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[RP] Vadrouille, Sueur et Pipe.

Elvyna
Chapitre VIII - Episode 16

    Suer Sang et Eau – Aux alentours de 4h du matin – Quelques jours plus tard.



    L'impétueuse était congelée, au moins son caractère rageux était calme et en hibernation. Elle souhaitait juste se réchauffer et sentir à nouveau ses mains et ses orteils. Elle remonta sa chemise comme elle pouvait pour la protéger du froid, ou du moins essayer, pace que ça ne changeait pas grand chose. De l'autre main ne lâchant pas sa cousine et accélérant encore, sans un regard en arrière pour perdre du temps à savoir sur Arioce les suivait ou non, si il souffrait de son coup, ou si elle l'avait raté. Qu'importe, il devait être tellement en colère qu'il ne fallait surtout pas s'attarder.

    Mais d'un coup, un poids lui tomba à moitié dessus et sa cousine l'entraina dans sa chute s'entaillant les genoux et les mains sur quelques pierres sortant du paysage enneigé. Elle maudissait la neige, mais a cet instant, aurait aimé qu'il y en ai un peu plus pour protéger la glissade. Se redressant en râlant et en maudissant Hope, elle tourna la tête pour lui hurler dessus pour la disputer de sa maladresse, ou était-ce Arioce qui les avait déjà rattrapé? Elle tourna la tête à droite et à gauche mais ne vit que la nuit.

    Claquant des dents, elle posa une main sur l'épaule de sa cousine et la secoua.


    - Hope dépêchez vous de vous relever, il va revenir. Hope? Cessez de faire l'idiote, c'est pas le moment et je doute que ça l'empêche de nous frapper de faire semblant d'être évanouie, en plus j'ai très froid et je suis trempée..

    Haussant un sourcil sous la nom réponse, elle lui grimpa a moitié dessous pour la retourner et remarqua une entaille sur son front. Ses yeux s'agrandirent de surprise et elle la secoua, en panique.

    - Non non non, ne mourrez pas ma cousine! Je suis là, allez réveillez vous!

    Un gémissement s'échappa de sa gorge. Elle ne devait pas mourir, elle prit de la neige et lui déposa sur ses joues et sa blessure en espérant que ça suffira pour la réveiller, les larmes aux yeux, elle pencha sur ses lèvres pour sentir si elle respirait encore, mais son visage était tellement gelé qu'elle ne sentait plus aucune sensation. Pensant qu'elle avait rendu l'âme, elle lui donna des grands coups de poing sur la poitrine.

    - REVIENS HOPE ! JE T'INTERDIS DE MOURIR TU ENTENDS ! REVIENS!

    Des larmes coulant sur ses joues, les réchauffant un peu, des sanglots se firent entendre dans la nuit, puis des cris de souffrance. Elle n'arrivait pas à se calmer, gardant le corps de sa cousine entre ses bras, la berçant doucement contre elle.

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Arioce
Chapitre VIII – Episode 17


    Suer Sang et Eau – Quelques jours plus tard – Aux environs de 4 heure 45.

Un sacré bordel !
A peine avais-je relâché Elvyna qu’elle revenait à la charge. Foutu caractère de von Riddermark ! Elle débarquait de nulle part et agissait comme une attardée. Savait elle au moins ce qu’il se passait ? Surement que non, se laissant aller à son instinct de merde et les brides de conversations ou gestes.
Bordel !
Cependant, je m’y attendais. C’est que je la connaissais bien la Dévergondée et son tempérament de feu. Je mords, elle mord.
Réflexe de survie – car il s’agissait bien de cela, survis de ma potentielle future progéniture –, ma main partit s’interposer entre le genou et mes bourses, me décalant que très légèrement pour quitter la trajectoire du coup.
Explosion, les nerfs à vifs, j’étouffais un râle de douleur. Bordel de couilles ! Heureusement que j’avais vu venir, sinon, je ramperais…
Le choc avait été quelque peu amortit et dévié de la cible. Raaaah !

    - Elvyyyynaaaa !

Une rage folle s’empara de moi. Elle le savait. Pas. Les. Boules !
Les vipères, elles détalaient déjà, alors que je tentais de réprimer la douleur, essayant de rester debout. Elle allait me le payer ! Ça ne resterait pas impuni !
Je serrais les dents, grognant. Mais pas ce soir. Ce soir, j’ai eu ma dose ! La claque de tout ça ! De ce rendez-vous stupide d’une gamine irréfléchie. Marre de sa cousine toute aussi stupide !
Je lâchais un profond grondement, me redressant, les yeux brûlant, suivant du regard les deux silhouettes qui s’éloignaient. Je me demandais bien ce que je pouvais bien faire avec elle, après tout. Jeunes, souvent immatures et ingrates. Mais au fond… n’avaient-elles pas besoin de moi ? Putain de sentiment protecteur !

Je pris mon barda, qui, bien entendu, n’avait pas perdu en poids et pesait toujours une tonne. Je le soulevais et le mis à l’épaule. Puis je pris la direction de l’auberge, suivant le même parcours que les deux chieuses. Au passage, je me baissais pour attraper la veste lestée ; ça sème l’équipement en plus. Aucun respect.
Je marchais d’un bon pas, rapide, pressé de retrouver la chaleur de mon lit. J’étais épuisé, non pas physiquement, mais mentalement. Je supportais beaucoup, presque sans râler. Néanmoins, je commençais à effleurer mes limites. Oui, j’avais besoin de repos. Cela faisait combien de temps que je ne m’étais pas vraiment reposé, me coupant du monde, durant plusieurs jours. Je ne me souvenais même plus. Juste soufflais, loin des problèmes, de la pression du quotidien, en pleine nature, seul avec moi-même. Oh bordel, oui. Je me trouverais un coin magnifique et…
Des pleurs ? Des pleurs de grandes peines, de souffrance.
Je passais un coin de rue, débouchant face à une séance singulière. En face de moi, une jeune femme pleurait sur ce qu’il semblait être un corps, étendu sur les pavés.
Je m’approchais à vive allure et reconnu la jeune femme. Elvyna. Mais alors, le corps…
Je soupirais, tout courroux envolé, tout le reste, oublié. Mes yeux, lamentés, observaient les deux femmes.
Mon vieil Ours, le repos, ça ne sera pas pour ce soir…

J’abandonnais mon sac, le laissant chuter au sol sans un regard. Je défis le fermoir de ma cape, la retirais de sur mes épaules et la mise sur celles de ma suzeraine en larme. Puis, je m’accroupis et me penchais sur la jeune femme endormie. Je vérifiai qu’elle respirait encore et fus soulagé de constater que c’était le cas. Elle avait dû prendre un sacré coup à la tête. Courir à tue-chevaux en pleine nuit… Stupide.

    - Elvyna, écarte-toi.

Ma voix était calme mais sans équivoque. Avec des gestes presque doux, je l’obligeais à se redresser, me laissant ainsi le champ libre. Passant mes mains puis mes bras sous le corps de la jeune femme, au niveau du haut de son buste ainsi que de ses genoux, j’assurais ma prise, contractant mes muscles et la soulevais en grognant. Bordel ce n’est pas une heure pour secourir des femmes en détresses.

    - Elvyna, prends mon barda. Il faut vite rentrer à l’auberge.

Tomber sur la tête pouvait ne pas être anodin, loin de là. Et plus l’on traînait dans la nuit froide, plus sont état pouvait empirer.
Bordel… Une putain de sortie nocturne de merde.
Reniflant, je repris ma marche, serrant le corps d’Hope contre moi, accélérant le pas.
J’ai besoin de repos. D’un vrai repos…
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Hope
Chapitre VIII - Episode 18

    Suer Sang et Eau – Quelques jours plus tard – Aux environs de 4 heure 48.



Le néant fait place à une sensation de légèreté couplée à une douce chaleur bienfaisante, réchauffant son corps engourdi par le froid.
Il lui semble qu'elle lévite, tout en étant bercée.
Serait-elle redevenue bébé, cajolée par sa mère ou son père, elle se sent si bien, qu'elle ne veut pas ouvrir les yeux, de peur que ce beau rêve ne cesse.
Pourtant ses paupières, elles, ne résistent pas à la tentation et clignent, le retour à la réalité est plus fort, alors qu'une douleur intense et lancinante dans son crane, lui donne l'impression que sa tête se fait écraser par un étau, et qu'elle va exploser comme une citrouille.

Un gémissement s'échappe de sa gorge, son odorat perçoit une odeur masculine, animale, mélée aux effluves de renfermé, bière, vinasse et que son regard se posent sur ce qui ressemble aux noeuds d'une chemise ouverte découvrant une masse énorme de poils.
Bordel ! Mais qu'est ce que...

Un furtif instant de panique l'envahit, tout un tas de pensées se mélangent, relançant la douleur avec plus d'intensité encore.
Il lui semble que tout son squelette s'est disloqué, une telle opression dans sa poitrine meurtrie, elle respire avec difficulté.
Ce serait-elle fait piétiner par un troupeau de boeufs ? Renverser par une chariotte ?
Tout est si vague, aucun souvenir ne revient, la laissant désemparée.
Nouvelle plainte, qui semble faire échos à des sons, qu'elle reconnait instantanément, des pleurnicheries et reniflements très proches, et d'autres cris, plus stridents et lointains.
Elle reprend peu à peu ses esprits, veut se débattre et se libérer de cette emprise, mais son corps comme paralysé, refuse de bouger.
Relevant la tête, avec stupeur son regard croise celui d'Arioce, :


Vous...

Puis glisse vers la silhouette marchant à ses côtés, l'origine des lamentations :

Cousine...

Voulant se relever, elle remarque qu'elle se fait porter à bout de bras par son maitre d'armes.
Les tempes bourdonnantes, elle porte ses doigts à son front, et découvre l'entaille ensanglantée, profonde, vilaine.
Merde ! Il ne manque plus que ça !

Et ces hurlements ! Faites les taire !
Elle comprend qu'ils sont à l'auberge, qu'il s'agit de la mini Riddermark, et c'est d'une voix basse et rauque qu'elle murmure :


Elvyna... Frejya a besoin de vous.

Plus que quelques mètres, et elle sera dans sa chambre, allongée dans son lit douillet, mais elle se sent si bien blottie contre le torse puissant de l'homme, qu'elle veut profiter de ce délicieux réconfort, encore... juste un tout petit peu.

Fermant les yeux, rassemblant le peu d'effort qu'il lui reste, elle parvient à lui chuchoter, un quasi imperceptible amusement dans la voix :


Vous allez devoir me recoudre... Maitre.
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Elvyna
Chapitre VIII - Episode 19

    Suer Sang et Eau – Aux alentours de 4h du matin – Quelques jours plus tard.


    Le visage enfouit dans la chevelure brune, tremblante de terreur et de tristesse, laissant ses larmes couler sur sa chevelure. C'était pas possible, une simple chute et la vie s'éteignait. Ignorant les bruits autour, elle releva la tête seulement quand un tissu vint couvrir ses épaules. La cape d'Arioce, il était là. Mais une rage folle l'envahit. C'était sa faute, à lui seul. Il avait tué sa cousine à faire l'idiot avec elle. Si il était resté calme, rien de tout cela ne serait arrivé. L'assassinant du regard, ne lâchant pas le visage meurtrier pendant que ce dernier se penchait sur le corps sans vie de sa défunte cousine. Il constatait les dégâts, mais étrangement son corps tendu par l'angoisse se détendit de soulagement. Reportant son attention sur Hope, la poitrine se soulevait au rythme de sa respiration. Elle soupira pour détendre le noeud qui s'était formé sous la terrible nouvelle qui s'était incrustée dans son esprit. Elle était en vie.

    Essuyant son visage avec un coin de la cape, elle laissa faire son vassal, ne connaissant rien en médecine. Elle se releva quand les bras musclés vinrent porter le corps meurtrit de Hope et fit quelques pas en arrière pour lui faire de la place. Elle s'apprêtait à les suivre quand son ordre claqua. Il était sérieux? Il pensait vraiment qu'elle porterait ces affaires? Il pensait que c'était un foutu âne? Qu'est-ce qu'elle en avait à foutre de son barda ! Grelottant sous la cape, elle récupéra quand même les affaires en reniflant, puis siffla assez fort pour qu'il entende.


    - Si elle meurt, le Très Haut en soit témoin, je vous tue.

    Le serment était prononcé, nul besoin de paroles en plus, elle porta le sac et la veste lestée et grogna sous le poids, pliant les genoux et tanguant elle suivit l'ours tant bien que mal jusqu'à l'auberge.

    La respiration rauque sous l'effort, elle tourna la tête à la voix faible qui sortait des bras poilus. Hope, elle semblait revenir à elle, bonne nouvelle.
    Entrant enfin dans l'auberge, elle se hâta de tout lâcher sur le sol, ouvrant la porte de la chambre pour les laisser entrer, allumant les chandelles en ignorant les pleures de la mini Riddermark qui n'avait donc pas cessé depuis son absence. Elle avait dû réveiller toute l'auberge, qu'importe. Mais quand elle entendit Hope, elle opina et repartit dans la chambre des enfants pour récupérer sa fille, lui engouffra un doigt dans la bouche pour la faire taire un moment avant de revenir de s'installer dans un fauteuil et de reprendre le geste qu'elle s'apprêtait à faire avant d'être interrompu par un hurlement. Tirant le reste de chemise qui restait pour dévoiler un bout de sa poitrine, qu'importe de se montrer ainsi devant deux personnes, elle ne lâcherait pas sa cousine dans cet état, surtout avec Arioce comme médecin. Echangeant son doigt contre le sein maternel qui fût happé, essayant de se réchauffer en frottant sa main libre sur ses cuisses, le regard sec et sombre s'attardant sur l'Horn soignant sa cousine.

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Arioce
Chapitre VIII – Episode 20


    Suer Sang et Eau – Quelques jours plus tard – Vers 4 heure 45 du matin.

Étonnamment légère, une fois bien calée dans mes bras et contre mon torse, ce fut sans difficulté que je la portais jusqu’à l’auberge. Pas un regard ne fut adressé à Elvyna et cela même lorsqu’elle osa me menacer. Les poils de ma nuque se hérissèrent, je fis une micro halte et m’efforçais à ne pas me retourner pour lui dire le fond de ma pensée. Calme toi Arioce, elle ne sait pas ce qu’elle dit… Tant d’ingratitude. Effrontées toutes deux qu’elles sont ! Je lâchais un grognement, serrant la mâchoire et repris un rythme de marche rapide, préférant totalement ignorer la jeune femme qui portait mes affaires.
Mon regard se posa sur Hope. Une sacrée entaille. Heureusement qu’elle n’était pas tombée de plus haut…

Approchant de l’auberge, je laissais sombrer mes pensées dans de lointains souvenirs. Bordel, était ce nouveau pour moi ? Aaah, loin de là. Ce n’était pas la première fois que je portais ainsi une femme, oh non. Combien de fois ? Je ne tenais pas de compte. Bien trop… Moi qui ne voulais pas être assimilé à un chevalier servant, finalement, les situations et mes actions faisaient pencher la balance vers ce ridicule titre. Cela avait commencé lorsque j’étais arrivé à Pau, en Béarn. C’est qu’on n’avait pas les mains dans les poches, on était jeune, insouciant, taquin et plein de vigueur juvénile. On aimait se battre, amicalement certes, mais sans faire semblant pour autant. A force, j’avais nommé nos petits jeux de luttes « La Guerre des Tavernes ». Une bien belle époque où je récoltais quelques cicatrices.
Mais, ce n’était pas durant cette période où je me suis habitué aux gestes de secours – bien qu’ils étaient nombreux. Non… Une plus sombre période… Personnage récurrent de cette partie de ma vie, vous devinerez. Alysson. Bordel Alysson, tu m’en as fait suer et saigné. Enfin, c’était surtout toi, qui saignais… Combien de fois ai-je du venir à ton secours ? Combien de fois tu t’étais mise minable, à coup d’herbes et de lames ? Je n’ai pas compté, cela aurait achevé mon moral et mes espoirs bien plus tôt. Une sale époque…

Enfin, la chaleur – relative – de la hôtellerie. Hope semblait reprendre conscience en plus, se débattant dans mes bras.

    - Restez calme, Hope.

Je lui accordais un léger sourire, pour la mettre en confiance. Manquerait plus que je la fasse tomber, ah ah.
Mon cœur se serra en entendant les cris de désespoirs de ma mini Oursonne. Pauvre Freyja, délaissée par sa mère, qui préfère sortir en pleine nuit pour s’occuper d’affaire qui ne la concernait pas, foutant encore plus la merde, qui plus est.
Un soupir, j’ouvris la porte de la chambre d’Hope. Je baissais de nouveau les yeux aux chuchotements de la jeune femme. Recoudre, oui. Cela faisait un petit moment que je n’avais pratiqué, mais ça aussi, ça me connaissait bien, à l’époque…
Je m’approchais du lit et posais un genou dessus. Puis, doucement et avec grande délicatesse, allongeais la jeune femme sur ses draps, la recouvrant avec jusqu’à la poitrine. Elle avait besoin de se réchauffer. Lumière fut grâce à Elvyna, alors que je pris le temps de refaire partir le poêle de la pièce.

    - Je reviens, Hope.

Sachant mon bras droit réveillé, je vins lui demander soutient, l’Impétieuse étant occupée à enfin nourrir sa fille. Pas si mauvaise mère que ça finalement ?
Nous rentrâmes tous deux dans la chambre, une flasque de l’alcool le plus fort de l’aubergiste et le coffre de premiers soins en mains.
Timothée porta son regard sur la comateuse.

    - Que lui ait il arrivé ?
    - Elle est tombée en courant.
    - Eh bien, une sacrée chute. Elle ne s’est pas ratée.
    - Ça lui donnera une bonne leçon.
    - La folie de la jeunesse, hein ?
    - Vaut mieux une blessure par sa propre maladresse, qu’une de moi.

Timothée ricana un peu et tendit la petite bouteille à Hope.

    - Tu devrais boire un peu de ça, ça atténuera la douleur.

Je m’assis sur le lit, au niveau du visage d’Hope, une chandelle dans la main pour bien l’éclairer et constater les dégâts. Moche. Il allait falloir nettoyer un peu, désinfecter puis effectivement, bien recoudre. Le reste de la nuit s’annonçait charmante !
Je fis une boule à l’aide d’un pan du drap et insistais pour qu’elle le mette en bouche, histoire de pouvoir mordre de douleur.

    - Timothée, tiens la.

Je sortis le kit de couture composé de fils, aiguilles circulaires, de tissus propres et alcool. Je commençais par versé un peu d’eau fraiche sur la plaie, me fichant bien de salir la literie. Il allait falloir que je reste concentré et que je fasse fi des plaintes de la jeune femme. J’inspirais et expirais profondément. Attrapant le flacon, je le débouchais et y laissais couler quelques grosses gouttes d’alcool. Ça allait piquer fort, mais rien en comparaison de ce qui aller venir. Passant un rapide coup de tissu pour retirer l’excédent de sang, d’eau et de désinfectant, il était temps de passer aux choses sérieuses. D’une main sure, je glissais le fil dans la niche de la fine aiguille, puis posant une main ferme sur la tête d’Hope, je déterminais par où j’allais attaquer. Je n’avais jamais vraiment suivi de formation pour apprendre à recoudre la peau. Mon école avait été l’observation et la pratique par obligation. Très certainement Hope allait grimacer et râler face l’amateurisme que lui renverrait le reflet du miroir. Mais bon, on fait avec les moyens du bord.
Prêt, je piquais la peau blessée à quelques millimètres de l’entaille. Appliqué, j’enfonçais, retirais, encore et encore, l’aiguille. Il fallait être minutieux et garder un bon rythme, histoire de ne pas faire éterniser le calvaire.
Le fil faisant son œuvre, peu à peu la blessure se referma. Serré ce qu’il fallait, je nouais le fil puis le coupais. J’observais le travail fini. Mmmh… pas mal ! Timothée semblait lui aussi satisfait de la suture et relâcha enfin la blessée.
J’attrapais les pendages et couvris la meurtrissure de quelques tours.

    - Du bon travail.
    - Merci de ton aide Timothée. Tu peux aller te recoucher. Et encore désolé pour… tout ce bordel.
    - La prochaine fois tue les plutôt que de les ramener ici dans cet état.
    - Je t’aurais appelé pour m’aider à creuser les tombes…

Rires du Bras Droit. Pas certain que l’humour plairait à tout le monde. Une main amicale sur l’épaule, et il retourna se pieuter.
Mes yeux se posèrent de nouveau sur le visage marqué par la douleur d’Hope et je lui souris doucement.

    - Vous allez supporter ou vous voulez fumer ou boire un peu ?

Un rapide coup d’œil à la mère et sa fille. Mmmh…
Qu’importais la réponse de la jeune femme, j’avais décidé de rester veiller sur elle.
Bordel… Quelle nuit de… Je devrais arrêter tout ça. Fini de me préoccuper, de protéger, d’être là. Mais si j’arrêtais, qui le ferait ? Me reconnaîtrais-je encore dans la glace ?
J’ai juste besoin de repos…
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Hope
Chapitre VIII - Episode 21

    Suer Sang et Eau – Quelques jours plus tard – Vers 5 heures du matin.



Confuse et désorientée, l'esprit vaporeux, mais parfaitement consciente, elle sent que cela s'active autour d'elle, ce qui l'agace et la rend quelque peu nerveuse.
Tout semble s'amplifier autour d'elle, autant la douce lueur projetée par la flamme des chandelles qui l'éblouit, que les bruits de succion de Freyja buvant goulument à la source maternelle, ne l'irritent.

A contrario, un certain bien-être se diffuse en elle au compte-gouttes, malgré la douleur dans son crane, alors qu'elle est allongée dans des couvertures moelleuses et chaudes.
Elle perçoit la conversation entre les deux hommes, qui relativement sans-gênes parlent d'elle comme si elle était morte et enterrée ou inconsciente, le pire étant leurs ricanements cyniques.

Et dire que ce n'est que le début de leur diabolisme...
Alors qu'elle refuse de boire leur cochonnerie, de force, on lui enfonce un bâillon dans la bouche, et la maintient pour qu'elle ne puisse plus bouger.
A cet instant, elle les maudit plus que tout pour leur manque de délicatesse, et râle en leur lançant un regard noir.
Bordel, mais quelle bande d'idiots !

Sans broncher d'un cil, ayant la capacité à supporter un certain seuil de douleur, plus par orgueil qu'autre chose, elle laisse l'Ours la recoudre, pour sûr que le résultat va être fameux.
Sans compter sa belle tête enrubannée, elle va faire sensation au bal organisé en Savoie, qu'elle ne veut manquer sous aucun prétexte.
C'est qu'elle a besoin de décompresser la petite.
Etrange tout de même de se rappeler de projets futurs et non du passé, du tout moins pas dans le bon ordre.

Allez hop, c'est reparti pour une nouvelle tirade de la part des deux comparses, tellement facile, alors qu'elle est allongée et sans force pour se défendre.
Préférant ne pas rétorquer, elle se promet de garder cet échange fort instructif dans un petit recoin de sa tête, et ressortir leur malveillance en pleine face, quand l'occasion se présentera.
Enfin si tête encore en bon état de fonctionnement d'ici-là.
Car pour l'heure, tout est flou, la mémoire fragmentée, des bribes de souvenirs éparpillés qu'elle tente de rassembler, en vain.

Elle n'insiste pas, et pose ses jades sur Elvyna assise dans un fauteuil en face de son lit, penchée sur sa fille, avec cette expression sur le visage que l'on ne retrouve que chez une mère.
Une mère... voilà à cet instant l'image que lui renvoie cette cousine très éloignée dans l'arbre généalogique, qu'elle connaît finalement si peu et pourtant si proche dans son cœur.
Soudain épuisée, totalement vidée, elle se sent prête à partir dans le royaume des songes, et esquisse pourtant un pâle sourire et murmure :

Je vous aime ma cousine...

Puis, le regard se tourne et se pose vers cet homme, ce maitre d'arme conseillé par l'Impétueuse, qui ne semblait jurer que par lui.
Ses paupières clignent, elle lutte contre l'envie de s'endormir, et trouve l'énergie nécessaire pour chuchoter à Arioce sans pour autant le lâcher des yeux :

Vous... faut qu'on se parle...

/.../

mais pas... tout de ssss'......


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Elvyna
Chapitre VIII - Episode 22

    Suer Sang et Eau – Aux alentours de 4h du matin – Quelques jours plus tard.


    Le bruit de craquement de peau quand l'aiguille s'insérera dans la chaire la fît frémir. Pas que le son parvint à ses oreilles, mais le fait de voir la pointe entrer et ressortir, c'était comme si. Elle n'hésitait pourtant pas à faire saigner d'un coup de lame, ni à faire entrer un doigt dans une plaie ouverte pour torturer, mais là, sur un être chère et qu'elle était simple spectatrice, ce n'était pas la même chose.

    Elle assassina Timothée du regard, il osait se moquer et mériterait bien un coup de tête sur le nez. Mais elle pensait qu'il y avait eu assez de dégât pour la nuit et reporta son attention sur son héritière happant goulûment son sein pour manger. Elle devait être en pleine croissance, elle avait toujours faim mais cette façon de la nourrir fatiguait la mère en plus de ses excès qui la rendaient plus faible. Elle deviendra forte et robuste, et ressemblera à sa cousine qui n'émettait aucun son face à la douleur qu'elle devait ressentir.

    Elle repensa aux évènements précédents, à la tournure des évènements, à la débilité du comportement de tous les trois. A cause de bêtises, la nuit aurait put-être endeuillée. Puis elle repensa aux mots forts qu'elle avait prononcé envers son vassal, ancien maître d'armes, protecteur et père. Elle les avait regretté au moment où ils étaient sorties de ses lèvres. Mais trop tard. Le mal était fait, ils avaient été prononcés à voix haute et entendu. Elle savait qu'une discussion s'imposerait pour s'expliquer. Mais pas maintenant. C'était le moment de soigner les plaies, qu'elles soient physiques ou intérieurs.

    La chaleur du poêle se diffusa enfin dans la pièce, dégourdissant son corps gelé, les sensations de ses orteils et de ses doigts revinrent, les tortillants pour leur faire reprendre vie. Un sourire se fît voir aux murmures de sa cousine, puis l'apaisement et la fatigue cumulée eurent raison d'elle, tenant fermement l'être le plus cher pour elle contre son corps, elle ferma les yeux et laissa emmener par Morphée dans un sommeil profond et réparateur.

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Arioce
Chapitre VIII – Episode 23


    Suer Sang et Eau – Quelques jours plus tard – Exactement dans la nuit, ou plutôt matin, du 5 au 6 Mars.

Fin d’intervention. La patience ne souhaitant ni boire ni fumer, il était temps pour elle de rejoindre Morphée pour un sommeil, que j’espérais, réparateur. Il fallait dire qu’elle avait été drôlement courageuse, n’émettant aucun cri de douleur durant la couture. Une femme de cran, ou peut-être d’orgueil. Qu’importait, elle avait été forte jusqu’au bout.
Quelques mots furent dits, à l’intention de sa famille, présent dans la pièce, puis de moi, son toubib de fortune. Pas de remerciement, je m’y attendais ; une nuit sous le signe de l’ingratitude. Je n’irais pas quémander. Mais, comme cette dernière prononça, une discussion s’imposait. Sur tout ça, tout ce bordel. Des explications, encore et encore. Hope, Elvyna. Les von Riddermark…
Une bonne pipe serait la bienvenue. Histoire de me détendre. Comme une récompense à cette nuit de merde. Mais point de femme pour cela dans les environs et bourrer la mienne me semblait un effort trop grand. Tant pis, cela se fera demain. Pour celle de bois, mmmh.

Après un rapide passage dans ma chambre – me rincer le visage et déposer mes affaires et me dévêtir des vêtements d’extérieur, je revins dans la chambre de la jeune femme. Elles devaient être toutes trop épuisées, puisqu’elles semblaient déjà dormir à point fermé. Une bonne chose, enfin le calme. Un regard à la mère et sa fille, un sourire fut adressé à la Mini. Si paisible…
Délicatement, je vins remettre convenablement la chemise d’Elvyna, de gestes lents et doux, pour éviter de réveiller l’un ou l’autre. Une idée me vint. Je restais quelques instants, là, debout devant le fauteuil, à réfléchir au comment je m’y prendrais pour être efficace sans les déranger dans leur sommeil. Un angle d’attaque semblait se dessiner et j’exécutais le plan.
Me baissant légèrement, fléchissant les genoux, le dos droit, je passais rondement et avec subtilité mes mains, puis mes avant-bras sous les cuisses d’Elvyna ainsi que dans son dos. Pas bien grosse, il ne me serait pas bien compliqué de la soulever à cette hauteur de départ. Ainsi, adroitement, je l’extirpais de la chaise, prenant garde à ce que son corps bouge le moins, afin qu’elle ne perçoive le moins de différence possible entre sons état de départ et maintenant. Puis à pas de loup, je l’amenais au bord du lit. Mimi toujours contre sa mère, elle-même contre moi, le trio semblait naturel. A la situation, quelque peu cocasse, je souris. Ce n’était pas tous les jours que je portais une mère et sa fille en même temps.

Seconde étape déterminante à l’opération, la mise en lit. Tout comme j’avais procéder pour Hope, je montais un genou sur le matelas. Ainsi posté, il était plus aisé de faire allonger la jeune femme sans brusquerie. Ce que je parvins avec brio.
Ni vu, ni connu, Elvyna et Freyja venaient de passer d’un fauteuil à un lit, bien plus confortable.
Dernière étape. J’étais homme à faire les choses bien et jusqu’au bout – même si ces dernières m’avaient précédemment péter les couilles, malheureusement au sens propre, comme au figuré. Je délassais les bottes de chacune, Elvyna et Hope, les retirant doucement et les déposants au pied du lit. Il est plus commode de dormir sans.
Enfin, la cerise sur le gâteau. Je tirais les draps pour qu’elles soient toutes deux bien recouvertes, laissant néanmoins, du côté d’Elvyna, l’espace nécessaire au bien être de la petite Freyja. Manquerait qu’elle s’étouffe par manque d’air…

Un pas en arrière, j’admirais l’œuvre. Mmmh… du bon travail. Pensée me vint "sont tellement plus calme une fois endormie ; elles en seraient presque mignonnes. Dommage que cela dure guère que le temps d'une lune...". Digne d'un père.
Satisfait, je remis deux bonnes buches dans le poêle et vint m’assoir sur le fauteuil, maintenant, libre. Je retirais mes bottes et mes bas, permettant à mes pieds de respirer pleinement. Chemise ouverte, orteils en éventail, il ne manquait plus qu’une chose… Ayant trouvé le courage, je déposais la boite en bois et laiton sur mes genoux et je me préparais une pipe, légère, un peu de chanvre et de menthe. Juste de quoi me détendre après cette nuit de folie.
Les yeux posaient sur les dormeuses, je laissais la fumée envahir mon esprit et mes pensées. Demain était un autre jour et pour l’heure, mon seul souhait était d’oublier tout ce bordel. Juste me détendre, souffler, fumer, et…

𝒯𝒽𝑒 ℰ𝓃𝒹

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Hope
Chapitre XI

    Fragment d'une vie – 7 mars – Campagne Franc-comtoise



Repos ! Il a dit.

Alors, elle exécute, quoique, pas facile quand on est constamment en déplacement, alors qu'il était prévu de rester quelques jours en ville, du moins dans son esprit.
Qu'elle ne fût pas sa surprise lorsque que l'Impétueuse patronne, les prévint qu'ils ne restaient pas et reprenaient la route aussitôt.
Nauséeuse, les bourdonnements vrillant encore un peu ses tempes et surtout très fatiguée autant mentalement que physiquement, elle était restée juchée sur son cheval, dormant presque à moitié, réveillée parfois par quelques soubresauts, qui l'empêchèrent fort heureusement de tomber, à nouveau.

Petite halte à mi-chemin, elle attrape son barda, quitte le groupe se met en marche à la recherche d'un coin tranquille quelque part dans les sous-bois pour s'isoler et se reposer.
Après plusieurs minutes de prospection, elle finit par trouver l'endroit idéal au détour d'un chemin s'ouvrant sur une petite clairière où trône un massif chêne, dont toute la majesté se révèlera avec le retour du printemps.
Elle décide de s'installer à son pied, sortant de sa volumineuse besace, une couverture qu'elle dépose sur ses épaules, et sa petite flasque de liqueur de prune dont elle boit une gorgée pour se réchauffer, s'adossant au tronc, elle ferme les yeux.

Les jours passés furent épouvantables, et l'ambiance au sein de la troupe pourtant si plaisante jusque là, se détériora pour laisser place à une tension quasi palpable où se mêlent colère, rancœur et frustration.

La mémoire lui revenant, elle a beau réfléchir aux causes de ce foutu merdier, elle en revient toujours à la même conclusion : elle en a été le déclencheur.
Quelle idée à la con avait-elle eu là, de s'introduire dans la chambre d'un ancien mercenaire, entrainé et paré au cas les plus extrêmes comme se faire brutalement réveillé en plein nuit, par une gamine arrogante et surtout irresponsable.
Jamais, elle n'oubliera la folie meurtrière qui s'empara de chacun des protagonistes, qui heureusement n'avait abouti qu'à sa proche chute au propre comme au figuré, avec pour conséquence l'éclatement du trio, chacun préférant rester dans son coin.

Un ricanement sarcastique sort de ses lèvres, elle repense à Elena sa mère adoptive et ses sages mises en garde quant à chaque acte posé, bien évaluer la justesse de ses motivations, sinon c'est le retour de manivelle assuré.
Et ça n'a pas manqué, elle faillit perdre la vie d'une manière stupide qui faisait écho à l'absurdité de ses agissements envers son maitre d'arme.

Depuis une discussion un jour en taverne, elle était infecte avec lui, le rendant responsable de ses tourments, alors qu'il lui rappelle par certains de ses comportements, ce gros fumier de gascon, qui avait eu raison de la plus belle amitié qui soit.
Situation devenue tellement insoutenable entre elle et celle qu'elle considère comme sa sœur d'âme, par la seule volonté d'un homme à l'esprit manipulateur, la poussant jusqu'à l'exil.
Elle, si forte, aux dires de ses proches, avait baissé les armes face à l'ennemi, quitter le navire, son être déchiré par la rupture qu'elle pensait définitive de la tendre complicité, de l'amour qui la liait à Surya.

Surya... Un doux sourire étire ses lèvres, alors qu'elle reçut la veille au soir après avoir quitté Arioce, une lettre de sa chère soeur d'amour, missive qu'elle garde précieusement contre son sein et son cœur, trop épuisée et torturée qu'elle était pour la parcourir dans son entièreté.

Les yeux toujours clos, elle n'a pour l'instant qu'un seul objectif, celui de faire une pause, faire taire son mental, pour remettre de l'ordre et dans son esprit, et dans sa vie, en commençant peut-être par foutre son orgueil de côté.

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Arioce
Chapitre XII – Episode 1


    Fragment de vie – Mars– Au Château du Comté de Marnay.

Du repos. Voilà ce qui ferait du bien à tout le groupe. Après les frasques de cette fameuse nuit, il était de bon ton que chacun souffle de son côté. Ainsi, j’avais décidé de suspendre les entrainements, et cela pas seulement pour Hope – qui blessée devait se reposer – mais aussi pour Elvyna. Et pourtant, bordel, que je voulais être derrière son dos. Je supportais de moins en moins ses écarts dû en grande partie à sa forte consommation de chanvre. Qu’elle fasse le deuil de sa relation, certes. Mais il faut savoir le faire dans certaines limites, pour ne pas bêtement bousiller sa vie.
J’avais pu avoir une bonne conversation avec elle, non pas sur la pipe, mais sur ce qu’il s’était passé la nuit du 5 au 6. Sur son attitude, son comportement hâtive et irréfléchie ainsi que sur ses paroles. Je comprenais bien ses raisons – protéger sa famille devait passer avant tout – cependant, elle s’y était prise comme un manche, fonçant tête baissée sans analyser la scène. Résultat ? Une blessée et une discussion règlement de compte inachevée. Moi qui voyais Elvyna comme ma propre fille, ça faisait mal de l’entendre jurer sur le Très Haut de me tuer pour un rien ; rien, façon de parler. Cela prouvait, dans un certain sens, qu’elle ne me faisait pas confiance. Que dans un moment de tension et de drame – bien que ça n’en était pas réellement un – elle se retourne contre moi, démontrait qu’une partie d’elle me voyait comme un malhonnête, sur qui finalement, elle ne pouvait compter. Dur constant…
Cependant, je ne m’en faisais pas plus que cela. Elle était encore jeune et en murissant, ce doute s’effacerait si je continuais à prouver ma valeur. Et puis, ses incertitudes n’étaient pas totalement infondées. Oui, je l’avais déjà blessé, plusieurs fois, durant nos entrainements ou nos jeux musclés. Mais, c’était dans des contextes bien précis. Jamais je n’irais la mettre à terre pour un rien, ou sous la colère. Enfin… Je faisais tout pour que cela n’arrive pas.
Elle s’était excusée et cela avait fini dans une étreinte, que dis-je, un tendre et long câlin.

Néanmoins, il manquait à résoudre encore un trouble. Plus encore, à réparer un outrage.
Que louanges soient faites, le jour était arrivée !
Assis sur un grand et beau fauteuil d’un des salons les plus traversés, je patientais, un verre d’un excellent vin à la main. Décors riches, atmosphère luxueuse. Pas de doute, je me trouvais bien chez une Comtesse. Bordel, ma petite Elvyna, Comtesse. Comme quoi, le monde fonctionne étrangement.
En face de moi, un mannequin couvert d’un long drap crème. C’est que j’avais dû être patient pour enfin l’avoir devant moi. Le modèle n’avait pas été bien difficile à acquérir – assez commun dans le royaume – cependant, le temps de faire les ajustements, de me le faire livrer – pas facile lorsque l’on est en constant déplacement – ça n’avait pas été de tout repos. Enfin… façon de parler, je ne mettais « épuisé » qu’à prendre les bonnes mesures au fil des séances d’entrainements. Le reste ayant été accompli par un petit couturier de la Grande Capitale.
Mes yeux coulaient du pan de tissus recouvrant le bois aux deux portes qui ouvraient sur la pièce. Je savais qu’Hope finirait par entrer par l’une de ses portes ; soit pour sortir du château, soit pour rejoindre les autres salles du lieu. Il ne fallait qu’être patient. Et patient, je l’étais, surtout avec une bonne bouteille à mes côtés.
Porte, mannequin, porte, verre, porte, bouteille, mannequin, porte…
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Hope
Chapitre XII - Episode 2

    Fragment de vie – Mars – Au Château du Comté de Marnay.




Calme, luxe et volupté.
Après avoir congédié les servantes mises à sa disposition pour l'aider dans sa toilette, elle glisse dans le baquet d'eau à température optimum en poussant un aaaaahhhhhh de bonheur.
Elle n'est pas du genre à rechercher le confort, mais ces derniers jours du voyage furent éprouvants, elle se sentait épuisée, courbaturée et sale.
Enfin, arrivés au château de sa cousine, elle avait délaissé toute la troupe, à peine en s'excusant, et s'était précipité dans sa chambre pour s'isoler.

Qu'il est bon de se délasser dans un bain, tout en buvant un peu de vin et se laisser aller à quelques rêveries bien agréables, d'où apparaissent sa sœur Surya.
D'ailleurs, elle ne la quitte plus depuis quelques jours, et il serait temps pour elle de prendre connaissance de sa missive, posée sur le petit guéridon juste à côté.

Elle l'attrape, et tout en trempant ses lèvres dans la coupe, elle parcourt la lettre à l'écriture reconnaissable entre mille.





De Surya. de la Grande Dune Date d'envoi Le 06 Mars 1467 à 21h37
Objet Des nouvelles....

Ma soeur chérie.

Dis-moi comment tu vas. Tu me manques tellement.
J'ose espérer, puisque tu tardes tant à rentrer, que tu t'amuses bien à voyager avec ta cousine ou à t'entraîner avec ton maître d'armes. Dis-moi. est-ce dur?
Si je te pose cette question c'est que j'envisage d'apprendre...non pas à tuer, tu me connais... à me défendre. Les chemins sont si dangereux et ce monde tellement cruel.
M'endurcir au niveau mental et physique sans toucher à mon petit coeur tout mou, c'est possible, tu crois? Je souris en écrivant ces mots.

La Guyenne a encore et toujours subi des élections ducales mouvementées. J'ignore comment cela se déroule ailleurs mais ici, c'est la cerise sur le gâteau. Que de jalousie, d'hypocrisie, de mensonges et d'accusations insultantes.
Et dire que ce parti de l'opposition, pour ne pas parler d'un panier de crabes, sera éternellement là à faire en sorte que le serpent se morde à l'infini.

Tu sais comment je suis, la politique me met les nerfs à vif et Dieu merci, certains membres de l'opposition, en mauvais perdants qu'ils sont, ont déserté les postes qui leur étaient proposés. Du coup. grâce au travail fabuleux du nouveau conseil, le prestige est remonté à 5.

Vu le calme régnant, suite aux foudres électorales, j'ai eu le loisir d'analyser quelques caractères et je me suis amusée à comparer les politiciens et autres (oui, oui, les débats révèlent les gens) à des animaux ou des végétaux particuliers. Tout ça à cause d'une candidate qui se voulait Duchesse et dont la comédie m'a fait mourir de rire: son ombrelle, instrument de soutien ou de protection, étant son seul moyen d'expression!

Je sais, je suis étrange, mais quand je m'ennuie, je dois m'occuper les mains et l'esprit!

Qui d'autres que les dames sont affublées d'ombrelles? Certains arbres, de nombreux végétaux comme les fleurs, les champignons. Les méduses aussi, bien entendu.
Parmi eux, des inoffensifs mais aussi de mortellement dangereux!

Où ta sœur d'âme veut-elle en venir? Ahahahah, tu vas dire que je suis folle!!

Je me suis lancée dans la fabrication d'ombrelles! Peut-être vais-je en vendre, les offrir, je ne sais pas encore mais crois-moi, je m'amuse car chacune aura sa particularité.
Je les classerai par thème...

Bref, difficile de t'expliquer, tu comprendras quand tu reviendras.
Et si tu tardes, je me ferai un plaisir de continuer à te mettre au courant de mes réalisations.

J'aurais tant souhaité aller te voir mais tu sais que la Teste n'a plus que moi comme CMD et je n'ai pas le cœur à abandonner ma ville que j'aime tant et qui m'a si bien adoptée.

Un jour, peut-être, naviguerons-nous toutes les deux. J'en rêve.

Raconte-moi où tu en es, comment tu t'en tires, quels sont tes projets à court terme et à long terme... et surtout, surtout, dis-noi quand tu reviens, bordel!

Voilà petite sœur chérie que j'aime... aucune histoire de coeur à te narrer...ahahah, tu m'étonnes, je sors d'en prendre plein la tronche! Aussi, du coup, c'est bien comme ça.
Et toi???
D'accord, je t'entends d'ici: "Curieuseeeeeeee!!!"

Je 'aime ma Perylou.

Su'



Comme toujours, lorsqu'il s'agit d'elle, son visage bien souvent impassible, reflète les émotions ressenties à chaque seconde.

Oh que tu me manques toi aussi...
Dur ?

Elle émet un petit ricanement et continue la lecture, non sans marquer un certain étonnement.

Surya, toi ? Apprendre à te défendre ?
Ton petit cœur tout mou, oui.
Pfff ! La Guyenne, le Rouergue et tant d'autres... c'est partout pareil, tant qu'il y a du pouvoir, les hommes font montre de leurs plus bas instincts.

Cette fois, elle ne peut s'empêcher de rire.

Analyser des caractères ? Non mais tu n'as vraiment que ça à faire ?
Des animaux ou des végétaux ?
J'aurai bien quelques idées moi aussi...

Nouvel éclat de rire, qui lui fait un bien fou, elle s'enfile quelques gorgées de vin, se ressert et continue.

Des ombrelles ? Mais qu'est-ce...
Qui d'autres que des femmes ?
Instrument de soutien et de protection ?

Elle lève les yeux et reste un instant perplexe.
Merde alors ! Elle qui est toujours à la pointe de la mode, ne sait même pas ce qu'est une ombrelle ?

Ca ressemble à certaines fleurs, champignons...méduses ?
Bordel, Surya, va falloir que tu me montres ça !


Buvant une gorgée, elle faillit s'étrangler.

Hein ? Fabrication d'ombrelles ? Par thème ?
T'es tombée sur la tête ou quoi ?

Soupire, sa soeur doit vraiment se morfondre seule dans ce petit village pour élaborer un tel projet.

Oui moi aussi j'aurai tant aimé que tu viennes.
Je sais, je sais tout cela ma sœur...

Son cœur se serre un peu plus, la poussant à reprendre du vin, et sourit en parcourant la fin de la lettre.

Perylou, bon sang, cela fait des mois et des mois qu'on ne l'avait appelé ainsi.
Il faut dire que maintenant pour la plupart c'est Hope, et elle s'y habitue finalement.
Hope, la sage cousine, pour l'une, l'effrontée et l'imbécile pour l'autre.

Pour sûr que sa sœur d'âme lui aurait passé un sacré savon, en la voyant se comporter de cette manière.
C'est qu'elle l'entend déjà d'ici, la petite voix de sa conscience.
Surya, sa béquille, celle qui l'empêche de dérailler, de faire du grand n'importe quoi, n'aurait pas du tout apprécié la voir jouer les pestes et les capricieuses, la recadrant toujours de manière efficace par des paroles qui font mouche.

Autant, elle se fiche éperdument de ce que les autres peuvent penser d'elle, autant il lui est insupportable de décevoir deux ou trois personnes chères à son cœur et sa sœur en fait clairement partie.

Elle repose la lettre et la coupe, la chaleur régnant dans la pièce associée aux effets du vin, elle commence à se sentir vraiment bien.
Fermant les paupières, progressivement, elle se laisse glisser dans le baquet jusqu'à recouvrir intégralement sa tête, oubliant totalement sa blessure et s'amusant à faire quelques bulles, c'est alors que Son visage apparaît, la poussant à rouvrir les yeux en grand.
Saloperie de conscience !

Elle se lève en râlant, envoyant des éclaboussures à tout va, sort du bain et entreprend de se vêtir et changer son bandage.
Bien joli de se la couler douce, mais va falloir, régler un problème et vite, cette foutue culpabilité devenant trop insupportable.
Bordel mais quel chiant !

Une simple robe, sa chevelure de jais relâchée, elle aperçoit son reflet dans une des fenêtres et grimace.
Heureusement le ridicule ne tue pas, mais avec son bandeau à la tête, elle devrait lancer une nouvelle mode.
Elle réfléchit quelques secondes, et trouvant un morceau d'étoffe assorti à sa tenue, l'enroule autour de son front de sorte à bien caché le pansement, le passe derrière ses oreilles, le noue dans la nuque, et le réajuste pour que ça fasse moins moche.
Dernier coup d'œil, satisfaite, elle sort de sa chambre non sans oublier de prendre sa coupe remplie de ce fabuleux nectar.

Elle déambule dans les longs corridors du château, titubant parfois, zieutant à droite et à gauche, - bordel, mais où se cache t-il encore ? - passe devant la chambre d'Elvyna et fronce les sourcils, l'attitude de sa cousine, sa consommation excessive de chanvre, d'alcool l'inquiète énormément.
Trop accaparée par ses propres problèmes, elle n'a pas la force de soutenir l'Impétueuse, et ça La Riddermark, elle ne le supporte pas.
Chaque chose en son temps, même s'il presse.
Dès demain, elle portera plus son attention sur elle, et pourquoi pas la pousser à sortir et à se divertir.
Elle continue sa quête, et s'arrête devant les deux grandes portes menant au grand salon, qu'elle ouvre à la volée.

Aaaahhhh le voilàààà !
Entrant dans la pièce, chaleureuse, propice au calme et délicieusement chauffée, elle s'approche de lui, d'un pas presque sûr, légèrement pompette mais toute en dignité et lui souffle :


Je vous cherchais...

Elle le regarde et sourit, lui semble parfaitement décontracté, tranquille la vie, à déguster lui aussi un bon vin qui la tente bien ma foi.
Son fessier prenant appui sur un des accoudoirs du fauteuil dans lequel il est assis, elle ajoute :

Je dois vous parler, vous vous souvenez ?
Mais avant cela... vous partagez un peu de votre bouteille ?



Retrait de la date du jour

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Arioce
Chapitre XII – Episode 3


    Fragment de vie – Mars – Château de Marnay.

Portes…
Je baissais le regard sur mon verre, sourit et le vidais en trois bonnes gorgées. Patience, patience. Après tout, je n’étais pas pressé. Le reste de la journée serait scindée entre une bonne heure de course avec exercices, passer du temps avec mes enfants et Freyja. Peut-être aussi déambuler dans les bâtisses et ses dépendances, par pur désir d’assouvir ma curiosité de savoir si changements il y a eu depuis ma dernière visite. Aaah la curiosité. Ma grande qualité, sans aucun doute.
Penseur, je laissais courir les doigts de ma main libre dans les longs poils de ma barbe. Devrais-je laisser de nouveau mes chevaux pousser ? Et si oui, jusqu’à quelle longueur… ? Mmmmh…

Mes yeux se levèrent vivement. La porte s’ouvrait soudainement. Je souris. Enfin. Et je n’avais encore bu que la moitié de la bouteille.
Je détaillais la jeune femme qui s’avançait, d’un pas presque chaloupé, vers moi. Ah ah, verre à la main mmh… Je vois que je ne suis pas le seul à profiter du faste et de l’hospitalité de la Comtesse. Fort bien. Esprits joyeux, conversations joyeuses. Je lui souris, affable.
Je fis l’effort de me redresser un peu ; c’est que j’étais grossièrement affalé. Un peu de tenu devant les jeunes fem…bla bla bla. Effort presque vain, je me contentais juste de lui faire un peu de place sur l’accoudoir. Après tout, on était entre maître et élève, bouteille entre deux, ambiance confortable et opulente.
Je la laissais s’installais et pris la bouteille nous servant tous les deux, la femme d’abord.

    - Je vous attendais.

Trinque cristallin et je bus une bonne lampée.

    - Je me souviens. Mais avant… j’ai quelque chose pour vous.

Nouvelle gorgée et je me levais – un peu trop prestement – déposant mon verre sur le guéridon. Mmmh… une demie bouteille. Je ferais demander de nous apporter une assiette de mets. C’est qu’il commençait à faire faim ! Et l’alcool montait vite à la tête… Vraiment pas mauvais ce vin, mais je gage que ce n’était pas que du vin.
Je me dirigeais vers le mannequin, posé à quelques pas, plus ou moins central au salon. Et sans plus de cérémonie, je retirais le drap découvrant la robe qui se cachait en dessous. Une belle robe, pas la plus belle que j’ai vue ou offerte à une femme – loin de là – mais belle tout de même.



    - J’ai abimé la vôtre lors de notre petite rixe en taverne. Alors… une neuve à vos mesures.

C’était quand la dernière fois que j’ai offert une robe à une femme ? Mmmh… Et à une élève ? Mmmh… Mmmh…
Je fis un pas de côté pour lui laisser l’espace nécessaire pour observer le vêtement sous toutes ses coutures. Certes, elle connaissait déjà cette toilette, néanmoins peut être qu’elle aurait envie de la voir de plus prêt. Après tout, tous les habits sont différents de par leurs couturiers.
Mes yeux posés sur elle, suivaient la moindre de ses réactions, mouvements, gestes, micro-expressions. Apprécierait elle le cadeau – qui n’en était pas vraiment un – resterait elle dans l’indifférence, ou prendrait elle cela comme une insulte ? Avec Hope, j’admettais n’être plus sûr de pas grand-chose, les derniers jours m’ayant prouvés la complexité encore plus profonde et sombre de la jeune femme.
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Hope
Chapitre XII - Episode 4

    Fragment de vie – Mars – Château de Marnay.



Qu'ils sont bien là, tous les deux à se partager un bon verre de vin en trinquant à ce lien maitre-élève qui les unit, lorsqu'il se lève pour se rendre près d'une chose qui ressemble étrangement à ce qu'elle peut voir à chacune de ses visites dans un atelier de couture.
Il était là ce truc, quand elle est entrée ? - oui le précieux liquide monte vite à la tête.

Tadaaaam !

Elle en tomberait sur le cul, heureusement, celui-ci est bien plaqué sur l'accoudoir du fauteuil.
Explosion de rire, de colère, elle oscille et se demande si ce n'est pas lui qui finalement aurait prit un coup sur la tête.
En tous les cas dans la sienne, ça n'arrête pas, et deux constats s'imposent d'eux-mêmes :

Primo, l'homme a son propre sens des priorités totalement à l'opposé du sien.
Alors, qu'il sait le sujet qu'elle souhaite aborder, - et quel sujet bordel ! - lui préfère parler chiffon ?!

Deusio, il est du genre expéditif.
C'est qu'il semble empressé de se débarrasser de ce lourd fardeau, au point de ne pas lui laisser le temps d'en placer une.
Une robe déchirée lors d'un duel qu'il qualifie de bon-enfant - soit ! - promesse d'en racheter une, - exactement la même tant qu'à faire... - et la voici exaucée !
C'est pas beau ça ?

Un profond silence s'installe, ses jades posés sur la tenue, le visage impassible, elle boit une gorgée de vin.
Tumulte intérieur, habituel chez elle lorsqu'elle est fort contrariée, elle se demande qu'elle attitude adopter.
Méchanceté, franchise, hypocrisie ?
La dernière option, on oublie ce n'est pas son genre...

Sur le point de lancer une vilaine pique, la voix de Surya se fait entendre dans sa tête.
Non Perylou, non !
Ce qui a le don de la calmer direct - quand je vous dis que c'est efficace.
D'accord, DI-PLO-MA-TIE - bordel, elle sait pas faire...

Long soupir de l'âme, elle se lève et s'approche du "mannequin" et inspecte LA robe sous toutes les coutures, espérant y trouver un quelconque défaut qui la ferait renvoyer à l'expéditeur.
Force est de reconnaître qu'aucune imperfection n'est à déplorer, cette tenue ayant été merveilleusement ouvragée.
Estimant qu'elle l'a assez ignoré jusque là, elle pose enfin son regard sur lui.

Au moins, vous, vous êtes un homme de parole... merci.

Prête à ajouter "bien que ce soit un dû", elle se ravise, laissant de nouveau un profond soupir s'échapper de ses lèvres.
Et si pour une fois, l'ingrate effrontée s'effaçait au profit de la charmante jeune femme qu'elle sait être.
Après tout, ce n'est pas un mauvais bougre, cet homme, et ça part plutôt d'une bonne intention.

Elle lui adresse un sourire courtois, se rend vers le guéridon sur lequel sont posés la bouteille et la coupe d'Arioce qu'elle remplit ainsi que la sienne.
S'approchant de lui pour lui remettre le nectar, elle boit une nouvelle gorgée et lance, espiègle, histoire de détendre l'atmosphère :

Que fait-on ? On passe aux essayages ?
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Arioce
Chapitre XII – Episode 5


    Fragment de vie – Mars – Château de Marnay.

Mes yeux détaillaient la jeune femme. Pas de doute, elle semblait mi-figue mi-raisin. Je m’y attendais quelque peu. Non pas que je pensais mon geste déplacé, mais plutôt parce que je ne comprenais de moins en moins les réactions d’Hope. Alors je m’attendais à un peu tout et surtout au plus insensé, de mon point de vu. Bordel que les femmes sont compliquées ! Et je crois bien avoir trouvé leur Reyne.
Je la laissais faire son inspection, acceptant volontiers de retrouver mon verre plein.
Essayage ? Mmmh… je n’avais pas prévu cela. J’avais confiance en les mesures prises et en le couturier qui avait ajusté la robe.

    - Si vous souhaitez l’essayer maintenant, je vous en prie. Je me tournerais ou quitterais la pièce.

Une bonne gorgée après.

    - Si non, vous souhaitiez me parler.

Un coup d’œil au contenu de ma coupe. Mmmh… il allait falloir que j’y aille plus molo, histoire d’avoir bien toute ma tête pour la conversation. La jeune femme était déjà suffisamment compliquée à comprendre, pour qu’en plus je me mette des obstacles de manque lucidité.
Mon regard croisant le sien et le soutenant, j’attendais savoir ce qu’elle désirait faire.
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Roxane_cardinal
      L’ours et le corbeau – une heure avant midi, le 10 mars – de Marnay à Dole.


    Après de longues journées de marche et quelques bifurcations inopinées pour changer de chemin, Solyaane était enfin parvenue à destination : Dole, en Franche-Comté, où elle avait rejoint Arioce. Des mois qu’ils ne s’étaient pas vus et n’avaient pas échangé plus qu’une poignée de lettres… Il s’était passé bien des événements, depuis tout ce temps. Ils en connaissaient les grandes lignes, mais il leur restait beaucoup à raconter. Suffisamment pour encore passer quelques mois ensemble. Du moins, elle l’espérait.
    Sans surprise, leurs retrouvailles avaient entraîné la promesse d’un duel dans la foulée. À peine une nuit pour récupérer des forces d’un long voyage, et déjà, l’on déclarait les hostilités. Ce qui n’était pas pour déplaire à Solyaane, au contraire. Il y avait bien trop longtemps qu’elle n’avait pas eu à un adversaire digne de ce nom, et les entraînements avec son maître d’armes habituel avaient fini par la plonger dans une lassitude engourdissante.

    Midi était encore devancé d’une heure. Dans la chambre qu’on lui avait attribuée au cœur du château, Solyaane se préparait à recevoir et, surtout, donner des coups. Cotte de mailles, cuissardes, gantelets, plastron, casque… avant de fermer les portes de son échoppe, elle avait pris le temps de se forger une véritable armure, qui épousait ses formes et les moindres de ses mouvements sans l’entraver. Elle était assez fière du résultat, fruit de sa passion pour le travail du fer.
    Tout cet équipement fut rangé dans un sac, jeté sur son dos. Le temps de faire le trajet jusqu’à la lice, elle ne porterait que la cotte de mailles et les cuissardes. Croisant le regard de son reflet dans le miroir, elle esquissa un pâle sourire en passant devant pour atteindre la porte. Malgré la mélancolie qui l’accueillait chaque soir entre ses bras glacés, Solyaane mettait un point d’honneur à donner le change devant les autres. On l’avait suffisamment jugée froide et distante ; il n’était plus question de passer pour ce triste cavalier solitaire qui portait sa croix à longueur de journée. Étouffer les états d’âme, pour mieux s’y abandonner plus tard.

    Elle était la première arrivée à la lice. Il n’était pas encore midi. La future duelliste déposa son sac dans un coin de l’arène. D’un regard circulaire aux alentours, elle constata avec une pointe d’amertume que, cette fois, aucun visage familier ne viendrait assister à la joute. Pas Diamantine, la rousse mercenaire au regard moqueur qui ne demandait qu’à assister à sa défaite cuisante. Ni Luz, dont les lèvres fines se seraient étirées d’un sourire goguenard dès que le genou de la combattante se poserait de force à terre. Pas plus que son glacial acolyte nommé Rael, ou que le portier qui avait été un maître d’armes presque infaillible. Et certainement pas Lyanéa qui, malgré sa désapprobation, serait venue soutenir sa sœur par sa simple présence…
    Solyaane soupira, et tourna les talons pour entamer son échauffement. Course et exercices musculaires divers suffiraient à passer le temps en attendant qu’Arioce ne la rejoigne pour croiser le fer. Elle n’avait pas foulé le sable d’une arène depuis des mois. À quand remontait exactement son dernier duel en lice ? Elle n’aurait su le dire, même si elle gardait en travers de la gorge le souvenir de sa dernière joute interrompue par des troubles-fêtes à l’égo surdimensionné…

    Solyaane ferma un instant les yeux, le visage levé vers le ciel. Le soleil peinait à percer au travers d’épais nuages sombres, qui n’étaient pas pour autant décidé à délivrer la pluie qu’ils retenaient. Un vent frais caressa l’arène. Elle sourit. C’était une belle journée pour se battre.
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