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Rencontre entre Roman, Alaynna et Barkie, à Blaye, février 1463

[RP] Le prince Grenouille qui voulait voir le monde

Roman.
On trouve parfois de drôles de petites choses, lorsqu'on voyage beaucoup. Or, l'Italien et sa compagne étaient de ceux qui passent leurs vies de feux de camps en auberge, et de charrettes en bottes mouillées. Et ce jour-là, alors qu'ils traversaient le Duché de Guyenne, faisant halte à Blaye, ils firent la rencontre d'une étrange créature : Barkie.

Barkie était un garçonnet d'une douzaine d'année, le menton fier, l'oeil hargneux, la mèche rebelle. Ses manières étranges, son accent incongru, ses velléités d'assassiner Roman qu'il trouvait probablement trop peu intimidé par ses allures guerrières... tout cela avait concouru à faire de leur rencontre un moment qui sortait de l'ordinaire. Le gamin avait mordu Roman au bras, mais pas rancunier, celui-ci avait évoqué avec Alaynna la possibilité d'emmener le môme avec eux. Ce qui avait mené à cette lettre, reçue par Roman quelques heures plus tard :


Barkie a écrit:

    Dear Grenouille,

    Je veux bien venir avec vous, mais je te préviens : je ne suis aux ordres de personne. Je suis Peter Barkie, et je suis un Grand ! J'ai chopé pas mal d'or à un Gentleman d'ici, un ivrogne qui m'a défié aux cartes. Je crois que je ferai mieux de disparaître au plus vite avant qu'il ne cuve pour de bon. J'ai néanmoins quelque chose à terminé, je ne pourrai quitter cette ville seulement demain.
    Quand partons-nous ?


    Peter


    P.S: Ne me fait pas faux-bond, Grenouille ! Je me fâcherais bien plus fort que tantôt !


- Ro-Man ! Je vais le lui répéter combien de fois ? Je m'appelle pas Grenouille !

Obscure dénomination du gamin à l'encontre du Corleone, l'animal surnom avait valu à l'enfant la promesse de se faire renommer "Morpiouille"par Roman. La deuxième insulte favorite du môme étant "Morpion du cul", joli mot fleuri qui avait bien amusé l'Italien. Lecture faite, après concertation avec Alaynna, réponse fut envoyée au petit.


Roman a écrit:

    Petit d'homme,

    Nous t'acceptons dans notre compagnie. Tu seras à présent nommé Peter, ou Grenouillon si t'es casse-pieds.
    Range tes crocs, je t'apprendrai à utiliser une dague, et je t'en offrirai une quand tu seras entraîné !

    À demain pour le départ.

    Roman di Medici Corleone.

_________________
Barkie
    [A l'aube du grand départ...]


Il était un petit homme, qui avait un drôle de prénom. Oh, bien sûr, nous ne parlons point de l'un de ces sobriquets mignons dont on affuble amoureusement nos chers enfants. Non non, c'était son prénom : son véritable, son unique prénom. Si la chose eût été légale, il est même probable qu'on lui ai jamais attribué un nom. Le fait est qu'il en a un, de nom : un vrai nom, un de ceux qui sonnent à merveille, un de ceux qui vous mettent à l'abri du besoin, ceux-là même qui vous assurent un brillant avenir et vous placent aux meilleures tables. D'aucun l'ignore, cependant, ce nom ; mais son prénom, lui, en fit rire plus d'un : on l'appela Barkie et l'on racontera plus tard que le jour de naissance, sa nourrice déclara avec amertume que cet enfant ne pleure pas, « he barks » – ou dans notre langue bien aimée, il aboie.
Une entrée en matière dans notre monde des plus cocasses, n'est-il point ? Cocasse, en effet, car si l'on devait comparer ce môme insupportable à un animal, ce serait à coup sûr un roquet hargneux et mal éduqué.

    « Gwenûûillion ? Qu'est-ce que c'est que cela, un Gwenûûillion ? aboya-t-il soudain dans cette taverne de Blaye où régnait un silence de tombeau.
    C't'une 'tite grenouille, j'crois ben. répondit un vieil ivrogne.
    T'ai-je parlé à toi, Miséreux?
    A qui d'aut', Morveux ?
    Oust ! Hors de me vue, Morpion du Cûûû!
    Hé Oh ! Y va s'calmer l'Gamin où j'lui flanque un coup d'gourdin, compris?! » hurla le tenancier, agacé.

Lors, le front haut, le gamin se leva et dans son riche accoutrement – peut-être trop luxueux pour être de bon goût, en tout cas bien trop riche pour un enfant en cet endroit – quitta ces braves gens en grommelant. D'ordinaire, il ne perdait jamais une occasion de déclencher une bagarre ; mais si la baston pouvait attendre, le Corleone quant-à lui avait un voyage à entreprendre et mieux valait ne pas rater le départ.

Au bout d'une bonne heure d'errance dans cette ville tout à fait inconnue, le blondin hargneux dans son déguisement d'apparat – ou du moins ce qui semblait l'être – parût soudain en vue de la charrette et de l'étrange italien. Devait-il sourire, montrer sa joie de le voir, de partir à l'aventure ? Devait-il montrer les crocs et grogner à son approche, comme il le faisait toujours en présence d'étrangers ? Cela dit, les deux personnages n'étaient plus vraiment des étrangers : les disputes de comptoir créent des liens forts et durable. Réflexion faite, c'est tout sourire qu'il vint à leur rencontre.

    « Ho Là ! Dear Gwenûûille ! … Le Bon Jour, Matâme. »

… Et sans leur laisser le temps de répliquer à ses salutations, il fit un tour sur lui même, fier comme tout de cette chemise de soie, de ces braies pourpres et cette cape verte de très bonne facture.
    «  Ne suis-je donc point… so… comment dit-on déjà ?… Chic ?! Très-chic, n'est-ce pas ? »

… Et son visage s'éclaira soudain. Il devait absolument leur raconter.
    « J'étais en chemin pour faire quelques… provisions ? On dit comme cela, n'est-ce pas ? Quelques provisions, donc.
    Mais je me suis dit qu'avec tout cet or, je pourrais m'offrir quelques… habits ! J'espère que vous avez des provisions, vraiment. Je n'avais plus de quoi payer, après tout cela.
    Oh, je me suis dit… Pourquoi ne pas voler ce pain, voyez-vous ? Mais… J'ai l'air si… Gentleman, là-dedans. Pas vrai ?
    Je me suis dit… cela ne serait pas très Gentleman de voler du pain habillé comme cela, voyez-vous ?

    Voyez ces bottes ? Le cordonnier m'a dit… Véritable Cûûille de Taureau ! Très-chic, n'est-ce pas ? C'est… Splendide! On dirait qu'elles marchent toutes seules ! C'est extra ! Très-chic, pas vrai ? »

Le garçon était une tête brûlée, un Dur pourrait-on dire. Mais la coquetterie était une chose, entre toute autre chose, à laquelle il tenait vraiment.
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