Lylie_blanche
9 Juillet 1467,
Pour la première fois depuis plusieurs semaines, l'orage gronde dans la ville. Accoudée à la fenêtre de cette chambre d'auberge, où elle reçoit de temps à autre, quelques clients, Renarde apprécie le tableau qui se dessine, se mue et s'active au dessus de Montpellier. La teinte unique et bleutée du ciel se pare de nuances plus sombres. Un dégradé de couleurs allant du noir profond au gris menaçant. L'orage gronde, le ciel craque et semble se déchirer sous des bruits puissants et intimidants. Sur les toits et les pavés, la pluie tombe, violente et épaisse. L'eau ruisselle déjà, tant sur les murs poisseux que sur les ruelles, emportant déchets et pourriture sur son passage. Montpellier semble se laver de ses vices, pour un temps du moins. Marchands s'activent pour protéger les produits, servantes s'empressent de refermer les fenêtres pour éviter que le mal ne s'y infiltre. En contre bas, les voix s'élèvent, tantôt agacée, effrayée et soulagée. La pluie bien que virulente, apporte son lot de fraîcheur et l'orage, aussi menaçant soit-il, apporte aux palpitants, cette dose d'excitation et d'appréhension. Fenêtre ouverte, museau dehors, Renarde savoure le déluge qui emporte les esprits et soulage les corps éprouvés par cette chaleur passée. Vent se perd au pelage, joue de quelques mèches rousses, quand de temps à autre, éclaboussures et gouttes viennent happer le derme pour le faire frissonner.
Si certains craignaient l'orage, Courtisane, elle s'en délectait. Cette puissance, cette imprévisibilité lui rappelait combien l'Homme pouvait être faible face aux caprices du Déos. Elle reste ainsi un moment, accoudée devant le spectacle quand la porte vient a être heurtée. Son délicat comparé au trouble qui emporte la ville. Volet est entrebâillé, fenêtre laissée ouverte comme pour conserver un lien avec ce qui se trame au delà et laisser les maux du Très Haut, envelopper sa chambre de ces déchirures.
Passant quelques secondes devant le miroir, elle arrange sa chevelure, pince ses joues et ses lippes pour les teinter de rosé et de pulpe. La tenue est simple, une robe teintée de pourpre, des bas blancs surmontés de rubans rougeâtre. Le parfum est saisi, porté à son cou alors qu'elle s'empare de quelques gouttes pour les porter entre ses monts, à ses poignets et derrière les oreilles.
Un regard vif et pointilleux se porte à la chambre, rangée. La couche dans l'angle gauche du mur est faite, surmontée d'étoffes. Son bureau est orné de ces divers ouvrages de lecture, tous rangés sur la tranche. Quant au baquet, ce dernier a été préparé par la servante de l'auberge à sa demande. La pièce est modeste mais elle dispose de tout le confort nécessaire pour une passe de qualité et inspirer, hygiène et confort à un client.
Tout est prêt..Doucement, l'échine se retourne et vient ouvrir la porte.
Face à elle, cet homme qu'elle avait rencontré au marché et qui semblait avoir entendu parlé de sa profession. Personnage qui semble commun et dont pourtant, la protection de ces hommes à ses côtés, laissait en deviner l'importance qu'il semblait, omettre, volontairement. Une stature assez quelconque, pas trop grasse ni trop musclée, une chevelure brune et des iris assortis. Il semble soigneux, sûr de lui et pourtant, à peine la porte est-elle fermée, qu'il ne semble plus rien avoir avec cet homme, naïf ou ingénu qu'il se plaisait à être au marché en présence des badauds.
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