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Juger sur pièce, combien de fois la florale qui se retrouvait du "bon" côté de la barrière, si tant est qu'il y en ai un, avait dû subir cet affront, et combien de fois avait-elle maudit les recruteurs et ceux qui se permettait des remarques acerbes sur sa manière d'être, sur ses manières tout court.
Mais on ne faisait pas d'un chat un chien, pas plus qu'un chien ne devenait chat, alors demander à une rose de n'être que marguerite et autre fleur des champs... l'assemblage ne pouvait se faire dans de bonnes conditions, c'est pour cela qu'elle avait su en arrivant ici, qu'enfin l'écrin était à la hauteur des pétales qu'il recevait.
Et pourtant...
C'était bien ce même moment détestable qu'elle faisait passer à la blonde dont la grâce et la finesse des traits n'étaient absolument pas à prouver, mais les manières... le dédain vis à vis de ses futures collègues, la sournoiserie des propos, il était des petites choses que la rose n'appréciait aucunement, et les épines gratuites avaient ça de détestables qu'elles étaient inutiles et stériles.
Et si Apolline si pliait à la requête de la florale, et bien que rien ne soit audible, Elle se doutait bien du grondement intérieur de la jeune femme, qui avait un temps soit peu de respect de soi aurait pris ces remarques sans avoir envie de cracher au visage de son hauteur ? Personne, surtout pas la rose.
Cela dit, la vaniteuse avait fait profil bas, et ça... L'épineuse lui annoterait comme un point positif, non pas parce qu'elle s'était écrasée, loin de là, mais parce qu'elle avait eu la maitrise de son ressentiment et l'intelligence de faire le bon choix et entendre ce qu'on attendait d'elle.
Un hochement de tête tout aussi avenant qu'à ses nouvelles compagnes de travail, la rose tira alors le siège dévoué à celle qui avait fait montre d'un contrôle sans faille, à peine une légère crispation musculaire de ses traits.
Elle devrait s'en méfier, et elle le savait, probablement à peine ses yeux s'étaient-ils posés sur le trio amené par Théodora.
- Bienvenu à l'Aphrodite Apolline.
Se dirigeant vers Justine qui était restée en retrait, comme souvent lorsqu'elle assistait la gérante, une liasse de parchemins fût attrapée, la rose prenant le temps de s'installer à table avec les trois nouvelles galantes, prenant le temps de la plume et de l'encre pour compléter trois contrats basiques des noms des femmes venues gonfler les rangs du lupanar.
Faisant glisser le parchemin à leur nom devant chacune d'elle, encrier et plume repoussé au centre de la table, la gérante s'enfonça dans son siège, croisant délicatement les mains contre son ventre en les regardant tour à tour avant d'ouvrir la bouche.
- Notre fonctionnement est simple, vous posséderez ici une chambre qui vous sera personnelle, vos clients n'ont normalement pas lieu d'y avoir accès, plusieurs salles, salons, chambres thématiques et bains étant dévolus à vos rendez-vous.
Vous payez un loyer pour celle-ci, ainsi qu'un pourcentage sur vos prestations.
Pour assurer une certaine uniformité dans le luxe qu'offre ce lieu, trois tenues vous seront fournies, retenues sur vos gages.
Prenant une inspiration, le laïus reprend doucement.
- Nos clients sont normalement trier à l'entrée, nous ne sommes pas à l'abri d'un malotru cependant, Bertrand est généralement présent pour intervenir au besoin.
Votre présence aux soirées est impérative, je vous conseille d'avoir une excuse absolument implacable en cas d'absence.
A partir du moment où ces contrats, que je viens de vous présenter, seront signés, vous ferez officiellement parties de l'Aphrodite.
A ce titre vous bénéficierez des installations et de la protection qui y sont associées, et vous acceptez les obligations ainsi que de ne pas porter atteinte à la réputation de ce lieu.
Sanctions seront applicables dans le cas contraire, par moi, le second gérant et le propriétaire.
Pause marquée, le jade se posa tour à tour sur chacune d'elles, tentant de jauger les réactions et attendant qu'elles paraphent le parchemin.
- Je reste ouverte à vos questions, j'y répondrais au mieux, maintenant ou plus tard, ma porte n'est que fort rarement close, qu'il s'agisse du bureau de la gérance ou de ma chambre.
Petit signe vers Adélaïde, une main se levant vers elle pour effleurer son bras et caresser la délicate blondeur du petit brin d'innocence de cet endroit.
- Peux-tu me préparer un infusé de menthe je te prie.
Un recrutement productif pour une rose éreintée qui n'aspirait qu'à une chose, voir les nouvelles perles du collier de la déesse découvrir leurs alcôves respectives et pouvoir elle rejoindre la sienne, il lui faudrait débusquer un médecin pour l'eurasienne avec le départ de l'italienne, encore une tâche à oeuvrer rapidement, le besoin s'en faisait au fil des semaines plus pressant.
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