Fanette_
le 30 juin 1467
Milo endormi, Fanette avait quitté la chambre à pas de loup, ramenant dans la salle commune le panier où Stella peinait à trouver le sommeil. Elle s'était glissée derrière son comptoir, prête à verser la bière, ou le vin ramené de Bourgogne aux quelques convives qui poussaient la porte. Les conversations étaient légères, quelques rires fusaient parfois. Dans le fond, un vieil ivrogne s'était endormi sur une table. La fauvette écoutait distraitement, gardant un il sur les mains qui la hélait, prompt à servir ses clients, mais le reste du temps, elle berçait doucement la dernière-née en lui susurrant une berceuse pour l'endormir.
Les chandelles s'étaient consumées, et vigiles venaient de sonner quand la porte s'ouvrit sur une silhouette que la cabaretière n'avait plus vue depuis plusieurs mois, et pour tout dire, elle ne s'en portait pas plus mal. Lucus, sa grande taille, ses boucles blondes, son accent normand, sa dégaine nonchalante, et cet air niais qu'il savait mettre dans son sourire pour venir provoquer avec l'air de pas y toucher.
Fanette souffla en se ratatinant dans sa chaise, ignorant le blond jusqu'à ce qu'il finisse par lui adresser la parole.
- Bon Fanette, t'as croisé Zilo dans les Flandres ?
- Ben non, ce pleutre a eu peur de s'faire casser les dents.
- Il viendra te revoir ici alors, je vais le motiver.
Bon, c'était clair, la fauvette se contenait. La dernière fois qu'elle avait vu Lucus entrer chez elle, il ne s'était pas passé moins d'un quart d'heure, avant qu'on lui place une hache dans les mains, et qu'elle la brandisse au-dessus de sa tête face au Normand. Evidemment, elle ne l'aurait sans doute pas abaissé sur son crâne, mais, vu le poids de l'outil et le gabarit de la jeune femme, l'homme n'était pas à l'abri de se faire trancher en deux, par inadvertance. Janis, son tavernier de l'époque, un jeune Angevin ô combien efficace et mal aimable lui avait sauvé la mise en le collant dehors à grands coups de tisonnier.
Non vraiment, la fauvette se contenait, mais, elle offrit un minois un peu perplexe à la suite de la discussion. Lucus savait beaucoup de choses, bien trop en vérité. Il savait qu'elle partait à Bordeaux, et qu'elle devait revenir après.
Ambroise se tendait un peu, au fur et à mesure que la blondine se ratatinait. Ninon avait ouvert le pan de sa cotte, découvrant ainsi l'étui où était glissé un couteau.
- Et comment vous savez ça vous ?
- Mon petit doigt m'a dit.
- Et qui donc l'a dit à votre petit doigt ?
- Mon oreille quand je l'ai grattée.
Elle esquissa un sourire.
- Oh, méfiez-vous alors, il se pourrait que votre oreille finisse dans mon bocal de saumure, avec celle de votre pote.
La discussion s'était poursuivie, Ninon et Ambroise, tour à tour s'y étaient mêlé, prenant la défense de la cabaretière, jusqu'à ce que l'homme déguerpisse. De tous les abrutis et les dingues à qui Fanette avait eu affaire, les deux Normands n'étaient pas ceux qui l'effrayaient le plus. Malgré tout, elle devrait s'entretenir avec son père. Elle espérait bien que ce soit lui et Carla qui se soient montré trop bavards quand le blond était passé les voir. Apprendre qu'il se soit renseigné sciemment pour connaître l'emploi du temps de la fauvette dans les prochains jours seraient bien plus inquiétant.
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Milo endormi, Fanette avait quitté la chambre à pas de loup, ramenant dans la salle commune le panier où Stella peinait à trouver le sommeil. Elle s'était glissée derrière son comptoir, prête à verser la bière, ou le vin ramené de Bourgogne aux quelques convives qui poussaient la porte. Les conversations étaient légères, quelques rires fusaient parfois. Dans le fond, un vieil ivrogne s'était endormi sur une table. La fauvette écoutait distraitement, gardant un il sur les mains qui la hélait, prompt à servir ses clients, mais le reste du temps, elle berçait doucement la dernière-née en lui susurrant une berceuse pour l'endormir.
Les chandelles s'étaient consumées, et vigiles venaient de sonner quand la porte s'ouvrit sur une silhouette que la cabaretière n'avait plus vue depuis plusieurs mois, et pour tout dire, elle ne s'en portait pas plus mal. Lucus, sa grande taille, ses boucles blondes, son accent normand, sa dégaine nonchalante, et cet air niais qu'il savait mettre dans son sourire pour venir provoquer avec l'air de pas y toucher.
Fanette souffla en se ratatinant dans sa chaise, ignorant le blond jusqu'à ce qu'il finisse par lui adresser la parole.
- Bon Fanette, t'as croisé Zilo dans les Flandres ?
- Ben non, ce pleutre a eu peur de s'faire casser les dents.
- Il viendra te revoir ici alors, je vais le motiver.
Bon, c'était clair, la fauvette se contenait. La dernière fois qu'elle avait vu Lucus entrer chez elle, il ne s'était pas passé moins d'un quart d'heure, avant qu'on lui place une hache dans les mains, et qu'elle la brandisse au-dessus de sa tête face au Normand. Evidemment, elle ne l'aurait sans doute pas abaissé sur son crâne, mais, vu le poids de l'outil et le gabarit de la jeune femme, l'homme n'était pas à l'abri de se faire trancher en deux, par inadvertance. Janis, son tavernier de l'époque, un jeune Angevin ô combien efficace et mal aimable lui avait sauvé la mise en le collant dehors à grands coups de tisonnier.
Non vraiment, la fauvette se contenait, mais, elle offrit un minois un peu perplexe à la suite de la discussion. Lucus savait beaucoup de choses, bien trop en vérité. Il savait qu'elle partait à Bordeaux, et qu'elle devait revenir après.
Ambroise se tendait un peu, au fur et à mesure que la blondine se ratatinait. Ninon avait ouvert le pan de sa cotte, découvrant ainsi l'étui où était glissé un couteau.
- Et comment vous savez ça vous ?
- Mon petit doigt m'a dit.
- Et qui donc l'a dit à votre petit doigt ?
- Mon oreille quand je l'ai grattée.
Elle esquissa un sourire.
- Oh, méfiez-vous alors, il se pourrait que votre oreille finisse dans mon bocal de saumure, avec celle de votre pote.
La discussion s'était poursuivie, Ninon et Ambroise, tour à tour s'y étaient mêlé, prenant la défense de la cabaretière, jusqu'à ce que l'homme déguerpisse. De tous les abrutis et les dingues à qui Fanette avait eu affaire, les deux Normands n'étaient pas ceux qui l'effrayaient le plus. Malgré tout, elle devrait s'entretenir avec son père. Elle espérait bien que ce soit lui et Carla qui se soient montré trop bavards quand le blond était passé les voir. Apprendre qu'il se soit renseigné sciemment pour connaître l'emploi du temps de la fauvette dans les prochains jours seraient bien plus inquiétant.
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