auberge qu'elle avait choisi pour les jours à venir, retournant malgré elle à une vie à terre pleine de contraintes. Rien n'y était plus à portée de main. La caraque avait cela de pratique que l'on y trouvait le gîte et le couvert, la besogne et le chemin. Ici, tout était disparate. Morcelé . Éloigné. Lorsqu'elle s'enferma dans la modeste chambrine, elle ne fût pas surprise de constater à la fenêtre qu'en contrebas, deux hommes s'étaient postés juste en face. Pour une nuit alors, sa chambre devint navire, les gardes devinrent marée. Mouvants pour aller pisser, se désaltérer et alterner leur garde. Monter, descendre les escaliers. S'asseoir dans le couloir. Prendre repos d'un oeil.
Au matin, lorsque la porte s'était ouverte sur la jeune femme, le garde laccueillit d'un regard aussi méfiant quensommeillé. Étrange contraste. Lui tendant une missive roulée, elle lui dit simplement.
Apportez-cela à mon Père. Qu'il décide s'il me pardonne, ou si je continue mon chemin sans vous.
L'encre et la nuit avaient coulé longuement sur les hésitations intestines. le temps perdu, les mois manqués.
Pourtant, elle était là.
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