Pluie, plumes, paille, farine, boue, ça vous glissait le dessous du pied! La nuit s'en allait vers l'aube, la caserne Savoyarde était de plus en plus comparable à un merveilleux fouillis, un véritable chef d'oeuvre. Nombreux sont les artistes qui ont aurait rêvé de peinturlurer une toile pareille.
Les combats faisaient rage, stables, sans incidences majeures, sinon une coupure ici ou là, fautes de piètres mauvais mouvements et postures. Rien de point pardonnable. À cette époque, on estropiait à la même mesure qu'on s'empiffrait de victuailles chez les nantis, c'était donc chose ordinaire, un vrai bout de quotidien.
Les guerriers noirs continuaient à pourfendre armes et boucliers, ils étaient plus artistes que brigands, à y voir clair. Mais comment pouvait-on s'user de ses yeux lorsque l'adversaire épousait le sombre du coin de mur où il se tenait? Chez les officiers savoyards, on avait la situation bien en main à présent. Les soldats se battaient bien, tentaient de repousser les envahisseurs de maintes manières et obtenaient un succès certain. Mais ils auraient été forts déçus de savoir que c'était voulu. Les hommes aux habits teintés de noirceur ne faisaient que grapiller par ici, tripoter par là, disparraissant lorsque cela s'envenimait un brin trop. On évitait les cavaliers qui galopaient avec bravoure dans la pagaille, on se faisait invisible devant le surprenant canon des militaires. D'ailleurs, on se réorganisait déjà pour aller déranger les manieurs de cet engin explosif. Un petit détour et les tireurs devraient ressortir rapières et écus.
Du côté des lices, le plus grand nombre d'assaillants ricanants s'acharnaient à scinder les vaillants combattants de leur courageuse Capitaine. Enfin, on réussit à tasser Niac archarnée, valeureux Louis et autres soldats à lame fine, ainsi qu'un seul Asiac sur qui on devait se mettre à plusieurs pour lui limiter le coup d'épée qu'il avait vif et ma foi, dangereux. Un chemin s'ouvrit devant la Régente Savoyarde qui se trouva, bref moment, face au clou du spectacle.
Sous ses toges noirs trop petites pour ce qu'elles contenaient, on voyait les muscles saillir. Une masse d'engrenages corporels impressionnants, le genre de chose qu'on ne voit point souvent. Il était grand, très grand, énormément haut. Ses épaules tenaient la comparaison, sur le sens large de la largeur. Un clairon doré au ceinturon, une longue épée bâtarde qu'il tenait d'une seule de ces pattes d'ours, on l'imaginait bien le chef des envahisseurs. On pouvait, qu'à le voir ainsi, songer aux colères terribles que cette créature pouvait engendrer, il était colère, la Ire elle-même. Un gaillard inimaginable et très vrai. Enfin, dur de confirmer sous ses parures noires si c'était un homme ou une femme, mais on pouvait tout de même tenter de deviner. Un colosse. Colossal. Et pas qu'un peu.
Il s'approcha de la Dame, la maitresse actuelle de la fière Savoie. Il n'en fit qu'une bouchée. Pour avoir pris un brin de repos entre les combats, il était frais comme une rose , ou dans son cas, un gargantuesque buisson de rosiers. Le bonhomme la désarma à l'aide de son outil métallique démesuré. Elle, très bonne guerrière pourtant, n'y put rien cette fois, certainement un peu fatiguée par la bataille qu'elle menait depuis un long moment. Le petit Géant rangea sa lame dans son fourreau. N'allait-il pas achever la Régente? Semblerait que non chers amis. L'empoignant doucement puisqu'elle était enceinte, par la taille d'un de ses bras de grizzli, il la chargea sur son épaule. Et ils s'en furent, elle, impuissante, qui ne pouvait que matraquer de ses poings le dos de la côte de mailles qu'il portait sous les tissus noirs.
À travers la symphonique cacophonie de cliquetis des métaux, du hennissement des chevaux, ça se battait toujours. On ne vit pas passer l'ombre entre les ombres, celle qui portait un chargement bien particulier sur son épaule. On évita les lieux où se tenaient les noyaux officieux d'officiers et on entra dans les couloirs principaux de la forteresse savoyarde. Une porte s'ouvrit et se referma. On alluma torches de sa main valide pour faire la lumière sur la situation, puis on déposa délicatement la Dame sur une chaise. Celui qu'on aurait pu désigner comme maître des brigands se détourna de la Régente, semblant chercher quelque chose. Il lui laissait le dos libre, comme en confiance avec celle qu'il avait mesquinement enlevée, mais se tenait quand même entre elle et la porte du bureau de la Capitaine.
L'impressionnant gaillard retira sa capuche pour mieux y voir et on pu ainsi voir son crâne immaculé, rasé de près. Soudain, d'une voix éraillée et caverneuse, méconnaissable, par les multiples combats menées à crier comme un déchaîné, le colosse avoua:
- Tu as à boire?
Je tiens à préciser que tout épisode sanglant a été ignoré de ma narration. J'ai seulement conservé les traces de valeureux combats menés. Je rappelle qu'aucun de mes personnages ne peuvent mourir. J'apprécie tout de même la créativité que certains ont eu à trancher têtes et autres membres du corps. L'histoire n'est point terminée, mais puisque toute bonne chose a une fin, il faudra finir celle-ci en beauté. Continuez à écrire avec passion mais évitez les effusions de sang.