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[RP] Généalogie

Alphonse_tabouret
Premier juin







La cour de petit Vésone se raye de verdures ; parterres, arbres, bosquets se partagent l’espace aux roches claires du bâtiment. Etirés sous un soleil de plomb, les arbres fruitiers dessinent aux nuées les rondeurs colorées des fruits à venir : les fleurs du printemps n’existent plus, l’été à grands coups de cymbales, annonce sa proche arrivée aux grappes apparues.
Rivière a trempé les silhouettes ; les boucles brunes des mâles Tabouret sont encore alourdies et abreuvent de transparence le tissu qui les recueille. La voix fluette d’une petite fontaine trouble le silence écrasant de ce premier soleil estival là où un plateau s’ombre d’un pichet d’eau embué ; épaisses branches de menthe aux feuilles veloutées y ont été plongées et diffusent leur parfum d’une subtilité aux gorges qui se désaltèrent.


Coulobre, propose le petit garçon en s’essuyant la bouche du dos de la main, reposant un verre vidé d’une seule traite, sous l’œil perplexe d’un père regrettant déjà ses largeurs.
Ce n’est pas un prénom, Coulobre, oppose nonchalamment une voix prudente quand les noirs observent avec méfiance l’enfant et ses fils logiques, y reconnaissant avec une certaine hypnose quelques-unes de ses expressions : Le visage ne se froisse d’aucune contrariété à l’objection ; comme son père, Antoine a la rhétorique implacable et le sens des promesses :
Tu as dit que je pouvais choisir.

Mouché d'une vérité, Alphonse donne le point d’une impassibilité ; son fils a raison, le choix du second prénom de son frère lui a été proposé.

Ou Gontran peut-être, comme le chevalier, tu sais.

Aux relativités d’un mieux à la surenchère, Tabouret joue de son verre entre ses doigts, faisant tanguer d’une vague fluette le fond d’eau fraiche qu’il n’a pas encore bu.

Celui qui meurt en tombant de la falaise ?, demande-t-il d’un sourire en coin, à ses airs de riens qui mettent en lumière le défaut du choix : la fin tragique de sieur Gontran a valu quelques rires en coulisses ; quel dernier pas stupide pour un chevalier aussi superbe, pourfendeur de loups géants et de mercenaires redoutables…
Le ricanement d’Antoine fait écho au souvenir quand son père renchérit, accentuant le second prénom comme s’il était dit au vertige d’une chute :

Melvil Gontraaaaaaaaaaan ?

Voyelles plus claires montant des deux gorges tranchent le débat : ce ne sera pas Gontran ; funambule méticuleux entrapercevant sa disgrâce à l’imagination inattendue d’un tiers repart à l’assaut, léger :

Pourquoi pas quelque chose de plus… Tiens, que penses-tu d’un … Hercule ?

La proposition est faite d‘une innocence factice à laquelle Antoine tombe d’une seconde, aiglon qui a toutes les manipulations du monde à découvrir encore aux bordures de son nid.

C’est le nom de l’ours à la foire !, proteste-t-il d'une grimace.
Bien, bien… Voyons, quel héro aurait on qui aurait du sens et de l’effet ?...
Ulysse !

Sourire se retient ; hasard fait bien les choses, Antoine, innocente créature vient d’ouvrir les portes de la guerre de Troie en perspective.

Ulysse est un joli prénom. Ajax aussi…
Non, Ajax, c’est moche.

Verdict énoncé d’une limpidité pleine arrache un rire et une main affectueuse vient couronner le crane humide de l’enfant.

Hector.

Silence répond d’une attention ; proposition s’étudie d’une seconde car tout, chez Antoine est propice à l’étude.
Voilà déjà quelques semaines qu’ils ont rejoint la terre, ailleurs en horizon, et le garçon s’adapte de nouvelles lois qui ponctuent l’univers. L’on serait bien perspicace de percer le mystère des yeux noirs qui considèrent à l’instant le panier de fraises qui compose la collation du jour ; Antoine, derrière l’épaisseur de son regard est une eau vive qui se cache.


Pâris.
Pâris a causé la guerre.
Eris a causé la guerre, le reprend son père. Elle a offert a escient un objet qui ferait le bonheur d’une au détriment des autres.

Antoine connait l’histoire ; pensées s’abiment au choix faussement concentré d’une fraise.
Les frères sont une plaie ; celui qu’il se connait n’a jamais été celui qu’il aurait voulu et n’a fait que façonner un monde aux différences acérées.


Il n’était pas très courageux.
Avoir en balance le pouvoir et la gloire mais faire le choix du cœur ne manque pas d'audace.
Tu aurais choisi pareil ?
Oui.


I wont hurt you
Je ne te ferai pas de mal
I wont hurt you
Je ne te ferai pas de mal
I wont hurt you
Je ne te ferai pas de mal
I wont hurt you
Je ne te ferai pas de mal




Antoine sait sans savoir, de ces intuitions qui ne soulèvent pourtant pas d’examens quand elles ont tout d’une interrogation. Ses grands yeux d’enfants ont vu se mêler tant de silhouettes aux couloirs du bordel où il a été élevé à ses premières années : garçons et filles, filles et filles, garçons et garçons, comédiens qui, une fois les marches de leurs quartiers franchies, redevenaient eux, âmes flottant à leur ressemblances plutôt qu’à leurs genres.
Il n’y a pas de mot pour décrire ce qu’il ressent, pas de frontières encore ferrées de symbolismes auquel se suspendre d’un systématisme : si Antoine sait qu’un père et une mère sont la base même d’un schéma, les siens n’ont jamais joué cette partition-là, et étrangement, ne se sent pour autant pas lésé à l’étrange famille qu’ils composent tous deux avec Faust ; car même aux ignorances d’outils trop complexes, intuitions-garçonnes savent déjà que Nicolas est la clef de toutes choses.


Pâris avait un frère ainé.
Qui ?
Hector.


Fraise trouve la bouche enfantine et se gobe d’une gourmandise en filigrane, la mâchant presque trop consciencieusement pour être honnête ; l’héritier Tabouret a lui aussi quelques accents à la mise en scène et engonce d’une adoration muette le cœur-père d’Alphonse sans pour autant céder un centimètre à sa machination.

Hector était un grand guerrier, observe Antoine d’un hochement de tête.
C’est certainement même le véritable héros de la guerre de Troie, répond Alphonse d'une voix basse ; Tabouret préférera toujours les héros plus discrets, si précieux aux coulisses, à ceux que l’on met en lumière.



An untouched diamond
Un diamant intact
that's golden and brilliant
c'est doré et brillant
without illumination
sans éclairage




Antoine ne répond rien, museau animé d’une ombre qui s’agite d’un peu de vent au-dessus de leurs têtes.



Your mouth is constellation
Ta bouche est une constellation
the stars are in your eyes
les étoiles sont dans tes yeux
I'll take a spaceship and try and go and find you
Je vais prendre un vaisseau spatial et essayer de te trouver.




C’était aussi un grand frère admirable… et tu seras toi aussi, un extraordinaire grand frère, ponctue doucement l’instinct qui commande Alphonse aux plus légers sous-entendus.
Melvil Pâris Tabouret, répond l'enfant d’une voix lente, touché au plus juste par ce serment proposé à l’angoisse des fraternités, fraise nouvelle portée à la bouche et s’y suspendant.
Cela sonne bien…
Melvil… Pâris… Tabouret… répète-t-il encore, solitaire aux phonèmes d’un nouveau langage, rouge éclatant d’un fruit se réfléchissant paresseusement à ses lèvres



Qui a entendu se soupeser à chaque syllabe le poids d’une telle destinée ?
Qui a entendu le secret d’un autre rythme ternaire aux fraicheurs insoupçonnées
battre le cœur du petit garçon ?

Gout acidulé des fruits rouges en bouche, révélation surprend en même temps qu’enchante.
Au premier jour de juin, Antoine Hector Tabouret se découvre grand frère.





My pale blue star
Mon étoile bleu pâle
my rainbow how good it is
mon arc-en-ciel à quel point c'est bon
to know you are like me
de savoir que tu es comme moi

_________________
Melvil_tabouret


    [Et la lumière fut .]


Quiétude.

Mon coeur bat, emballé, saccadé, contrastant avec la douce mélopée de celui qui me berce jour et nuit. Je suis petit, infime poussière de vie qui tangue et se balance avec nonchalance, accrochée à l'insignifiance de mon existence attendue mais ignorée. Caché, reclu, tapis chaudement, roulé d'incertitudes; je vis. Je ne suis qu'une conséquence géométrique. Croissant avec méthode; j'écoute.


    Ça doit faire quelques heures maintenant, ou peut-être quelques jours, que je suis là.
    Aucun repère, je dirais que je suis à quelques centaines de kilomètres de la station spatiale.
    Une sortie extravéhiculaire ordinaire qui a mal tourné après l'explosion d'un des modules.
    Pas de chance.


Chaque jour qui passe m'invente une lucidité insoupçonnée, je commence à connaitre les moindres détails de l'espace qui m'environne. Il se meut autour de moi comme si j'avais toujours été là. Au travers de la fine paroi je me figure déjà ce qu'est la vie de l'autre coté, je la devine sans bien la distinguer. Je ne suis qu'un spasme de vie. Enveloppé de secret je me bat en silence, je veux rester là, à jamais. Je ne lâche pas ce besoin d'être quelque chose, je m'y agrippe avec une force que je me découvre. Au fil des jour tout est moins frêle, moins incertain. Il est certain que désormais... Je demeure


    Je ne sais pas ce que sont devenus les autres.
    Maintenant je suis seul, suspendu dans le vide, incapable de bouger, une marionnette sans ficelles.
    Et je crie à travers ma carcasse d'aluminium, mais à quoi bon?
    Est-ce que quelqu'un m'entend?
    Pas de réponse, j'abandonne.


Je rêve d'atteindre quelque chose, quelque part. J'assimile la galaxie à une entité pleine, et vide à la fois. Une inatteignable présence dans laquelle je surnage, prenant de plus en plus d'ampleur. Nous sommes seuls. Ne serais-je donc qu'un hôte condamné à la solitude ? Je veux être remarqué. Je veux être entendu. Je veux être quelqu'un. J'étire mes membres nerveusement. J'allonge mes incertitudes, et mes prières.

Ecoute-moi...

Ecoute-moi...

Ecoute-toi.




    Quand soudain, dans un demi-sommeil, j'entends au loin venir leurs voix.
    J'essaye de voir à travers le vitre sale de mon scaphandre d'où viennent ces voix, quelques tâches de couleur au loin, grossissent à vue d'œil.


Ils m'environnent, ces bruits diffus et ces rumeurs que je ne comprend pas. Les lumières se tamisent et se télescopent. J'associe et je soliloque, je réceptionne l'information, elle excite mes sens. Je tutoie la voie lactée. Je l'entend rire, pleurer. Elle que je connais si peu et si bien à la fois. Son visage se dessine dans les délicates expressions du mien, je me construis à son image. Je pensais qu'il n'y avait qu'elle. Créature qui m'accueille en son sein. Mais le commencement a pris une forme inattendue. Des voix masculines.

Je ne l'ai pas vu venir.



    Des scaphandres.
    D'un seul coup j'ai chaud, je tremble, j'attends avec soulagement que leur dérive les mène jusqu'à moi...


Et oui. Je suis là. Je suis empreint de la poésie de ma création et de toute sa laideur aussi. Je ne le sais pas encore, mais je suis le fruit d'une promesse. D'un contrat.
On me croit asexué, il n'en est rien. Tout est écrit. Je fais des ganses dans cette panse de musicienne, sans imaginer les réactions de causes à effet. Ici le temps n'est pas long, j'ai tellement à faire. Me voir pousser des doigts et d'autres appendices bien saugrenus entre autre. Ses soupirs m'endorment, je vis dans une somnolence toute subjective. Ici pas de saisons, seules les humeurs de mon hôte font la pluie et le beau temps.

Pour l'heure, je suis sage. Pourtant, je m'imprègne du mystère dont j'ai hérité aléatoirement. Au grand jeu chromosomique, j'ai tiré quelques fameux numéros... Héréditaire mon cher Watson. Je suis nourri, blanchi et logé. Plus belle ma vie. Sous mes paupières, l'infini. J'appuie, je pousse, j'enroule. Accroché au cordon, il me vient l'envie de broder le fil de mes pensées naissantes. Je suis insignifiant mais je me sens exister.
Je suis un être sans passé, et c'est bien là tout le mystère de mon sourire. Je suis l'innocence, pourtant je suis mensonge. Paradoxe qui me bâtit. Mon avenir? Je le dessine au gré des mois, d'une menotte à cinq doigts parfaitement formée. Je suis presque .

"Bébé. Créature difforme à l'âge, au sexe et à la condition indéterminés, hautement remarquable par la violence des sympathies et des antipathies qu'elle provoque chez les autres, sans exprimer elle-même de sentiment ni d'émotion identifiable."

La créature geint quand je rugis silencieusement, sa complainte me décontenance. La femme est la dernière chose que Dieu a faite. Il a dû la faire le samedi soir. On sent la fatigue. Je grandis dans l'aléatoire des voix masculines qui m'entourent. Je crois assimiler par eux que le seul moment où une femme réussit à changer un homme, c'est quand il est bébé... La créature à de quoi faire. Il me faudra me battre pour me faire accepter. Ce n'est pas pour rien que les bébés qui viennent au monde naissent avec les poings fermés : ils savent déjà instinctivement qu'ils auront à lutter. Si petit et déjà révolutionnaire.

- On rince les bébés dans deux eaux de rinçage tièdes, puis on les sèche dans un linge éponge. Ne jamais les frotter ni les tordre. Laisser reposer, surveiller régulièrement -

Soudain le sérieux m'assaille. Ne suis-je pas trop petit pour m'y plier? Je veux m'y soustraire. J'ouvre un oeil. La beauté d'un monde submergé me laisse pantois. Je pense. Il faut quelquefois se promener au fond de l'abîme pour mieux se connaitre. J'ai rendez-vous avec moi même, abandonne la créature et ses suppliques de femelles. Bonjour terre nourricière, paysage in utero. C'est une balade qui me révèle bien des choses, moi qui n'ai fait que vivre comme un aveugle, tâtonnant dans ma soupe. J'avance, tourne et vire, je crois distinguer l'extérieur. Lueurs ajourées, elles se découpent au travers pour mieux me percer à jour.


    Mais quand ils arrivent à ma hauteur, je ne vois que du vide à l'intérieur.
    Perdu dans l'espace, je viens de croiser la route des cosmonautes fantômes.


Moi qui étais si vif et transi d'énergie je me sens désormais malade. J'ai cessé les galipettes, me suis recroquevillé mains sur la tête pour ne plus entendre ma galaxie penser. Je me sens las, mon coeur bat la mesure d'un enfant sans armure. Mes jours s'étiolent , mes yeux se flouent. Je n'ai que mon air pour pleurer. J'ai le mal de l'eau. Le lien qui me lie à la créature me fait une écharpe et un bel oreiller, je le tiens dans ma paume comme un fier chapelet. Ne me regardez pas, je prie un dieu dont vous ne vous souvenez pas.
Dans mon cocon, j'expérimente la déception. Ou peut-être est-ce le désespoir colérique. J'ai décidé de frapper un grand coup... Rageur ou désespéré. Il me coûte, il m'épuise, mais je frappe comme on frappe à une porte dont on ignore ce qu'il y a derrière. Fort. Pour impressionner et prévenir. J'aurai crié si j'avais pu, si j'avais su , j'aurais hurlé. Mais à la place de tout cela, je me laisse glisser.

Tout lent; de l'autre côté. Dans des bras de matière, j'accuse une bouffée d'air. Et un cri.

Je viens au monde; je nais.



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