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[RP] Journal d'une chiasse en goguette

Andrea_
[Le mariage]


C’est pas comme si j’avais pas d’entrainement. Le mariage je maitrise. Enfin tout ce qui va avec la demande. De la rencontre à la demande, je gère. L’acceptation, je gère aussi. Le mariage nickel, j’ai toujours réussi à écrire mes vœux sans pomper sur le mariage précédent, ce qui me semble être un bon indicateur.
Nan mon problème à moi, c’est la suite, et plus précisément : la fidélité.

Enfin cette fois ci, j’ai quand même vécu un truc unique, qui pour le coup le restera.
Il a pris ma main, et j’ai perdu deux doigts.
Alors ouais, le raccourci est un peu facile, je sais. D’ailleurs à la base, je devais « juste » en perdre un, mais il se trouve que par un concours de circonstances, j’ai perdu c’lui d’à côté.
Concours de circonstances : mauvaise désinfection de la plaie, non changement du pansement pendant cinq jours, possible humidité chronique. Refus de montrer l’évolution à quiconque sous prétexte que je suis pas une fiote. Bref, maintenant j’suis pas une fiote MAIS j’ai deux doigts en mains moins.*
Qu’il me coupe l’annulaire où était tatoué l’alliance était une chose, que le petit doigt qui gratte l’oreille se chope la gangrène au point de tomber comme une merde sur le sol quand je daigne enfin montrer tout ça, j’avais pas vraiment prévu. L’avantage c’est qu’une fois que c’est bien bouffé par la merd’ tu n’sens plus grand-chose. Enfin… Si, tu sens. Par le nez. C’est vrai que j’avais bien senti un léger fumet de ragondin crevé abandonné au soleil depuis plusieurs jours. J’avais bien noté que cette odeur me suivait depuis un petit moment mais j’avais rien à me reprocher parce que je prends un bain chaque jour –je suis riche, je peux-.
Bon clairement, si j’avais du choisir, j’aurais gardé l’annulaire. Et son petit frère. Mais dans la vie on n’choisit pas toujours, maintenant faut positiver : je peux toujours envoyer les gens s’faire foutre en leur offrant un super majeur, et comme j’suis partisane du moindre effort : je peux le faire en baissant que DEUX doigts, si c’est pas du luxe ça…

Et sinon je zone, comme toujours quand tout devient flou. Je remets sans cesse au lendemain mon départ de Limoges. Surtout maintenant que ma Blondeur est de retour. Y a des gens qui passent dans ta vie et qui disparaissent aussi vite qu’ils sont arrivés, tu t’dis qu’c’est pas plus mal et puis… Et puis un jour ils réapparaissent et tu t’prends une grande tarte dans la gueule. Et même si ça laisse pas d’traces –tant mieux j’en avais déjà pas mal-, ça t’atteint pas mal. Astana est de retour.
Et elle a l’air d’avoir tellement morflé que j’suis pas sûre que c’est la même personne.
Mais elle est là.

Avec « Brise b’urnes » et « Brise charme ». Le premier a toujours du mal avec les chaises, j’en viens à me demander quel traumatisme il a pu subir pour les admirer à ce point. Peut être une relation charnelle qu’a mal tournée. Peut être que sa mère était une chaise, qu’il est né sur une chaise, peut être que… J’en sais rien, et j’suis pas sûre de vouloir savoir. J’dis juste qu’un jour on s’fera engueuler de poser sa cape sur le dossier par crainte qu’on étouffe la chaise.
Le second est tout son opposé. Son truc c’est plus l’art du mercenariat. Le maniement des armes. Et la cuisine, il paraît, mais bon ça fait deux semaines qu’il nous vend un put’ain de rôti et on n’en voit toujours pas la queue. Heureusement, y a que le rôti.
Et puis y a la Rouge. Si elle devait briser quelque chose, ça serait plutôt la sobriété. Je ne pense pas trop m’avancer en disant qu’elle est beurré du matin au soir, et que ses nuits sont trop courtes pour qu’elle décuve. Au milieu de l’alcool, dans ses veines coule un peu de sang. Suffisamment pour faire tourner sa cervelle et fomenter de quoi occuper la fine équipe de Blaireaux cendrés.

Et puis ils sont repartis.
Et je zone.
En reniflant mes doigts.



* J’ai vu la faute à la relecture, et elle m’a fait rire alors je l’ai laissé. Mais du coup, elle a trois doigts en main, puisque deux en moins.

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[ Le cœur à ses raisons…]


Larver. J’aime larver. Et ce matin, alors que la neige semble suspendre le temps, je larve si bien que je me demande pourquoi on utilise ce mot. Une larve, aussi petite soit-elle, va éclore et devenir un ver qui va bosser, bosser comme un con pour pas un rond et mourir, ou une mouche qui se posera sur des bouses et… Décidément, je n’ai rien d’une larve.
Disons que je procrastine. Oui, je n’en glande pas une. Etendue sur le lit je profite d’une grasse matinée sponsorisée par mon époux, les lourds rideaux empêchent le froid de passer et la cheminée bosse à plein régime. Le plateau du petit déjeuner a même été posé sur la table. Oh qu’il est bon de ne rien faire… Oh oui, c’est à ça que je pensais alors que la porte s’ouvre à la volée sur Georges, l’homme de main.


- Ma Dame
– Je ne suis pas là.
- Je crois pourtant entendre sa voix
– C’est pas ma voix.
- Je crois pourtant voir un corps sous la couverture…
– C’est pas moi.
- Quel dommage, j’ai un pli pour Vous.
-Pas intéressée.
- Bien alors je vais le renvoyer à son propriétaire.
- Faites donc ça.
- Je suis pas enchantée, Limoges c’est loin.

Georges, je le connais depuis toujours. Je l’ai rencontré il y a bien longtemps, avant que mon destin ne me mette des bâtons dans les roues. Avant que je ne me décide à voler les gens pour m’enrichir. Avant que je ne sois mère, avant… Avant. Et bien je crois que même Lui, ne m’a jamais vu me lever aussi vite.

- Vous êtes nue.
– Quelle clairvoyance, donnez-moi ça, et partez.

Autant vous dire que moi non plus, je ne l’avais jamais vu déguerpir aussi vite, ce couillon est plutôt du genre à rester jusqu’à ce que j’oublie sa présence.

Le papier avait été déchiqueté, faut dire ce qui est. Les mains avaient l’impatience des yeux, à retrouver l’écriture connue et reconnue du Poméranien. Le temps semblait soudain suspendu dans cette chambre luxueuse et le corps bientôt s’avachie sur le fauteuil devant la cheminée, pouce caressant le vélin comme s’il était la peau même du Blond. Bientôt le rubis monté en collier coulerait entre ses mains la plongeant dans une mélancolie sans précédent. Oh non, elle ne lâcherait pas une larme, et sourit même à cette idée l’entendant encore « et bin, tu chiales maintenant ? » lâché peu avant son départ de Limoges.

J’avais aimé, souvent. Beaucoup. Je m’étais souvent fourvoyée dans des histoires parce que j’avais besoin de quelqu’un sur qui compter, persuadée qu’on avait toujours besoin d’un autre pour s’élever. Il est vrai aussi, qu’il est plus facile de manipuler quelqu’un, lorsqu’il suffit de jouer de ses charmes pour le faire céder. J’avais aimé, oui, souvent pour occuper mon temps et mon esprit, me satisfaisant de peu, persuadée qu’on ne pouvait pas tout avoir.
J’avais trompé, pas toujours, mais presque, parce que l’herbe est plus verte ailleurs et suivant le principe qu’on ne sait pas si on aime tant qu’on n’a pas goûté.

La première fois que j’ai vu Siegfried, sa présence m’avait fait l’impression d’une claque. J’avais passé de longues minutes à regarder le Poméranien, il semblait sur le fil ce soir là, ne sachant pas vraiment s’il était en territoire ami ou ennemi, je ne savais pas encore que c’est un combat qu’il menait chaque seconde de sa vie. Et puis… Et puis après l’impression d’une claque, j’en avais pris une, m’interposant sans le vouloir entre Vera –que j’allais biser- et Lui –qui comptait lui en mettre une-. Ce fût notre premier contact, renversant si j’ose dire.
Le reste n’appartient qu’à nous, mais cette nuit là avait laissé bien des questions dans mon esprit. Des questions auxquelles il avait répondu huit mois plus tard environ. C’est étrange, d’être attirée ainsi par quelqu’un, de pouvoir parler des heures sans jamais se lasser. J’avais entrevu l’homme qu’il était, lorsqu’il distillait son histoire, et il avait pris un soin tout particulier à me faire rendre les armes, sans jamais le demander.

Mais il y a le cœur et la raison.
J’avais laissé un bout de mon cœur à Limoges ce soir là, et je m’efforçais de garder la tête hors de l’eau depuis. Je pouvais compter sur le soutien et la patience indéfectible de mon époux. Il faudrait du temps, beaucoup de temps.



- Permettez… Un châle de laine vint se poser sur mes épaules, par un George qui avait su entrer silencieusement dans la pièce.
- Le paquet que je vous ai confié hier est-il parti ?
- Oui, bien sûr, il sera là bas à la date souhaitée. Je reviens de la forge et Monsieur Gilly semble trop occupé pour penser à déjeuner, dois-je..
- Faites préparer un panier, je vais le rejoindre dans l’heure


La vie devait continuer, et puisqu’il n’est plus question de dissolution désormais, je me dois d’être une épouse meilleure, bien meilleure que celle que j’ai été jusqu’à maintenant.
Qui sait, ce qui peut renaître des cendres.

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[ Prise en mains du Craque Haine]

C'est-à-dire qu’après des mois –des années ?- à payer des taxes au comté Languedocien, sans jamais aucun retard, pour DEUX bateaux, j’avais reçu une petite menace pas sympathique de notre cher Bentich –Comte et Connard- : soit je bouge les bateaux, soit il les coule.

Alors si dans un premier temps j’ai bien été tentée de l’envoyer chier et de ne pas bouger les bateaux, j’ai décidé finalement de l’envoyer chier, de le faire mariner un mois et demi ET de bouger les bateaux. C’est là qu’on en était. J’ai vendu la nave au nom imprononçable et gardé la caraque avec pour objectif : le coller dans un port naturel.
Nous avons donc embarqué tous les cinq : la Magnifique, Lanterne, Vran, Ulis –un nouveau- et Moi. Et Vran a pris la barre. On a attendu longtemps parce que Lanterne est tellement radine qu’elle a voulu profiter de la mine jusqu’à la nuit tombée mais quand on a tous été à bord, ENFIN on s’est préparé à partir.

Une fois dans le messe j’ai prévenu tout le monde : JE prends la chambre du Capitaine, Vran –râleur de naissance- a bien sûr dit que non, puisqu’il était capitaine, sauf que je lui ai appelé que c’était MON bateau et que toute façon c’est trop tard. Il a donc fait une crise de seum et m’a dit « t’façon t’auras pas l’temps de dormir on va vite arriver ».
Alors voilà, j’me suis mise sur le pont et j’ai attendu qu’on bouge.

J’ai attendu un bon moment, et j’suis finalement allée me coucher, la nuit serait longue, je le sentais, et puis quand je dormais j’avais pas la gerbe alors c’était tout bénef’.
Le lendemain, Vran, tout serein se pointe en râlant –pour changer- parce que merd’, le vent n’était pas favorable, les matelots sont mauvais –on t’emmerde !- et puis rien n’allait, parce que bien sûr, tout le monde le sait, quand Vran vit un truc dramatique c’est de la faute de tout l’univers mais sûrement pas de Lui.

Alors je l’ai regardé, bien dans les yeux et j’ai souri. Ensuite je l’ai pris par la main pour l’amener sur le pont. On a salué le soleil –sans faire de figure, on ne fait pas de yoga-, on a salué Béziers aussi, parce qu’on n’avait pas bougé.
On s’est approché de bord du bateau et j’ai pointé les amarres avant de lui tapoter l’épaule.

Vran a donc pris sa première leçon de Capitaine : quand on ne désamarre pas un bateau, on a beau tourner la barre dans tous les sens, il ne se passe rien. Rien du tout.


Bien sûr c’était de notre faute, à nous, les matelots, parce que c’était notre taf, alors que notre taf c’est juste de faire ce que le capitaine demande hein. M’enfin on a bien rigolé, parce qu’au fond on savait tous que c’était lui le seul coupable.

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[Âge de raison ou sénilité. ]


S’il n’y a que les cons qui ne changent pas d’avis, alors je suis beaucoup moins conne que la normale. D’accord je suis une femme et une femme en temps normal a tendance à changer plus souvent d’opinions que de petites culottes, mais je pense être sur le podium des changements d’avis.
Ils sont toujours assumés, et c’est le plus important.

Le mariage ? Plus jamais ! Mais si tu veux m’épouser je dirais oui. Allez demande moi !
Les enfants ? Niet, j’ai donné. Mais avec le recul je ne suis pas contre, si t’en veux. FAIS-moi un GOSSE !

Le seul point sur lequel je n’avais JAMAIS transigé, en plus de trente ans d’existence, c’est la religion.
Peu importe le ou les Dieux adorés, je n’y croyais pas. Je jugeais sans honte les croyants, persuadés qu’ils n’étaient que des moutons en quête de reconnaissance, des pauvres qui donnaient leur argent pour une cause perdue d’avance, ou simplement des gens qui ne savaient pas quoi foutre le samedi matin et qui, s’ils pouvaient bouffer du pain rassis en se rinçant la bouche avec de la piquette avaient trouvé l’alibi idéal.
J’ai payé pour me faire baptiser, j’ai pissé dans bon nombre de baptistères, et je ne compte pas le nombre d’autels pillés en fin de soirée, quand les tavernes sont vides et l’esprit encore trop vif. Les confessionnaux ont longtemps été l’endroit parfait pour forniquer et le livre des vertus était parfait pour s’essuyer l’oignon après la grosse commission. Il fût même un temps où brûler les églises était devenu mon activité préférée preuve en est que la première union entre Vran et moi fût célébrée sur les ruines encore fumantes de l’une d’elles.

Et puis j’ai croisé Urbain. J’avais, je crois, trouvé la paix intérieure.
A l’époque, Vran était mort et revenu à la vie, nous nous retrouvions petit à petit. J’avais perdu ce besoin d’enfant à tout prix, et avais même fait une croix sur un bébé que je verrais devenir homme chaque jour que je passais sur cette terre. J’allais concrétiser un projet qui me tenait en haleine depuis des années. Je n’avais pas de problèmes d’argent, d’amis, d’amour. C’est important de le souligner pour ce qui va suivre.

Et j’ai croisé Urbain, curé de son état. Qui n’a jamais essayé de me rallier à sa cause. Nous avons longuement discuté et nous écrivons depuis des mois maintenant. Il m’expliquait ce qu’il faisait, je répondais ce que je faisais. Jamais Urbain n’a « prêché pour sa paroisse » -pardon pour l’expression-. J’ai expliqué prier, comme j’imaginais qu’on priait. J’ai expliqué croire, comme je pensais qu’on croyait. J’ai avoué ne rien y connaitre et m’y accrocher pourtant.
J’avais des questions, il avait des réponses. Tant et si bien qu’il m’a envoyé un livre des vertus, que j’ai mis bien du temps à ouvrir. Parce que merde, c’était la honte !
Johannes aussi, m’en a envoyé un, et c’est le sien que j’ai ouvert –parce que c’était Johannes, et aussi parce que celui d’Urbain était trop beau pour être trainé partout-.

Je ne suis pas un mouton, pourtant je peux dire aujourd’hui que je crois. Que j’ai commencé à croire lorsque Vran est mort, puis revenu. Parce que j’ai prié, supplié, beaucoup, pour qu’il me revienne et qu’aujourd’hui je ne peux cesser de croire que mes oraisons n’y sont pour rien.


Je suis peut être un mouton, mais je ne peux pas nier l’évidence.
Et si j’arrête de croire, est-ce que tout s’arrête ?

Ils ne sauront pas pour les prières, ils ne sauront pas pour les messes suivies en secret. Ils ne sauront pas pour les cierges allumés, pour les offrandes. Parce qu’ils ne sont pas encore prêts,
Mais bientôt…

Très bientôt, Rome comptera un curé de plus.
Et si je rallie autant de fidèles que de soldats…

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[Nuit de combats]

J’avais compris depuis bien longtemps que la peur n’évitait pas le danger. J’avais passé des jours à craindre la mort, mais alors que les premiers coups commençaient à pleuvoir, la peur m’avait quittée, laissant place à une hargne indéfinissable. Le but était simple, attaquer, vaincre, piller. Des gestes maintes et maintes fois répétés, qui ont la plupart du temps menés à la victoire. Il me semble n’avoir jamais imaginé la possibilité que l’on pouvait échouer, et j’en voulais à Vran, de s’accrocher à cette idée en annihilant le fait qu’on pouvait réussir : les chances étaient faibles, mais elles existaient, et quand bien même il n’y en avait qu’une sur cent, nous devions la tenter.
On s’était fâchés, la veille. Des mots avaient été balancés sans tendresse, et sans même vraiment les penser : je n’ai pas d’autres excuses que le fait que nos amis pensaient qu’on réussirait, et que j’étais totalement d’accord avec eux, que s’il voulait partir, il pouvait. Je ne retenais personne, je ne forçais personne, et Lui le dernier. J’avais par la même renié un des vœux de notre mariage : jamais l’un sans l’autre. Et même si cette engueulade me rongeait, je l’ai mise de côté quand tout a commencé.

J’avais rapidement pris conscience qu’il n’était plus question de prendre la ville, si c’était ce qui m’avait animé les premières minutes, il avait fallu se rendre à l’évidence : il fallait luter pour survivre. Survivre, et seulement ça, ça ne faisait pas partie des plans que j’avais imaginé. Je n’avais pas vraiment de plan B, et j’ai, je l’avoue, perdu pied, doucement. Je m’en voulais soudainement d’avoir poussé tous ces gens vers une mort certaine, à commencer par Nicolas, mon fils, et Vran.
Et tu sais, ça rend téméraire la peur. Ça décuple la force, ça repousse tes limites, et même celles de ton cœur. Toute la volonté du monde ne peut pas se mesurer à la peur de mourir. Tu pourrais déplacer des montagnes à la seule force de tes mains, mais ceux d’en face avaient la même envie d’en découdre : plus nombreux, sur des terres qu’ils connaissaient par cœur, ils ont pris le dessus.

Je n’ai pas vraiment de souvenir de ce qu’il s’est passé avant la fin. Une vive douleur dans l’épaule gauche et le bout d’une épée qui déchire ma chemise. A peine le temps de comprendre qu’un pied s’enfonce dans mes reins pour me pousser au sol.
Aucun son ne sort de mes lèvres, le regard scrute l’horizon à la recherche de Vran, et puis le froid.
Le froid, le souffle qui se creuse et puis plus rien.



[Hôpital de Campagne, Genève, Vingt cinq Juin 1469]


Je viens de trouver ce carnet, notez qu’il n’a pas suffit à vous épargner. Je n’ai pas lu les pages précédentes, bien que je me demande toujours ce qu’on vécu les gens pour devenir brigand. Quels traumatismes ont bien pu les conduire à piller d’honnêtes personnes pour s’enrichir. C’est d’autant plus étonnant que vous aviez le Livre des Vertus contre ce carnet.

Je ne sais pas si vous survivrez, j’aime penser que l’on doit soigner les gens tels qu’ils soient, aussi vous recevrez les meilleurs soins. Vous avez été trouvée sur un champ de bataille proche d’Embrun, au milieu d’autres, amis, ou ennemis. Vous sembliez flotter au dessus d’une mare de sang, les yeux ouverts, les lèvres bleues. Nous avons d’abord pensé que vous étiez morte.
Vous êtes salement amochée. Une lame vous a vraisemblablement traversé l’épaule, vos reins sont une ecchymose géante. Vous ne répondez pas encore à nos mots, et vous êtes agitée, la culpabilité semble vous ronger, réveillez-vous, et nous discuterons de vos paroles car non, ce n’est pas votre faute, et non, on ne vous tuera pas.
Un homme porte le même bracelet que vous, nous le préviendrons de votre réveil.
Reynald.

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[Hôpital de campagne, Genève, Vingt sept Juin 1469]

Andréa.
C’est ainsi qu’on vous a baptisé visiblement. Votre époux n’a de cesse de demander de vos nouvelles depuis votre arrivée, il porte le même bracelet que le votre, le doute n’est donc pas permis. Il passe des heures à vos côtés, démuni de ne pouvoir agir. Alors il repart, pour mieux revenir.
Vous ne vous êtes pas encore réveillé, deux jours déjà que Morphée vous emprisonne et si vous n’aviez pas le visage si marqué, nous pourrions penser que vous dormez. Un sommeil agité, et douloureux jusqu’au breuvage qui vous fera sombrer pour quelques heures de repos.
Un certain Urbain vous a écrit, entre autres. C’est le seul qui mentionne vos possibles projets avortés, aussi comprenez que j’ai du mal à savoir qui vous êtes. Attaquer la religion, en priant son Dieu, oui, j’ai du mal à comprendre.
Aucun signe de réveil ne vous anime ce soir encore. Mais demain, demain est un autre jour.
R.



[Hôpital de campagne, Genève, Vingt neuf Juin 1469]

Vous grognez. Vous grognez en dormant, de douleur ou parce qu’on vous ennuie, nous n’en savons rien. Vous faites semblant de dormir, mais nous savons encore reconnaitre les gens qui dorment de ceux qui simulent. Vous voulez la paix, nous n’insistons pas, mais si j’ai un conseil pour votre futur, évitez de grogner quand on ouvre votre courrier, c’est un bon indicateur pour nous.
Votre blessure évolue bien, il n’y a pas de signe d’infection et vous ne saignez plus. Alors pourquoi n’ouvrez-vous pas les yeux ?
R.



[Hôpital de campagne, Genève, Premier Juillet 1469]

Vous êtes mutique sans que l’on ne comprenne pourquoi. Vos yeux gris restent sans cesse voilés, seule la présence de votre époux, et votre regard dans sa direction nous indique que vous n’êtes pas atteinte de cécité.
Vous semblez résignée à ne pas vous battre. Sourde à nos questions, passive lors des soins. Et lorsque vous nous faites l’honneur de chuchoter quelque chose, c’est pour nous prier d’abréger tout cela. Mais il n’y a rien à abréger Andréa, dans quelques jours vous quitterez cet endroit sur vos deux jambes.
Vivre vous semble difficile. Peut-être avons-nous fait une bêtise. Peut-être qu’il était dans vos plans de mourir tel un chien sur ce champ de bataille. Mais peut-être en tirerez-vous une leçon qui changera votre vie à tout jamais.


-Il est l’heure de changer les bandages.
- …
- Vran ne devrait pas tarder.
- …
-Nous avons eu des nouvelles de votre ami, à Poligny, il se remettra.
- …
-Andréa.
- Assez.
-Il faut savoir célébrer la vie lorsque Déos nous offre une autre chance, et s’en servir.
- Je ne veux pas de cette chance.
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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[Août 1469]


Trop tôt pour expliquer,
Trop tard pour regretter,


        Il est temps de clore ce chapitre.

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[A mon ancrage rêvé après le chaos*]


J'avais quitté Bordeaux sans savoir que je n'y reviendrais pas. J'avais posé la majorité de mes affaires dans l'appartement acquis voilà quelques années, pris le strict minimum, comme on le fait quand on voyage seule, et qu'on ne part que deux jours, ou trois.
Et puis le goût de la liberté avait pris le dessus sur le reste.

La liberté, ou le mariage, c'est l'éternelle question. C'est comme devoir choisir entre une crème au chocolat et une tarte au citron. C'est savoir dans quel ordre les manger pour que l'un ne prenne pas le pas sur l'autre.

Il y avait eu ces échanges de missives avec l'Italien. Prudents, comme il faut l'être quand deux anciens amants s'écrivent. On peut en dire mais pas trop. On devine ce qu'il écrit entre les lignes en espérant qu'il ne fera pas la même chose. On crève d'envie de, mais on ne peut pas. Mais on ne doit pas.
C'est une histoire qu'on ne saurait dater, elle semble vieille comme le monde. Ce sont deux êtres que tout sépare mais qui sont incapable de résister l'un à l'autre. Deux êtres qui veulent, mais ne peuvent jamais, jamais entièrement. Parce que l'un est engagé et pas l'autre, jusqu'à ce que ça soit l'inverse. Deux personnes qui ne peuvent pourtant s'empêcher de se voir, et encore moins empêcher leur cœur de battre un peu plus fort quand l'autre s'approche. Et c'est difficile de voir qu'on ne peut pas contrôler ça.

Dans la vie, il faut faire des choix. Et puisqu'il n'y a jamais de bons moments pour se retrouver, il faut tailler dans le vif.
Et partir.
Partir, avec un bout de celui qu'on abandonne. Partir avec un enfant en son sein, partir en sachant que le profil s'arrondira encore un peu, avant de disparaitre. Partir, en sachant qu'il n'y aura pas de retour possible, partir, en sachant qu'aucun pardon, jamais, ne sera accordé.

Partir, et mourir un peu.
Mourir.
Pour mieux renaître.

Et c'est à Limoges, comme toujours, qu'aura lieu la renaissance.
Limoges,
L'Italien,
Mon ancrage rêvé après le chaos.


: * Pomme.

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[ Grandiose, ou rien. ]


Je voulais un enfant.
Le temps semblait me glisser entre les mains et avant que vienne l'heure de ne plus pouvoir, je voulais être mère à nouveau. Un foyer, stable, où il grandirait en sécurité, une vie, grandiose, à la hauteur de tous les sacrifices que j'étais prête à faire.
J'ai été exaucée, au delà des espérances, à peine Vran et moi avions pris la décision que l'enfant déjà grandissait.

Et puis la vie.

Et l'espoir devient fardeau.
Prendre la route en sachant que jamais le pardon ne sera accordé. S'imaginer élever un enfant sans son père, et tuer les espoirs d'une famille unie. Supposer qu'un autre le prendra sous son aile mais ne pourra jamais le regarder comme on regarde la chaire de sa chaire, mais plutôt comme une petite chose qui lui rappellera toujours que j'ai failli, l'objet de la trahison chaque matin devant ses yeux. Essayer de trouver des alternatives, des compromis à ce Grandiose tant espéré, en vain.
Ma décision était égoïste, comme je l'ai toujours été.
Mon choix était fait, et rien ne pourrait me faire changer d'avis.

Il avait demandé du temps, le temps d'être sûr peut être, mais surtout celui d'être bien entouré. S'assurer que tout se passerait au mieux, pour que bientôt, peut être, il lui soit à nouveau possible de devenir père. J'entendais ses craintes, je les comprenais, mieux, je les acceptais.
Mais chaque minute supplémentaire, dans cet état, me rendait amère. J'avais peur de regretter, de sentir sa présence et de changer d'avis. J'avais peur qu'il ne devienne un mur que je ne pourrais plus franchir. J'avais peur d'imposer sa vie à la mienne, de lui faire porter ma vie dans la sienne. J'avais peur de lui reprocher sa naissance. Et pour ça il ne pouvait pas rester.

J'imaginais que quelques minutes suffiraient à effacer mon état, qu'une poignée de plantes infuséees viendraient à bout d'un enfant pas plus gros qu'une pomme. Je m'étais fourvoyée.
Dans la sueur, les larmes et le sang, je m'étais fourvoyée.


Et j'avais donné la mort après avoir si longtemps voulu donner la vie.

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[Reste en vie]


Il était arrivé dans ma vie un soir de fin d'été, de ces soirées où l'air est étouffant, mêlant la chaleur de la journée et l'humidité du soir, de ces soirées où même le temps ne sait choisir.
Il n'avait pas beaucoup parlé, se contentant d'observer. J'avais été marquée par la couleur de ses yeux, plus que par les cicatrices qui transformaient son visage, je ne saurais dire s'il était beau, je n'avais pour seules certitudes que la blondeur de ses cheveux et le Bleu de Prusse qui faisaient de ses billes des puits sans fond.
J'avais eu l'intime conviction, dès la première minute, que nous partagerions quelque chose de beau, de ces histoires qu'on ne confie que rarement, quand l'alcool et les herbes délient les langues. De ces mots que l'on abandonne en les regrettant aussitôt, comme si le simple fait d'en parler rendait la chose moins réelle, moins forte, moins belle. J'étais restée longtemps à le regarder, oubliant même qu'il y avait une conversation avec d'autres personnes, et quand enfin j'avais pu décrocher mon regard de ses mains, j'avais souri en regardant les miennes.
Te souviens-tu Hecthor, de ce sourire que j'avais offert à l'univers, comme une promesse à moi même que j'irais au bout de ce que j'avais senti, comme un duel entre Déos et moi, qu'il pouvait bien tout mettre entre nous mais qu'il n'empêcherait pas les choses d'arriver.

J'avais pris soin de ne pas te parler en public, parce que j'avais senti que tu n'étais pas du genre à te dévoiler vraiment en présence d'autres, acteur en ton domaine tu maîtrisais les masques. Tantôt musicien, chanteur ou amuseur. Mais on ne me la fait pas à moi, je sais ce que sont toutes ces personnes lorsque la nuit tombe. Je sais ce que l'on devient, quand on est seul et qu'il n'y a plus personne devant qui faire semblant.
Je t'avais apprivoisé dans ton silence, je pense, avec le recul, que tu faisais de même. Nous parlerions quand le moment serait venu.

Tu sais Hecthor, tu n'as jamais eu besoin de dire les choses pour que je les devine. Je ne vais pas te sortir tout un laïus sur les âmes soeurs, les amours ou toute autre connerie du genre, il y a simplement dans ce royaume des gens qui se comprennent sans qu'on ne puisse l'expliquer.
Moi, j'ai compris dans ton silence que tu souffrais. J'ai vu qu'à l'intérieur de toi il y en avait un autre, plus grand, plus fort mais bien plus cabossé par la vie. Tu ne m'as pas beaucoup laissé l'occasion de le rencontrer, celui là. Mais je savais qu'il existait et je crois que ça me suffisait.

Je sais. Je TE sais. Je sais qu'on ne voit parfois aucune alternative que la souffrance, pour contrer la souffrance. Qu'on a besoin de se faire du mal, plus de mal, pour ne plus avoir mal. Qu'on peut boire, fumer, péter des gueules et casser des dents pour oublier qu'on est brisé. Qu'on peut chercher la merde et s'y enfoncer pour se souvenir que l'on est en vie.
Je sais, Hecthor, qu'on peut être en vie et trouver ça injuste. Qu'on peut aller loin, pour s'assurer que Déos ou quiconque ne s'est pas trompé de personne en emportant avec lui l'âme d'un ami, d'un enfant, d'un amour.
Je ne saurais probablement jamais ce qui t'a été enlevé, je ne peux que supposer.
Supposer, et espérer qu'un jour tu comprendras que tu ne feras revenir personne en agissant de la sorte. Pire, tu feras du mal à ceux qui se sont attachés à Toi.

Tu crois que tu ne mérites pas qu'on s'attarde sur ton cas, que tu n'en vaux pas la peine, que tu n'es que déchéance mais malgré toi tu attires les autres.
Il y aura les fragiles, qui tenteront tout ce qu'elles ont pour t'aider. Tout ce qu'elles ont Hecthor, quitte à y laisser des plumes, leurs ailes et peut être même la vie. Ces mêmes que dans un sursaut de vie tu vas vouloir prendre sous ton aile avant de les abandonner dans un coin, par peur de trop t'attacher.
Il y aura les battantes, qui t'accompagneront à ta perte. Ces fidèles de la baston, des reines des armes, couronnées de lames, toujours droites, toujours fières, espérant au fond qu'un jour tu verras autre chose en Elle. Et puis par peur de les blesser car ce jour n'arrivera pas, tu les abandonneras, par peur de les faire souffrir.
Il y aura les passagères, ces filles d'un soir, d'une nuit mais guère plus. Qui sauront profiter de ta détresse pour s'envoyer en l'air. Dans la vienne, contre un arbre ou dans les champs. Ces filles qui ont compris qu'elles n'auront jamais rien de plus que ce petit bout de tendresse que tu pourras leur concéder. Et au petit matin, sans surprises, tu les abandonneras. Elles aussi.

Au milieu des fragiles, des battantes et des passagères, il y aura moi. Qui aura entrevu la lumière et compris que rien n'est possible. Car rien n'est possible Hecthor, tant que tu ne l'auras pas décidé.
J'aimerais te dire qu'il suffira d'une rencontre avec l'évidence pour que tout change, que ton passé, sans l'oublier, tu arriveras à vivre avec. Qu'il pèsera moins lourd, qu'il ne te réveillera plus en sursaut, que tu n'auras plus jamais besoin de taper dans les murs et de te sâouler jusqu'à cet état comateux, seul état où tu es vraiment bien. Mais ça serait mentir Hecthor, ça serait te raconter des conneries aussi grosse que ce mal qui te ronge.
On n'oublie pas, on vit avec.
On survit avec.
Parfois avec aisance, parfois avec violence.
Ça te sautera à la gueule quand tu ne t'y attendras pas, ça sera un geste, une odeur, un bruit, parfois même un simple regard. Et tout ce que tu auras mis des mois à construire s'écroulera.

Je le sais. Mieux que personne.
Car c'est tout cela que tu as réveillé en t'approchant de la Vienne ce soir là.
J'ai senti l'urgence dans ton regard. J'ai senti le dégoût dans tes yeux, et ce que je pensais dirigé contre moi l'était en fait contre toi. Tu sais, je me suis dégoutée, aussi, un peu. De ne pas avoir essayé de te retenir, mais c'était vain, et je le savais.

Je savais depuis le début que ça serait éphémère, mais l'éphémère chez toi l'est encore plus.
J'ai déposé cette hache devant chez toi, même si plantée dans ta porte me semble plus juste. J'aurais aimé la faire graver, mais je ne voulais pas que tu partes sans elle.
J'aurais aimé la faire graver, pour que chaque fois que tu la regardes, tu saches que je ne te demande qu'une seule chose.

"Reste en vie"

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
Andrea_
[Alzo.]




C'est la première fois que j'écris ton nom sur ce journal, même si tu étais déjà présent, à plusieurs endroits. Un peu de toi soupoudré ça et là, comme un reflet de ta présence dans ma vie.
Je ne saurai dire depuis quand nous nous connaissons, j'ai toujours eu du mal à me repérer dans le temps, deux, trois ans? Dix? C'était dans le sud, peut-être Marseille, ou Arles. Notre groupe y avait amené Lenù, elle parlait de toi, parfois, le soir, des lettres que vous échangiez, du fait qu'elle allait t'épouser et que c'est pour ça que tu venais la chercher. Quand elle parlait de toi, je ne comprenais pas. Tu ne vidais pas les mairies, tu ne bravais pas les armées, tu ne fomentais aucun plan, tu n'étais pas un adorateur des voyageurs, ni même un explorateur.
J'ai essayé de lui faire comprendre, moi, à Lenù, qu'elle n'avait rien à foutre avec un gars comme toi, qu'elle allait s'ennuyer ferme, que ça serait marrant les premières semaines de jouer à la maman, de cueillir des roses et de regarder pousser la pelouse, mais que franchement, Lenù, c'est pas ça la vie des femmes comme nous !

Et puis avant que je ne sois prête à dire au revoir à mon amie, t'étais là, dans cette taverne dont j'ai oublié le nom. T'étais là toi, ton sourire absent, ton regard hautain et ton air d'avoir un balai dans le cul. Je t'ai détesté, et je ne me suis pas cachée de te le dire. T'avais d'ailleurs été très clair en m'avouant que tu l'avais compris avant même que je ne le formule, au moins on partait sur de la franchise.
T'avais voulu danser. Je ne sais toujours pas pourquoi t'avais voulu danser, j'avais jamais fait ça en plus ! Je t'ai écrasé quelques fois les pieds, parfois d'inexpérience, souvent de mon plein gré. Je crois que j'aimais te voir serrer les dents, t'avais envie de m'en coller une, c'était tellement flagrant que je jubilais.

J'ai détesté ce que tu as fait d'elle. Elle avait l'air épanouie dans cette vie que tu lui offrais, alors que ça n'était rien de plus qu'une cage dorée, rapidement Charles est né et elle était comblée, c'était comme si tu avais fondu l'ancienne Lenù pour en modeler une nouvelle à ton image. Et puis son sourire a disparu, bientôt ses mots suivraient, jusqu'à ce qu'elle entière disparaisse.
C'est bien avant ça, pourtant, que nous avons commencé à nous retrouver, tard, le soir. Pour discuter, parce que je voulais comprendre ce qu'elle trouvait, pour échanger, parce que tu voulais savoir, toi aussi, qui j'étais. Et plus tard, pour se connaitre sur un plan plus personnel, quand les peaux nues se découvrent, par curiosité, par envie, par besoin.

L'histoire a longtemps été belle. De ces moments partagés à deux, avant que de ta famille il ne reste que Charles et que je sois autorisée, à petits pas, à me glisser dans votre univers, pour qu'enfin père et fils se rapprochent. De la vie que nous partagions, à celles que nous gardions secrètes. Lenù avait disparu et rien ne nous empêchait de tout partager, rien sinon cette inflexibilité qui nous caractérisent.
Tu me voulais libre, comme personne ne m'avait voulu. Tu acceptais les autres, tu acceptais les distractions, les coups de sang, les pulsions, tu me semblais tout accepter en échange de ton nom, et moi, moi si je pouvais t'offrir un enfant, je n'étais pas sûre de supporter voir les autres te tourner autour, pire encore, partager ta couche et ta peau.
L'histoire a longtemps été belle, et si elle l'est encore plus aujourd'hui, c'est parce qu'il aura fallu se déchirer, se séparer, s'éloigner, parfois à des semaines, loin de l'autre. S'oublier, des mois durant, pour se rendre compte qu'il suffisait d'un seul regard, pour retomber. C'était douloureux de se quitter, encore plus douloureux de se revoir. Chaque fois loin de toi, j'ai cru être guérie, j'ai construit des choses, sans faux semblant, j'ai avancé, pour de vrai, comme j'aurais avancé si tu n'avais jamais existé, loin des yeux loin du coeur, droit devant, toujours.
Et puis Toi. Et les doutes. Et les armes levées, les dents serrées. Toi, que je devais fuir sans le pouvoir, toi, te croiser, juste te voir. Et puis juste une minute, juste un verre. Et puis juste une balade. Et puis... Et puis juste ma main dans la tienne. Juste un baiser, juste ça. Et puis... Et puis repartir, encore.
Mon départ et tu te mures dans le silence, tes fiançailles et je pleure, les miennes et tu fuis. Pour mieux avancer loin l'un de l'autre.

Poligny aura été la fois de trop. S'il suffisait habituellement de quelques jours, de quelqu'étreintes d'un autre pour oublier jusqu'à ton existence, ce ne fût pas le cas cette fois-ci. Tu étais dans chacun de mes songes, dans chacune de mes réactions. Mes paroles sonnaient faux et avaient du bien du mal à garder les nerfs, qui à fleur de peau, faisaient souvent exploser des colères. Je m'en voulais Archibalde. Je m'en voulais de ne pas pouvoir t'oublier cette fois, j'ai essayé pourtant Dieu que j'ai essayé.

Je sais aujourd'hui ce qu'elle te trouvait, je sais que la cage n'est pas fermée et que j'aime m'y retrouver. Un écrin, un écrin de Nous quand au dehors tout est possible.
Un écrin, où raisonnent encore tes mots.



On ne détrône pas les dieux.
Un autre pourrait aussi venir prendre ma place, qui sait, mais je place ma confiance en vous. Même si votre coeur s'égare, que votre raison vous rappelle que je vous offre tout lorsque les autres ne vous en donneront le quart.
Baise avec qui tu veux, car je les observe de loin ces hommes qui te tournent autour, attirés par ta lumière comme des papillons de nuit qui s'époumoneront de ne pouvoir t'avoir toute entière. Et je t'imagine roulant des hanches sur eux, soupirer de plaisir sous leurs reins, t'extasier de la vigueur de l'un. Crie, hurle, j'aimerais l'entendre si je le pouvais, qu'ils cherchent désespérément à te posséder en redoublant d'effort.

Mais cela n'y changera rien, puisque je vais graver en toi tout ce que je suis, et tout ce que tu es.
Et tu auras beau leur donner ce que tu voudras bien leur concéder, peut-être même ce que tu penseras offrir avec clémence, je resterai maître de ce rivage qui est le tien. Et tu me reviendras, disposée à me retrouver car tu sais qu'on t'attend, et qu'il n'y a personne d'autre ici bas si ce n'est moi capable de t'aimer comme il le faut. Tu es libre car c'est ce qui te va le mieux, mais tu es à moi, et je continuerai de le ciseler en toi jusqu'à la fin, parce que c'est ce qui sonne le mieux.


A cet anneau, pour la troisième fois offert.
Ne t'avais-je pas dit que jamais deux sans toi?

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*Phrase de Pomme, Merci pour la bannière, vraiment.
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