Cixi_apollonia
Montpellier.
Citation:
- Bonjorn la Mouette,
J'espère que le pigeon auquel je confie cette missive est assez malin pour te retrouver, quelque part. J'ai toujours eu des doutes au sujet de leur malignité, et pourtant, je reçois mes messages.
Les Pottocks vont bien. Nous assurons le train de l'Ordre dans nos pérégrinations miitaires, encore que parcourir le Royaume de France par ce temps s'apparente plus à une villégiature nomade qu'à une expédition guerrière. Il fait divin.
Nous prenons nos aises. On pourrait presque nous confondre avec un cirque ambulant : j'ai adopté la tenue des maures pour être au mieux sous la chaleur, et d'autres ont fait comme ils voulaient, ce qui fait de nos "caravanes" quelque chose d'assez bigarré.
Une mouette est venue se poser sur mes épaules dernièrement. Et depuis, elle ne me quitte que pour aller manger, puis me revient.
Je me suis demandé quelques temps si ce n'était pas une mauvaise plaisanterie de Dieu, ou si c'était toi qui était revenue ainsi réincarnée.
Puis, et bien, Dieu reste très muet souvent. Il rira de la chose, j'en suis certain, mais de là à la provoquer ...
Et toi, tu es trop coriace pour finir ainsi, et trop indépendante pour occuper l'épaule d'un routier comme moi et t'en contenter.
Je vais bien, dans l'ensemble. Quelques blessures de coeur, pas de nouvelle blessure de chair ni d'âme encore que nous cherchions celles-ci plutôt que celles-là. Les cicatrices tiennent mieux que le reste.
Nous avons plein de nouveaux qui gagnent l'Ordre, et de belles rencontres ainsi, et en chemin. J'avale de la poussière des chemins, et tous les fruits qu'on m'offre et le gibier que je peu braconner. Enfin, nous avons le droit parait-il, mais la technique est la même, au collet ou à la fronde.
Je n'ai pas de nouvelle du Toubib Rameau depuis longtemps. Je suis persuadé qu'à m'en faire, il réapparaitra à un carrefour, le sourire aux lèvres, comme si de rien n'était. Ceci dit, le Royaume est calme d'où je le vois.
Et voilà, le pigeon qui me regarde d'un oeil acerbe en voyant cette missive s'alourdir. Finalement, ils l'ont sans doute, cette intelligence. Et moi, je pérore et pérore, alos que je voulais juste demander "comment vas-tu ?". Dis-moi ce que tu peux, et veux.
Je te souhaite plein de bonnes et belles choses.
Torchesac
Une lettre sortie du fond d'une gibecière. Le regard de la Mouette en question sur le port. Quelle étrange sensation que le retour. Bientôt, demain sans doute, il faudrait remonter vers le nord. Il fallait voir si Bastian était en vie. Il fallait récupérer Tencendur. Réapprivoiser la vie terrestre, après tant et tant de mois entre deux vagues.
Qu'était devenue sa vie ici? Qu'avait-elle laissé? Que récupérait-elle? Tant de questions qu'elle rangea avec la missive qui semblait arrivée aujourd'hui au port, providentielle, pour lui remettre les idées en place. Torchesac avait quelque chose d'énigmatique et de magnétique sur la course de sa trajectoire. Une aiguille lui indiquant la direction à suivre. Une façon de la remettre sur pied, comme il l'avait si bien fait en la tirant du charnier, ce soir là...
Plus tôt, elle avait retrouvé le gout du pain au levain, sensation indescriptible pour rompre un régime frugal de poisson séché et de farines fades. Les escales avaient toujours le goût des saveurs incroyables. Promesses de manger autre chose, à chaque fois. Celle-ci, bien qu'elle sonnait un retour sans repartance en mer, n'y échappait pas. Elle avait loué une chambrée et avait profité de l'adrénaline momentanée pour aller au marché, négocier quelques marchandises ramenées du bout du monde. De quoi se faire un pécule confortable et assurer ses arrières... Si Leffe ne voulait plus d'elle, elle aurait de quoi se retourner. N'avait pas démérité ses soldes à bord. Et qui sait, peut-être qu'elle reviendrait ici, à Montpellier, récupérer son magot pour se faire construire un navire?
Matelot fourbu, jeu de cartes en poche, se dirigea vers l'auberge indiquée plus tôt par le premier type rencontré. Il était temps de prendre un repos qu'elle n'avait plus goûté depuis longtemps. Et de répondre, calée dans une vraie couche, à Torchesac. Mais d'abord, boire un verre de rhum, et fumer. Habitudes prises aux rituels quotidien, au contact des autres. Seuls plaisirs des marins. Des marins qui ne baisaient pas, du moins.
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