Jhoannes
Une heure avant les Matines, un petit capuchon fuguait du monastère. Un petit capuchon pas bien fier, qui allait faire sa prière, loin des dogmes, près des arbres, le ventre plein de bière et à sa seule manière. Peut-être qu'une prière envoyée au ciel ou dans la terre ne remuerait ni l'une ni l'autre, mais il pensait que cela n'avait pas d'importance : c'était l'acte qui comptait, et pas les résultats. Une pensée concentrée sur l'autre, ramassée en petits grains de bienveillance, un temps qu'on ôte de soi pour le donner à quelqu'un, où l'on est acteur d'un vu, et non pas l'impatient d'un miracle.
Il posa la lanterne sur un tapis de feuilles mortes et le dos tourné à la silhouette lointaine de l'édifice religieux, protégé par la largeur d'un tronc on peut brûler pour ces conneries, commença à agiter patiemment ces mains pour élever une construction en petit bois qui serait détruite avant l'aube, assembler les brindilles sèches, faire jouer l'amadou pour faire naître un petit feu contenu par le froid de la saison. Il était renfermé sur lui-même, dans un nid de pensées coupables. Sa petite voix intérieure, Caillou, aurait joliment bouclé son raisonnement par un « Tu merdes », mais Caillou n'était plus là depuis longtemps.
Minuit sonna. C'était le signal. Blondin déposa un petit fagot de bruyère sèche dans le ventre des flammes, et si la destinataire de cette prière n'avait pas oublié ses paroles, elle faisait brûler une bruyère jumelle au même instant, bien plus au nord. Simplement, à la lueur totalement absente de la nouvelle lune, il croisa ses doigts entre eux et se recueillit. Il pria en silence pour le cur d'Ermelne, fendu, et pour son ventre, qui donna la mort. Pour que la lézarde se ferme et pour que les jours redeviennent fertiles, si ce n'est en gosses, au moins en sourires.
Pour que peine passe, au rythme du temps.
Que les croisées de son destin apportent lumière.
Pour adjurer les versants de malheur,
Et appeler son âme à trouver routes sereines.
Longtemps il pria. Parfois son esprit battait les champs pour revenir à lui, en lui, et alors il le rappelait à l'ordre. C'était vers cette jeune femme qu'elles devaient aller, à laquelle il n'avait réellement causé qu'une seule fois. Il n'avait pas idée du poids qu'elle portait, mais en avait deviné les traces. Ermelne et sa maigreur maladive, son teint de cierge oublié sous un banc d'église et son histoire triste, racontée à petite voix. Quand ses pensées se mirent à se rebeller de plus en plus fréquemment contre la laisse d'une litanie, il prononça un dernier vu, et enterra les cendres de bruyère sous la terre humide.
Là, il fallait retourner dans l'enceinte du monastère, au présent, près de sa fille, et sa cellule sans aucun miroir et pour ce détail il rendit grâce à un esprit dont on taira le nom.
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Il posa la lanterne sur un tapis de feuilles mortes et le dos tourné à la silhouette lointaine de l'édifice religieux, protégé par la largeur d'un tronc on peut brûler pour ces conneries, commença à agiter patiemment ces mains pour élever une construction en petit bois qui serait détruite avant l'aube, assembler les brindilles sèches, faire jouer l'amadou pour faire naître un petit feu contenu par le froid de la saison. Il était renfermé sur lui-même, dans un nid de pensées coupables. Sa petite voix intérieure, Caillou, aurait joliment bouclé son raisonnement par un « Tu merdes », mais Caillou n'était plus là depuis longtemps.
Minuit sonna. C'était le signal. Blondin déposa un petit fagot de bruyère sèche dans le ventre des flammes, et si la destinataire de cette prière n'avait pas oublié ses paroles, elle faisait brûler une bruyère jumelle au même instant, bien plus au nord. Simplement, à la lueur totalement absente de la nouvelle lune, il croisa ses doigts entre eux et se recueillit. Il pria en silence pour le cur d'Ermelne, fendu, et pour son ventre, qui donna la mort. Pour que la lézarde se ferme et pour que les jours redeviennent fertiles, si ce n'est en gosses, au moins en sourires.
Pour que peine passe, au rythme du temps.
Que les croisées de son destin apportent lumière.
Pour adjurer les versants de malheur,
Et appeler son âme à trouver routes sereines.
Longtemps il pria. Parfois son esprit battait les champs pour revenir à lui, en lui, et alors il le rappelait à l'ordre. C'était vers cette jeune femme qu'elles devaient aller, à laquelle il n'avait réellement causé qu'une seule fois. Il n'avait pas idée du poids qu'elle portait, mais en avait deviné les traces. Ermelne et sa maigreur maladive, son teint de cierge oublié sous un banc d'église et son histoire triste, racontée à petite voix. Quand ses pensées se mirent à se rebeller de plus en plus fréquemment contre la laisse d'une litanie, il prononça un dernier vu, et enterra les cendres de bruyère sous la terre humide.
Là, il fallait retourner dans l'enceinte du monastère, au présent, près de sa fille, et sa cellule sans aucun miroir et pour ce détail il rendit grâce à un esprit dont on taira le nom.
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