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[RP] Retour au monde.

Maleus
[Aheum.]

Oh que oui, son isolement lui avait fait le plus grand bien et si c’était à refaire, il le referait sans hésiter. Le hic c’était qu’il avait pris cette décision sur un coup de tête et qu’il se retrouvait dorénavant seul dans cette ennuyeuse cité de Mâcon où il ne connaissait personne et où il n’avait pas sa cadette pour passer sa mauvaise humeur…

Bien entendu, comme un ivrogne paumé un lendemain de cuite, il avait erré quelques heures dans la ville sans vraiment avoir de but, lançant quelques œillades peu aimables aux pauvres badauds qui croisaient son chemin ou quelques jurons à ceux qui étaient assez fous ou sociables pour l’aborder. Quelques heures donc, sans trop savoir que faire et où le mèneraient ses pas, tirant occasionnellement des bouffées sur sa pipe et pestant sur sa famille si inutile puisque absente, tournant en rond dans cette satanée Mâcon sans avoir une quelconque idée de quoi serait fait l’avenir, qu’il soit proche ou lointain.

********

Qu’on se le dise, cette ruelle sentait la pisse… Entre autre. Le séant posé sur une vieux tonneau, le cyclope tendit le bras pour se saisir le la boutanche que lui tendait un vieux vagabond édenté puis but une rasade.

" Oui… S’isoler et prier Deos pendant quelques temps est salutaire je puis vous l’assurer… "

Il avala une deuxième goulée et rendit la fiasque au clochard. Ce dernier, le regard perdu et l’air passablement niais écoutait sagement le pasteur, lachant par moment quelques « Hu» et quelques « Gné » sans pour autant que le grincheux borgne ne s’en agaça.

" Vous voyez, avec cette famille d’ingrats que je me traine et ma chance parfois maquante, il est parfois nécessaire de faire le point… De se recentrer quoi… N'est-ce pas ? "


Il ralluma sa pipe et tira quelques bouffées sans prêter attention à la réponse de son interlocuteur. C’était avant tout un dialogue à sens unique.

" Hu. "

L’œil de l’Assay suivit un instant le trajet de la fumée vers le ciel et qui savait peut être même vers le Tout Puissant puis continua.

" Pourtant, cher ami, je dois avouer que je ne compte pas faire de vieux os dans cette ville… L’air bourguignon ne me va guère au teint et qui plus est, après bien des semaines à prier, ne dois-je pas aspirer à l’aventure ? A voyager ? Bref me dégourdir les jambes et affronter comme il se doit les épreuves que le Très Haut dresse sur notre route ? "

" Gné "

Maleus prônait la confiscation et la réquisition des biens des couvents et des monastères. En bon huguenot, il trouvait que le mode de vie de ces cloitrés n’allait pas dans le sens souhaité par le Créateur… Qui plus est, en bon réformé là aussi, il trouvait que les moinillons et les nonnettes ne savaient pas investir correctement leurs écus… Quel gâchis.

" M’enfin rassurez-vous, il n’y a pas le feu non plus… Il me faut regarnir quelque peu ma bourse et j’apprécie votre conversation. Pourriez-vous, s’il vous plait, me donner de nouveau l’occasion de boire quelques lampées de votre gnôle immonde ? "


Cette question n’en était pas une et il arracha sèchement mais avec politesse (selon ses critères) la bouteille des mains de l’ivrogne sans domicile. L’odeur de pisse était toujours aussi forte dans cette ruelle et la gnôle du clodo l’assommait assez pour ne plus y penser… Un moyen de passer le temps.

" Gné. Hu. "

_________________

Adieu Fab'
Astana
    [Plus au nord, Dijon]

Contrairement à cousin cyclope qui a passé l'hiver à prier, Sørensen a chopé la fièvre, un samedi soir. Aujourd'hui, ses poumons en gardent des séquelles. Elle a gratté des lettres, au début, pour prévenir qu'elle s'illustrerait une fois encore par son absence. Et tu crois que ça lui aurait fendu la trogne, à l'autre, de répondre ? Espèce d'ingrat, va. Bien sûr, elle sait désormais que les vélins n'ont jamais trouvé leurs destinataires, mais dans la famille on a la rancune tenace. Que ce soit justifié, ou non.

Ainsi Dijon a vu débarquer une Astana bien déterminée à débusquer son ainé retranché chez les bourguignons. Parce que l'appel du fer est là, et qu'ils auront bien assez le temps de se foutre sur la tronche après. Le premier rade trouvé fait l'affaire d'une halte. Blondeur entre, sa reproduction miniature dans une main, un sac grouillant dans l'autre.


    [Deux heures plus tard]

Astana + 1 gramme dans le sang.

- « Bon, vous buvez ou merde ? »
- « J'devrais pas... »
- « Vous avez peur de quoi ? C'est pas de l'alcool de cailloux. »
- « On voit qu'vous connaissez pas ma femme. Si j'rentre bourré... »
- « Ha non. Eh quoi, elle est du genre esprit sain dans un corps sain ? »

- « Il se passe qu'en plus d'être laide, elle est chiante, mais CHIAAANTE ! »
- « Shhhhhhht ! Vous allez la réveiller. »

Le pouce par-dessus l'épaule désigne Hazel, au fond, endormie sur deux chaises rapprochées.
L'homme hoche la tête, désolé, puis écluse son verre. Elle l'imite avant de les resservir.


- « Vous vous repentirez plus tard, après votre cuite, allez. »
- « Z'êtes mignonne. C'est facile pour vous d'dire ça. On vous fait pas la morale souvent, ça s'voit. »
- « Ah si. Si, si, si. Tout le temps. Déjà, dans les textes il est écrit que je ne suis pas censée abuser de l'alcool, bon... la repentance sert à ça. Autrement, j'ai mon cousin. Zélé, le gars. Il a qu'un oeil et il voit tout, c'est dingue. J'en faisais des cauchemars avant, où il brandissait une Conduite de poche et me frappait avec. »

C'est un poil exagéré, mais le fond est là. L'occupation favorite des d'Assay en pleine crise ? Faire des battles de versets.

- « Il est à Dijon vot' cousin ? »
- « Non. À Macon d'après mes informations. Sûrement qu'il cherche à convertir quelques âmes égarées. »


Là, elle se marre un peu. Juste pour elle. Comme ça. Mieux vaut ne pas chercher à comprendre tout ce qu'il se passe dans le carafon de la blonde. En tout cas, lui ne pige pas la blague et la regarde, sourcils haussés. Vrai que tu peux pas comprendre tant que t'as pas rencontré la bestiole. Elle balaie sa dernière réflexion d'un geste.

- « Rien. Il est pasteur... »
- « Aaaaah ! Et c'est ma... »


L'homme s'arrête pour aviser le dessous de table, légèrement bancal, où quelque chose vient d'attirer son attention. Il grimace large et tend un index effrayé vers le sac de jute.

- « Là... Là ! V-votre sac bouge ! »

Astana suit l'index du regard avant de négligeamment hausser les épaules.

- « Oh ça ? Nan mais vous en faites pas. C'est Maleus. C't'un blaireau. »
Maleus
[Mâcon, un autre moment.]

Refaire le plein d’écus, alourdir de nouveau sa bourse… Voila la quête qu’il s’était donné depuis qu’il était revenu au monde. Bon bien entendu, avant de passer aux choses sérieuses il en avait quand même profité dans cette ruelle poisseuse pour se plaindre de sa famille et cracher son désamour pour l’humanité. Ceci étant fait, il avait abandonné l’indigent, marmonnant un bref merci et pestant contre son état fort proche de l’ivresse… Elle tapait sec la gnôle du gueux.

************

Dans sa chambre à l’auberge, à genoux près de sa paillasse, le cyclope priait et se flagellait verbalement pour avoir succombé à l’appel de l’alcool, s’être embrumé l’esprit… Il marmonnait prières sur prières et indiquait au Tout Puissant que les fautifs étaient les siens, sa famille d’ingrats qui ne se souciaient pas de leur ainé… Lui si bon et si généreux avec eux…

Il en était à blâmer encore sa cadette et sa cousine quand on toqua à la porte.

L’austère se leva, consciencieusement il renoua sa chemise et enfila son mantel puis ouvrit. C’était la taulière et son air de musaraigne… Un sourire de faux derche, des mains aux doigts crochus qui triturait sans cesse le nœud de la large bourse qui pendait à sa robe grisâtre et usée. On aurait dit qu'elle avait besoin de vérifier qu’on ne lui avait pas subtilisé son plus grand bien… Le réformé n’arriva pas à se retenir de grimacer.

" Hm… Oui ? "

La mégère lui décocha un regard de rapace qui dénotait avec son sourire mielleux.

" Mon bon sieur… Loin d’moi l’idée de vous déranger dans vos honnêtes activités tant ma clientèle m’est chère mais si vous pouviez régler la première moitié d’votre séjour… La vie est dure mon bon sieur pour une vieille veuve comme moi… M’y faut compter sur mes honnêtes clients… "

Maleus se renfrogna comme à chaque fois qu’on lui parlait de lui ponctionner de l’argent, honnêtement ou non et se retourna par réflexe pour appeler sa sœur.

" Clara veuillez payer cette… Hum. "

Cadette inutile ! Sœur de pacotille ! Pourquoi manquait-elle à l’appel alors qu’il l’avait missionnée pour tenir leurs comptes ! Jamais là quand il avait besoin !

Il soupira et refit face à la garce toute dubitative.

" Hm pardon… Combien vous dois-je ?... "

Certains de ses anciens camarades avaient coutume de dire que l’honnêteté ne payait pas, il aurait pu rétorquer qu’elle coutait même trop cher. Il attrapa sa maigre bourse et alla pour piocher dedans.

" Oh, une misère mon grand seigneur, une misère… Mettons cinq écus et trois deniers pour la semaine puis une prime de quinze écus pour la non dénonciation et les dommages spirituels… Brave aristotélicienne romaine que je suis, côtoyer de si près l’hérésie m’est si douloureux… "

Les fausses larmichettes et l’air fourbe de l’alberguière le rendirent plus pâle que d’habitude tant l’agacement était grand et il songea que sa cousine présente, l’autre arnaqueuse aurait fini avec quelques fractures… Mais bref ! Une ingrate de plus aux abonnés absents… Il ne manquerait pas de leur faire payer quand il les reverrait c’était sûr et certain… Dans la famille on était du genre teigneux.

A contrecœur le pasteur fila les écus à la garce, lui claqua la porte au nez puis retourna au bord de sa paillasse où il prit place.

" Seigneur, donne moi la patience et… Un seul petit godet de gnôle… Pas plus… Hm. "

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Adieu Fab'
--Vif_argent
[Bourgogne, campement de Vif]

Une envie, une inspiration, des jambes qui fourmillent.
Vif Argent avait pris la tangente de la trop paisible cité ou il avait pris ses quartiers d'hiver.
Le projet était grandiose: Ne rien faire!
Mais hélas, notre homme s'était trompé sur sa nature profonde.
Le Vif et l'Argent ne sont que mouvement perpétuel.
Ne rien faire était insupportable.

Aussi, il avait rejoint ce Duché en perdition, rejoindre quelques amis qu'il n'avait pas revu depuis de longs mois.
Partager leur luttes et leurs efforts.
Pour sur, ils ne le reconnaitront pas sous son masque, mais l'important était d'etre la.
Tard, surement, mais la.

Il pensait à MG, qui avait dit "plus tard" au petit Lustiger
Il pensait à Charlotine, qui l'avait approuvé dans cette histoire de temple.
A Vignolles, qui l'avait orienté et conseillé, le "frangin" .. Vif sourit encore a cette évocation.
Bien des litres d'eau s'étaient écoulés sous les ponts depuis ces instants.
La Fatum avait recueilli le petit garçon, qui était devenu un homme.
Il y avait eu Vendôme, puis Gien, mais la c'était le bon Berry à venger.
Ici, les choses étaient différentes.
Ici, c'est Déos qui l'appelait.

Oui, décidément, fallait pas laisser tomber Déos, et son Œuvre.

Il se prit à réciter à forte voix le Crédo, bientôt repris par son compagnon




Je crois Deos Créateur du monde
Depuis l’Enfer qui est sous l’onde
Au paradis où volent les colombes
La Réforme

Il nous jugera à l’heure du trépas
Sur nos actes et surtout notre Foi
Son sourire déjà nous donne de la joie !
La Réforme

La Réforme, la Réforme
Proclame Oane, ancêtre vénéré
La Réforme, la Réforme
Car de tous, il fut le premier.
Il soupesa en sa chair, les belles vertus de l’Esprit
Et l’essence de Deos, si Aimant, il comprit
C’est la Réforme

Aristote fut premier prophète
Les lois divines, il décachète,
Et cette sagesse, c’est vachement chouette
C’est la Réforme !...


Les étoiles dardaient leurs rayons bienfaisants sur la nature endormie.
Le feu crépitait doucement.
La prière avait raffermi les âmes, Vif s'enroule dans une couverture et s'endort. Demain, il y aurait de la route, encore.
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