Afficher le menu
Information and comments (0)

Info:
Unfortunately no additional information has been added for this RP.

[RP] Vers le pays des rêves, cet autre monde

Takoda
“On peut fort bien pratiquer des opérations chirurgicales douloureuses sans anesthésier le patient à condition de se mettre du coton dans les oreilles.” (François Cavanna)


Ding Dong. Sur les coups de minuit, Blondin fait son apparition dans le cabinet. Rapidement il vire sa cape, pas l'temps d'niaiser, pour rester en simple chemise blanche. Sous le lin, la nausée. Au centre des yeux noirs, des pupilles dilatées. Est-ce que cet homme a déjà commencé à fumer des trucs pas nets ? Oui. Clairement oui.
Thaïs, concentrée sur ses notes, notes qu'elle relit depuis le début de soirée, encore et encore pour ne rien laisser au hasard, lève le nez.


JHOANNES — Belle cousine bonsoir.
THAÏS — Jhoannes.
JHOANNES — Vous allez bien ?
THAÏS — Je vais. C'est suffisant. Vous pouvez vous asseoir, si vous le voulez.


Son derche atterrit sagement dans le fauteuil médical. Il commence déjà à se préparer une autre pipe. Dire adieu à sa conscience, c'est son projet.
La rouquine se lève donc, dépliant sa petite carcasse avec lenteur, et va chercher deux préparations dans un placard.


THAÏS — Vous avez pu parler avec Hazel ?
JHOANNES — Ne me demandez pas lequel de nous deux a le plus rassuré l'autre par contre…


Il sourit doucement, et remarque qu'il tremble un peu, en tassant son chanvre.
Thaïs étire un sourire et pose ses petits flacons, qui s'entrechoquent dans un petit bruit de verre, à proximité.


THAÏS — Tout va bien aller.
JHOANNES — Vous rassurez qui là ?
THAÏS — Vous.


Jhoannes sourit plus large et avise les flacons.

JHOANNES — C'est pour moi ?
THAÏS — C'est pour vous. Faites voir votre main, s'il vous plaît.


Il détache sa mitaine et lui tend la papatte, en observant toujours les drôles de liquides.
Thaïs prend délicatement la main qu'il lui présente, et la masse énergiquement dans des mouvements circulaires.


JHOANNES — Je dois les boire maintenant ?
THAÏS — Non. Vous n'allez pas les boire du tout. C'est du jus de jusquiame et du jus de mandragore. Je vais les mettre sur de la mousse et vous allez les respirer.
JHOANNES — J'peux pas en boire quelques gouttes directement... ?
THAÏS — C'est trop dangereux de les boire.


Jhoannes fronce le museau.

THAÏS — Ne faites pas cette tête.
JHOANNES — Ce soir j'ai le droit de faire toutes les têtes.
THAÏS — D'accord.


Jhoannes lui tire une langue mignonne et se lève, le temps d'allumer sa pipe, puis de reprendre place.
Thaïs relâche donc la main et se retourne pour imbiber de nouveau son éponge soporifique.
Jhoannes aspire de loooooooooongues taffes. Les plus longues de sa vie. Il toussote mais recommence.


THAÏS — Vous avez mis quoi ?

Fraîchement rebaptisée d'Assay, va chercher l'eau qui bout depuis un moment sur le feu à présent.

JHOANNES — Du chanvre et ce qui me restait de pavot. C'est-à-dire pas grand chose.
THAÏS — Bien, c'est efficace.


La médecin prend ensuite un gobelet d'eau chaude et détrempe l'éponge.

THAÏS — Mettez ça sur votre nez et votre bouche, respirez profondément.

Jhoannes s'empare de l'éponge et l'observe, cette éponge. Puis Thaïs.

JHOANNES — C'est parti pour le pays des rêves ?
THAÏS — Oui.
JHOANNES — Je vous interdis de noter mes prochaines déclarations dans un carnet. Et merci, tant que je peux encore vous le dire.
THAÏS — Je serai concentrée, je promets de ne rien noter. Et de rien. C'est tout à fait normal. Allez.
JHOANNES — Non m-... Oui oui, j'y vais…


Jhoannes lui claque beau sourire.

JHOANNES — Au revoir belle cousine.

Thaïs étire un tout petit sourire.

THAÏS — À tout à l'heure.

Soudain plus silencieux, il se met à renifler l'éponge, à grandes inhalations régulières. Pressé d'arriver au pays des rêves.
_________________

Merci à JD Nessia pour cette merveille.
Jhoannes
THAÏS — C'est bien, vous vous débrouillez parfaitement.
JHOANNES — Ah... les drogues... toute une jeunesse...
THAÏS — ça vous rappelle des choses.
JHOANNES — Pas si lointaines malheureusement… Krkr.
THAÏS — Vous pouvez vous mettre bien au fond du fauteuil, contre le dossier.


Korydwen attrape de nouveau la main et reprend son massage plus doucement.
Jhoannes la regarde plus sérieusement par-dessus son éponge, sniffant toujours.


JHOANNES — Vous allez devoir me sangler, hein.
THAÏS — Je vais attendre un peu avant de faire ça.
JHOANNES — Mais vous ferez. Il faudra.
THAÏS — Vous voulez un truc dans lequel mordre ?
JHOANNES — Non.
THAÏS — De l'alcool ?


Vif hochement de trogne. Oui.
Thaïs se relève, posant la main délicatement.
Elle attrape un cruchon de Chartreuse, rien de tel pour passer dans un autre monde, et le pose près de lui.
Après avoir murmuré un merci, le barbu garde le museau plaqué contre la mousse, et ferme les yeux un instant. Il alterne sa phase de shoot jusquiame/mandragore avec des bouffées de pipe, pour mettre toutes les chances de son côté.


THAÏS — Donnez l'éponge.
JHOANNES — Déjà... ?


Jhoannes lui fait des yeux de chiot. Battu, le chiot. Abandonné au fond d'une ruelle.

THAÏS — Je réimbibe
JHOANNES — Oh.


La rousse fait donc son office, augmentant de deux gouttes chacun des jus, et attrape soudain un autre flacon, qu'elle ajoute au reste des liquides déjà imprégnés dans la mousse : jus de laitue. Elle se réaffaire à plonger le tout dans le gobelet d'eau chaude et le lui rend.
Toujours l'éponge sous les naseaux, il tente de maîtriser son souffle, même s'il sent qu'il tremblote, un peu, dedans, déjà.
Thaïs, de son côté, se rassoit sur le petit tabouret non loin, et récupère la main, sans lui dire, qu'elle essaie de fixer dans sa tête chaque relief de cette dernière.


THAÏS — Détendez vous. Je veille.

Jhoannes sourit doucement et déglutit.

JHOANNES — Je sais.

Il se sent bizarre. Le début des effets. La montée est douce et traîtresse. Non pas que ses tripes s'affolent moins à l'intérieur, mais l'arrière de sa tête commence à se reposer contre le dossier.

THAÏS — C'est bien, détendez vous.

L'observant et constatant que le corps se fait plus serein, la jeune femme attrape la ceinture qui lui sert de sangle et fixe sans violence cette dernière autour du bras du blond.
Jhoannes a un geste de recul, qu'il maîtrise ensuite rapidement. Réflexe.


THAÏS — Chut, doucement.
JHOANNES — Pardon.


Thaïs pose sa main sur sa joue, comme un baume rassurant.

THAÏS — ça va allez, ce n'est que moi. Je ne vais pas vous violenter.

Jhoannes hoche légèrement. Il dit qu'il sait, et s'excuse encore. Pardon.
D'Assay en profite pour regarder ses pupilles.


THAÏS — Respirez, encore.
JHOANNES — Même Astana avait du mal à m'attacher cette main au pieu quand on faisait des trucs cochons.


Il ne remarque pas que la confidence est potentiellement déplacée, non. C'est le début des festivités.
Thaïs a un léger rire nerveux, se dit que ça ne va pas être de la tarte mais ne rebondit pas. Peut-être par pudeur, peut-être pas, toujours est-il, qu'elle ne le fait pas.


JHOANNES — Krkrkr. C'est vrai.
THAÏS — Respirez Jhoannes.


Rousse cabèche se lève une fois de plus et va chercher une fiole, pavot macéré, pour en verser deux gouttes dans un peu de vin.

THAÏS — Buvez.

Jhoannes abandonne l'éponge près de la pipe et boit son remède, d'une traite. Il est gâté.
La médecin a bien l'intention de l'assommer, s'il savait.

_________________
Takoda
JHOANNES — C'est du Bourgogne ?
THAÏS — Cahors. Encore.
JHOANNES — Vous êtes une femme de goût.
THAÏS — Mmmh mmh.
JHOANNES — Même pour les hommes dans l'ensemble vous avez du goût quand même.
THAÏS — Ah oui ?


Thaïs en a profité discrètement pour rapprocher ses instruments.
Jhoannes acquiesce en silence. Ce qu'elle ne voit pas, mais il ne s'en rend pas compte. Il est occupé à s'enfumer à nouveau le museau.
D'un geste que lui non plus, n'a pas du remarquer, chacun étant dans son monde, la rousse attrape son scalpel, avant de tâter l'auriculaire pour trouver le bon endroit.
Blondin dodeline... et rattrape sa pipe avant qu'elle ne tombe des mains. D'accord, le geste est devenu trop technique pour son état. Abandon maladroit de pipe sur la table.


THAÏS — Sans doute.

Thaïs s'arrête, a trouvé. Repassant lentement le doigt sur l'endroit, pour être sûre, elle détaille avec application, ici le tendon, ici le vaisseau sanguin et là, l'os en question.
Affalé dans le fauteuil tel le plus gracieux des dandys opiomanes, il suit la gestuelle. Il comprend, mais tout est plus lointain, ou distordu. Même la peur. Pour l'instant.
Anciennement D'Ambrois l'observe, et elle le voit commencer à sombrer, alors que la discussion se poursuit.
Jhoannes se concentre pour écouter, mais sent sa respiration s'alourdir et ses sourcils se froncer au fil de la discussion qui se poursuit. Il n'en capte plus que des bribes, trop concentré sur ce qu'elle se prépare à faire.
La Limougeaude pose la lame et entaille de façon nette, sans hésiter une seconde, et surtout avant qu'il ne se rende trop compte.
Ses sourcils se froissent davantage. Il a senti. Mais les entailles nettes, c'est loin d'être les pires.


JHOANNES — Pas comme Vran hein...
THAÏS — Je ne suis pas lui. Vous le savez. Vous me faites confiance.


Jhoannes remonte ses billes sur elle. Ah oui c'est vrai.

JHOANNES — Hum.

Jhoannes regarde le sang à son doigt. C'est très rouge, ce sang. Il finit par fermer les paupières. C'est trop rouge, là. Vertigineux.

JHOANNES — Faut pas faire comme Vran.

Jhoannes répète, pour être bien sûr.
Thaïs éponge avec des bandelettes et écarte les chairs avec délicatesse, utilisant cet instrument à la moitié entre pince et ciseau, qui sera sans doute l'ancêtre des écarteurs actuels, essayant de ne pas trop triturer les tendons pour lui épargner la douleur.


THAÏS — Promis, je vais essayer de faire ça doucement.

Sa main au blond commence instinctivement à tenter de rebrousser chemin le long de l'accoudoir. Merci la sangle.

THAÏS — Jho, parlez-moi. Racontez- moi une histoire d'avec Maleus.

Thaïs éponge de nouveau, le sang ne lui permettant pas de voir ce qu'elle veut, et cherche le bout d'os ennuyeux qu'elle a senti plus tôt sous ses doigts.

JHOANNES — Maleus est un gros chaton triste comme ses pieds. Parce qu'il a perdu Matalena.
THAÏS — Chouette.
JHOANNES — C'est vrai.


Jhoannes respire fort, et commence à délirer un peu fort quand même.
Korydwen chope sa pince, la petite avec des bouts fins et un peu pointus et écarte le tas de chairs qui clairement, ne lui rend pas service et finie par arriver au lieu désiré. L'os pointu qui provoque l'affliction dont il souffre.


THAÏS — Ne bougez surtout pas.

Il lâche une plainte de douleur. On a bien senti, ça, quand elle a trituré dans le vif dans son moignon d'auriculaire.

JHOANNES — Si je vais à Genève. Parce que je préfère être seul dans les montagnes qu'ici.
THAÏS — Oui. J'avais saisi, que vous vouliez être seul.
JHOANNES — Je suis tout le temps tout seul. Et vous aussi. Et les autres aussi.


La rouquine éponge, comme un geste machinal, sans réfléchir.
Jhoannes détourne un peu la tête et attrape un truc qu'il sent sous ses doigts. Le talisman d'Hazel qui pend à son cou. Porte-bonheur temporaire confié il y a une heure à peine. Petit rectangle de tissus entre ses doigts rassurant.
Thaïs attrape alors silencieusement son petit maillet et une sorte de burin, et les place pour l'opération taille d'os. Détourner son attention, maintenant.


THAÏS — Je ne suis pas toujours seule.

Et elle tape, un grand coup, pour faire disparaître cette pointe. Cette pointe qui n'a rien à faire là et qu'on lui a demandé de réduire à peau de chagrin. Thaïs tape, fort, il faut que la section soit nette.
_________________

Merci à JD Nessia pour cette merveille.
Jhoannes
Jhoannes pousse un cri d'écorché, sans retenue. C'est comme si tous ses os étaient en train de vibrer. À l'intérieur de lui, il a entendu le morceau de phalange se fendre quand cette dernière s'est éclatée. Le pic de douleur perce dans tous les nerfs, et ne redescend pas. Le barbu se recroqueville comme il peut dans le côté opposé du fauteuil, en tirant sur la sangle. Et puis il se met à chialer dans sa mitaine droite.
Thaïs, qui n'avouera jamais que ça lui brise le cœur sur l'instant, relâche les instruments à toute vitesse, posant sa main sur l'avant bras du blond pour le calmer. Elle ne supporte pas de le voir souffrir ainsi, et se retient de lui emboîter le pas dans les larmes. Mais, il faut qu'elle reste concentrée, et qu'elle finisse. Après, elle pourra craquer. Respirer, calmer.


THAÏS — Je sais, je sais. ça va… Calmez vous… doucement.

Tout ramassé sur lui-même, il sanglote. La souffrance lui vrille encore le crâne et résonne dans son squelette. On peut aussi mettre ça sur le dos des drogues. Que le geste remue beaucoup de trucs, qu'il rappelle une douleur ancienne. Et que ce mec en a gros sur la patate depuis des plombes. Bref, ça sort là.

THAÏS — Chut, chut. Je termine. C'est bientôt fini.

Il renifle et hoquète. Depuis son nouveau monde ça veut dire : oui j'ai bien entendu, j'ai compris.
La médecin relâche le bras et se hâte, plus elle ira vite, moins il hurlera, et moins cela la perturbera. Elle saisit donc une bande, éponge pour la énième fois et se munit de la pince. L'instrument vient retrouver les chairs à nues, pour lui permettre de sortir le morceau qu'elle vient de détacher. Les yeux sont concentrés, elle ne doit pas laisser de débris.


THAÏS — Respirez Jhoannes, respirez. Écoutez ma voix. Tout va bien.

Jhoannes s'y accroche, à la voix, parce qu'il n'est pas en état de dire grand chose, là.
Thaïs continue d'œuvrer, vérifiant ensuite, que rien ne vient encore peser sur la peau pour le blesser, et après un instant, la rousse décide de limer la partie encore un peu acérée qu'elle vient de créer. Elle éponge, encore une fois, encore machinalement comme un geste refuge qui lui permet de réfléchir.


THAÏS — Vous vous en sortez bien. Vous êtes fort.

La petite lime ronde est saisie rapidement et va venir se placer sur la surface. Et c'est sans à-coups qu'elle s'active avec cette dernière, doucement. Doucement, elle lime l'aspérité.
Jhoannes lâche d'autres plaintes de douleur sourdes pendant qu'elle lime, mais l'impact de la précédente aura pour bénéfice de noyer (un peu) celles qui viennent ensuite. Sa main droite, la saine, est agitée de soubresauts.
La seconde main de Thaïs vient donc se poser sur la main tremblante, et la rousse glisse son index sur un point précis, situé entre le pouce et l'index du blond justement. Une fois trouvé, elle presse avec force le dit point.


THAÏS — Vous vous souvenez ce point. Je vous l'ai appris à Roche.

D'Assay relâche la lime et après avoir imbibé un linge propre, nettoie ce qu'elle vient de limer avant d'éponger à nouveau.
Il regarde le point, en tentant de ravaler sa morve. Sans grand succès. Et puis il hoche doucement.


JHOANNES — C'était joli Roche.

Thaïs sourit, nostalgique de cet instant volé, chose qu'elle n'admettra qu'à demi-mot et observe de nouveau son ouvrage.

THAÏS — C'était un beau moment oui.

Rousse cabèche estime alors que c'est suffisant et éponge une dernière fois avant de commencer à replacer les chairs et les tendons avec douceur. L'une après l'autre, chaque tissu reprend sa place.
La bouille à nouveau tordue par le mal, tout crispé qu'il est, il cherche le regard de Thaïs pour lui préciser, au cas où elle serait pas au courant - t'as raison on sait jamais Blondin :


JHOANNES — J'ai mal.
THAÏS — Je sais. Vous voulez boire ?
JHOANNES — Oui je veux.


Patiente, la jeune femme pose sa pince, et attrape le cruchon, qu'elle débouche avant de lui tendre.

THAÏS — Chartreuse, faites-vous plaisir.

Jhoannes tente un sourire, ça donne rien mais l'intention est là et prend une rasade. Qu'il ne sent pas. Alors il prend une autre rasade et repose vite la bouteille avant que sa main ne la lâche.
N'ayant toujours pas redémarré son travail, la Maître troubadour, amorti l'arrivée de la bouteille et la repose doucement. Sa main se passe alors sur le front, vérifiant la température, avant de redescendre sur la pommette, les yeux rivés sur les pupilles... Dilatées, bien entendu.


THAÏS — C'est bon n'est-ce pas ?

Thaïs ayant constaté qu'elle peut continuer sans souci, reprend donc son travail, éponge le sang qui pourrait la gêner pour voir, replaçant tout comme elle l'a mémorisé.
Il semble ne pas trop comprendre. D'un drôle de coin de sa conscience, il lui vient une saillie toute bienveillante et sarcastique. L'humour, dernier rempart contre les instants de merde. Avec les antidouleurs. Ne faites pas ça chez vous.


JHOANNES — Non mais j'vois bien que vous prenez votre pied belle cousine.
THAÏS — Quoi ?
JHOANNES — Krkr.


La médecin fronce le pif, le regarde un tout petit instant et secoue la tête... il délire !
_________________
Takoda
THAÏS — Oui, ça doit être ça.

Thaïs, petit sourire sur les lippes, enfile son aiguille, et s'apprête à piquer, avant de réaliser qu'il y a encore une étape. Ne pas se laisser distraire par les délires de Jhoannes, reprendre le court de l'opération.

THAÏS — Je referme. ça va piquer, mais vous aurez la plus belle couture qui soit.

La rouquine s'empare soudain du cruchon avant de suturer et vide une petite dose de Chartreuse sur la plaie pour la désinfecter.

JHOANNES — Peut-être on pourrait-

Jhoannes exprime sa douleur. ça carbonise, la langue de l'alcool dans les chairs. Il hurle encore.
D'Assay éponge le liquide en tapotant doucement sur la plaie.


THAÏS — On pourrait ?

Reprenant son aiguille, Thaïs entreprend de faire de belles sutures, toute couturière qu'elle est.
Du poing il cogne sur l'autre accoudoir, plusieurs fois, le temps que la sensation de brûlure redescende comme elle est venue, et peu à peu endorme sa viande, pour un petit temps de soulagement.


JHOANNES — Raaaaaaaa saloperie.
THAÏS — Peut-être on pourrait… Concentrez vous.
JHOANNES — ... tailler des petits vêtements pour les moignons. Comme ça ils seraient en sécurité et un peu drôles.


Les coins des lèvres s'étirent dans un léger sourire, indiquant l'amusement et Thaïs termine le premier point, avant de couper le premier fil.

THAÏS — Oui, c'est une idée.
JHOANNES — Et des petits chapeaux à plume.


Anciennement D'Ambrois, refait le nœud. Thaïs pique, et c'est parti pour la seconde suture.

JHOANNES — Je pourrais donner des specta-aïe-cles.
THAÏS — Demandez à Hazel pour les chapeaux. Je suis certaine que ça l'amusera.


Jhoannes sourit à la mention de sa fille, rapidement.
Thaïs noue, referme la phalange peu à peu et enfin...coupe le second fil. Et elle enchaîne sur la troisième couture aussi sec.


THAÏS — Avec de la couleur, ce serait super.
JHOANNES —Du rouge et du vert.


La rousse, terminant le point en cours, coupe une fois encore le fil.

THAÏS — Du rouge et du vert. Oui.

La médecin s'active et termine enfin le troisième point.

THAÏS — Voilà.

Thaïs coupe le dernier fil, achevant de refermer les chairs.

THAÏS — Je nettoie. Et je vous fais le pansement.
JHOANNES — Quand j'étais petit je passais le balai dans l'atelier.
THAÏS — Mh ? L'atelier de ?
JHOANNES — Du mari de ma maman.


La jeune femme imbibe ensuite une bandelette de Chartreuse.
Jhoannes tente de calmer sa respiration, à grandes inspirations, et se cogne les premières sueurs froides. Tous les meubles de la pièce ont l'air bizarres. Le plafond aussi. Ce fauteuil est suspect. Le feu qui ronronne dans l'âtre est presque menaçant. Le visage de Thaïs est un phare aux loupiotes vertes dans une mer louche.
Thaïs loin d'être consciente de la bizarrerie de l'environnement de son côté, pose la bandelette sur la plaie, et s'attendant à une réaction instantanée, tente la diversion.


THAÏS — Respirez ! Le mari de votre maman alors. Comment s'appelait-il ?
JHOANNES — Dans ma tête je l'appelais : Branlecouille. Mais je savais pas ce que ça voulait dire, juste que c'était pas gentil.


La rouquine pose sa main libre (la senestre) à plat sur son avant bras, et la glisse doucement pour lui faire oublier que la désinfection peut être désagréable.

THAÏS — Il était méchant donc ?

Elle s'applique donc de l'autre main avec la compresse, appuyant le tissu d'un bout à l'autre par touche.
Jhoannes frissonne un peu et opine doucement, le regard dans le vide.


JHOANNES — Il avait pas une jolie couleur dedans.
THAÏS — Et dehors non plus je présume.


Thaïs arrête son mouvement, reposant la compresse d'alcool et attrape une bandelette propre.

JHOANNES — Non. ça traînait derrière lui.
THAÏS — Accroché. Mh.


Korydwen panse la main délicatement à présent, enroulant le tissu autour de la main tour après tour.

THAÏS — Et elle, comment était-elle?
JHOANNES — Maman ?
THAÏS — Oui.
JHOANNES — Je crois qu'elle m'aimait bien mais que je la rendais triste. Mais elle avait une plus jolie couleur.
THAÏS — Quelle couleur ?


Thaïs fini par fixer le pansement sur le poignet avec une fibule.
Il plisse le front, parce qu'il n'y avait jamais sérieusement réfléchi, et décrit la première qui lui vient en tête.


JHOANNES — Un bleu... mais loin, presque effacé.
THAÏS — Un bleu pâle.
JHOANNES — Hum.


Jhoannes hoche. Au top de la répartie.
Les yeux verts rivés sur le visage, les doigts habiles désanglent tout doucement le bras.


JHOANNES — Il fait froid.

Thaïs toujours le regardant.

THAÏS — C'est la descente.

Jhoannes regarde son bras, puis sa main bandée, et comprend peu à peu que c'est fini, quelque part.

THAÏS — Vous voulez une couverture?
JHOANNES — Je veux bien. Je suis fatigué.

_________________

Merci à JD Nessia pour cette merveille.
Jhoannes
THAÏS — Oui, c'est normal.

D'Assay se lève et nettoie ses mains dans l'eau du baquet, avant d'aller lui chercher une couverture.

THAÏS — Vous allez vous enrouler là-dedans. Nous allons attendre un poil, et je vous ramènerai.

Jhoannes n'enroule pas la couverture autour de lui mais se rapetisse lui pour s'enrouler dedans, c'est un concept.

JHOANNES — Chez moi c'est bien. Hazel pense que j'y serai demain.
THAÏS — Vous avez un fauteuil où je puisse passer la nuit ?
JHOANNES — J'ai des chambres mais il y a un fauteuil dans la mienne.
THAÏS — Parfait, je ne vais pas dormir. Je vais vous surveiller.
JHOANNES — Vous allez m'empêcher de fumer comme je veux…


Il l'accuse avec des yeux d'enfant.

THAÏS — Non. Mais… il vaudrait mieux dormir.

A son tour, c'est elle qui subit la descente, Thaïs ne peut réprimer un tremblement de main réflexe, et étend ses doigts.

THAÏS — Ce n'est l'histoire que d'une nuit. Laissez moi faire et tout ira bien.

La rouquine attrape le cruchon et avale une goulée, prenant conscience enfin, de ce qu'elle vient de faire, et ce à quoi elle se préparait depuis des jours.

JHOANNES — Il y a des fleurs dans l'entrée du manoir. C'est pour vous.

Moment d'arrêt dans la tête rousse, silence et première réponse: reprendre une seconde gorgée. La seconde, verbale arrive un instant après:

THAÏS — Euh… merci.

Puis, Thaïs décide de boire de nouveau pour se donner une contenance majoritairement.

THAÏS — Il ne fallait vraiment pas.
JHOANNES — C'est peu. Je taillais celles dans mes pots tout à l'heure, j'ai mises celles-ci de côté pour vous.


Korydwen étire un petit sourire et range machinalement ses instruments. Se concentrer sur ça, ne pas rougir et se contenter de la petite victoire de la soirée, l'opération est faites.

THAÏS — C'est gentil. Comment ça va , là tout de suite ?

La rousse nettoie la pince, puis le burin, l'air absent.

JHOANNES — J'ai mal de loin. Je suis très fatigué.
THAÏS — Je vais vous ramener alors.


Thaïs finit par le scalpel, le reposant sur le plateau. La jeune femme se tourne de nouveau vers lui, et pose sa main sur son front.

THAÏS — Mh. Acceptable.
JHOANNES — C'est la plus gentille chose qu'on m'ait dite.


Jhoannes a annoncé ça avec tout le sérieux du monde, depuis le pays des rêves. C'est agréable de se sentir accepté.

THAÏS — Quoi ?

Thaïs percute qu'il est loin, soudain.

THAÏS — Allez, on se lève.

Son front se plisse sous l'ordre, parce que ça a l'air désagréable, de se lever. Sous la couverture, c'est un peu chaud et rassurant. Hors la couverture, c'est froid et fatigant.

JHOANNES — Ah bon ?
THAÏS — Doucement, et vous vous appuyez sur moi.
JHOANNES — Et ma béquille aussi comme ça je vous écrase pas quand même.


Jhoannes prend une inspiration et se lève. Oula. Trop vite. Pouce.

THAÏS — Doucement j'ai dit.
JHOANNES — ça tournicotille.


Thaïs attrape son bras pour éviter qu'il ne bascule.

THAÏS — Là, prenez la béquille, elle est près de vous.

Lui fait-elle en désignant l'objet, alors qu'elle l'assiste le temps qu'il se cale.
À tâtons il finit par caler la béquille sous son aisselle comme il peut. ça prend un petit temps. Ensuite il déclare, avec une ombre de fierté dans la voix :


JHOANNES — J'ai pas vomi.
THAÏS — Oui… Vous avez été courageux.
JHOANNES — Moins que vous.


Léger grognement en réponse et la rouquine enroule le bras blessé autour de ses épaules afin de servir de soutien.
Jhoannes lui appuie un gros bécot contre la joue et cligne. Si si, elle a été grave courageuse.


THAÏS — Mais non, mais non.
JHOANNES — Si si si.
THAÏS — On va y aller tranquillement.
JHOANNES — Si on croise des méchants courez devant, je les retiendrai en disant des bêtises.
THAÏS — Mais bien sûr. Et moi, je vous abandonne. C'est ça. Quelle bonne idée! ça va ?
JHOANNES — Oui ça va…


Il opine en regardant ses pieds. La bonne idée.

JHOANNES — On est loin ?
THAÏS — Un peu.
JHOANNES — Oh.
THAÏS — Mais... Gustave attend dehors, avec une charrette.
JHOANNES — Oh.
THAÏS — Vous n'avez qu'à aller jusqu'à la porte.


Blondin béquille jusqu'à cette surface dure qui rencontre son front. La porte.

JHOANNES — Oh. C'est la porte.

Thaïs ne peut réprimer un rire.
Jhoannes tente, de toutes ses forces pratiquement réduites à néant, d'ouvrir ladite porte en tapant dessus avec sa béquille.


THAÏS — Attendez, je vais le faire.
JHOANNES — Hum.


Après un dernier essai non concluant, il abandonne l'affaire. Cette béquille qui ne sait pas ouvrir les portes est parfaitement incompétente. Demain dès la première heure il ira se plaindre au marchand de béquilles. Non vraiment c'est un scandale.
La jeune femme qui l'a laissé essayer, sachant parfaitement que ça peut être délicat pour son ego si elle ne le laissait pas faire, ouvre donc la porte.


THAÏS — Voilà. Encore quelques pas, et charrette !
JHOANNES — Krkr. Charrette...
THAÏS — Doucement. Je peine à vous suivre.


C'est du moins ce qu'elle lui dit, alors qu'en réalité, il n'en est rien du tout.

JHOANNES — J'suis trop fort c'pour ça.

Jhoannes y croit et tout.
Thaïs sourit doucement, n'ira pas le contredire.


THAÏS — Oui.

D'Assay fait signe à Gustave et l'intendant prend alors le relais. Il aide Jhoannes à s'installer dans la charrette, tandis que la rouquine prend place auprès du blond pour le trajet.
_________________
See the RP information
Copyright © JDWorks, Corbeaunoir & Elissa Ka | Update notes | Support us | 2008 - 2024
Special thanks to our amazing translators : Dunpeal (EN, PT), Eriti (IT), Azureus (FI)