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[RP] Il lupo e l'uccellino*.

Zilofus
[Le 30, une fois le courrier reçu ...]

Sauf que la fauvette semblait encore ignorer à qui elle écrivait, pensant simplement que comme à l'accoutumée elle aurait à faire à un représentant comtal qui l'aurait d'abord questionné pour mieux répondre à ses questions ensuite, s'évertuant à faire son boulot correctement en soi, mais là ce n'était pas le cas, par la simple connaissance de la personne qui occupait la fonction de prévôt ce mandat ci elle se serait abstenue d'écrire quoi que se soit et aurait trouvé d'autres moyens pour retrouver sa tavernière disparue ...

Sur le coup il avait hésité entre toutes les options qui s'ouvraient à lui pour la malmener - une fois encore - pour se venger de sa tentative d'assassinat de la dernière fois, il y en avait tellement qu'il n'avait pas su déterminé laquelle aurait été la meilleure entre l'envoyer croupir dans une geôle quelques jours pour trafic de bière, envoyer des gardes dans sa taverne pour la désordonnée davantage à la recherche d'indices sur la disparition soudaine de son amie, lui faire croire que justement la maréchaussée avait retrouvé un corps inanimé sur un chemin non loin de la capitale pile poil cette nuit là ou simplement que la dites tavernière avait été appréhender pour qu'il puisse enfin récupérer son enfant après tout ces mois où elle l'avait fait passer pour un père indigne qui se fichait éperdument de sa fille, c'est clair que les idées ne lui manquaient pas et qu'il aurait pu inventer n'importe quelle histoire pour faire payer à l'une comme à l'autre les faits qui s'étaient déroulés ces derniers mois.

Néanmoins il avait choisit l'option de rester neutre, pour l'instant, profitant de l'ignorance de la jeune femme pour lui faire parvenir une réponse dans laquelle il devrait effacer son envie d'inscrire du "Saucisson", ne pas lui dire que vu sa coupe de cheveux elle avait plus l'air louche qu'innocente, ni même qu'avec une enseigne pareille on craigne qu'elle fasse partie de la mafia italienne. Il devait donc rester sobre et ne lui donner aucun indice quant à sa réelle identité, essayant de la faire un peu culpabilisé au travers de quelques mots avant de se résoudre à peut être lui révéler ce pourquoi elle lui avait écrit, ça il ne savait pas trop encore ...




Donà di Medici Corleone,


De ce que je lis dans votre courrier et pour vous citez "ma tavernière est partie précipitamment", soit. Qu'y puis je donc ? A ce que je sache chacun est libre de faire ce qu'il veut dans la mesure où il respecte les lois régissant notre bon comté. Il n'en tient qu'à vous de savoir qui vous embauchez et pourquoi votre tavernière a décidé de partir précipitamment, peut être que vous ne la payez pas assez, qu'elle avait trop de travail ou au contraire pas assez, que ce travail n'était pas ce qu'elle espérait, que vous n'êtes pas une bonne patronne ... bref, les raisons sont tout aussi nombreuses que variées.

De ce que j'ai appris par ailleurs, ce n'est pas la seule tavernière qui disparait soudainement de son poste en votre établissement, détail qui accentue mon propos précédent et qu'il doit bien y avoir un problème venant de vous. Peut être que les fûts de bière que vous avez récemment acquis ne contiennent pas que de la bière et qu'en connaissance de cause votre tavernière ne supportant pas le poids d'un tel fardeau ait préféré partir plutôt que de subir vos foudres en révélant aux clients la composition de leur breuvage.

Pour en venir - enfin - à votre demande, je veux bien vous aidez mais je ne vois pas pourquoi je vous révèlerais des données confidentielles sur les allers et venus des voyageurs sans rien avoir en retour c'est donc pour cette raison que vous ferait une liste d'exigence à la fin de ce message pour donner réponse à vos inquiétudes afin que vous puissiez dormir sur vos deux oreilles ce soir, ou pas.

Aussi, sachez que j'ai beau être au courant de bien des affaires dans la province, je ne sais pas forcément tout, quand vous me dites "ma tavernière" sachez que pour moi ce n'est pas forcément évident de savoir de qui il s'agit puisque vous semblez changer de larbin comme bon vous semble, ou bien est-ce l'inverse ?

Liste d'exigences :
- Place d'honneur dans le carré VIP
- Boissons offertes à vie
- Menu offert à l'oeil
- Interdiction d'entrée pour les roux, les bretons, les païens, les hérétiques, les moins de dix ans, les plus de cinquante ans
- Pas de canidés
- Cesser de raconter des contes archi faux aux gens de passage
- Que vous vous peignez au moins trois fois par jour, par pitié
- Ne pas pondre un chouineur
- Augmenter de 1 denier le prix de la bière pour qu'elle soit à un tarif impair


Cordialement,
Le prévôt.
Fanette_
Limoges, le 2 avril 1466

Oui, Fanette aimait les cerises, mais il était encore trop tôt dans la saison, ou alors, la Danoise comptait lui ramener des cerises au vinaigre, et ça, c'était une rudement bonne idée. La fauvette grimacerait peut-être tant le met était acide, mais elle n'en raffolait pas moins. Ce dont elle ne raffolait pas en revanche, c'était le maniement des chiffres, et Svan avait beau la railler en lui promettant de lui apprendre les multiplications dès son retour, Fanette n'était pas folle. Elle ne savait sans doute pas très bien compter, mais les trois cent treize écus qu'elle avait trouvé en plus dans sa caisse quelques jours plus tôt n'était pas le fruit de l'une de ses erreurs. Rychard, le nouveau fiancé de la brune avait fini par lui cracher le morceau. C'était son argent, et celui de sa promise qu'ils avaient discrètement ajouté à la recette de l'auberge, pour participer aux frais qu'engendrerait la venue de la fameuse matrone Rochelaise.

En attendant, Fanette était rassurée sur le sort de Svan. Elle avait été enlevée. Bien sûr, dit ainsi, ça semblait terrible, mais la Danoise commençait sa lettre par « je vais bien. Ne t'inquiète pas, et Tartine aussi. » Alors, la jeune femme ne s’inquiétait pas, et elle s'inquiétait d'autant moins que le ravisseur était cet idiot de Lucus. Le Normand, amouraché de sa captive, ne saurait donc lui faire aucun mal.

Fanette était perplexe cependant, et pas loin de croire que Svan s'était tout autant amourachée de celui-là, en dépit de son nouveau fiancé dont elle lui avait dit tant de bien. Comment croire sinon qu'elle ait pu se laisser entraîner en dehors de l'auberge contre son gré, quand on connaissait un tant soit peu la Danoise et son passé. Ce n'est pas un blondinet énamouré qui aurait su lui intimer l'ordre de quoi que ce soit, si elle n'avait eu, a minima, l'intention de se laisser faire.

Enfin, après tout, si Svan allait bien, c'était là le principal, le reste ne la regardait pas plus que ça. C'était entre son fiancé, elle et le Normand. Bon, au cas où les deux-là se mettraient à faire des petits, elle les prierait juste de ne pas lui en garder un. Fallait pas pousser quand même … Un Lucus junior … Quelle horreur ! Elle se fendit d'un léger rire, rien qu'à imaginer la brune amoureuse du gars qui l'avait dénigré auprès de son propre époux et père de son adorable Astrid. Non mais Fanette, d'où tu sors une idée si saugrenue, n'importe quoi !

Restait le courrier du prévôt, auquel elle avait demandé de l'aide et qui lui avait répondu. Bien évidemment, si elle avait su alors que derrière la fonction se cachait le second Normand de Limoges, et meilleur pote de Lucus, elle se serait abstenue de faire appel à lui. Mais depuis, elle l'avait appris, et c'est d'un autre regard qu'elle accueillait sa réponse. L'homme ne se dévoilait pas, quoique, ses exigences ayant trait aux cheveux, ou aux canidés aurait sans doute pu lui mettre la puce à l'oreille. Ainsi, il voulait jouer, et ce soir, la fauvette était de bonne humeur.




De Fanette di Medici Corleone
à vous, Messire Prévôt.

Pour faire un pas dans la bonne direction, et vous être un tant soit peu agréable, j'ai baissé le prix de mes cervoises d'un denier, afin d'avoir le nombre impair que vous réclamez, et du même coup, de pouvoir contenter les radins de la cité, qui pourront ainsi se régaler à moindres frais. Ne dites rien, vous ne le savez peut-être pas, mais oui, cette cité compte bien quelques pingres. Pour ma part, j'en connais un assez bien, un Normand figurez-vous. Comme quoi, on devrait revoir notre avis sur les Auvergnats.

Pour ce qui est du chouineur, soyez rassuré. C'est un Corleone que je porte, et ils n'ont pas pour habitude de geindre ou de chouiner.

Pour le reste, je crains de ne pas trop savoir vous contenter. Si je vous offrais à vie le boire et le manger, on vous accuserait à coup sûr d'être un prévôt corrompu, et je ne voudrais pas être responsable de votre déchéance. Imaginez un peu, on vous collerait au pilori toute une semaine, vous seriez la risée des grands et des petits qui vous jetteraient dans poire tout un tas de détritus, plus ou moins putrides. Oh non, ça, je ne peux m'y résoudre. Et bien au contraire, pour vous garder loin d'une fin si peu glorieuse, considérez que, quand vous viendrez vous désaltérer chez moi, je vous compterai cinq deniers de plus par chope de cervoise, et le double du prix convenu pour une écuelle de soupe, ainsi aucun doute ne sera possible, et personne ne vous accusera de vilaines choses.

A ce propos, Messire prévôt, je ne sais d'où vous tenez vos informations, mais les taverniers que j'ai employés jusqu'ici sont partis pour des raisons bien indépendantes de la fonction qui étaient la leur.

Enfin, pour finir sur l'affaire qui nous occupe. J'ai reçu hier soir un courrier rassurant de ma tavernière. Elle a été enlevée. Rien qui ne nécessitera votre intervention cependant, car son ravisseur ne lui fera aucun mal. Figurez-vous qu'il s'agit d'un crétin Normand du nom de Lucus, le meilleur ami de son ex-mari, qui plus est, qui s'était sans doute amouraché d'elle depuis si longtemps qu'il a fini par passer à l'acte. Bon, il n'était pas à son coup d'essai le bougre, j'crois que c'est une habitude de Normand le rapt.
Quoi qu'il en soit et tout à fait entre nous, ma tavernière n'est pas vraiment sans défense. Sans doute qu'elle le renverra à son pote Zilo quand elle l'aura étranglé avec ses propres tripes.

S'il en réchappe, peut-être que vous devriez les garder à l’œil ces deux-là, on ne sait jamais, dès fois qu'ils aient encore l'idée d'aller enlever d'autres donzelles.

En attendant, vous m'avez donné une idée pour ma taverne, en me demandant de l'interdire aux roux, aux Bretons, aux païens, aux hérétiques, aux moins de dix ans et aux plus de cinquante ans. En fait, c'est aux Normands que je vais interdire l'entrée. Ce sera plus sage, et en tant que Prévôt, je suis bien sûre que vous m'approuverez.

Bien à vous.
Fanette

_________________
Alienor.
Aliénor et son mari, après quelques jours de voyage se pointent à Limoges. Appelée par son frère au chevet de Fanette, la bretonne se dirige tout droit vers l'auberge de la future maman. Gourvan lui a donné des explications claires et c'est donc sans hésiter qu'ils trouvent tous deux l'auberge.

Non pas que le voyage fut long mais le couple, tout à la joie de se retrouver à deux, pour la première fois depuis 5 ans de mariage en avait profiter... les nuits avaient été courtes mais intenses. Et puis.... chuuuuuut! vous n'en saurez pas plus.

Devant l'auberge, ils regardèrent le nom.


C'est bien celui difficilement épelé par Gourvan. Nous pouvons entrer.


Ils poussèrent la porte et se trouvèrent dans une belle salle lumineuse. Personne... le maitre des lieux devaient se reposer. Posant leurs baluchons sur un banc, ils s'avancèrent vers le comptoir et Garg d'une vois forte, héla:


Il y a quelqu'un??
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Fanette_
Il était rare que des voyageurs poussent la porte de l'auberge entre tierce et sexte, et par chance, Fanette s'était levée tôt et était déjà revenue de sa petite marche matinale. Pour tout avouer, et même si elle gardait en tête les recommandations de Joséphine Rougemont, son dos la faisait tant souffrir qu'elle écourtait sans doute la durée de ses promenades.
Quand elle entendit une voix masculine, au parlé fort, appeler, elle posa son couteau et la rave qu'elle était en train d'éplucher, puis, essuyant ses mains dans un torchon, regagna la salle commune.

Elle marqua un petit temps d'arrêt en apercevant le couple, puis se précipita vers eux, aussi rapidement que son état le lui permettait. Sans trouver autre chose à dire sur l'instant, tant elle était heureuse de les revoir, et émue qu'ils soient venus pour elle, elle ouvrit ses bras pour serrer tendrement Aliénor. Puis, hésitant un instant, elle finit par offrir une étreinte timide à son époux.

Elle s'écarta enfin légèrement, reprenant un peu contenance, pour leur offrir un radieux sourire.

- Je suis bien contente de vous revoir Aliénor, vous aussi sieur Garg. Gourvan m'a dit qu'il vous avait demandé de venir, mais j'ignorais exactement quand vous seriez rendu à Limoges. Bien évidemment, vous allez loger ici, n'est-ce pas ?

La fauvette s'était empressée de les faire asseoir, puis avait posé sur la table un pichet du vin que Roman avait ramené quelques jours plus tôt, ainsi qu'une belle miche de pain croustillante et dorée, accompagnée d'un peu de fromage et de charcuterie. Alors, les laissant à cette petite collation du matin, elle s'était excusée, pour gagner l'étage. Elle ouvrit la porte d'une chambre de bonne taille, dont l'unique fenêtre donnait sur la rue qui descendait à la Porte-Panet. Elle s'appliqua à la rendre présentable, car, ce soir et pour plusieurs semaines, ce serait là le havre d'Aliénor et de son époux.
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Alienor.
Aliénor ne put dissimuler sa joie en revoyant Fanette. Ciel! Comme elle avait meilleure mine! Le fait de rester bien en place, l'avait remise sur pied, et elle faisait plaisir à voir.

Oh Fanette! quelle joie de vous revoir!

Et elle la serra affectueusement contre elle. Puis, elle regarda Garg et Fanette, amusée de la situation. Le connaissant, il devait pas beaucoup se souvenir de la jeune femme et de plus, elle était méconnaissable. La dernière fois qu'il l'avait vu, elle avait un visage émacié, les yeux ternis par des cernes énormes, un visage triste. Là, la rousse rayonnait. Même si elle n'y pouvait rien, la bretonne était fière de la voir en si bonne forme.


Eh bien, nous sommes partis le lendemain de sa demande! Il ne nous a pas laissé le choix et puis au plus tôt nous étions là, au mieux c'était! Et je sais Eléonore pas loin. Nous aurons peut-être la possibilité de pousser un peu pour la voir. On ne sait jamais.
Eh bien, si vous avez une chambre, nous serions ravis de loger ici! et je pourrais veiller sur vous!


Coquine, après un regard à son époux tant aimé, elle murmura plus bas:

C'est un peu comme un deuxième voyage de noces... si on pouvait avoir une chambre éloignée des autres, ce serait super...

Elle prit place à la table proposée par Fanette. Et avant de la voir disparaître dans les hauteurs:

Ah merci! nous mourrons de faim!
Chéri, tu nous coupes du pain s'il te plaît?

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Zilofus
[Le 2 avril, de l'autre côté du courrier ...]


Seconde réception bien parvenue au destinataire, celui-ci s'était empressé une fois encore de lire la missive que lui avait fait parvenir la tenancière de la taverne au nom rital pour savoir de quoi il retournait cette fois, peut être qu'après avoir découvert que sa tavernière n'avait pas vraiment disparu elle s'était décidée à céder aux exigences du prévôt, peut être pas, et de ce qu'il en lisait, c'était pas vraiment le cas.

Dans la foulée, réponse fût rapidement écrite pour aussitôt envoyer un gamin la livrer à l'intéressée afin qu'elle cesse de l'importuné pour des broutilles pareilles et surtout pour dénigrer les personnes qu'elle n'appréciait pas au travers de quelques sous entendus.




Donà di Medici Corleone,


C'est un bon début que de lire que vous avez suivit mes conseils en réduisant le prix de la bière dans votre établissement, cependant je reste assez étonné par vos propos visant à pointer du doigt les radins, plus particulièrement les normands. Vous qui devez voir passer bon nombre de personnes aussi différentes les unes que les autres vous avez bien du vous rendre compte que les radins sont de toutes origines et non uniquement issue de Normandie, c'est de la discrimination raciale que vous faites là, à penser comme cela on pourrait penser que vous prêchez la suprématie italienne en vue d'une invasion future ou de l'instauration d'un dictat anarchique de votre clan et les gens qui ont des pensées aussi radicales on les met au trou en prévention d'un quelconque acte pour préserver l'identité de notre province ainsi que la sécurité de nos citoyens, méfiez vous !

Un mini Corleone vous dites ? Pffff ... Ça va nous faire un futur criminel de plus à surveiller, vous pourriez vous abstenir de mettre au monde ce genre d'énergumène, à peine saura t-il marcher qu'il ira déjà braquer la boulangerie du quartier pour aller y voler les quelques pâtisseries que le boulanger se sera donner de la peine à confectionner. Non mais vraiment, où avez vous la tête ?
Remarquez que c'est une question idiote, elle est dans le sachet de pâtes, évidemment ...

Vous savez madame, je suis déjà passé une fois ou deux dans votre établissement et vu l'odeur nauséabonde qui régnait dans l'air ça ne m'a pas donné envie de rester, c'était assez désagréable de venir passer du bon temps dans une taverne prévue à cet effet alors qu'une certaine odeur de charcuterie planait dans l'air, alors ne vous en faites pas trop pour mon intégrité physique et morale je m'en sortirais aisément en ne venant pas chez vous. Puis comme je dois faire la prévention routière pour tout ces crétins qui ne respectent pas les limitations de vitesse en charrette il vaut mieux que je ne boive pas pour montrer l'exemple.

Concernant mes informations, cela ne vous regarde guère d'où je les tiens, ma fonction me permet d'être au courant de bon nombre de choses dans toutes les villes de notre comté, sachez simplement que mes petits oiseaux me rapportent toutes ces informations, aussi inutiles soient elles.

Et enfin ... pour en revenir à cette affaire d'enlèvement qui n'en est pas un mais que finalement si ... Si personne ne se plaint de sa disparition soudaine ou de son kidnapping, peu importe comment vous appelez ça, je ne vois pas l'intérêt de mener une enquête, ni même d'organiser une intervention pour la sauver des griffes de son agresseur, elle ne manquera à personne, pas même à vous étant donné ce que je lis, il est donc inutile de s'éterniser sur cette affaire que nous pouvons d'ores et déjà considérer comme close. Puis s'il s'avérait qu'elle l’éviscère pour l'étrangler avec ses boyaux, elle ne serait plus victime mais coupable de meurtre, dans ce cas là la maréchaussée interviendrait très rapidement pour l'appréhender et ensuite la pendre par les pieds jusqu'à ce que tout son sang s'écoule dans sa tête. Et oui ... la justice est bien plus complexe qu'il n'y parait et agit plus favorablement à certaines personnes, allez savoir pourquoi ...

La petite note de fin ... Vous seriez étonnée d'apprendre qu'il y a plus de normands dans le comté que les deux personnes que vous m'avez précédemment cité, contrairement au mal que vous en dites ils sont plutôt amicaux et loin d'être radins. Qui plus est je ne pense pas qu'au cas où vous souhaiteriez porter cette affaire en justice que vous soyez plus à même d'obtenir gain de cause, les autorités seront plus enclines à intercéder en faveur d'un normand radin et kidnappeur plutôt qu'une membre du clan Corleone, il aurait fallut mieux choisir votre époux madame.

Cordialement,
Le Prévôt.
Fanette_
Limoges, le 4 avril 1466

Quelques convives s'étaient succédés dans la salle commune tout au long de la soirée, amenant à Fanette sa dose de sourire, de rêve, de découverte. On avait parlé de l'Espagne, de la Toscane, de l'Helvétie, des armées, des gens trop volubiles, des mains qui parlent autant que les bouches, de l'amour d'un frère pour ses sœurs, de l'amour des sœurs pour un frère, de travail, de curé, d'enfants, du sien, de ceux des autres, de loyauté, de donneurs de leçons ... Rien que de l'ordinaire routine qui, si elle avait privé la fauvette de voyage, ne la rendait néanmoins pas malheureuse.

Puis, quand le calme était revenu, elle s'était appliquée à répondre à ses courriers ... Eléonore d'abord, Nusha et Janis ensuite, puis Svan, et elle venait de dérouler le message du prévôt, riant sous cape des énormités qu'il écrivait.

Mais une visite tardive autant que rapide, en l'espace d'un court instant, allait sensiblement entamer l'humeur joyeuse de la fauvette.

Quand le Sire Zolen s'était extrait de son fauteuil, il avait ralenti le pas, laissant partir devant Lucie, pour lâcher trois mots qui avaient glacé Fanette.

- Eldearde est morte.


Son ton était froid, son expression presque détachée, si ce n'est l'amertume qu'elle pouvait deviner dans le léger rictus accroché au coin de ses lèvres. Alors, Fanette s'était figée, clapant comme un poisson hors de l'eau. Elle ne savait que le fixer, haussant deux sourcils interrogateurs, quand ses yeux écarquillés semblaient se noyer dans l'émotion qu'elle peinait à maîtriser.

- Quand ... Comment ... parvint-elle enfin à articuler.

Mais l'homme n'avait pas envie de s'étendre sur la disparition de son épouse.

- Bientôt une semaine maintenant.

C'est tout ce qu'il avait consenti à livrer, avant de disparaître, en haussant les épaules. Et la jeune femme, submergée par le chagrin revoyait le visage souriant de l'homme quelques semaines plus tôt, quand il lui avait annoncé la grossesse de son épouse, quand il lui expliquait combien il espérait cette fois une petite fille, une sœur pour le jeune Nathaniel. Il lui avait confié un jour que les femmes, d'ordinaire, n'aimaient guère Eldearde, mais Fanette pourtant appréciait sa gentillesse, son humour, son sens de la répartie, ses avis bien tranchés, son ton, souvent un peu abrupt et coloré, son sens de la métaphore qui la faisait toujours rire. Elle aimait par-dessus tout sa bienveillance, sa simplicité et sa franchise.

Alors, elle était restée là, immobile, laissant silencieusement le chagrin couler sur ses joues. Le chien était venu poser sa lourde tête sur son genou, et la fauvette l'avait couverte d'une main, quand l'autre prenait la plume pour répondre au prévôt. L'heure n'était plus au jeu, elle avait juste envie de pleurer, entachant sans doute le vélin destiné au Normand, mais elle n'en avait cure.




Zilo,

Oui, je sais bien que c'est vous, plus la peine de vous cacher derrière vos fonctions, acquises je ne sais comment. Avez-vous donc soudoyé la comtesse, ou est-elle Normande elle aussi pour embaucher comme prévôt le plus malhonnête des habitants de la cité ?

Vous n'avez rien compris à ce que je vous ai écrit dans mon dernier courrier, je réitère donc. Point besoin de votre intervention. Je suis désolée de vous apprendre que votre meilleur ami vous a menti quand il vous disait qu'il n'avait jamais eu aucun sentiment pour votre épouse. Il semble bien que ce soit faux, et je n'ai nulle envie que vous entamiez de quelconques poursuites pour enlèvement, puisque la kidnappée était volontaire. Grand bien leur fasse, et avec un peu de chance, elle lui brisera le cœur. J'avoue que je m'en amuserai.

Et cessez de vous soucier du choix de mon époux, il me convient parfaitement. Il est tendre, loyal, aimant et tout italien qu'il soit, il ne parle pas avec les mains, ou du moins, n'a jamais osé, contrairement à vous, ne serait-ce qu'une seule fois, lever la main sur moi.

Bien à vous.
Allez au diable

Fanette



Elle avait replié la missive, et la confierait au lendemain au gamin du grouillot postal pour qu'il la transmette à qui de droit. Puis elle s'était mélancoliquement plongée dans de tristes pensées où se bousculaient un garçonnet, qui venait d'être privé de sa mère, un veuf qui se réjouissait pourtant il y a peu d'être de nouveau père, et une jeune femme, parfois désabusée, et malgré tout, toujours prompte à s'amuser.

Elle ne comprendrait décidément jamais les desseins que le Très Haut nourrissait pour les hommes, ni la cruauté et l'injustice de ses décisions. Et, tout à son chagrin, elle perçut néanmoins le claquement de la porte de la salle commune. Elle chercha vainement à dissimuler ses sanglots dans un sourire, alors qu'entraient Grégory et Opalia.
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Zilofus
Plonger dans la paperasse liée à sa fonction, il lisait les courriers les uns après les autres en croyant lire toujours la même chose, "faut il un LP pour traverser le comté ?", " je me suis fais brigander sur telle route ..." ou encore "est ce que si, est ce que ça ...", c'était toujours la même chose, jamais personne ne lui écrivait pour lui demander s'il passait une bonne journée, si son boulot était bien, non rien, les gens s'en foutaient, ils aimaient savoir être en sécurité quand ils se promenaient mais les représentants de l'ordre il n'y avait rien pour eux, c'était normal qu'ils veillent au bien être des gens, bla bla bla. N'importe quoi. Après avoir fait le tri il en aperçu un différent des autres, un long soupir s'extirpa de sa bouche à voir l'écriture de ce dernier.

Encore elle ?!

A vrai dire les courriers de la fauvette étaient facilement reconnaissables, ils étaient souvent plus humides que les autres, allez savoir pourquoi ... ah oui, c'est vrai qu'elle passait son temps à chouiner pour un oui ou pour un non alors forcément quand elle était en train d'écrire un courrier plein de gentillesses pour son normand préféré en même temps ça le faisait pas trop et quand ce dernier venait lire le courrier reçu il devait s'évertuer à faire une petite séance de déchiffrage pour comprendre le mot là où l'encre avait été étalé ou à moité mélanger avec l'eau des pâtes ... euh non, des yeux de la grosse vagabonde.

Une fois que lecture fût faites il prit le temps de lui donner une réponse, même si elle racontait que des conneries comme d'habitude c'était surement le courrier le plus intéressant qu'io avait reçu de la journée alors autant en profiter pour se remotiver pour la suite de son travail.




Saucisson !

Faut-il que je vous rappelle une fois de plus qu'un vélin n'est pas fait pour s'éponger les yeux ni même s'essuyer le nez ? Quand vous êtes triste, c'est à dire tout le temps, il faut utiliser un mouchoir, vous savez là le petit bout de tissu carré prévu à cet effet, c'est ce truc là qu'il faut utiliser pour se moucher, ça m'évite par la suite de prendre votre message avec des pincettes pour ne pas attraper la fanettingite grave.

Puisque vous savez que c'est moi le prévôt, pourquoi continuez vous à m'écrire ? Je croyais que j'étais à fuir comme la peste, un vil gredin, un mécréant nauséabond, pire que le choléra ou la syphilis ? Non ? Finalement vous m'aimez un petit peu ? On ira se promener à nouveau ensemble ?
Ah bah oui évidement, vous n'aurez pas le choix, par contre on retournera pas dans le Poitou, il n'y a vraiment que des bisounours là bas, puis c'est la porte d'à coté on ne peut pas vraiment appeler ça un voyage, c'était plutôt une promenade de santé hein. Enfin je ne vais pas trop vous en racontez pour l'instant, on verra le moment voulu.

En tout cas, s'il devait y avoir un menteur dans cette histoire de "kidnapping" ça ne serait surement pas Lucus, vous pouvez bien essayer de me faire gober ce que bon vous semble mais ça ... C'est comme si vous vouliez faire rentrer un château dans une maison de paysan, impossible n'est ce pas ? Eh bien là c'est pareil. Les normands que vous connaissez sont peut être de beaux enfoirés mais jamais aucun d'eux n'a menti et même si c'était le cas ça ne serait pas pour des histoires de cœurs. Non en fait vous devriez plutôt vous posez la question de qui ment le plus depuis le début, qui ment à tout le monde pour obtenir ce qu'elle veut, qui ment au sujet des autres pour passer pour la petite victime. Remarquez, vous n'êtes pas sœurs pour rien, aussi martyriser l'une que l'autre, le destin est trop cruel envers vous deux hein ... Pauvres femmes que vous êtes.

Puis je serais vous je ne ferais pas trop la maligne, quand vous aurez pondu un chiard qui ne plaira pas à votre époux et que celui-ci décidera de vous abandonnez en vous laissant seul avec votre enfant ça vous fera moins rire. Un petit bâtard de plus. J'avoue que ça m'amusera aussi. Surtout que je pourrais bien remuer le couteau dans la plaie en vous disant "je vous avais prévenu" ...

D'ailleurs, en parlant de couteau et de plaie, je pourrais vous incriminez pour tentative d'assassinat ! Ça ne vous dirait pas une visite guidée des cachots limousins ? Au moins pour une fois vous auriez une bonne raison de pleurer et de dire que je ne suis qu'un salaud. Il parait en plus que les rats font la taille d'une choppe, vous pourriez commencer un régime à base de viande là bas, ça ne vous ferait pas de mal puis au moins ça habituerait votre mioche pour quand il n'aura rien d'autre à se mettre sous la dent.

Le diable vous embrasse !

Z
Fanette_
[Le 6 avril 1466, un soir comme les autres ?]

La salle commune résonnait du ronflement de Huan ... Non, peut-être avait-elle accusé le chien un peu trop vite. Elle regarda Dereck, vautré sur son dossier, jambes allongées devant lui, et mains croisées sur l'estomac, en esquissant un sourire amusé. S'il bougeait ne serait qu'une oreille, il tomberait de sa chaise. Elle le laissa cependant à ses rêves, espérant qu'ils ne soient guère mouvementés et s'attela à la vaisselle des quelques chopes de l'après-midi. Aliénor venait de quitter la taverne, et il était encore trop tôt pour les habitués du soir.

Sa corvée achevée, elle s'installa non loin du feu, et entreprit de lire le courrier remis un peu plus tôt par le gamin du grouillot postal.

- Maudit soit-il ! Est-il donc dépourvu de cerveau pour oser me menacer encore ?

La fauvette pestait toute seule. pourtant, en cet instant, tout vilain Normand qu'il soit, elle ne se sentait pas en danger. Elle ne le croyait pas capable de passer de nouveau à l'acte. Il ne pouvait pas être si bête ! De nombreuses personnes savaient ici ce qu'il lui avait fait subir, il ne prendrait pas le risque de s'en prendre une nouvelle fois à elle. Sans compter qu'à présent, Roman était revenu, et qu'il n'était pas souffrant, comme lorsqu'il était venu l'enlever à Toulouse.

Elle remisa soigneusement le vélin dans l'écritoire de bois qu'elle conservait dans un coffre de leur chambre. La dernière fois que Zilo était venu, il avait promis d'attendre patiemment la naissance du petit Corleone pour ensuite l'enlever. Hélas, ce n'étaient que des paroles et les témoins de cette discussion n'étaient plus en ville. Alors ce dernier courrier était précieux. S'il tentait de lui nuire, elle pourrait tout aussi bien lui rendre la pareille en montrant à qui de droit les menaces qu'il n'avait pas hésité à lui délier dans l'encre.

Elle hésita à répondre point par point à chacune de ses phrases, mais finalement, y renonça assez vite. Ils n'en finiraient pas de s'envoyer des courriers, et Fanette en avait assez. Elle ne s'étendrait donc pas plus que nécessaire.





M'sieur le Prévôt !

Libre à vous de croire ce que vous voudrez, mais laissez l'enfançon que je porte en dehors de ça. Et sachez qu'il n'est pas un bâtard et ne le sera jamais. Quand bien même, dans vos rêves, son père m'abandonnerait, son enfant portera son nom, qui est aussi devenu le mien lorsqu'il m'a épousé.

Pour le reste, ne me menacez plus. Trouvez donc plutôt le courage de venir me dire tout cela en face, et vous saurez ce que j'en pense. A oui ! Il faudrait pour cela que vous n'ayez plus peur de mon époux, de mon chien, de Yohanna, de mon tavernier, qui sait, des clients de mon auberge ... j'imagine que la liste n'est pas exhaustive.

Et cessez donc de m'embrasser, je ne voudrais pas contracter la peste, la syphilis et le choléra.

Votre ex belle sœur.



Elle était tranquille, il ne viendrait pas. Il était le garant de l'ordre et de la sécurité, il aurait bien trop à perdre à s'en prendre encore à elle. Malgré tout, Fanette s'était un peu renfrognée. Assise derrière son comptoir, elle n'en ruminait pas moins le courrier du Normand, et se trouvait sans doute bien lâche de n'avoir pas su le tuer quand elle en avait eu l'occasion.

Et puis, la routine du soir avait repris sa place, comme chaque fois. Les habitués s'étaient installés dans la salle commune. Amarante et Lili avaient même réussi à réveiller Dereck, et les discussions cédaient parfois la place à quelques rires.

Alors, la porte s'était ouverte sur un visage inconnu. Celle qui s'était présentée dans l'embrasure semblait tout entière avalée dans une cape poussiéreuse qui dissimulait une silhouette que l'on devinait frêle. Le capuchon qu'elle venait d'abaisser dans son dos révélait une soie brune remontée en chignon. Quelques mèches s'en échappaient, venant négligemment encadrer un visage encore gracieux, malgré de discrètes rides que la lueur des chandelles laissait entrevoir. Les convives tournèrent la tête au bruit qui précéda ses pas. Une longue canne, balayant le sol au-devant d'elle ne laissait aucun doute sur l'inutilité de son regard sombre.

Fanette hésita un fugace instant à se précipiter vers la femme, pour la guider vers une table libre. Puis, elle se ravisa. Si elle avait pu venir seule jusque-là, sans doute s'était-elle accommodée de son infirmité. Ne risquait-elle pas de la mettre mal à l'aise en la traitant comme une impotente ? Elle attendit qu'elle se fût installée pour déposer un verre devant elle. Elle avait pris cette habitude. Bien souvent, aux visages inconnus, elle offrait le premier verre. Du vin, ou de la cervoise, c'était selon ce qu'elle avait en réserve, et pour l'heure, ce serait ce vin que son diable avait ramené quelques jours plus tôt.
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Victoire.
Svan somnolait sur une chaise de la taverne. Elle était arrivée tôt ce matin, épuisée. Le temps de monter sa fille dans une chambre libre, elle redescend et posée sur cette chaise, les yeux se ferment tout seuls. Après dix jours d'escapade romanesque, elle était rentrée de son expérience d'échange culturel, des nouvelles connaissances plein la tête. Elle allait le prendre ainsi, comme une nouvelle expérience.

Il faut bien comprendre que le normand n'est pas un être comme les autres. Les ancêtres de la danoise avaient utilisé ce bout de la France pour y exiler tous les débiles scandinaves, les crétins congénitaux qui polluaient leur sang noble. Les moches, les fous, les mangeurs de grands-mères avaient été envoyés là-bas pour assainir le peuple et continuer à faire d'eux des gens beaux, grands, forts et équilibrés. Alors ce n'était pas étonnant que les deux débiles n'étaient rien de plus que des débiles. Qu'il ne fallait plus rien espérer d'eux.

Donc la danoise a appris plein de choses et surtout deux concepts bien à eux : l'amitié et la victimisation.

Alors les filles, il faut savoir que l'amitié n'a pas du tout la même dimension en Normandie et dans tout le reste du monde. Attention, si un normand vous dit qu'il vous aime, vous embrasse à pleine bouche, vous caresse, vous câline, dort avec vous, vous dit des mots d'amour, ce n'est que de l'amitié. Il ne faut surtout pas confondre avec un quelconque sentiment autre. Si le normand vous dit qu'il est fou de vous, qu'une minute sans vous est un supplice, que si on vous enlève à lui, il deviendrait fou, ce n'est que de l'amitié. Oui, oui, Svan s'était faite avoir. Mais la différence culturelle, que voulez-vous quand on ne sait pas ... Pourtant, elle en avait épousé un de normands l'année dernière. Mais en toute amitié apparemment aussi. Ah les mariages d'amitié, on n'en parle pas assez ! Et le sexe d'amitié aussi ! On se pense trompée, bafouée, trahie. Que nenni mesdemoiselles ! Si vous épousez un normand et qu'il couche ailleurs, c'est en toute amitié ! Et si vous n'êtes pas mariée avec et qu'il vous propose de vous embrocher (oui le normand est un homme romantique aux mots toujours finement choisis !), c'est en toute amitié. Oui, ça surprend au début mais quand on sait ... Et inversement aussi. Quand le normand dit qu'il se fait chier dans la vie et qu'il ne croit plus en l'amour, c'est qu'il est amoureux d'une personne charmante. Oui, oui ! Non mais c'est pas toujours facile. Surtout pour eux, les pauvres incompris.

De toute façon, pour faire simple, il faut se souvenir que le normand n'aime que ses ami(e)s, le calva et lui-même, surtout lui-même.

Et ce concept de victime aussi. Le normand aime enlever. Des enfants, des femmes, des marcassins. S'ils peuvent ligoter, emprisonner, posséder, ils ne s'en priveront pas. Mais attention ! Là encore, tout est question de culture. Car si on vous enlève, vous n'êtes pas la victime, non ! C'est lui la pauvre victime. Il est la victime parce que vous allez vous plaindre, vous allez demander à pisser sur les chemins, vous allez demander à pouvoir manger. Mais pas seulement lors d'enlèvement, non, non ! Cela serait bien trop simple. Il est victime tout le temps. Le matin, le soleil se lève, il est victime du rayon de soleil qui vient lui taper dans l'œil. Le midi, son pain est tendre et chaud, il est victime du boulanger qui veut lui brûler la langue. Et ainsi de suite, toute la journée. Il est juste victime de tout et de tout le monde. Même d'une petite fille qui dort ! Oui, oui. Elle le fait exprès, elle est nulle cette petite fille de dormir la nuit quand même. Comment le normand peut jouer avec si elle dort ? Victime du sommeil d'un nourrisson.

La vie est dure pour les normands.
Et c'est épuisé d'avoir vécu à la normande pendant dix jours que Svan s'endort sur une chaise dans la taverne de sa sœur.
Fanette_




Lundi 9 avril 1466



- Le lundi, c'est toujours un peu déprimant ! Ça c'est l'avis du padre Corleone, quand il est venu boire un verre dans la salle commune encore déserte de l'auberge de son fils. Il ne savait sans doute pas que, pour pallier l'ennui des lundi, on peut toujours organiser des soirées à thème.




Oyez ! Oyez ! L'auberge "il lupo e l'uccellino" organise ce soir
sa première soirée autour du thème :

Pommes sous toutes ses formes !



Enfin, pour Fanette, le thème sera plutôt cerise rouge, comme l'embarras qui s'est glissé sur ses pommettes tout au long du soir.

Tout commença par une allégation hautement scientifique dispensée par le prestigieux mercenaire dont la légendaire renommée n'était jamais parvenue aux oreilles de la jeune femme. Il prétendait que manger des pommes pouvait changer le goût de ... Bon d'accord, ses joues se sont sans doute empourprées à ce moment précis, mais il faut bien s'instruire, alors ...

- Mais lequel des deux doit manger des pommes ? Avait demandé la candide fauvette.
- Ahinnnn, Fanette ! S'est écriée Svan, écarquillant des mirettes effarées, roulant son noir regard au fond de ses orbites, levant les yeux au ciel, s'éventant allègrement pour ne pas défaillir !

N'allez pas croire qu'elle en rajoutait la Danoise. Elle avait eu a peu près la même réaction en apprenant que sa presque petite sœur, le soir de la Saint-Jean, sur une berge discrète du Clain, s'était laissé effeuiller par le Corleone. Et encore, l'effeuillage n'avait été qu'un prélude.

Seconde couche de rouge aux joues de la fauvette.

- Ah mais non hein ! J'fais pas ça moi ! Fallait bien se défendre pour conserver la sainte auréole que sa presque grande sœur avait emmêlée dans sa tignasse indisciplinée. D'abord, l'église réprouve !

C'est vrai, tous les prêtres vous le diront, rien d'autre que ce qui permet d'enfanter n'est permis, et encore, en dehors des périodes de fêtes. Alors, depuis qu'elle portait ventre gros autant dire que l'Italien jeûnait ... Bon, peut-être pas, mais il n'avait jamais été un fervent pratiquant, et Fanette avait un léger contentieux avec le Très Haut. Et puis, ce n'est pas le curé de la paroisse qui allait y trouver à redire, vu qu'il était le seul homme d'église du royaume, marié, qui plus est à l'une des filles de la Succube. A moins que ses pairs aient songé que, étant la femme de tous, elle ne pouvait pas vraiment être la sienne.

- Non mais tu l'as dit, ou avoué, ou sous-entendu ! Ah ! Mais quelle horreur ! Et c'est avec cette bouche que tu embrasses ma fille ?!

Et ça continuait. Si elle savait la "prude" Svan que ce n'était pas là l'unique amusement que lui avait appris le Corleone.
D'ailleurs, quand il s'était amené, la fauvette avait sans doute gagné un ton de plus au joli rouge qui s'étalait sur son visage. Et pourtant, cette fois, ce n'était pas la contemplation de son diable, de son harmonieuse silhouette aux épaules carrées, dont la chemise de toile laissait deviner des muscles secs et déliés, ni des reflets de cuivre qui illuminaient le brun de ses cheveux qu'il portait court depuis leur mésaventure tourangelle. Ce n'était pas non plus ce regard de lichen, ni son nez droit, sans épaisseur disgracieuse, et qui surplombait cette bouche charnue tant de fois baisée. Non, ce n'était rien de tout cela. C'était juste la question de Svan !

- Dis Roman, Fanette te fait manger des pommes ?

Evidemment, si ça n'était qu'une question, mais non, il fallait qu'ils en rajoutent, encore, et encore ... Et à l'incompréhension Italienne s'opposait le rire Danois, et des joues sans cesse plus rouges que Fanette dissimulaient dans l'épaule de son diable.
Et il finit par deviner que cette histoire de pommes qui faisait glousser les deux dindes n'était pas qu'une simple question d'hygiène alimentaire. Il l'avait d'ailleurs chuchoté à sa mère.

- J'crois bien que c'est sexuel, mais j'arrive pas à comprendre.
- Qu'est-ce que tu comprends pas Roman, vas-y, dis-nous, j't'explique !
lui avait lancé Svan compatissante. Et là, elle avait craché plus ou moins le morceau, devant une assemblée hilare et une fauvette qui ressemblait davantage à un bouvreuil.
- Non mais c'est vrai ! Fanette sait bien ! C'est comme pour son histoire d'humidité, hein, c'était quoi déjà Fanette ? raillait la brune.
- Non mais ça n'a rien à voir, s'était défendue blondine. C'est juste que, il n'y a rien que j'aime plus que de m'allonger sur une berge tranquille, dans l'herbe douce épargnée des chaleurs de l'été par l'humidité d'un sous-bois. Il n'y a rien que j'aime plus que ça, sauf peut-être, glisser mes doigts dans les bruyères.

Et une fois de plus, la joyeuse assemblée était partie d'un grand éclat de rire, sauf notre fauvette cerise, et son Corleone d'époux qui semblait plongé en pleine réflexion.

- Amore mio, j'ai du mal à comprendre toutes les subtilités de votre langue.
- Il n'y en a pas, n'aimes-tu pas toi aussi, t'allonger dans l'herbe douce, épargnée de la chaleur, par l'humidité d'une berge ombragée ?


- Ah ! Si ! Et il avait tourné un regard très satisfait vers la Danoise, approuvant forcement son épouse, parce que les berges humides, il connaissait bien, même qu'il aimait ça, et qu'elles allaient par deux, et que c'était d'ailleurs bien souvent allongé qu'il s'y abandonnait, et que ... et on avait définitivement perdu Fanette quand il avait évoqué la nécessité qu'une grande main et de quelques doigts. Là, le bouvreuil s'était fait pivoine et s'était enfuie pour camoufler derrière son comptoir ses couleurs bien trop vives. C'est vrai quoi, on ne parlait bien que de sieste au bord de l'eau, un jour d'été !

En attendant, l'ingénue, un sourire malicieux aux lèvres, et le rouge aux joues, resservait innocemment à son Italien, un gobelet de cidre.
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Victoire.
Midi.

Les cloches sonnent à la volée pour prévenir les paysans, les artisans, les travailleurs qu'il était temps de prendre une pause bien méritée. Il est l'heure d'aller manger.

C'est un œil déjà épuisé que Svan ouvre sur le monde. Depuis plusieurs jours, elle se réveille encore plus fatiguée que la veille. Elle a pourtant l'habitude de se démener pour tout faire en même temps. Travailler chez Fanette, servir des chopes, recompter derrière elle, ce n'était pas ce qui était le plus épuisant. Après une bonne journée à discuter de client en client, de gens de passage en habitué, elle enchainait avec une petite milice. Non pas qu'elle ait besoin d'argent mais cela lui permettait de prendre l'air, de se dégourdir les jambes, de voir qui arrivait, qui partait, des nouvelles têtes. Et il fallait aussi s'occuper de Tartine. En pleine croissance, elle mange comme quatre et son éveil fulgurant laisse peu de temps au vagabondage des idées. Elle est toujours en attente de voir, de découvrir, de sentir, de toucher. Elle est souvent avec Fanette et Svan en taverne. Elle découvre le monde autour d'elle et semble adorer ça. Cette fatigue est donc inexplicable. Elle n'arrive pas à émerger avant midi et encore ... elle descend dans la taverne pour faire acte de présence mais somnole sur le comptoir. Elle est épuisée mais pas à cause de son rythme. Il y a certainement autre chose. Mais pour le moment, seule compte Fanette, le reste on verra plus tard.

La danoise n'a donc pas le temps de se morfondre. Et ça tombe bien vu qu'elle n'a pas spécialement de raison de le faire. Tout se passe si bien en ce moment que cela en devient même très étrange. Elle rit toute la journée et la nuit venue, sa soeur et elle partagent quelques confidences. Parfois, une larme roule sur leurs joues mais aussitôt un rire éclate et c'est reparti. La vie quoi !

Cette taverne est le lieu de tous leurs secrets. Et d'autres moins secrets. Certaines personnes doivent carrément saigner des oreilles. Et ça la fait rire la danoise de voir Fanette pleine d'assurance dans son petit monde. Peut-être parce qu'elle va bientôt accoucher. Et qu'elle a tellement peur de crever qu'elle se dit que plus rien n'a d'importance. Donc elle se moque du Padre en l'imitant, elle dit à qui veut l'entendre que le prévôt est un âne -ce qui n'est pas gentil pour les ânes, vous en conviendrez- elle ose même se retourner contre Svan en étant moqueuse la vilaine vagabonde. A croire que de fauvette, elle était passée à pie : moqueuse et qui aime tout ce qui brille ! Mais elles rient, elles rient tant ... Elles se taquinent, se chamaillent, se cherchent, se trouvent !

Des sœurs quoi.
Fanette_
Jeudi 26 avril 1466

Sexte ramenait toujours quelques Limougeauds. Ils avalaient rapidement une assiettée de bouillon, versée sur un épais tranchoir de pain. Un verre de vin aux épices, ou une cervoise ponctuait le frugal repas, qu'ils payaient de quelques pièces jetées sur la table, puis la porte était aussitôt repassée dans l'autre sens, les renvoyant sans autres manières sur le chemin de leurs échoppes ou de leurs champs.

Fanette faisait le tour des tables, de plus en plus péniblement, il faut bien l'avouer. Ventre en avant, dos cambré sur une douleur qui ceignait ses reins depuis déjà plusieurs jours. Elle rassembla la vaisselle salle, puis la plongea dans le baquet. La brosse s'activait sur les écuelles, dans un silence quasi religieux. Et pour cause, la tavernière "del lupo e l'ucellino" n'avait plus pointé son nez depuis le mardi précédent. La fauvette s'était inquiétée. La brune était toujours d'une pétillante insolence, et il n'était guère courant de la voir traîner sa fatigue ou s'endormir avachie sur le comptoir. Contre l'avis de la Danoise, elle avait demandé à son diable de l'ausculter, ce n'était sans doute pas le pire qu'elle ait fait, car Svan s'était finalement prêté de bonne grâce à l'interrogatoire du Corleone. Non, le pire, c'est quand Fanette, se souvenant bien de la fatigue incompréhensible qui s'abattait si souvent sur elle au cours des premiers mois de sa grossesse, avait demandé à la brune si elle saignait encore. C'est là que la tavernière avait pris ses cliques et ses claques, et sa fille aussi, et qu'elle avait déserté l'auberge, sans un mot.

Alors depuis deux jours, la salle commune baignait dans un calme presque morbide, et Fanette qui d'ordinaire savait l'apprécier, ne souhaitait rien d'autre que de voir réapparaître sa presque sœur, et toute la gamme des cris et des rires qui l'accompagnait.
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Victoire.
Vraiment ? Fanette, tu penses que ta soeur te manque ?
Non, tu ne devrais pas le dire, ni même le penser.
Car ta sœur va revenir en pleine forme !

Dix-huit heures de boulot plus la milice plus une Tartinette en pleine croissance plus la chaleur inhabituelle pour un mois d'avril, combo parfait pour tuer une vigoureuse danoise. Car un jour, elle apprendra à Fanette comment on fait les bébés. Et sauter au-dessus d'un feu lors de la Saint-Jean ne suffit clairement pas. Et puis la Saint-Jean, c'est en juin. Donc enceinte, elle ne l'est pas, elle était juste fatiguée. Et pas seulement à cause de tout ça ... d'autres choses aussi mais bon, on n'est pas là pour se plaindre. Donc elle va bien. Elle va mieux. Elle va tellement mieux qu'elle fait des courbettes au Milord, qu'elle a décidé de courser le mec aux cheveux longs dans toute la taverne pour les lui couper, les cheveux, qu'elle a proposé au petit nouveau de faire le tour de la ville en faisant la roue. Elle a dormi une journée entière et elle va carrément mieux. Mangeant de nouveau comme quatre, elle rassure Fanette : pas de grossesse, pas de mort imminente, la danoise est de nouveau sur pied.

Elle l'est tellement qu'elle lui parle de la joie d'être mère. Des bébés ... de la fontanelle des bébés. Et là, elle lui explique que les petits ont le crâne mou à la naissance et pendant près d'un an. Et pourquoi, ils ont le crâne mou ? Parce que les papas n'ont pas su résister à l'appel des mamans et qu'en les pénétrant un peu trop vigoureusement, bah ça fait un trou dans la tête du bébé. La fauvette la regarde avec des yeux ronds comme des soucoupes. La danoise ment. Non non, touche, Tartine, elle en a une aussi. Fanette découvre, Fanette s'affole. Mais non, c'est dû à l'humidité, ça rend les os des bébés tout mous. Impossible sinon ils auraient tous les os tout mous ! Euh ... Alors ? Vraiment ? Noooooooon ! Si ! Non ... Si si ! Tu vois une autre explication ? Lèvres mordues, elle se rend à l'évidence, il n'y en a pas.

La fauvette n'y croit pas mais un peu quand même et s'imagine déjà accouchant d'un bébé sans crâne tellement elle a été vilaine avec son italien.

Svan ne voulait pas savoir que sa petite sœur couche.
Elle est vengée !
Bon, elles ne savent toujours pas pourquoi les bébés naissent avec le crâne tout mou ceci dit ... Si un médicastre pouvait les renseigner, ça serait sympa !
Fanette_
Quelques heures plus tard, la tavernière repartie se reposer, ou pas, Fanette s'était, comme à son habitude installée dans la salle commune de l'auberge, non loin de l'âtre devant laquelle se prélassaient les deux dogues, celui de Yohanna et celui de son oncle. Son regard s'était accroché aux ombres qui doucement engloutissaient la rue au-delà du carreau. Le silence ne fut guère troublé par les convives ce soir-là, sans doute préféraient-ils l'ambiance joyeuse de la municipale, ou les tables de ramponneau, et les banquettes feutrées abritées de paravents de la succube.
Mais, pour plaire à la Danoise absente, c'est bien un médecin qui poussa la porte, et pas n'importe lequel, sans doute le seul auquel Fanette oserait poser la question soulevée par la brune.

- Je crois que je sais pourquoi l'église interdit aux épouses engrossées les relations charnelles. Svan dit que ...

Et elle lui avait confié l'inquiétante information révélée un peu plus tôt par sa presque sœur. Roman et l'église, il lui avait gentiment rappelé ce qu'il pensait de son dieu, avant d'éclater de rire.

- Dans ce cas, il doit y avoir beaucoup d'hommes qui continuent de baiser leurs femmes, parce que des bébés au crâne mou, j'en ai vu plein !

Les grandes mains italiennes étaient venues presser le ventre rond de la jeune femme, cherchant le contact avec l'enfant au-dessous. Fanette releva vers lui un sourire, teinté de toutes les interrogations déclenchées par Svan.

- Tu as déjà vu des adultes avec un trou dans la tête ? Non, alors, tu en déduis quoi ?

Lèvre pincée entre les dents, ça moulinait sous les boucles dorées, mais la fauvette n'avait guère d'instruction, comment aurait-elle pu répondre à pareille question ?

Les ongles masculins accrochaient l'étoffe des jupes, les faisant lentement remonter sur ses cuisses pour laisser une main audacieuse se glisser en dessous. Elle répondit d'un sourire, vérifiant d'un furtif coup d'œil que personne ne pousse la porte de la taverne.

- Je n'en déduis rien, la seule chose que je sais, c'est que si notre enfant courait un risque, jamais plus tu ne m'aurais touchée.

Il approuva, le lichen amusé, brûlant d'un désir qui, si proche du terme, devenait difficile à assouvir. Mais si Fanette était à présent convaincue que son enfant n'avait pas souffert de l'amour que lui avait bien souvent démontré son diable, elle ne savait toujours pas pourquoi les bébés naissaient avec le crâne tout mou.
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