Belisaire
- Scène d'une vie - Acte IV
Son compagnon absent, Belisaire ne fit pourtant pas le retour seul. Une boule au ventre naissante et persistante l'accompagnait depuis la fuite de l'établissement. Le cur noué, l'esprit contracté, le visage craintif, l'angoisse du jeune Lablanche était bien palpable. Et pourtant, que cette nuit avait été fantasmée, rêvée, impatient qu'il était, tout curieux de découvrir ces horizons sujets à tant de conversations, de messes basses, de provocations, de moqueries pour ne pas déjà les connaitre. Pour braver les regards de ces compagnons, plus coqs que jeunes, il s'était montré bien hardi, fautif de bien des maux, coupable de ne pas s'être épanché auprès de Jean Loing. La honte ? La pudeur ? L'hésitation ? La question restait en suspend, l'ânerie était somme toute actée. De ses quinze ans bientôt révolus n'avait-il que cela à présenter ? Beaucoup d'interrogations, d'énormes doutes ... Une certitude, sa mère ne serait pas dupe bien longtemps.
Alors quand enfin, il arriva au château, il resta un moment interdit et songeur à ce qu'il pouvait faire, dire ... Mentir ? L'art était délicat, lomission possible mais le bobard utopique face au regard de sa mère. Il ne savait pas la tromper, jamais il n'avait réussit. Alors, résolu a éluder un face à face inégal, il avança enfin ayant acté un subterfuge. Se porter malade quelques temps. Ses couvertures lui serviraient d'asile, Phémie de caution. Et puis ... et puis Jean Loing devra savoir ensuite pour trouver en la circonstance un ambassadeur compréhensif. Le supposait-il !
La main tremblante ne pu ouvrir la porte complice de sa fuite. Bizarre ! Le regard se porta sur le ciel légèrement étoilé pour encore quelques temps. La lune n'était pas pleine. Il s'essaya alors à passer par une des fenêtres de l'arrière cuisine toujours capricieuse à se clore. Là encore il trouva un refus catégorique. Étonnant ! L'entrée serait donc son seul salut ? La clé fut glissée délicatement dans la serrure pour y être ensuite tournée avec précaution. Beaucoup de prévoyance, énormément de temps et au final une discrétion pas à la hauteur de ses espérances. Sur la pointe des pieds, le ventre rentré, le respiration interrompue, Belisaire se faufila à travers l'entrebâillement pour enfin se retrouver le front adossé à cette fichue porte. Il reprit un peu ses esprits, souffla, puis ouvrant les yeux, il la vit, interloqué. Son ombre ondoyait fébrilement avec un mépris pour la manuvre. Phémie avait certainement oublié d'éteindre une bougie ou deux. Se retournant décidé à y remédier un sursaut le dompta. Elle était là, le regard courroucé, le visage fermé. Signe annonciateur d'un temps ombrageux, Dago s'extirpa avec diligence. Les noisettes funèbres le transperçaient. Aurait-il préféré affronter les quatre chevaliers de l'apocalypse en cet instant ? Assurément.
- Mamouchka ! Vous ne dormez pas ?!!
Quelle question ! La preuve, elle te fusille du regard et sapprête à te pourfendre . Non elle ne dort pas, et la voilà semble-t-il bien réveillée.
Face à son stratagème évaporé avant même de voir le jour, Bélisaire se transforma en un fantôme. Et le déguisement faisait des miracles : pâlichon, blême, exsangue, blafard, cadavérique. Le fils pouvait aller creuser sa tombe. Sa boule au ventre venait d'imploser. "Qu'allait-il faire dans cette galère" , comment allait-il faire pour en sortir sain et sauf ?
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