Jhoannes
Crique près de Bouzigues, début août
Ils avaient fait un château de sable à six mains. Les plus petites menottes avaient décidé de l'architecture générale et d'où qu'on mettrait la haute tour. Les plus fines et pâles avaient pensé des murailles pour parer aux attaques des puces de mer et autres monstres marins qui pourraient venir s'échouer dans le coin. Les plus bousillées et attaquées par le sel avaient creusé des douves, que les premières vagues de la marée montante viendraient abreuver dans un léger quart d'heure.
Maintenant c'est terminé, et ils commentent leur chef-d'uvre à trois voix. Le barbu, il enlace la danoise en lançant un regard songeur sur son ventre qui commence à s'arrondir sérieusement depuis quelques semaines. Pour qui sait pas voir, Astana, on dirait pas forcément qu'elle a un pois dans le tiroir. Et puis il faudra en parler à la gamine, aussi. Hazel, la propriétaire des plus petites menottes. À un moment, ça serait bien de lui dire qu'elle sera plus la seule reine du bal. Lequel de moment, il sait pas. Sans doute que ça se fera à l'instant qui sonnera le plus juste, quand il seront un peu plus certains que le pois est bien accroché là-dedans, qu'il va pas abandonner en début de route, et puis un jour pas comme celui-ci ; un jour sans engueulade. Encore que, ce matin, c'était leur premier coup de torchon depuis qu'ils ont décidé d'aller se faire une cure d'air marin. Le sujet de l'embrouille ? Lui-même il sait plus très bien. Encore un truc à la con, encore les angoisses des caractères qui se frittent et ça fait des étincelles. Par chance et comme souvent, ce départ de feu-ci aura trouvé sa résolution au pieu, et le temps est revenu au beau fixe. Normales saisonnières et regain amoureux. Ce qu'ils peuvent être cons. Là, il lui écrase un baiser furtif derrière l'oreille pendant qu'Hazel raconte ses théories sur les baleines en matant les vaguelettes.
Oui, on va terminer l'histoire de la baleine. Ce soir, c'est promis. Pour l'heure, on est en face d'une affaire bien plus urgente à régler. On a un château, mais sans âme qui y vive. Et une forteresse abandonnée, c'est quand même rudement sinistre quand on y pense. Surtout qu'il y a, il espère, une bande de petits crabes résidant dans les rochers pas loin qui n'attend que ça, d'investir un château de sable érigé par trois glandus blonds.
- « D'moiselle Hazel, vous êtes missionnée pour partir en quête du Roi des Goberts. Attention aux pinces. Tu vises les petits crabes. Et ta mère et moi, on file chercher... »
... soyez bien attentive votre Blondeur et prenez donc ma main pour cette nouvelle et merveilleuse aventure...
- « Madame Floulala Belle-Pince... »
Oui, c'est signé. Alors qu'Hazel taille vers le récif, il est frappé par les toutes petites empreintes de pas qu'elle laisse dans le sable. Vraiment, ça lui semble minuscule et trop fragile. Il chasse de sa tête l'image de sa fille qui se rétame à l'arrivée et se fracasse le crâne contre un rocher, mais guette quand même la fin de course d'un regard anxieux. Tout à l'heure, dans une de ses phrases, elle a casé le mot « circonvexe ». Jhoannes, il a aucune idée de ce que ça peut trop bien vouloir dire, comme pour toutes les étranges inventions latines qu'elle peut lui sortir, mais n'empêche, tu disais circonvexe à huit ans, toi ? Non, tu pensais qu'à fuguer, faire des parties de gobilles et bouffer. Sans doute qu'elle a raison, la danoise, quand elle dit que vu d'où ils viennent, et vu comme ils sont perchés, et leur somme de conneries communes et singulières, finalement, ils auront fini par pondre un humain qui devrait pas trop mal s'en sortir. Enfin en théorie. Peut-être même un second, s'ils la jouent fine.
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En noir c'est Jhoannes. En vert c'est Caillou, une de ses voix intérieures. Caillou est vil. Et gros merci à JD Griselidis pour la ban.
Ils avaient fait un château de sable à six mains. Les plus petites menottes avaient décidé de l'architecture générale et d'où qu'on mettrait la haute tour. Les plus fines et pâles avaient pensé des murailles pour parer aux attaques des puces de mer et autres monstres marins qui pourraient venir s'échouer dans le coin. Les plus bousillées et attaquées par le sel avaient creusé des douves, que les premières vagues de la marée montante viendraient abreuver dans un léger quart d'heure.
Maintenant c'est terminé, et ils commentent leur chef-d'uvre à trois voix. Le barbu, il enlace la danoise en lançant un regard songeur sur son ventre qui commence à s'arrondir sérieusement depuis quelques semaines. Pour qui sait pas voir, Astana, on dirait pas forcément qu'elle a un pois dans le tiroir. Et puis il faudra en parler à la gamine, aussi. Hazel, la propriétaire des plus petites menottes. À un moment, ça serait bien de lui dire qu'elle sera plus la seule reine du bal. Lequel de moment, il sait pas. Sans doute que ça se fera à l'instant qui sonnera le plus juste, quand il seront un peu plus certains que le pois est bien accroché là-dedans, qu'il va pas abandonner en début de route, et puis un jour pas comme celui-ci ; un jour sans engueulade. Encore que, ce matin, c'était leur premier coup de torchon depuis qu'ils ont décidé d'aller se faire une cure d'air marin. Le sujet de l'embrouille ? Lui-même il sait plus très bien. Encore un truc à la con, encore les angoisses des caractères qui se frittent et ça fait des étincelles. Par chance et comme souvent, ce départ de feu-ci aura trouvé sa résolution au pieu, et le temps est revenu au beau fixe. Normales saisonnières et regain amoureux. Ce qu'ils peuvent être cons. Là, il lui écrase un baiser furtif derrière l'oreille pendant qu'Hazel raconte ses théories sur les baleines en matant les vaguelettes.
Oui, on va terminer l'histoire de la baleine. Ce soir, c'est promis. Pour l'heure, on est en face d'une affaire bien plus urgente à régler. On a un château, mais sans âme qui y vive. Et une forteresse abandonnée, c'est quand même rudement sinistre quand on y pense. Surtout qu'il y a, il espère, une bande de petits crabes résidant dans les rochers pas loin qui n'attend que ça, d'investir un château de sable érigé par trois glandus blonds.
- « D'moiselle Hazel, vous êtes missionnée pour partir en quête du Roi des Goberts. Attention aux pinces. Tu vises les petits crabes. Et ta mère et moi, on file chercher... »
... soyez bien attentive votre Blondeur et prenez donc ma main pour cette nouvelle et merveilleuse aventure...
- « Madame Floulala Belle-Pince... »
Oui, c'est signé. Alors qu'Hazel taille vers le récif, il est frappé par les toutes petites empreintes de pas qu'elle laisse dans le sable. Vraiment, ça lui semble minuscule et trop fragile. Il chasse de sa tête l'image de sa fille qui se rétame à l'arrivée et se fracasse le crâne contre un rocher, mais guette quand même la fin de course d'un regard anxieux. Tout à l'heure, dans une de ses phrases, elle a casé le mot « circonvexe ». Jhoannes, il a aucune idée de ce que ça peut trop bien vouloir dire, comme pour toutes les étranges inventions latines qu'elle peut lui sortir, mais n'empêche, tu disais circonvexe à huit ans, toi ? Non, tu pensais qu'à fuguer, faire des parties de gobilles et bouffer. Sans doute qu'elle a raison, la danoise, quand elle dit que vu d'où ils viennent, et vu comme ils sont perchés, et leur somme de conneries communes et singulières, finalement, ils auront fini par pondre un humain qui devrait pas trop mal s'en sortir. Enfin en théorie. Peut-être même un second, s'ils la jouent fine.
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En noir c'est Jhoannes. En vert c'est Caillou, une de ses voix intérieures. Caillou est vil. Et gros merci à JD Griselidis pour la ban.