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[RP] L'Artemisium

Ingeburge
Il se déroba.
Typiquement masculin, comme aurait dit l'autre. Peu ravie de cette opinion sexiste qu'elle ne goûtait guère, Ingeburge regarda longuement son ami, son visage d'albâtre ne reflétant pas la moindre émotion, pas la moindre pensée. Il semblait positivement étonné de sa sortie, il ne s'y attendait visiblement pas. Bast, il savait pourtant qu'elle disait toujours ce qui lui passait par la tête. Il sembla ensuite pensif... allait-il enfin livrer le fonds de sa pensée?

Et bien non car il prit la parole et déclara, un peu confusément, qu'il en cachait rien. Elle fronça les sourcils, légèrement, ne comprenant pas tout ce qu'il disait. Ce qui était néanmoins certain, c'est qu'il ne répondrait pas à ses questions, il prétendait ne rein dissimuler.
Et pour ponctuer cette explication alambiquée, cette flagrante dérobade, il changea de sujet, ni plus, ni moins. Et pas n'importe comment, en parlant de ce cadeau qui était l'un des prétextes de sa venue. L'un de ces prétextes qu'il avouait bien volontiers et qu'il mettait en avant, afin de masquer le reste. Car l'opinion d'Ingeburge était faite et elle n'en démordait pas : il lui cachait quelque chose.

Ce fut donc le visage arborant finalement une moue dubitative qu'elle répéta :

— Le cadeau? Je...
Elle se mordit la langue et lâcha enfin :
— Et bien, puisque telle est ta volonté.

Car de nouveau, elle n'était pas dupe : il lui demandait s'il elle voulait voir le présent qu'il lui était destiné alors que c'était lui qui voulait couper court à la discussion houleuse qui s'annonçait. Et en appuyant là où il faut, elle lui démontra que non, elle n'était décidément pas naïve.
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Asdrubaelvect
Et bien allons-y.

Lâcha t-il laconiquement en reprenant la marche, mais en l'orientant cette fois-ci vers la cour où attendait toujours la voiture qui les avait emmenés. Il adressa un signe de tête à l'attention de la nourrice, il n'y avait pas besoin de mot pour lui expliquer qu'elle devait faire son office : garder les enfants -qui étaient à présent bien occupés à jouer ensemble, et qui ne verraient sûrement pas immédiatement l'absence des adultes.

Les expressions du visage d'Inge, il commençait à les connaître et même s'il ne parvenait toujours pas à comprendre, il repérait et analysait. C'était bien là une particularité du Duc qui agissait toujours ainsi avec ceux qui lui étaient proches ; il lui plaisait de pouvoir comprendre et même prévoir les réactions, et avec Inge c'était pour ainsi dire l'enfer tant elle dissimulait bien ce qu'elle ressentait...

Après quelques respirations un peu sonores, qu'on aurait pu -à juste titre- prendre pour des désirs de prendre la parole, il finit par se lancer après avoir trouvé l'assurance, peut-être pas idéale mais c'était déjà cela :


Puisqu'on ne peut décidément rien te cacher, je pense avoir en effet quelque chose à te dire. Je n'étais pas venu consciemment pour cela, et j'insiste sur ce consciemment. Même si cela ne te parait pas essentiel, pour moi ça l'est.

Il lâcha un sourire, droit devant, et reprit bien vite tout en poursuivant leur marche à pas régulier :

J'ai souvent bien du mal à te comprendre -et je pense d'ailleurs que ce sentiment est partagé- mais je tiens à t'affirmer que je ressens une réelle affection envers toi. Parfois j'ai l'impression que nous sommes proches et des fois très lointains alors que toujours je me sens être ton ami.
Je sais que tu es ainsi et que tu demeures relativement éloignée des expressions extérieures et physiques... mais lors des allégeances par exemple, j'ai eu l'impression qu'outre l'aspect purement formel de la cérémonie tu appréciais que nous soyons disons... proche, tu comprends ce que je veux dire ?
Bref, je ne sais jamais comment me tenir face à toi, comment te saluer, comment... Et cela me trouble, cela me met dans des situations inconfortables dirais-je.


Il cessa là, se disant qu'il devenait préférable de ne pas l'inonder sous un flot de paroles. Il continuait à regarder droit devant lui, dédaignant à tourner le regard vers elle par crainte de sa réaction.
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Ingeburge
Ils parvinrent finalement près de la voiture d'Asdrubaelvect. Elle avait écouté ce dernier, quelque peu perplexe et intriguée, ne sachant à quoi s'attendre. Il semblait finalement vouloir dire plus de choses qu'il n'avait encore dit mais elle ne s'attendit pas à cela.

Après s'être légèrement mordillé la lèvre, elle posa sa main délicatement sur le bras d'Asdru et elle indiqua :

— J'ai moi-même beaucoup d'affection pour toi, sache-le. Je sais que je ne suis pas toujours facile et que ce que je garde ce que je ressens la plupart du temps mais ne voit pas là du dédain ou du désintérêt. Et surtout ...
Elle le regarda avec intensité, voulant donner du poids à ce qu'elle s'apprêtait à dire :
— Surtout, ne te comporte pas différemment avec moi, reste-toi même, ne cherche pas à anticiper ce que je vais dire ou comment je vais réagir. Reste-toi, s'il te plaît.
Elle répéta, plus doucement, dans un souffle :
— S'il te plaît. J'en ai besoin. Je n'ai que peu de proches, je veux que ceux-ci restent authentiques avec moi.

Un silence gêné suivit ce qu'elle venait de confier. Elle resta un instant embarrassée et s'exclama, d'un ton qu'elle espéra joyeux :
— Alors! Et ce cadeau?
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Asdrubaelvect
Lorsqu'elle prit la parole il tourna le regard vers elle car à présent libéré de son obligation de parler et donc, il se sentait plus "libre". Ressentir la main d'Inge se poser sur son bras lui fit vraiment plaisir, et les premières paroles qu'elle prononça confirmèrent cette sensation. Bien que ces mots purent paraître anodins dans la bouche d'une autre, dans celle de son amie, c'était éminemment plus important, et il le savait. Il souriait légèrement, et même plus largement lorsqu'Inge le regardait avec intensité.

"Rester soi-même, sans prévoir ses réactions" ? A vrai dire, s'il l'avait écoutée, il lui aurait sauté dans les bras. Mais il n'en fit rien, on ne pouvait pas être parfait après 2-3 vœux pieux n'est-ce pas ?
Asdru couvrit sans prévenir la main d'Inge -qui était toujours posée sur son bras- de la sienne. Il ne savait pas vraiment comment réagir et rester authentique lui paraissait au dessus de ses forces.


Ton cadeau ? oui bien sûr... j'arrive. Lança t-il en montant dans la voiture et en sortant la malle qui contenait le cadeau.
Il la posa au sol et en sortit une robe de soie grise agrémentée de velours bleu. Elle était brodée de quelques entrelacs en fils d'argent représentant de discrets motifs nordiques. Une ceinture d'argent également enserrait la taille et l'on pouvait voir quelques aigue-marines parsemer la robe. Le Duc appréciait beaucoup l'aigue-marine parce qu'elle lui rappelait ses racines et sa jeunesse... et pour de nombreuses autres choses.
La coupe et finalement la robe était assez sobre. Et Asdru la commenta de quelques mots en la dévoilant à son amie :


Je t'avais dit il y a... fort longtemps que je t'offrirai une robe qui changerait de ton habituelle couleur noire.
J'espère qu'elle te plaira d'autant plus qu'elle reste sobre et simple...


Il souriait discrètement en attendant la réponse, la robe était toujours tendue à bout de bras entre eux.
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Ingeburge
Appréhendant quelque peu de recevoir ce que le Duc d'Amboise avait prévu de lui offrir, Ingeburge observa avec attention les gestes de celui-ci, tâchant de ne pas penser que ce qu'il était sur le point de lui remettre ne pouvait que pas lui convenir. Car elle se connaissait et elle connaissait tout autant ses propres goûts et ses propres exigences et tout ce que cela impliquait. Elle craignait plus les cadeaux pour la réaction que leur réception entraînait que pour les cadeaux en eux-mêmes et c'est bien pour cela qu'elle préférait offrir plutôt que recevoir.

Asdrubaelvect avait grimpé dans sa voiture et en était ressorti aussitôt, une malle oblongue dans les bras. Le sourire de circonstance d'Ingeburge se crispa, il n'était pas petit le présent! Le duc s'affaira ensuite à extirper ce que la malle renfermait et lui présenta... une robe.

Ça par exemple, elle n'y aurait pas cru! Ce n'était pas un cadeau courant, pas pour elle en tous les cas car en la matière, on la prenait toujours pour une vieille douairière sur le retour. Elle recevait toutes sortes de choses mais jamais de vêtements. Ce fut donc la surprise qui l'envahit tout d'abord.
Mais cette surprise laissa vite la place à la gêne car le rejet qui était habituellement le sien ne lui avait pas fait défaut. Elle fronça légèrement les sourcils et souffla, en réponse à ce qu'il venait de dire :

— C'est... coloré.
Elle regarda ce gris, ce bleu, cet argent et ne trouvait rien d'autre à dire, comme si c'était un vêtement arc-en-ciel qui lui avait été montré. Comparée à sa propre robe, celle d'Asdru l'était, colorée. Quant à la simplicité et la sobriété, la robe qu'elle portait en ce jour pouvait paraître sobre mais simple, non, il suffisait de regarder les broderies.

Sa main se risqua alors sur le tissu, après tout, elle aimait les riches étoffes, elle aimait à les caresser, à les sentir prendre fore sous ses doigts. Elle toucha donc la robe, doucement, appréciant le contact soyeux... il y avait pensé.
Mais que pouvait-elle dire? Le remercier, sans doute mais elle ne pourrait en dire davantage. Elle le blesserait, sûrement car elle ne saurait pas mentir... Comment lui dire?
Mal à l'aise, elle demanda, tâchant de détendre l'atmosphère :

— La coupe de mes robes te déplaît donc tant que cela?

Il lui sembla que sa question tomba à plat mais elle ne trouvait rien à d'autre dire, ou plutôt, elle tâchait de dire tout et n'importe quoi pour ne surtout pas à avoir à parler de la couleur.
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Asdrubaelvect
On put voir assez rapidement le mince sourire du Duc se rétrécir et même se transformer en une moue de déception. Il avait cherché à redoubler d'ingéniosité pour trouver une teinte très simple. Et le peu de bleu présent ne pouvait pas masquer l'aspect de sobriété du colori : le Duc ne considérait vraiment pas le gris et l'argent comme "coloré".
Trêve de pensées, il avait énormément appréhendé la réaction de son amie et encore plus depuis ces quelques dernières minutes où la situation entre eux étaient... tendue. Finalement, ce fut la déception qui l'emporta.
Il murmura avec un peu de gêne dans la voix :


Même si elle ne te plaît pas, je te l'offre quand même... Si un jour te venait le cœur de la mettre...

Ne voulant pas continuer à s'encombrer pour finalement une chose qui n'avait que peu de valeur, il reposa la robe dans la malle.
Sincèrement, il répondit à sa question :


Je te trouve très élégante dans tes robes, c'est certain. Mais je t'avais dit que je te trouverais une couleur pour changer, un peu, même très exceptionnellement. Enfin soit... j'ai échoué. Conclut-il en baissant la voix.
Il ne voulait pas laisser l'embarras s'installer, car il était à prévoir qu'il allait arriver. Un soupir passa ses lèvres, il était un peu désemparé.
Il avait beaucoup de choses différentes en tête et elles se bousculaient encore. Devait-il proposer de repartir vers les enfants ? Devait-il s'enfuir au plus vite ? Devait-il, comme il le souhaitait au plus profond de lui, faire réellement ce qu'il aurait fait s'il avait été "authentique" ?

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Ingeburge
Avait-elle été à ce point transparente? Oui, mille fois oui et plus qu'elle ne l'aurait voulu.

Tout chez le Duc d'Amboise lui signifia que le peu de mots qu'elle avait exprimés avaient été parfaitement clairs pour lui : son sourire qui s'envola, son visage qui se voila de déception, sa réponse chuchotée, ses gestes désabusés pour ranger la robe de la discorde, les termes qu'il employa, ses soupirs et ce silence qu'il avait fini par lui opposer. Il était évident qu'il avait perçu tout ce qu'elle taisait et qu'il avait assimilé que le cadeau qu'il lui faisait, elle l'acceptait sans rien promettre.

Quelque peu craintive, elle regarda à nouveau le visage gêné d'Asdrubaelvect, ce visage dont elle s'était détournée lorsqu'elle y avait lu la cuisante déception. Oh, elle n'avait pas voulu le décevoir et elle qui était en représentation la majeure partie du temps avait appris à feindre. Elle aurait donc pu aisément se montrer plus enthousiaste, elle aurait pu facilement s'extasier sur le vêtement, elle aurait pu mentir. Mais pas à lui. Il était l'un des rares à la connaître réellement et elle ne pouvait pas faire semblant, question d'honnêteté et d'amitié. Et Dieu, qu'aurait-il fini par dire, à la longue, quand en la revoyant, il se serait aperçu qu'elle ne portait pas son présent? Il aurait alors compris le rejet qu'elle n'avait pu taire, il aurait repensé à sa réaction à l'aune de la vérité et en aurait été davantage déçu, il aurait peut-être même été blessé. Cette constatation qu'elle avait eu raison de ne pas jouer ne l'apaisait pas pour autant, avoir été authentique et préservé Asdrubaelvect d'une blessure à venir ne pouvaient la satisfaire. Alors, vite, réagir, briser la gêne, retrouver la sérénité du début de la visite. En avait-elle seulement les moyens? Bien avant son cadeau, les tensions accumulées avaient affleuré.

Inspirant comme avec effort, elle déclara :

— Je sais que tu as voulu me faire plaisir et que ton geste était guidé par le désir de me rendre heureuse. J'accepte donc ce cadeau car il est le reflet de ton amitié et jamais, ô grand jamais, je ne rejetterai cette amitié.
Elle ajouta :
— Merci.

Puis, un peu précipitamment, elle se tourna vers la bâtisse devant laquelle se trouvait toujours quelqu'un. Elle y avisa un valet et lança à celui-ci :
— Faites donc porter ceci dans mes appartements.
Elle désigna le coffret dans lequel la robe avait été serrée.

Ingeburge observa le domestique emporter la malle puis reporta son attention sur le duc. Que dire d'autre maintenant? Elle se lança, lançant quelques mots au hasard :

— J'étais en train de rédiger ma feuille de route pour le nouveau conseil* avant que les enfants et toi n'arriviez. C'est assez fastidieux, je dois dire.
Elle lança un nouveau regard vers l'Artemisium, plus précisément vers l'une des croisées de son bureau.


* [HRP]celui de septembre car ma foi, on prend notre temps là.^^[/HRP]
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Asdrubaelvect
Lorsque la déception s'était irrémédiablement installée, la déloger s'approchait certainement du parcours du combattant. N'étant guère d'humeur combative, en fait Ingeburge avait probablement anéanti toutes ses volontés, il se laissa submerger par cette déconvenue. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il ne laissa paraître qu'un hochement de tête sincère aux paroles d'Ingeburge. Sincère mais criblé des impacts de son désœuvrement : tout concourrait à attiser la flamme de sa déception.

Que valait-il mieux faire en ce cas ? Feindre et subir jusqu'à la délivrance ou bien fuir sans geindre? Hélas même les bonnes intentions de franchise échangées n'y pouvaient rien, et elle aurait sûrement pu prononcer tous les mots du monde, la messe était dite et le pessimisme qu'il cachait toujours tant bien que mal lui étreignait le cou et le cœur.
Il était vaincu et la défaite n'en était que plus cinglante par le bruit des enfants peu loin qui s'amusant dans l'insouciance de leur âge.


Je... je songe partir maintenant. Je crois qu'on en a assez vécu pour aujourd'hui...

C'était lâché, et cela aurait pu avoir l'effet d'une bombe chez Asdru s'il était resté quelque chose à casser à cet instant en lui.
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Ingeburge
Il hésita.
Perceptiblement, visiblement... douloureusement, il hésita. Il ne le regardait plus d'ailleurs et elle ne songea pas à chercher à le détourner de ce qu'il semblait fixer.
Il hésita, longtemps, trop longuement à son goût et elle n'était pas pour sa part capable de parler davantage. Le malaise qu'elle avait perçu avait cru et était désormais durablement installé. Que dire pour que cela change? Que faire pour inverser le cours des événements?

Immobile et impuissante, elle se contenta d'attendre qu'il parle, qu'il esquisse un geste qui brise ce silence devenu trop lourd. Il s'exprima, enfin et elle soupira, soulagée... Mais le soulagement ne dura pas car il ne se contenta pas de lui dire qu'il était temps pour lui de partir, il lui signifia à mots à peine voilés qu'il valait mieux qu'il se retire.
Tête obstinément baissée vers le sol, elle ne répondit rien, se mordant violemment la lèvre, son esprit se repassant ce qui venait d'être dit.

" Je crois qu'on en a assez vécu pour aujourd'hui. "
Il avait pris son peu d'enthousiasme pour la robe qu'il lui avait offerte de manière vraiment trop personnelle, elle ne voyait en tout cas d'autre explication à cette froide résignation qu'il lui opposait maintenant. Alors qu'il ne devait pas... Ah s'il avait seulement su, s'il avait seulement pu entrevoir les raisons de ses choix... mais il ne pouvait pas car elle était incapable d'en parler. Et puis, rien ne disait qu'il comprendrait. Il lui débiterait ses phrases si simples et si gentilles et elle s'en irriterait forcément, agacée par ce bon sens pourtant amicalement prodigué.

Il lui faudrait donc jouer la comédie, jusqu'au bout. Elle releva la tête et lâcha d'une voix neutre :

— J'ai moi-même fort à faire, je ne peux m'attarder.
Trop neutre peut-être mais le mal était de toute façon fait, il n'y avait qu'à observer l'attitude d'Asdru. Un peu plus un peu moins :
— Tu salueras les enfants pour moi. Merci...
Ce fut à elle d'hésiter et elle regarda involontairement là où la malle se trouvait quelques instants plus tôt :
— ... pour tout.

Alors, après un léger sourire crispé, elle se détourna et gravit lentement les marches du perron, se contraignant à ne pas s'enfuir à toutes jambes puis finit par disparaître à l'intérieur de la bâtisse. Une fois le lourd vantail de bois repoussé, elle s'y adossa et se prit la tête dans les mains.
Décidément, elle avait bien un don pour faire le vide autour d'elle.

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Asdrubaelvect
Si le clou avait pu être enfoncé un peu davantage, la première phrase d'Inge aurait été un violent coup de marteau.
Il restait pétrifié et inerte. Le demi-tour de son amie qui repartie vers la bâtiment le sortit de sa torpeur.


Oui, je, je, je, je...Ce bégaiement accompagnait la retraite de la Duchesse et Asdru ne réussit pas à sortir une phrase intelligible.
Pire, le bruit de l'huis se refermant sonna le glas de l'enthousiasme qui avait accompagné son arrivée à l'Artémisium.

Il contourna la bâtisse pour aller signifier à ses enfants qu'il était à présent l'heure de partir. Il n'eut qu'un signe de main à faire à leur nourrice pour que sa volonté ne se transforme en ordre.

Retournés dans leur voiture, qui se mit rapidement en branle, le Duc prit ses deux enfants près de lui et leur souffla :

Inge a du partir précipitamment mais elle voulait vous dire qu'elle vous aime beaucoup tous les deux.Conclut-il en embrassant chacun d'eux sur la tempe.
A quoi bon cela servait-il de leur dire la vérité ? Ils auraient inévitablement posé des questions pour lesquelles le père n'avait aucune réponse à fournir et puis vraisemblablement, il n'aurait rien compris à la complexité des sentiments.
Qu'attendait le Très-Haut d'une telle torture envers ses pieux enfants ? Asdru se tenait la tête à deux mains et soufflait quelques mots à ses enfants pour éviter de penser à tant de choses qu'il aurait sitôt voulu oublier.

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Ingeburge
Janvier 1458

Toutes les demeures d'Ingeburge avaient quelque chose de sinistre. C'est ce qui frappait toujours les rares personnes invitées dans l'un de ses antres, aussi divers les uns des autres. Malgré les meubles de prix, les couleurs époustouflantes des tapisseries, la joliesse des bibelots, l'on ne pouvait ne pas remarquer que quelque chose détonait. Le Château de Carpentras, joyau d'un fief assiégé, restait désespérément vide depuis que sa propriétaire avait été contrainte à l'exil. Le Palazzo di Diana, à Rome, avec ses tentures sombres, tenait tout du tombeau, il avait d'ailleurs vu la sœur d'Ingeburge s'y éteindre et avait été le théâtre de la dernière confrontation entre la désormais Duchesse de Bourgogne et Tithieu. Et l'Artemisium ne contrevenait pas à la règle, se dressant solitaire et à l'écart de tout dans son écrin dépouiller par les frimas hivernaux.
Elle aimait cet endroit comme elle aimait tous ceux qu'elle possédait, elle y avait déposé son cœur et il était au final semblable à elle-même : solitaire, déserté, sépulcral. Sinistre.

En cette journée de janvier pourtant, de la chaleur et beaucoup d'agitation. Les feux dansaient dans les cheminées et la domesticité était occupée à plier, empaqueter, ranger, mettre dans des coffres, vêtements, livres et autres colifichets. La duchesse était sur le départ mais quelque chose dans l'air indiquait qu'il serait plus long que de coutume voir pis. Et cette impression de résolution se trahissait dans la quantité d'objets empilés dans les malles, c'était plus que le nécessaire qui était pris — même si le nécessaire chez Ingeburge avait toujours été pléthorique, les armoires, les rayonnages, étaient vidés.

Ingeburge, elle, ne prenait pas part à l'agitation environnante même si à sa manière, elle participait à ce tournant. Sur un coin de sa table de travail, les missives s'empilaient; depuis le matin, elle rédigeait commandes, consignes, recommandations, mettant ainsi ses affaires privées en ordre. Cela faisait donc plusieurs heures qu'elle écrivait, relisait, sablait, scellaient des épîtres à destination des quatre coins des royaumes connus.

Il s'agissait de pas perdre de temps car malgré son retrait de la vie politique bourguignonne active, elle ne chômerait pas une fois son troisième mandat ducal achevé.

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