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[rp]Hostel Malemort-Arduillet-Brassac, le MAB

Melissandre_malemort
La première expression du valet à l'approche de l'étrange duo fut la stupéfaction. On l'avait certes prévenu que le fils d'Arnaud se présenterait ici, mais il s'était attendu à des carrosses et de grandes pompes si propres aux familles royales et plus encore aux gouts dispendieux de l'ainé des fils. Il marqua donc un temps d'arrêt, se fit renseigner, et finalement autorisa Odinette et l'enfant à entrer dans le vestibule, si surprit qu'il en oublia de dévisager le cadet Malemort lorsqu'il remit les invités entre les mains d'une jeune servante plus aimable qui les fit s'installer.

- Son Altesse Royale va vous rece...

La jeune femme fut interrompue par le bruit d'une porte dans son dos et plongea dans une révérence à l'approche de Mélissandre. Faisant fi du protocole cette dernière se dirigeait déjà vers eux, retenant dans sa paume gauche les pans de sa large robe de brocard. Bien qu'excessivement petite, elle avait la distinction propre au sang bleu, si bien qu'en dépit de sa hâte ce fut avec beaucoup de grâce qu'elle contourna la large banquette pour venir observer Nicolas, puis Odinette.

- Soyez les bienvenus chez vous. Cet hôtel est la possession de notre famille, et vous y serez traité avec tous les égards. Cependant nous aborderont les points domestiques plus tard. Pour l'heure, mettez vous à l'aise et s'il vous plait, expliquez moi comment vous avez pu, tous deux, en arriver à un tel dénuement. J'aurais pensé que mon frère et ma belle soeur auraient songé à faire bénéficier leur héritier d'une rente... A moins que cette dernière ai disparue lorsque Esylt a été dépossédée de ses terres?

Mélissandre préféra ne pas mentionner les échanges qu'elle avait eu avec le clan Louveterie quelques mois plus tôt en apprenant que sa belle soeur avait été dépossédée de ses terres et que la famille maternelle de l'enfant en tenait le clan Malemort pour responsable. Ni ainée ni chef de famille, la comtesse ne s'occupait des siens que par loyauté envers son sang en attendant que Blanche ou Elisa puissent prendre le relais avec la légitimité qui était leur. De plus, dans le secret de son coeur, une partie d'elle même cherchait par là à détourner ses pensées de l'absence d'Aeglos et des malaises qui la prenaient parfois plusieurs fois dans la journée.

Ses souvenirs d'Arnaud étaient presque flous. Elle se souvenait de son frère ainé, de ses rires et des cadeaux dont il couvrait ses soeurs à chacun de ses retours à Ségur, tirant de ses poches des quantités prodigieuses de bijoux et de friandises. Son fils n'avait, manifestement, pas encore eu l'occasion de jouir de la générosité du comte de Turennes. Peutêtre était il temps pour la dernière née des Princesses Malemort de rendre un peu des attentions dont elle avait joui toute son enfance ?

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Nicolas.de.malemort
Odinette n'était pas à l'aise, l'accueil était assez froid. Nicolas, lui, était tout juste curieux de découvrir cette belle bâtisse. Si sa nourrice lui avait expliqué la raison de leur venue, il n'avait pas tout compris. Ou plutôt il avait tout entendu sans trop écouter. Alors qu'on les laissait entrer, ils n'eurent le temps de ne faire que quelques petits pas avant qu'une autre personne moins froide que le portier. Cependant, pas le temps de s'éterniser et de regarder l'architecture du lieu que déjà une autre porte s'ouvrit. Odinette s'interrogea alors sur le nombre de porte de cette bâtisse, mais cette réflexion fut bien courte car c'est leur hôte qui vint les saluer. Les grands yeux curieux laissèrent place à des regards mi souriants, mi soulagés.

"_ Votre Altesse" déclara la nourrice alors qu'elle ployait l'échine. Juste après, elle donna une légère secousse dans le bras de son protégé pour qu'il fasse de même. "Nicolas, saluez donc votre tante comme je vous l'ai appris.
_ Bonjour votre Altesse." La révérence qui suivit était aussi maladroite que mignonne. S'il était encore jeune, Odinette veillait à lui enseigner quelques règles élémentaires. Elle reprit les choses en main alors que Melissandre semblait déjà fort bavarde.

"_ Je vous remercie de nous recevoir et de faire preuve de générosité à notre égard. J'ai bien conscience de l'étrangeté de cette rencontre. D'aucuns auraient souhaité de meilleures conditions pour cette première réunion de famille." On leur avait dit de se mettre à l'aise alors ils s'assirent côte à côte. Odinette gardait ainsi un oeil sur les pitreries du garçonnet et ce dernier restait ainsi sous les jupons protecteurs de sa seconde mère.
"Si ma toilette peut paraitre quelconque, il n'en est pas de même pour celle de votre neveu. Contrairement à toutes les femmes, Odinette n'avait jamais vraiment été portée sur les apparences. Aussi, elle se contentait de ses avoirs sans chercher à faire déborder ses coffres. Certes les Béarnais ont quelques gouts douteux, mais la tenue est neuve. J'ai dépensé plusieurs centaines d'écus dans cet accoutrement avant que nous remontions à Turenne pour le printemps. Il grandit malheureusement si vite, que je n'ai pas eu l'occasion d'en refaire confectionner depuis.
Les destitutions successives de la comtesse et sa disparition brutale n'ont pas aidé, nous ne pouvons vous le cacher. De grands travaux ont été engagés à Turenne et les revenus bourguignons et tourangeaux servaient à faire vivre la famille. Plus de vin et plus de verre à échanger sur la Loire, seuls les revenus de Turenne et des travaux couteux. Néanmoins le Comte ne nous a pas abandonné, nous pouvons toucher chaque mois une bourse généreuse. Le petit ne manque de rien et c'est là ma priorité.

Nous étions partis en Béarn chez des amis de son grand père pour profiter d'un hiver plus doux et surtout pour échapper à la solitude qui sévit à Turenne. Le Comte absent et les ouvriers partout, nous avons souhaité voir si l'herbe y était plus verte. Nous étions partis avec une petite cassette, tout s'y est très bien passé. C'est au retour que les choses se sont compliqués. Nous avons fait une mauvaise rencontre qui nous a détourné de notre trajet. L'argent est venu à manquer et c'est alors que je vous ai écrit, sachant que le comte serait injoignable. J'avais entendu des échos de votre retour limougeaud, c'était une chance pour nous. Et aussi l'occasion d'organiser ensuite cette rencontre."


Au final, la plus bavarde n'était pas celle que l'on croyait. Odinette parlait beaucoup et Nicolas était là, assis et étrangement calme. Lui qui d'ordinaire prenait plaisir à faire tourner la tête de sa nourrice, il restait assis et silencieux. Ses yeux étaient tout occupés à regarder autour de lui et une pointe de timidité devait guider sa soudaine réserve.
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    Turenne règne !
    Nicolas de Malemort & de la Louveterie
Melissandre_malemort
Mélissandre écouta la nourrisse avec une attention particulière. Elle nota aussi, non sans plaisir, que l'enfant connaissait le protocole. Il s'agissait à ses yeux tout à la fois d'un poids trop lourd à porter et d'une condition importante pour occuper une place dans une famille qui jusqu'alors figurait parmi la plus vieille, la plus respectable noblesse du royaume, exempt des frateries gigantesques et de la vulgarité ambiante.

Du moins... Quand elle ne faisait pas scandale.


- J'aimerais vous remercier, Dame Odinette, pour votre dévotion envers Nicolas. A ce titre donc, acceptez que je vous verse des gages supplémentaires afin que vous puissiez jouir du confort qui vous revient en tant qu'employée de deux des plus grandes familles du royaume. Je vous laisserais voir cela avec mon intendante, afin que vous conveniez ensemble d'une somme qui vous paraisse acceptable. Je vous remercie également d'avoir eu la clairvoyance de m'écrire. Il est vrai que je ne suis que la dernière née, mais j'ai l'avantage de disposer de temps libre et je tâcherais d'écrire à ma soeur Elisa, qui saura nous aider. Je n'ai pas de terre ici, mais je dispose de quelques chateaux dans le nord du pays. Peutêtre pourrions nous y établir Nicolas une partie de l'année ?

Sur ces mots, Mélissandre se souvint d'à quel point elle detestait qu'on parle d'elle en sa présence quand elle était enfant. Elle quitta donc la banquette confortable, s'agenouilla sur le tapis aux pieds de Nicolas et d'un index délicat releva le menton pour le regarder. Ciel, qu'il ressemblait à Arnaud... Et malgré le fait qu'elle n'ai que peu de souvenir de sa belle soeur, il lui paraissait que le petit avait hérité quelques uns de ses traits. Bien qu'elle n'ai jamais su comment se comporter avec les enfants, celui ci était un Malemort : Il devait donc avoir le même gout que ses consoeurs pour les compliments.

- Bonjour, Nicolas. Tu ne dois pas te souvenir de moi... A dire vrai, je ne t'ai vu que bébé, et je n'étais moi même qu'une toute petite fille aux genoux crottés. Dis moi, c'est que tu es déjà très fort... Seras tu un jour chevalier, portant fièrement les couleurs de tes vieilles tantes ?
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Ain
Aïn était devant le fameux hôtel où elle avait rendez-vous. Cela faisait plusieurs minutes qu’elle regardait la bâtisse, bras ballants et un air un peu niais sur le visage.
Grâce à Maximilien, son vœu le plus cher était sur le point de se réaliser. Jamais elle ne pourrait le remercier assez pour ce qu’il avait fait et ce qu’il faisait. Aïn vouait à cet homme une véritable admiration et essayait de le prendre comme modèle. D’ailleurs, elle se posait souvent la question suivante : « Que ferait Maximilien ? » Et elle arrivait toujours à la réponse suivante : « il ne se serait pas mis dans pareille situation ! ». Du coup, ça ne servait pas à grand-chose…

Bref. La petite brune prit une profonde inspiration et s’avança avec détermination. Elle se présenta et indiqua l’objet de sa visite : elle voulait s’entretenir avec son Altesse Royale Mélissandre de Malemort.
Melissandre_malemort
[Quelques jours après son entrevue avec Nicolas.]





- Qu'on la fasse entrer.

L'ordre avait claqué depuis le boudoir ou Mélissandre rédigeait quelques courriers pour son intendante. Lorsque Maximilien lui avait demandé comme un service de prendre vassale, elle n'avait guère hésité : Bien qu'il ai des tendances à agir comme un connard, ce dernier savait jauger les gens et les rares personnes qu'il distinguait du reste en valait la peine.

Le valet introduisit donc Ain avec toutes les gesticulations possibles, se courbant presque à en faire trainer son nez sur le parquet tendit qu'il reculait jusqu'à la porte, laissant les deux femmes en tête à tête. Bien qu'elles se soient croisées ça et là, la Malemort en profita pour jauger plus attentivement la jeune femme, puis d'un geste de sa petite main blanche elle l'invita à s'installer sur la banquette garnie de brocard qui faisait face à son bureau.

- Je vous remercie d'avoir fait si vite. Si mon accord est acquis quand à faire de vous ma vassale, il n'en reste pas moins important que nous apprenions toutes deux à nous connaitre. Me permettez vous donc quelques questions bateaux, comme "D'ou venez vous" et "Quels sont vos projets"? Comme on vous l'aura peutêtre dit, je suis investie auprès de la couronne et je suis tout à fait disposée à aider mes vassaux à trouver leur place si ils en éprouvent le désir.

Il y avait une pointe d'orgueil dans la voix de la Princesse qu'elle ne cherchait guère à camoufler. Mélissandre était tout autant fière de son lignage royale que de son parcours d'officier royal. Elle se leva sur ces mots pour se rapprocher d'Ain, trahissant par là sa petite taille et sa silhouette gracile que même un port de tête irréprochable ne parvenait pas à rendre tout à fait impressionnante.
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Ain
Aïn regarda le valet faire, esquissant un sourire. Une fois qu’il prit congé, elle salua la princesse, en s’inclinant à son tour et prit place sur la banquette.
Oui, mieux valait-il qu’Aïn et sa suzeraine apprennent à se connaître. La brune répondrait à ces questions, certes, mais avec une pointe d’appréhension. Mentir n’était pas un problème pour la brune lorsqu’elle n’avait pas face à elle une princesse de France sur le point de l’anoblir.
Il n’y avait plus qu’à espérer qu’elle ne voudrait pas plus de détails…


Oui, bien sûr, je comprends…

La brune suivit Mélissandre des yeux et, une fois que celle-ci fut installée, répondit à ses deux questions.

J’ai grandi en Bretagne et j’ai pour projet d’avoir un titre, pour le moment. Et je verrai après. Je réfléchis encore à ce que je veux être et à qui je veux être. ‘Voyez ?

Bon, Aïn n’avait jamais vraiment pensé à l’après. Elle ne s’était arrêtée qu’à l’anoblissement, dans sa petite tête. De là à savoir si elle allait vouloir d’un poste à la cour ou autre, aucune idée… !
Melissandre_malemort
- Voici qui a le mérite d'être clair, c'est appréciable. J'ignore si on vous aura parlé de mes terres Mainoises : Il s'agit d'un des comtés les plus vastes mais aussi d'une place forte très mal située. Mes terres son frontalière de la Bretagne, et il arrive régulièrement que je sois la première résistence aux incursions indépendantistes. En bref donc, je n'attend pas de mes vassaux de la servitude mais une vigilance constante. Qu'un village brule parceque mon seigneur en titre n'en assure pas la sécurité me déplait tout particulièrement.

J'ai fais parvenir à Maximilien quelques uns des fiefs que je puis octroyer. Tous se situe a l'Est de Pirmil, non loin du Mans. Je vous laisserais y jeter un oeil et m'informer par courrier de votre choix de prendre ou non la responsabilité de mes gens.


Mélissandre termina sa petite tirade par un sourire. En dépit des maux qui recommençaient à lui broyer les chaires, elle s'efforçait de ne rien montrer. Elle réprimait toujours tout : colère, amour, tristesse ou déception. L'idée même de voir le Lion ramper sur le parterre de fleur lui retournait l'estomac, mais elle n'avait pas loisir de dire à quiconque quoi faire, comment et pourquoi. Elle fermait son cœur, jetait la clef aux orties et petit à petit réduisait son entourage en peau de chagrin jusqu'à blesser le moins de monde possible lorsque la maladie aurait eu raison d'elle. Une Malemort s'éteint comme une grande dame, en douceur et sans esclandre.

Pour le reste, je rédigerais une patente dès que nous serons tombé daccord. La cérémonie se déroulera en Maine : Une province mal connue mais hardie et courageuse. J'y suis très attachée. Sur ce, je vous remercie d'être venu et d'avoir fait preuve de sincérité, Damoiselle Aïn.
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--Ain
S’il y a bien quelque chose que l’on ne pouvait pas enlever à Aïn, c’était bien son honnêteté. En effet, la petite brune disait (presque) toujours ce qu’elle pensait. Elle ne mentait que par nécessité absolue.

Je comprends, je comprends. Je prendrai bien soin de vos terres.

Pour sûr, qu’elle en prendrait soin ! Aïn n’allait pas bêtement perdre son titre à cause d’un manque de vigilance.

Je vous enverrai un courrier très bientôt ! Et merci, votre altesse royale.

La petite brune évitait de sauter de joie… ça aurait fait mauvais genre. Alors elle se leva, petit sourire au coin des lèvres et salua Mélissandre comme il se devait avant de prendre congé.



Le lendemain, un coursier apporta un courrier à la princesse.



A vous, Son Altesse Royale Mélissandre de Malemort,
De moi, Juste Aïn sans titre et avec un nom de famille que j’aimerais taire pour le moment,

Chère Vous,

Je vous écris pour vous dire que j’ai choisi le fief qui est : fief de Chemiré le Gaudin.
J’aime beaucoup le blason !

Que Dieu vous protège,
Juste Aïn.
Amarante.
Dès son arrivée dans la capitale, voilà déjà quelques semaines, sa cousine Mélissandre lui avait dit de s'installer au MAB ... Au début, elle ne voulait pas, ne voulant pas la déranger dans son chez elle, mais ayant un peu insisté en lui disant que cela animerait un peu son aile, elle avait fini par accepter ... Il avait fallu qu'elle lui explique ce que c'était, parce qu'elle ne voyait pas du tout ... Il s'était avéré que c'était un très grand Hôtel particulier, divisé en trois partis. Mélissandre lui avait donc fait préparer un appartement privé dans la partie Malemort de la bâtisse.

Bien qu'à Limoges depuis déjà quelque temps, elle n'avait pas encore eu l'occasion de voir cet appartement privé. Seules ses malles y avaient été entreposées ...

La chambre était d'une belle taille et décoré avec goût. Lit et meuble et bois sculpté, un parquet ciré avec soin sur le sol et de magnifique poutre au plafond. Deux fenêtres à meneaux et à croisillons, laissaient passer la lumière lorsque les lourds rideaux étaient ouverts.

Malgré la chaleur, il faisait assez frais dans la pièce, grâce à l'épaisseur de la pierre qui composait l'Hotel. Depuis son retour d'Eauze, elle avait été souffrante et forcée à une retraite pour se soigner, mais là santé et la fatigue n'était toujours pas revenu pleinement ... Alors épuisée, elle s'allongea sur le lit confortable et recouvert de coussins moelleux, s'endormit, sans demander son reste, dans ce nouveau lieu de vie ...

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Melissandre_malemort
C'était une torture.

M
élissandre ne parvenait pas à mettre de l'ordre dans ses idées. Prostrée dans un coin de canapé, elle chiffonnait un papier entre ses mains, cherchant quels mots coucher pour parvenir a expliquer à Maiwen ce qui la tourmentait.
Citation:

Maiwen,

Je vais finir par la haïr et je ne peux pas. Je refuse de la perdre. Pas elle. Pas même pour vous. Surtout pas pour vous.

Je suis jalouse. J'en crève. Pourquoi m'avoir retiré notre si doux absolu? Pourquoi avons nous quitter cet Anjou, ce cocon ou nous nichions secrètement nos sentiments?

Je suis égoiste. Je vous veux à moi seule. Je ne sais pas aimer d'avantage que je suis aimé. Je ne suis pas capable d'aimer assez fort pour me disputer votre attention. Je refuse d'en venir à craindre croiser la femme que j'aime le plus au monde par peur de perdre l'homme que j'aime le plus au monde.

J'ai besoin de vivre pour moi. Vous m'affaiblissez. Vous me faites croire que l'avenir sera... Qu'il peut y avoir un avenir pour une femme comme moi. Je vous déteste.

Maiwen, je vous en supplie, suivez moi.


Les ratures étaient désespérées. Tracées si fort qu'elles en transperçaient le papier comme une dague vous déchirait le coeur en deux. Quoi qu'elle fasse, l'expression douloureuse de Maiwen quand elle l'avait éconduit pulsait entre ses tempes, torturant sa cervelle confite d'alcool.

Finalement Mélissandre chiffonna la lettre à deux mains jusqu'à n'en faire qu'une petite boule sans importance. La lune ne savait vivre que dans la lumière, répugnant à subir la moindre once d'ombre qui lui rappelait son statut de vaste cailloux cosmique privé d'un rayonnement propre. Elle n'existait qu'illuminée par les regards, renvoyant au monde une aura qui lui était devenue vitale. Si bien que le papier vola dans la pièce jusqu'à rebondir dans un froufrou contre un mur et se perdre sous un meuble.

- C'est absurde. Absurde.

Ca l'était. Mélissandre savait qu'elle s'amputait volontairement de son soleil pour une question d'égo. Parcequ'elle ne parvenait pas à trouver en elle la force d'accepter le lien entre sa cousine et l'homme dont elle s'était éprise. Si ils n'avaient été qu'amant, la chose aurait été aisée. La princesse n'était pas d'un tempérement jaloux, ayant elle même du gout pour les badinages intempestifs. Mais avant d'être l'homme qui l'abreuvait de sa bouche veloutée, Maiwen avait été son meilleur ami. Son mur porteur. Ses fondations. Son sourire. Son formateur. Son rêve. Et c'était cela qu'elle ne parvenait pas à négocier. L'absolue de leur lien avait nourri son amour. En absence de cette certitude là, elle préférait arborer le visage lointain et méprisant de la princesse de sang qu'elle était avant tout, quand les portes des tavernes se refermaient sur ses rêveries provinciales d'amoureuse.

M
élissandre n'avait plus le temps. Elle devait vivre. Vite et fort avant que la mort ne fauche sa jeunesse. Son séjour au Sanatorium l'avait tout à la fois soulagé et horrifié. La bas, c'était comme regarder dans un miroir impie et y découvrir ce que serait les mois à venir. Ces visages décharnés, ces corps blancs, ces fleurs pourpres qui fleurissaient partout ou elle regardait avait achevé de balayer ses espoirs. Quelles que soit ses décisions et sa force de vivre, les lendemain ne seraient que douleur. Telle la rose envoutée que la bête gardait précieusement, les jours qui lui restaient à vivre normalement s’égrainaient, indifférents à toute notion de pitié.

- Emilien?

Le secrétaire leva vers elle son faciès joufflu.

- Pourriez vous je vous pris verser son salaire à Thomas et veiller à ce que ma cousine ai bien fais ses malles?

Déjà il s’éclipsait dans ses formulations d'usage. Mélissandre profita de sa solitude pour sortir de derrière un coussin la chemise dérobée à Maiwen quelques mois plus tot. Elle y plongea son petit visage enfantin, comme une enfant chercherait l'odeur de sa mère. Le parfum du Cerf était devenu aussi familier que le sien propre et lui arracha ses premières larmes depuis que sa décision avait été prise. Et si sa prime impulsion fut de rejeter le tissu pour se convaincre qu'il serait aisé d'apprendre à vivre sans sa voix chaude et ses mains sur sa taille. Elle n'en fit rien, fourrant la chemise dans le sac qu'elle prendrait avec elle.
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Fanette
Limoges, le 3 octobre 1465, peu après laudes.


La porte cochère s'était refermée sur large cour pavée encadrée par trois corps de bâtiments taillés dans la pierre grise du Limousin.

- Petite biche ... Nous arrivons !

La pression légère d'une main à son genou encourageait la jeune fille à sortir de ses songes. Les paupières papillotaient un peu, puis, son regard croisa celui bienveillant de Melissandre. L'esprit sans doute encore embué par les limbes du sommeil, elle la détailla un instant. Ses traits rosés affichaient cette même jeunesse qu'elles partageaient, mais les onyx royaux reflétaient le plus souvent la détermination, autant que la malice. De longs cheveux châtains foncés retombaient souplement sur ses épaules menues. Parfois, elle les retenait dans des rubans ou d'élégantes coiffures savamment ordonnées. Bien que légèrement plus haute qu'elle, Fanette se sentait minuscule face à ce brin de femme. Sa noblesse pouvait sans doute lui conférer quelque grâce supplémentaire, mais elle avait surtout tant de devoirs qu'elle s'appliquait à remplir, travaillant souvent jusqu'à tard sans s'épargner aucun effort, et se partageant entre ses différents domaines, et ceux de la Reyne qu'elle servait. La vagabonde acceptait cette amitié réconfortante, même si elle peinait à comprendre toute cette bienveillance qu'elle lui témoignait à elle, qui s'était donnée à un assassin en dehors du mariage, en portait le fruit au fond de ses entrailles, et avait à son tour souillé ses mains du sang d'un homme.

Le rideau qui occultait la portière fut tiré, laissant entrer dans le carrosse le soleil blafard de ce matin d'automne. Fanette parvint enfin à répondre d'un sourire léger, teinté d'une désagréable sensation de nausée qui la tenait parfois dès le réveil.

D'un geste, elle repoussa ses boucles qui lui chatouillaient la joue et se frotta les yeux.

L'attelage venait de s'arrêter, et on sentait poindre l'agitation tout autour de l'équipage. La porte de la voiture s'ouvrait et une main invitait Melissandre à en descendre. Les gardes qui les escortaient avaient mis pied à terre et emmenaient déjà leurs montures vers les écuries. Fanette avait suivi, un peu intimidée par le déploiement de valets et de servantes qui s'affairaient autour d'eux après un révérencieux salut à la maitresse de maison. Quelques-uns de leurs compagnons de route s'étaient arrêtés en ville, mais la jeune fille aperçut avec soulagement l'italien, qui confiait à un garçon d'écurie les rênes de son cheval, et la longe de Siena, avant de la rejoindre.

Cette dernière nuit de voyage s'était révélée un peu éprouvante. Les premiers orages d'automne avaient déjà passablement détrempé les chemins, laissant par endroits de profondes ornières qui engluaient les roues du carrosse. Il fallait alors toute la puissance des chevaux de timon, encouragée par les claquements de fouet du cocher pour arracher la voiture à sa gangue de boue, dans des secousses qui en bringuebalaient ses occupantes. Aussi, Fanette n'était pas fâchée d'être arrivée. A la fatigue et à son ventre contrarié, s'ajoutait ce matin quelques douleurs qui tiraillaient ses hanches et qu'elle mit sur le compte des cahots de la route. N'osant pas tendre ses lèvres à Roman au milieu de toute cette effervescence, elle se contenta de lui adresser un pâle sourire, en glissant une main fine à son bras.

Le ciel au-dessus de leur tête recommençait à se couvrir de lourds nuages gris, qui ne tarderaient pas à se rompre bientôt en une pluie drue et froide. La jeune fille détaillait les hautes façades de l'hôtel. La rudesse du bâtiment témoignait de son ancienneté, mais on pouvait aisément deviner qu'il avait fait l'objet d'améliorations plus récentes dans la finesse des pierres claires joliment ouvragées et qui ornaient les corniches et les linteaux des nombreuses fenêtres.

Toujours accrochée au bras de son diable, elle se laissa entraîner à l'intérieur de l'imposante bâtisse. Melissandre donnait quelques ordres, précisait les détails de son court séjour, mais bon nombre de domestiques, connaissant déjà parfaitement leurs rôles, s'étaient dispersés pour vaquer à leurs occupations. C'est en bas des marches d'un large escalier aux balustres de pierres que la Princesse les abandonna aux bons soins d'une servante au visage souriant, et à l'allure replète, qui devait les guider jusqu'à la chambre qu'elle leur avait dévolue et s'assurer qu'ils ne manquent de rien.

Quand la porte se referma sur eux, Fanette impressionnée, était toujours plantée au milieu de la vaste pièce, en détaillant chaque recoin sous l'œil amusé du Corleone. Il avait grandi à la cour de Florence, dans la puissante famille de sa mère, une Medicis et avait assurément plus l'habitude des fastes et du luxe que la petite vagabonde.

Les noisettes émerveillées balayaient la pièce sans savoir sur quel détail s'appesantir, tant tout lui semblait sublime. Au delà des carreaux, on apercevait une parcelle d'un beau jardin qui surplombait la Vienne.

Une étroite porte s'ouvrait sur une pièce attenante, plus petite et plus sobre. Un large cuvier trônait en son milieu. Une table accueillait quant à elle une bassine et plusieurs flacons renfermant de précieuses essences parfumées. La cheminée moins ostentatoire maintenait néanmoins une douce chaleur.

Dans la pièce principale, le plancher de chêne était recouvert de plusieurs tapis de sol, représentant des scènes de chasse. L'ensemble des murs était garni jusqu'à hauteur d'homme, de panneaux de bois sculptés de motifs géométriques, rappelant les moulures qui ornaient les solives apparentes du plafond. Au-dessus, on avait pris soin de se protéger de l'humidité de la pierre en apposant des tapisseries murales reprenant les mêmes thèmes que les tapis.

Un lit monumental était disposé dans un angle, fermé par trois clôtets de menuiserie, mais le côté qui restait ouvert était garni d'une courtine, sur laquelle on avait relevé et noué un lourd rideau de velours vert. Entre les deux fenêtres la haute armoire en noyer pouvait à elle seule contenir le triple de la vêture de l'un et de l'autre réunie. Pour autant, trois autres coffres, aux pentures finement décorées étaient posées autour de la pièce. Quelques escabeaux et deux fauteuils aux hauts accotoirs de bois, accueillaient de moelleux de coussins d'une teinte rappelant l'étoffe du lit et des tentures, qui au soir venu, occulteraient les ouvertures.

Mais l'élément le plus imposant de la chambre, restait sans nul doute la cheminée. Sur le manteau, deux silhouettes échappées d'un bestiaire fabuleux soutenaient un blason sculpté aux armes de la famille. Le vaste foyer circulaire était encadré de deux piliers rappelant les colonnes antiques. Leurs chapiteaux s'ornaient d'un entrelacs de vignes, aux feuilles finement représentées. Les flammes y crépitaient doucement, invitant au repos et à la contemplation.

Fanette fit quelques pas, s'approchant suffisamment pour en sentir la chaleur rayonnant sur sa peau. Un instant, elle essaya d'oublier sa condition, et celle de la Malemort qui leur offrait refuge dans cette Limoges qu'elle aimait tant. Il était bien difficile de ne pas se sentir redevable et gênée devant tant de générosité. Elle laissa tomber l'étole qui couvrait ses épaules, puis vint cueillir les lèvres de celui qui la couvait silencieusement du regard. Alors seulement, étirant ses membres las, elle se laissa choir dans le confort du matelas de laine.

Au loin, le clocher de Saint Michel des Lions égrenait les trois coups de tierce. Sous les halles, et dans les ruelles, les artisans relevaient les volets de leurs échoppes. Et à l'heure où la ville s'éveillait, Fanette, épuisée, s'endormait pour quelques heures.
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Jd Svan ;-)
Blanche_de_malemort
Le temps revient, disait le poète . Rien ne se crée, tout se transforme disait ... peu importe. Au loin se devinaient les murailles de Limoges, les rives de la Vienne et le bruit de la cité, tout autour, les vertes pâtures de cette terre riche et féconde faisant du Comté une province prospère. La vie, tout simplement, semblable à ce qu'elle avait toujours été. Comment était-ce possible ? Comment ne pas trouver cela impensable. Injuste. Cruel. Car, lorsque l'on a souffert, on voudrait que tout le monde souffre à son tour. Parce que lorsque l'on peine à entrevoir l'ampleur des sacrifices auquels on a dut consentir, on voudrait que tout le monde dusse souscrire aux mêmes séparations. Parce que, tout simplement, quand on arrive au terme de son objectif, on commence à deviner le néant de l'inconnu... Regagner le Royaume de France, rentrer à Limoges, retrouver les murs protecteurs de l'hostel familial et en suite ... Rien. Le plus parfait plan, la plus implacable détermination, la plus insolente des chances aussi, il faut bien l'admettre, lui avait permis de s'accrocher à la vie et de pouvoir envisager de revenir au monde qui était le sien. Et pourtant, elle n'avait jamais projeté ce qu'elle ferait en suite. Renaissance ou pas ? Reprendre son existence publique était impossible, pas après ce qu'elle avait vécu. Un retour en arrière était inenvisageable, quand bien même l'eut-elle désiré. Elle n'avait plus rien en commun avec celle qui avait arpenté la vie avec la candeur et la bêtise d'une péronnelle que rien n'avait jamais confronté aux réalités du monde. Pour autant, son parcours ne pouvait être dévoilé, sa survie en dépendait, pas seulement la sienne du reste, et c'était là le plus important. Le sombre secret qu'elle devrait préserver, au prix du sang, au prix des larmes, au prix de la haine même...

Le temps revient, et tandis qu'elle rabat avec soin les plis de l'ample cape de laine qui dissimule ses traits et sa silhouette, prenant appuie sur son bâton de marche, l'exilée reprend sa marche... d'ici l'aube, elle franchirait la porte principale de la Cité. D'ici l'aube, il lui faudrait avoir mis en place la prochaine stratégie qui lui permettrait d'expliquer son absence et de légitimer son retour. D'ici l'aube, elle devrait avoir arrêté sa décision ultime et s'y tenir D'ici l'aube, de nouveau, elle porterait ses fers de joyaux et d'ors, elle serait de nouveau la Princesse Royale, intouchable, protégée, celle que les fées semblaient avoir comblées de grâces à la naissance. Et personne ne devrait voir plus loin que cette image lisse et parfaite. On ne cache jamais aussi bien l'obscurité qu'au cœur de la lumière et, pour cela, elle draperait de blanc immaculé sa noirceur sépulcrale. Les dessins du henné qui avaient orné ses mains avaient disparu depuis bien longtemps, mais il lui semblait, tandis qu'elle fixait ses mains que le sang ne partirait jamais. Un sourire effleura ses lèvres, alors que les images de la nuit précédant son embarquement lui revenait. Les images, la chaleur, mais pas les sensations. Par chance, la mémoire ne peut reproduire l'écho de la douleur, sans quoi, elle serait tomber à genoux en hurlant jusqu'à perdre connaissance. Et défaillir au bord d'une route, choir dans un fossé... non, vraiment, ce serait ajouter un délais supplémentaire à la dernière étape de son plan. Elle allait faire ces derniers pas, ignorant la fatigue et ses jambes qui peinaient à la porter, le tiraillement de son dos et la sensation d'empester comme si elle n'avait pas pris de bain depuis des semaines, ce qui du reste était vrai. Elle allait rejoindre sa destination, se glisser à l'intérieur et en suite... peut être que, réflexion faites, commencer par prendre un bain serait le plus raisonnable. Et un repas chaud aussi, plus de bouillie, plus jamais, de bouillie, de légumes, de céréales, la bouillie sous toutes ses formes serait, définitivement, proscrite.

Le temps revient, et la résilience étant certainement la vertu première chez les Malemort, il était à craindre que rien ne serait jamais simple, ni ne se passerait ainsi qu'elle avait put l'envisager. A commencer par le fait de trouver le MAB vide et fermé, en dehors de la poignée de domestiques logés sur place en permanence et dont les gages avaient été servi malgré son absence selon les dispositions prises en ce ses par ses intendants. Son plan de départ, en effet, supposait que nul ne sache rien avant les quelques semaines à venir, de sa présence, afin de pouvoir mieux reparaitre dans le monde... son apparence actuelle excluant absolument le fait que quiconque ne l'identifie. Cela poserait trop de problème, représenterait un trop grand risque. Elle ne pouvait se permettre cette erreur, pas alors qu'elle était si prés du but... Poursuivant sa marche, le frêle chaperon rouge, plus précisément une ample cape d'un rouge sombre, décida de ne passer les portes qu'à la tombée de la nuit, afin de profiter de l'obscurité pour se glisser à l'intérieur de l'Hostel à la faveur des ténèbres naissants.

Le temps revient... et jamais il ne fut si incertain.

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Blanche_de_malemort
Il serait présomptueux de dire que la façade du M.A.B était un bijoux d'architecture, un défi à la création, le fruit de l'audace la plus folle poussée au paroxysme de la démesure sur un fond de fortune dépensée à coup de paris et d’enchères entre trois personnes parmi les plus riches de l'époque... dans le sang des Arduilet ne coulait, certes pas, le gout de la dépense inconsidérée, du tout, mais bien une certaine propension à vouloir avoir le dernier mot. La Comtesse de Ségur demandait un plancher de chêne ? Le Comte de Turenne exigeait du marbre pour ses escaliers. Le comte de Meymac prévoyait 8 stales pour ses montures ? La Comtesse de Ségur annonçait avoir, impérativement, besoin de pouvoir ranger 3 carrosses dans la cour. Et, de fil en aiguilles, vit le jour, une façade ornée de sculptures plus dignes d'une cathédrale que d'une demeure privée... encore qu'en lieux et place de gargouilles, on identifiait sur la dictes façade des nymphes, des loups et autres créatures du bestiaire imaginaires, chevaliers poursuivants maints dragons terrifiants et même, sacrilège, un moine libidineux sur le point de choir dans un tonneau. Bien sur, la plus pas de ces scènettes n'attiraient plus l'attention des lémovices depuis longtemps, pourtant, ce jour là, une silhouette isolée resta des heures à fixer l'édifice avant d'esquisser le moindre mouvement.

En eusse-t-elle exprimé le désir, elle aurait été incapable de définir son ressenti, joie, peine, crainte... le pêle-mêle des émotions était trop intense pour se pouvoir domestiquer, aussi valait-il mieux qu'elle se retienne d'y songer. Aussi valait-il mieux qu'elle n’entrouvre pas la boite de Pandore au risque de voir s'en échapper les démons souvenirs depuis longtemps prisonniers en son sein. Un pas, un autre pas et la cour se dessine avec précision. Une précision qui révèle un obstacle évident auquel elle n'avait, pourtant, pas songé... Deux gardes devant la grille. Deux gardes qui n'auraient de cesse de savoir ce qu'elle venait faire aux abords du cénacle le plus précieux des alentours... Et il était impossible de répondre à la plus légitime des questions. De même qu'il était impérieux qu'elle pénètre les murs de ce qui devait être le dernier rempart à sa résurrection à venir. Mais, là encore, il n'était pas de nécessités que les fondateurs des lieux n'avaient envisagé... C'était un secret de famille, certes moins croustillants que les squelettes dissimulaient sur les terres respectives de leur nobiliaire, moins chatoyant que la liste des joyaux accumulés par leurs aïeux mais l'entrée dérobée menant au troisième étage, dict l'étage des Brassac bien qu'il fut dévolu à Arnaut depuis qu'il avait récupéré les terres de Turenne en hommage au grand Nicotortue, était, pour le coup, l'information la plus utile à notre protagoniste...

Toujours dissimulée sous une ample cape de laine écarlate, la silhouette descend la rue, passant devant les gardes sans leur manifester le moindre intérêt, elle se glisse dans la ruelle voisine, une impasse en vérité qui sert à entasser un bric à brac devenu obsolète mais cette petite courette avait l'intérêt de dissimuler, entre deux pierres émoussées, un système permettant d'ouvrir une brèche dans la muraille, assez étroite pour la discrétion, suffisamment large pour qu'une fine silhouette s'y glisse .... Bien sur, en cet instant l'aisance n'était plus au rendez vous mais n'ayant plus quinze ans et étant dotée de tous les attributs naturels qu'une femme Malemort voit s'épanouir à la puberté, il eusse été malaisé de croire qu'il puisse en être autrement... Après quelques contorsions aussi silencieuses que disgracieuse, merci l'absence de témoins, la tache est bouclée, l'accès refermé et c'est face à la porte de service que l’intrus se retrouve. A cette heure, et même si l'Hostel est vide de résidents, les domestiques de service devant être occupés, aux courses, au ménage, à la sieste. Avec un peu de chance, seule la séculaire cuisinière devrait se trouver dans les communs mais la chance était une composante avec laquelle elle avait appris à ne pas compter. C'est donc en tâchant de se faire aussi invincible que la brume et silencieuse que la mort qu'elle pénètre l'antre de la gourmandise, le refuge de ses gouters d'enfants, un des rares endroits ou elle pouvait s'esclaffer sans retenue, manger avec les mains et même, comble du scandale, parler la bouche pleine sans que nul n'y trouve à redire... Bien sur, ce temps était révolu et ne devait jamais exister en dehors de l'étroit espace de sa mémoire, néanmoins, c'était une petite portion de ce qui lui avait permis de tenir bon quand le présent ne se présentait plus que comme l'antichambre de la mort et qu'il n'y avait plus rien que le passé pour rendre l'instant supportable... combien de fois avait-elle plongé ses doigts gourmands dans des pots de confitures tandis qu'elle ne pouvait empêchait sa bouche de laisser échapper ses cris et imposer à son esprit de ne pas supplier pour que ses tourments s'achèvent ?

Pourtant, si cela ne fut jamais le cas au cours des derniers mois, la déesse de la Chance, Dame Fortuna la bien nommée, avait décidé de lui faciliter la vie à cet instant... déserte la cuisine vaste comme celles du Louvre, froides les cendres au fond de l'âtre... à croire que personne n'avait daigné se présenter céans... Et, tandis qu'elle se glissait jusqu'au bureau de l'intendant, là encore, l'incorruptible Amaury ne pouvait avoir quitté sa place et abandonné le poste qu'il considérait comme sa vocation sans quoi elle aurait put croire l'apocalypse comme imminente. Mais, là encore, la chance était de son coté et Maitre Amaury était bien dans son office, penché sur son registre et, visiblement, prêt à renvoyer l'inopportun osant le déranger tandis qu'il révisait les comptes de la maison et qu'il avait donné congés à tout le personnel pour se concentrer sur sa tâche... Le saisissement manqua de lui faire perdre connaissance, changeant l'ours bougon en une peluche bafouillant et ce qu'ils se dire dans les heures qui suivirent ne parvint jamais à aucune oreille humaine mais à sa conclusion, l'homme ne put qu'essuyer ses yeux rougis et s'incliner avec déférence.

Dés le lendemain, Maitre Amaury fit savoir à tout le personnel que l'étage des Brassac était interdit d'accès, des travaux important devant avoir lieux pour sécuriser les appartements bien trop obsolètes depuis que le Comte de Turenne avait quitté Limoges et que lui seul, ainsi qu'une femme de service nouvellement engagée pourrait s'y rendre. Bien entendu, nul n'osa interroger l'intendant sur le pourquoi de ces consignes, pas plus qu'il ne fut jugé opportun de se risquer à y contrevenir... Et, bien sur, si des bruits y furent perçu, si de la nourriture se mit à circuler vers les étages ou qu'il fallut, pour ces mystérieux travaux, monter des baquets d'eau chaude chaque matin vers l'étage en question, personne, non plus, ne voulut savoir pourquoi aucun ouvrier, nul artisan, ne fut aperçut durant les semaines qui suivirent la mise en place de cette nouvelle organisation. Après tout, les maitres étaient absents et eux seuls étaient en droit d'exiger des réponses, un bon domestique, quand ses gages sont deux fois plus élevés que la moyenne sur le marché est un domestique trop heureux de ne pas avoir à se poser de questions.

Et c'est ainsi que, chaque soir, devant un feu de cheminé attisé dans la cheminée de la chambre d'apparat des appartements Comtaux des Brassac, tout tendu de tapisseries vertes émeraudes et d'or, celle que plus personne n'avait appelé par le nom de sa naissance depuis deux années que sa disparition avait durée put, enfin, gouter à la sensation du confort, au gout de la sécurité... un répit, bien sur, juste une étape de plus de franchie dans son plan ... le plus ardu restait à venir, le plus périlleux aussi en un sens...

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Melissandre_malemort
Même après des années à occuper presque seule l'aile Malemort du fameux MAB, joyeux de la ville de Limoges, jamais Mélissandre n'était parvenue à s'en approprier les murs. Elle était ici comme une visiteuse. L'éternelle dernière née qui ne faisait que jouir des privilèges de ceux qui l'avaient précédés. Qu'elle se soit taillée un patrimoine et des charges entre temps n'y changeait rien. Elle n'en éprouvait pas pour autant un quelconque malaise. Il lui plaisait au fond de vivre ici comme chez ses frères et soeurs, sans en bouger un bibelot, sans en modifier la moindre tapisserie.

Elle aimait le caractère légèrement austère des lieux et la familiarité bienveillante des serviteurs qui n'étaient pas vraiment les siens. De cet hotel elle avait donc fait un refuge. Pour elle ,d'abord. Pour Aeglos, fut un temps, pour Fanette et Roman, ces jours derniers. Elle raffolait de la vie qu'ils insufflaient dans les longs corridors feutrés.

Cela faisait quelques semaines que la jeune Malemort n'était pas revenue ici, passant la plupart du temps sur les routes ou à Paris ou ses obligations la retenaient plus souvent qu'à son tour. La maisonnée était pourtant trop bien rodée pour se laisser aller en son absence. Il n'y avait ni poussières, ni cheminées vides, ni meubles peu artistiquement voilés de draps, ce que Mélissandre avait toujours détesté, leur trouvant ainsi des airs de linceul. Maitre Amaury avait toujours veillé jalousement sur l'héritage de trois grandes familles qui fut un temps s'étaient unis sous le même toit. Elle y pensait encore quand la servante acheva de lui retirer sa cape et son manchon avec son habituelle déférence. En dépit de ses seize printemps, sa jeune maîtresse arborait encore la silhouette gracile de l'enfant qu'elle avait été. Elle en prenait donc un soin jaloux, et lorsqu'elle fut installée devant le jeu, répondit avec plaisir à ses questions.

- Que s'est il passé en mon absence Martha? Gailen m'avait assuré qu'il attendrait mon retour mais je ne l'ai guère revu.

- Sa Grandeur le comte est encore au ville votre Altesse royale, il viendra vous saluer sans aucun doute.

Mélissandre inclina la tête, l'invitant à continuer. Par bonheur, la servante était bavarde comme une pie et adorait entretenir la princesse des menus ragots de la mesnie.

- Il faudra par contre envisager des travaux rapidement dans l'aile Brassac. D'après l'intendant, il faudra plusieurs mois pour en venir à bout.

Le babillage de Martha n’intéressait pourtant guère la comtesse de Primil qui déjà s'assoupissait, pelotonnée dans le fauteuil à larges oreilles ou elle s'était réfugiée pour oublier le vent polaire de cet hiver naissant. Tout au plus hocha t'elle la tête en songeant au comte Nico qu'elle n'avait jamais réellement connue. Ses pensées l’entraînèrent ensuite en direction de Blanche, disparue depuis si longtemps que la hérauderie envisageait d'enterrer son souvenir.
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Blanche_de_malemort
Quelques jours de repos avaient fait merveille, le silence recueilli de cet étage déserté, la régularité des repas, un peu trop riches peut être mais tellement délicieux, un bain journalier et la sensation nouvelle de sécurité lui faisait éprouver une sensation d'hébétude presque semblable à l'ivresse. La prochaine étape du plan établi de longue date pouvait débuter. Quelques jours encore et elle reprendrait dans la route. Mais... la mouche ne peut résister au pot de confiture, le papillon est incapable de se tenir éloigner de la lumière de la bougie et le sang appelle le sang. Par prudence, et parce qu'elle doutait de l'accueil qu'elle recevrait, se rapprocher des membres de sa famille dans les provinces respectives ou elle pensait les trouver mais quand le retour de sa cadette lui fut rapporter, quand elle entendit sa voix à travers les étages, oublier cette présence et se raccrocher à ses projets ne fut plus qu'une chimère . Et une nouvelle résolution vint se placer en première place sur la longue liste des choses à faire... une priorité, un besoin viscéral, une lubie au parfum de folie...

La nuit tombée, alors que tout le personnel avait regagné ses quartiers, que les bougies étaient mouchées et que tous devaient dormir du sommeil du juste, le fantôme du MAB se glissa au premier étage en passant par les passages dérobés reliant les appartements principaux entre eux, un système de communication, là encore, peu connu en dehors du cercle familial et bien astucieux pour éviter les escaliers principaux. Sa destination n'était pas la chambre comtale, devenue sienne après avoir été celle de sa mère, mais les pièces des membres de la famille, elle n'avait qu'à se fier à la chaleur du feu de cheminée pour savoir ou serait sa destination ... Les pièces vides et froides des autres chambres étaient un rappel de ce que sa famille était devenue au fil du temps, un rappel douloureux et la douleur était une trop familière compagne pour que sa folle résolution ne soit pas confortée par l'idée de résorber la souffrance qu'elle portait quotidiennement. Se glissant dans le silence à l'intérieur de la pièce, elle prit un instant pour se repérer. Les flammes luisant dans l'âtre éclairaient suffisamment la pièce pour qu'elle puisse avancer... le lit semblait vide mais pas le fauteuil devant la cheminée d’où provenait l'écho d'une profonde respiration, une respiration calme et sereine et pas le moindre ronflement, bien sur une princesse ne ronfle pas c'est inconvenant.

Juste un coup d’œil, un simple regard n'entraverait en rien sa volonté de poursuivre son plan sans plus s'en écarter. Pouvoir simplement s'assurer de ses yeux qu'au moins un membre de sa mesnie était bien portant suffirait à lui donner le courage et la force de persévérer, car elle ne pouvait s'offrir le luxe de croire que retrouver les frontières limousine suffisait à assurer sa sécurité, à la mettre à l'abri des velléités de vengeance de celui qui avait fait d'elle ce qu'elle n'avait envisager de devenir. Regarder en arrière lui ferait mesure le sombre parcours qui fut le sien, elle s'y refusait. Seul l'avenir devait compter et pour en avoir un, il lui fallait tenir bon l'instant présent. C'était une leçon durement acquise... De même que celle lui permettant d'accepter son état présent, de ne pas renier ses choix et ce qu'il lui en avait couté. Cette parenthèse actuelle, cet instant de bonheur qu'elle allait voler au destin, elle l'avait mérité. Pour avoir réussit quand tout indiquait qu'elle échouerait, pour être sur le point de renaitre, non pas de ses cendres mais de l'oubli, elle s'arrogeait le droit d'avancer vers le fauteuil, de le contourner, d'avancer encore et de s'accroupir, difficilement, lourdement, pour approcher son visage d'un autre. Bien qu'il fut impossible de les décrire comme identique, on ne manquait pas de voir les similitudes qu'impliquent parfois une même ascendance. La pâleur du teint, la volonté farouche imprimée même dans le relâchement des traits consécutif au sommeil, cette bouche vermeille qui, jadis, faisait naitre la plus ravissante des fossettes au menton jamais vue dans tout le Royaume... Mais ce visage n'était plus celui de l'enfance, pas même celui de l'état transitoire qui sépare l'être en devenir de son évolution finale. C'était bien une adulte, désormais, une femme... peut être même une femme accomplie. Se penchant jusqu'à venir effleurer de ses lèvres l'oreille de l'endormie, elle murmure, en confession, tout ce que son cœur retenait au fil des années, comme la lettre d'adieux qu'elle pensait ne jamais pouvoir écrire car il était trop tard et qu'elle ne pourrait jamais, à aucun de ses frères et sœurs, avouer combien elle les avait aimé, combien ils étaient importants pour elle, tous et sans la moindre restriction malgré les désaccords ou les distances les ayant séparé... tous étaient dans son cœur, tous l'avaient maintenu en vie quand il aurait été si tentant de renoncer, tous avaient guidé ses jambes quand son corps voulait défaillir, tous avaient maintenu sans esprit quand la folie lui tendait les bras... et aucun ne saurait jamais. Arnaut. Elisa, Foulques, Gauthier, Mélusine, Mélissandre...



Quel a été ton chemin, petite soeur ? Au fil des mois, as-tu trouvé ta voie ? Es-tu devenue celle qui se cachait en ton sein ? Tu as surmonté des épreuves, reçu des blessures et remporté des victoires certainement. Je voudrais pouvoir en entendre le récit, je voudrais pouvoir t'étreindre... Je voudrais pouvoir te connaitre, connaitre celle que tu es et pas celle que je pensais que tu deviendrais... Je suis tellement désolée si j 'ai pensé devoir définir ton existence, si j'ai cru avoir le droit, le devoir, de t'enfermer dans un moule alors que personne ne devrait jamais connaitre ce genre de prison... Je suis désolée si je t'ai fait fuir... Si, par ma faute, tu as connu la solitude... Mais tu es là, à présent... je présume que cela signifie que tu as compris ce que j'avais pas deviné avant qu'il ne fut trop tard... qu'une famille peut s'opposer, se fuir... mais jamais s'oublier. Je suis désolée... que tu ne puisses entendre ce que j'ai à te dire... peut être, un jour, aurons-nous l'occasion de nous retrouver... de réparer... la plus élimée des tapisseries peut être reprisée, notre famille est cette tapisserie. Un jour, quand tout sera fini, je voudrais pouvoir nous repriser... Il y a tellement de fils brisés.... tellement de pertes... à jamais... Mais pas celle-ci... on peut encore la sauver... Nous sauver..


Malgré elle, sa main s'avance, suivant le contour innocent d'une joue caressée par la lumière des flammes, sans la toucher, sans s'y risquer pour ne pas être tentée de pousser plus loin l'audace d'un appel contre lequel aucune volonté ne peut lutter. Ce besoin charnel, physique, viscéral de sentir sa propre chair contre soit, cet instinct qui est celui de la vie, quand un loup solitaire, trop longtemps privé des siens, retrouver la chaleur, l'odeur, le contact de sa meute... Mais cela ne se peut, elle n'a pas le droit de prendre le risque de s'exposer ainsi. Et même si elle n'était pas rejetée sur l'instant, comment pourrait-elle faire face aux conséquences d'une révélation qui détruirait, à jamais, ses chances de retrouver la moindre légitimité parmi les siens ? Sans même envisager le péril qu'encourrait n'importe quel individu pris dans le feu croisé du danger qu'elle fuyait depuis des mois. Même si elle concevait de prendre le risque de la vérité, jamais elle n'accepterait de mêler les siens à ses ténèbres, surtout pas sa fragile petite sœur -oui peut être n l'était-elle pas, mais une petite sœur est toujours fragile pour une grande sœur aussi têtue soit-elle, cette vérité est indérogeable.


Je t'aime, Mélissandre, le Très Haut veille sur toi mieux que je n'ai put le faire.


Il fallait maintenant se redresser, sans choir sur un céans bien moins rebondit qu'il ne devrait l'être, sans perdre lourdement l'équilibre et sans écouter son dos qui protestait douloureusement contre des acrobaties totalement déraisonnable ... mais elle n'écoutait plus les appels de son corps depuis que, pour survivre, il lui avait fallut domestiquer la douleur autant que possible. Un élan, une inspiration et elle se relèverait, tournerait le dos à ce feu familier et attendrait le petit matin pour quitter le MAB, dans le silence et l'inconnu, comme elle y était parvenue quelques jours plus tôt. Le plan devait prévaloir... nul ne saurait, nul ne serait en danger à cause d'elle... Plus personne ne devrait mourir par sa faute.
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