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Introduction
La médecine scientifique apparaît et se développe dans lAntiquité. En France, au Moyen-Age, la montée du christianisme freine considérablement son essor. Plusieurs sortes de médecine vont ainsi cohabiter. Les épidémies, la famine et la guerre vont entraîner la construction de locaux daccueil, ancêtres de nos hôpitaux.
La médecine du Moyen-Age aurait-elle jeté les bases de notre médecine moderne ?
I. Réactions face à la maladie et à la folie.
Au Moyen-Age, les médecins religieux pensaient que les fous étaient possédés par des démons.
Quand les gens étaient malades, ils allaient voir des médecins religieux mais pensaient rarement à aller voir des médecins scientifiques. Selon les membres du Clergé, le seul médecin était le Christ, lui seul pouvait guérir les malades .
II. Evolution des médecines.
a)la médecine culturelle
La médecine culturelle est la continuation du culte des dieux païens comme Esculape ( dieu grec élevé par un centaure administrant des potions bienfaisantes ; il devint rapidement un bienfaiteur universel ). Cest une médecine pratiquée par les membres du Clergé.
corps humain selon les médcins religieux au Moyen-Age
Les malades, quelle que soit leur maladie, se rendent dans une basilique où ils peuvent séjourner plusieurs mois. Le Saint, médecin du corps et de lâme, peut alors les guérir par des miracles en apparaissant dans leurs rêves. Les cierges situés autour du tombeau du saint guérisseur restent allumés toute la nuit, ce qui donne une ambiance mystérieuse propice aux visions. Les malades veillant dans léglise, souvent fatigués, ont de saintes apparitions ayant la pouvoir de guérir. Les principaux remèdes reposent sur le tombeau et ce qui lentoure :
la poussière du tombeau guérit toutes les maladies. Les fidèles récupèrent cette poussière en grattant les tombeaux. La poussière est mélangée à de leau ou du vin , puis bue.
Cest le prêtre qui la distribue. Peut-être la-t-il mélangé avec des potions retrouvées dans des textes anciens ? Cette poussière est particulièrement réputée pour soigner les dysenteries, fréquentes à lépoque. Elle peut être emportée dans des petites boîtes.
le voile du tombeau a le pouvoir de guérir la douleur des lèvres quand on la touche avec la bouche. A son contact, on peut stopper une hémorragie. Frotter des yeux malades avec ce voile permet de retrouver la vue. Les franges peuvent être emportées comme reliques, et , parfois guérir , à leur contact, les maladies du corps.
les cierges brûlent au tombeau et ont, eux aussi, un pouvoir de guérison grâce à lhuile et à la mèche brûlée.
lautel est un lieu sacré et le contact de celui-ci avec de leau ou du vin donne à ses derniers un pouvoir de guérison.
la grille de bois de léglise a elle aussi un pouvoir de guérison.
consultations de médecins
b) la médecine raisonnée
Tandis que les prêtres pratiquent la médecine religieuse, des personnes comme les moines tentent de transmettre les uvres scientifiques dHippocrate et Galien. Ces moines vont retranscrire, avec quelques modifications, les écrits anciens se trouvant dans leurs bibliothèques. Ils vont les lire, les étudier, les recopier et surtout appliquer cet art médical auprès de ceux qui en ont besoin. Cest grâce aux moines quune certaine idée de la médecine peut continuer à survivre. Malgré toutes les interdictions et tout leur intérêt pour les sciences, ils sauvent le patrimoine médical des médecins antiques. Les moines ne se contentent pas de recopier les manuscrits, car ils o,nt grâce aux « hospitales », la possibilité de pratiquer les théories contenues dans ces écrits.
c) la médecine profane
Cette médecine repose sur les médecins profanes qui sont bannis par la religion, les devins, les sorciers, excommuniés par léglise : les rebouteux et les ermites qui jouissent dune grande popularité. Ces ermites sont parfois visités par des Evêques. Ils guérissent les malades par des breuvages à base de plantes. Mais la médecine profane est très critiquée à cette époque. Comme les médecins ne sont pas des personnalités de haut rang social, les dignitaires du Haut Moyen-Age peuvent donc attaquer à volonté ces médecins qui ne guérissent pas grand chose. Après les invasions et les destruction, le savoir médical ne repose plus que sur la transmission orale et les médecins profanes passent progressivement au rang de charlatans. Mais les critiques ne suffisent pas et certains dignitaires jouent avec a vie des médecins. Un récit de Grégoire-de-Tours raconte que la reine Austrigilde, femme de Gontran, roi des Burgones, ayant contracté la variole, fit jurer à son mari de tuer les praticiens , dont les potions ne la guérissaient pas, si elle venait à mourir.
Les critiques envers la médecine profane durèrent jusquà ce que, au 11ième siècle, Fulbert de Chartres, se demande sil faut avoir recours à la médecine profane. Mais les médecins profanes seront peu à peu remplacés par des médecins religieux. Plus tard, les sorciers et les devins seront brûlés vifs par lEglise.
III. Les facteurs de la maladie.
a) les conditions de vie
Au Moyen-Age, la vie est rude. On se déplace beaucoup à pied et par tous les temps.
Les maisons protègent assez bien des intempéries, mais très peu du froid et de lhumidité. Au V et VI ème siècle surtout, il ny a pas de cheminée. On se réchauffe au braséro. La fumée qui sen échappe nest pas évacuée et provoque des maladies des poumons et des yeux.
b) lhygiène
Au Moyen-Age, les gens sont propres mais la notion dhygiène nexiste pas. Dans les villes, les déchets et les excréments sont évacués par une rigole au milieu de la rue. Dans les villages, les tas de fumier sont sous les fenêtres ( les mauvaises odeurs et les germes se propagent dans la maison ) ou à côté dun puits qui, par infiltration, se trouve contaminé. Les rivières servent à la fois de source deau et dégout, ce qui facilite la propagation des maladies.
c) la nutrition
Au Moyen-Age, lalimentation est un problème grave. Les riches mangent en général trop, et surtout trop de viande ( doù problème de goutte ). Mais la majorité de la population ne mange pas à sa faim. Les paysans souffrent de nombreuses carences : ils se nourrissent du produit de leurs champs et de quelques ufs ( presque jamais de viande ). Il suffit dune année de mauvaise récolte ( guerre, intempéries, maladie du bé...) pour que la famine sinstalle favorisant les épidémies.
IV. Quelques maladies et épidémies courantes au Moyen-Age
la lèpre : cest une des plus anciennes épidémies.
lépreux avec son écuelle et sa cliquette
Jusquau Vième siècle, la lèpre nest que très peu reconnue, mais en 549 devant une forte épidémie, un traité rend obligatoire aux évêques lassistance aux lépreux. Ceux-ci sont considérés comme déjà morts. Dès quun présumé lépreux se présente, le prêtre laccueille chez lui. Peu après, une cérémonie mortuaire a lieu avec à la place du mort sous le drap noir, le lépreux. Après lavoir béni et donné des offrandes, le peuple se rassemble sur le parvis, le prêtre donne au lépreux une cliquette, des gants, une écuelle et lui dicte la conduite à suivre. Puis le prêtre plante une croix et un tronc destiné aux offrandes devant sa hutte. Aucun remède nétant connu, on se contente de soigner son âme et de lisoler. Des épidémies surviennent du VI au VIIème siècle, puis du VIII au IXème siècle.
La variole : cette maladie est grave, infectieuse , contagieuse et épidémique ; elle se caractérise par des plaques rouges devenant des vésicules puis des pustules. Elle refait son apparition au Moyen-Age après une accalmie et revient en force en Europe. De nombreux malades sont soi-disant soignés grâce à des ventouses posées aux épaules et aux jambes qui font apparaître et crever les tumeurs.
La peste : quelle soit bubonique ou pulmonaire, cest un grand fléau au Moyen-Age. Elle est transmise par le rat noir importé involontairement dOrient par les Croisés. Il y a plus de vingt poussées épidémiques en deux siècles, de 541 à 767. Les épidémies sont très meurtrières : des millions de morts au bilan.
flagellants faisant pénitence pendant la peste de 1348
La peste de 1348 fut le plus meurtrière de toutes. Entre la moitié et les deux tires de la population sont décimés à ce moment. On meurt en deux jours et les condamnés sont libérés pour ramasser les cadavres par charrettes entières. Le mal est si grand quil y a des débordements hystériques et religieux ( flagellants...). Ceux qui ne sont pas morts de la peste meurent de la famine qui sensuit. Comme pour le reste, les saignées et les lavements sont les seuls remèdes prescrits. Quant à la cause de lépidémie, elle est attribuée à la conjonction de trois planète au début de lannée.
lergotisme : il est aussi appelé « mal ardent », « feu sacré » ou encore « feu de St Antoine » ; cest une maladie fréquente au Moyen-Age. Les symptômes sont très marquants : les membres postérieurs se nécrosent, ce qui donne limpression que le sujet brûle de lintérieur. _ Lépidémie débute en 857 sur la rive gauche du Rhin et envahit progressivement la France.
b) maladies, avatars et autres blessures
les troubles rhumatismaux, cardio-vasculaires et cancéreux ne sont que très peu mentionnés car on meurt, généralement, avant que ces dégénérescences ne se fassent sentir.
Les plaies sales et mal soignées sont par contre très courantes et conduisent fréquemment à la gangrène puis à la mort.
La mortalité infantile est extrêmement importante ( 50 % ). Elle nest pas mentionnée car considérée comme un jugement divin. De plus, lenfant doit être absolument baptisé pour rejoindre le « Royaule de Dieu ». La femme en couche est donc parfois sacrifiée au profit de son enfant.
V. Les soins et remèdes de lépoque
Au Moyen-Age, toute la médecine repose sur les théories dHippocrate et de Galien. Il ny a aucun progrès et beaucoup de pratiques ont été perdues. Voici un extrait de la théorie dHippocrate ( reprise par Galien ) : « Le corps de lhomme a en lui sang, pituite, bile jaune et noire ; cest là ce qui constitue la nature et ce qui crée la maladie et la santé. Il y a essentiellement santé quand ces principes sont dans un juste rapport de crase, de force et de quantité, et que le mélange en est parfait ; il y a la maladie quand un de ces principes est soit en défaut soit en excès, ou, sisolant dans le corps dest pas combiné avec tout le reste.
La médecine est donc basée sur létude et la régulation des humeurs. Le diagnostic des médecins dépend de linspection visuelle du malade, de la prise du pouls, du mirage et de la saveur gustative des urines confrontés à la position astrale des planètes ! Les rmèdes les plus souvent prescrits sont les saignées, les lavements et les potions.
les saignées :
elles sont pratiquées par les barbiers. Ces personnes, à lorigine, coupent seulement la barbe masi avec le temps, elles sont devenues chirurgiens. La saignée consiste à ouvrir une entaille dans la peau pour faire sortir le sang du malade. Efficace pour les problèmes de goutte, elle affaiblit plus quelle ne guérit le malade dans les autres cas.
les clystères : les clystères, ou lavements, sont réalisés par les médecins. Ils consistent à envoyer de lair par lanus pour dégager les intestins.
les ventouses : elles sont utilisées par les médecins. Après les avoir chauffées, on les place sur le corps pour attirer les « mauvaises » humeurs.
Les amputations et les cautérisations :
Les amputations sont une forme embryonnaire de chirurgie jugée indigne des médecins et donc pratiquée par les barbiers. Cela consiste à couper un membre abîmé ( souvent dans le cas de gangrène )
Pour éviter linfection,
les instruments
on cautérise. Au début du Moyen-Age, on utilise de lhuile bouillante peu efficace. Plus tard, on utilise un cautère, tige de bois chauffée au feu.
les plantes médicinales : au Moyen-Age on a une bonne connaissance des plantes que lon utilise dans les tisanes, décoctions, cataplasmes... Les médecins en prescrivent souvent. Les moines en développent lutilisation en créant les premiers jardins botaniques et pharmaceutiques.
potions, pommades, sirops... : ils sont fabriqués par les apothicaires ( ancêtres des pharmaciens ). Ces médicaments, destinés à rééquilibrer les humeurs, sont composés dingrédients appartenant aux trois régimes : animal, minéral, végétal. Dans ces mélanges, il est fréquent que lon rajoute des pierres précieuses ( en raison de leurs fonctions « magiques »). De plus, elles servent à améliorer laspect des remèdes ( doù lexpression « dorer la pilule » ).
autres domaines : les bains et les régimes alimentaires (diètes) font également partie des prescriptions courantes de lépoque, ainsi que lexercice physique.
Laccouchement nest pas laffaire des médecins mais des ages-femmes. Les forceps sont connus depuis lantiquité.
Le métier darracheur de dents existe, sans lien avec les médecins.
VI. Les facultés de médecine
La fondation duniversités dans tout lOccident chrétien va stimuler les échanges avec le monde Musulman et créer les conditions dun renouveau général du savoir. La première école de médecine ouvre à Salerne ( Italie ) au Xème siècle. Elle accueille des médecins Juifs, des Chrétiens de Syrie, qui font le lien avec le monde Musulman, où de réels progrès médicaux ont été réalisés. On leur doit la traduction de larabe au latin et des textes « perdus » des auteurs de lAntiquité. Tous les grands médecins du XIIième siècle ont étudié à Salerne dans la tradition Galénique. Puis des universités vont se créer aussi dans des grandes villes de France ( Montpellier, Reims, Lyon...) permettant au savoir de se répandre.
cours dans une faculté de médecine
VIII. Lévolution des locaux de la médecine
Un autre progrès essentiel de la médecine au Moyen-Age est lapparition détablissements hospitaliers. Après avoir été accueillis chez les prêtres et dans les églises, les nécessiteux sont rassemblés dans des locaux prévus à cet effet. Grâce à la richesse de lEglise et à la générosité des catholiques de lépoque, les hospices, « Hôtels Dieu », pauperes... ( selon les régions )apparaissent. Tout dabord ils sont destinés à laccueil des pèlerins, pauvres, femmes enceintes, orphelins, incurables... tous ceux qui ont besoin daide ou qui ne sont pas « en bonne santé ».
La notion de « bonne santé » selon Galien : « ce qui est conforme à la nature, cest la santé, tandis que ce qui est contraire à la nature , cest la maladie.... Lhomme qui peut travailler et vivre normalement est considéré comme en bonne santé. »_
Laccueil donne droit à un bain de pieds, un bol de soupe, un lit ( en commun ), plus un peu dargent aux nécessiteux. A cause des nombreuses épidémies qui sévissent et de lobligation qui est faite aux évêques de soccuper des victimes, ces établissements se multiplient, sagrandissent et recentrent leur activité sur les malades. ( à lorigine le seul service médical offert était laide à laccouchement par la sage-femme ). Ainsi au XII siècle on construit limmense « Hôtel Dieu » de Lyon pour accueillir les malades. Les autres pensionnaires sont redirigés vers un autre établissement : la « charité » . Dès lors, les plus grands médecins vont venir travailler en ces lieux. Lhôpital est né, même sil présente encore de nombreux défauts : de grandes pièces mal chauffées au plafond volontairement trop haut pour éloigner les fumées des malades, des lits à plusieurs places et des malades atteints de maladies différents mélangés ...