L_aconit
19 août - Retraite d'été
* Amour
** Louis Aragon
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(En Bleu italique, les pensées Laconiques.) galerie d'avatar-Recueil
- Rien n'est précaire comme vivre
Rien comme être n'est passager
C'est un peu fondre pour le givre
Et pour le vent être léger
J'arrive où je suis étranger
Sac de toile posé sans douceur réveille un léger nuage de poussières sur le ciré morne du carré de terre cuite. Alors c'est ici. C'est ici qu'il passera le plus clair de son temps à ne pas être. Dehors sans doute, dehors apaisera le temps qui passe. Déréglé. Trop lentement est prédit. Pourtant Montfort reste ouvert aux surprises. à toutes les surprises. Une nuque plus longue qu'une autre, le dos d'un étudiant à l'échine courbée sur un écrit. Quelque chose pourra égayer limplacable sablier. Ne s'est-on pas juré de se séparer pour toujours mieux se retrouver?
- Un jour tu passes la frontière
D'où viens-tu mais où vas-tu donc
Demain qu'importe et qu'importe hier
Le coeur change avec le chardon
Tout est sans rime ni pardon
Les griffes des Lévriers cliquètent au sol dans un bruissement qui a été pensé pour rappeler le chant-maison. Resté non loin de Béziers, Montfort détaille d'un bleu atone la décoration sommaire de sa cellule d'étude. Avant, il s'enfermait dans des alvéoles aux croix. Désormais, il embrasse des retraites où s'endormir dans des livres. Dans un regret épais de n'y coucher personne.
- Passe ton doigt là sur ta tempe
Touche l'enfance de tes yeux
Mieux vaut laisser basses les lampes
La nuit plus longtemps nous va mieux
Mais l'enfant qu'est-il devenu
Je me regarde et je m'étonne
De ce voyageur inconnu
De son visage et ses pieds nus
Les genoux se plient, non pas à la prière, mais à l'essai du lit. On y passera du temps, des nuits sans teint ni paupières, des poignées d'heures du soir où relire les courriers. On imaginera l'Italie, on y brassera les chiens pour se faire croire que l'ennui filera par la fenêtre. D'une main experte d'être souvent loin de chez elle, Faust estime dans la densité de l'édredon la longueur des routines. Combien de jours lui faudra-t-il avant de le rejeter loin de ses bras, faute de parvenir encore à combler d'un ersatz l'absence du corps de l'autre? Faute de simuler et stimuler dans l'assaut des brèves nuits la lourdeur naturelle d'une physionomie endormie.
- C'est long d'être un homme une chose
C'est long de renoncer à tout
Et sens-tu les métamorphoses
Qui se font au-dedans de nous
Lentement plier nos genoux
Ô mer amère ô mer profonde
Quelle est l'heure de tes marées
Combien faut-il d'années-secondes
À l'homme pour l'homme abjurer
Faust est parti aux études, Tabouret à son rôle paternel. Ne reste que les saveurs éternelles des manques au silence prude. Kuanos s'oublie sur le carreau. Un compagnon passe dans le couloir sonner l'heure du repas. On se sent le ventre creux d'une nourriture à laquelle personne n'oserait songer ici bas.
Faust fera le mur ce soir.
- Pourquoi pourquoi ces simagrées
Rien n'est précaire comme vivre
Rien comme être n'est passager
C'est un peu fondre pour le givre
Et pour le vent être léger
J'arrive où je suis étranger.**
* Amour
** Louis Aragon
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