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Retrouvailles entre les deux soeurs Alterac, trop longtemps séparées. Noisettes et Océan.

Deux soeurs, mon coeur.

Aleanore
Un dernier signe de croix, et elle se relève du prie-dieu. Toujours tournées vers lui ses prières. Elle ne pleure plus, à quoi bon et Oane n'avait-il pas dit que plutôt que larmes de tristesse, c'était des larmes de joie qu'il fallait verser. Sa foi ne va pas jusque là, elle ne pleurera pas de joie de le savoir là-haut son frère, mais néanmoins elle espère qu'il s'y sent bien aux côtés du Très-haut dans le Paradis Solaire tant vanté. Aléanore ferme les yeux un court instant pour essayer de se souvenir de son visage tellement chéri, mais ne parvient qu'à distinguer des contours, l'avait-elle si peu aimé, ou avait-elle oublié son visage en même temps qu'elle s'était efforcée de calmer sa douleur. Pas de réponses pour changer, ni dans son coeur, ni dans son esprit.

Un regard circulaire à la chambre délicate qu'elle occupe, lit massif, teintes beiges, calmes, reposantes. Aux murs des représentations multiples d'Archanges, des dessins au fusain qu'elle a fait elle-même représentant diverses scènes du Livre des Vertus. Et une chandelle qu'elle n'éteint jamais, observer la flamme, attendre la sienne. A-t-elle reçu son petit mot à l'annoblissement lui demandant de venir dans sa chambre le lendemain quand tous seraient partis et que la vie reprendra normalement. Normalement.. Si ce n'est cette zone d'obscurité sur la vie de ceux qu'elle aime tant. Qu'ont-ils fait pendant qu'elle était au couvent vouant son âme à Dieu ? Elle les imagine chacun dans des situations différentes, périlleuses pour le moins, sérieuses à n'en pas douter pour certains.

Une image de sa mère entourée de ceux qui composent l'assemblée prestigieuse en qui le Roy a toute confiance. Son père chevauchant habilement et fièrement, à travers le Royaume et sa soeur, petite flamme virevoltant sur les chemins en compagnie du jeune garçon présenté la veille. Sa flamme en péril à chacune de ses entreprises, défigurée par elle ne sait qui. Elle l'imagine fort et brutal, sanguinaire, monstrueux, un Prince-démon aurait pâle figure face au visage qu'elle donne au monstre qui aurait pu faire ça à Maeve. Une envie s'insinue dans l'esprit de la, jusqu'à présent douce et naïve, Aléanore. Envie de tuer, de faire souffrir. Elle n'a pas à pardonner. Seul le Très haut peut le faire.

Le Pardon se passe entre le Très-haut et lui, elle ne sera là que pour qu'ils se rencontrent. Pensée sournoise, envie latente, image fugitive de la joue mutilée de sa petite soeur. Elle ne se contentera pas d'une entaille. Elle s'insurge, quel droit avaient-ils les hommes de souiller ainsi tant de pureté, un regard à la flamme de la chandelle. Purifier ce monde à l'atmosphère vicié, purifier cette humanité rongée par le Sans Nom. Mais avant .. Se jetant sur son lit avec une classe tout sauf féminine, Aléanore fixe le plafond en attendant sa petite soeur. Tant à lui raconter. Tellement envie qu'elle aussi raconte.

Elle fixe la porte comme pour lui demander de s'ouvrir sur sa Flamme.

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Maeve
La cérémonie d'anoblissement sitôt arrivés de leur périple depuis la Lorraine avait forcé Maeve à prendre du repos. Certes, la jeune fille était habituée aux voyages et à la fatigue, mais elle n'en restait pas moins une jeune fille de douze ans qui parfois ne demandait qu'à un peu de repos.
Et elle avait regagné sa chambre rapidement, non sans avoir indiqué à son chevalier la sienne. Léger sourire de connivence pour les futurs licorneux qui partageaient la même maison, là-bas à Vaudémont, qui vivaient ensemble. Mais chacun dans sa chambre, bien sûr. Elle lui avait souhaité bonne nuit, après lui avoir indiqué comment appeler un domestique s'il avait besoin de quoi que ce soit. Après un dernier sourire et une chaste bise sur sa joue, elle avait rejoint son antre.

Moins décorée et personnalisée à Louhans où elle avait passé quelques années, sa chambre n'en était pas moins à son image. Les murs peints en pourpre et noir amenaient une atmosphère plutot sombre, égaillée ça et là de grandes tentures et de portraits.
Sur ces ornements étaient représentés, vous vous en doutez, de grandes scènes de bataille magnifiant les chevaliers et leurs armures blanches et or brillaient sur les murs sombres. Auréolés de lumière, ils veillaient sur les rêves animés de la petite Alterac.

Pour l'instant, elle est assise à son bureau. Quelques taches d'encre inscrites dans le bois abimé, quelques velins grattés dans un coin, au dessus, une licorne aux courbes enchanteresses qui se dressait fièrement. La petite rouquine se brosse les cheveux, tentant vainement de discipliner les boucles rousses qui refusent obstinément de se laisser coiffer autrement qu'en queue de cheval retenue par la barrette en argent massif ornée d'un serpent zokoiste.
Une fois la tignasse attachée, une robe de simple laine enfilée par dessus sa tunique, la ceinture nouée dans son dos encore frêle et ses bottes inopportunes lacées, elle sort de sa chambre sans jeter un regard au psychée qui trone dans un coin.

Au pas de course, arrêt façon glissade, elle s'arrête à trois portes de la sienne, devant celle de sa soeur. Légère inspiration avant de frapper. Un coup, deux, avant de toute façon d'ouvrir la porte à la volée, le sourire en étendard. Aleanore... Sa grande soeur. Celle qu'elle n'avait quasiment pas connue, partant à quatre ans pour sa formation en Normandie, et à son retour c'était 'Nore qui était partie pour son couvent. Elle avait craint de ne jamais la revoir, elle avait peur que sa soeur ne subisse le même sort qu'Arthur. Autant elle n'avait pas d'amour particulier pour son frère, autant elle gardait de chaleureux souvenir d'Aleanore.
Et puis qui n'a pas rêvé d'avoir une grande soeur ? Tellement de choses à lui raconter, tellement de réponses que 'Nore pourra surement lui apporter... Sans penser plus avant, elle court au lit de son ainée après avoir claqué la porte d'un coup de talon. Assise en tailleur près de sa soeur, les saphirs l'interrogent sans relache, tandis que les lèvres se descellent, plus circonspectes.


Bonjour ma 'Nore ! Comment tu vas ? bien dormi ?
jolie cette cérémonie hein ? Et je suis contente que tu sois là !
Alors ? Raconte ! Le couvent ? pas trop dur ?

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Aleanore
Lumineux son sourire, évidemment sinon ça ne serait pas sa Flamme, son territoire personnel approprié par la rouquine en moins de temps qu'il n'en faut pour le dire mais qu'importe puisque c'est elle. Et c'est parti pour la ronde enchanteresse aux milles questions. Avec un sourire amusé aux lèvres, la jeune fille se penche sur la table de nuit et en sort un peigne fin.

Parce qu'en fait, elle a cru qu'elle se laisserait agresser par toutes ses questions en restant les bras ballants ? Petit rire taquin pendant qu'elle attrape sa soeur et la met dos à elle. On détache la barrette, jolie soit dit en passant mais cela ne l'étonne pas le moins du monde, Maeve a le chic pour trouver des gens assez épris d'elle pour lui offrir les plus belles choses. Détachés les cheveux pendant qu'elle passe le peigne fin dans la chevelure rebelle mais soyeuse de sa cadette.


Oui, j'ai bien dormi. Cela faisait longtemps que je n'avais aussi bien dormi d'ailleurs. La cérémonie ? Oui très jolie.. Elle tire la langue toute à sa concentration pour réunir la chevelure flamboyante entre les doigts fins, Et puis c'était si sérieux en même temps. Et je l'aime bien ce nouveau vassal de Maman.

Un dernier coup de peigne pour démêler uniformément avant de séparer l'ensemble en trois grosses méches. Un baiser déposé sur la joue.

Moi aussi, je suis heureuse d'être là, avec Toi. Tu m'as manquée ma Flamme.

Celle de droite au milieu, puis celle de gauche, les doigts s'agitent habilement, récupérant ça et là, une petite méche qui essaye d'échapper au carcan de la tresse.


Le Couvent ? Mais non, ce n'était pas dur Maeve. Eclat de rire joyeux avant de poursuivre, j'y ai appris tant de choses magnifiques, et j'y étais très heureuse, même si vous me manquiez beaucoup. J'ai appris la Foi. Et des jolies choses.. Si jolies.. Tu voudras que je te raconte ça aussi ? Les archanges Maeve !!

Un signe du doigt sur les icones cloués au mur d'en face avant de tenir à deux doigts le bout de la tresse pendant qu'elle délie le ruban accroché au peigne et en fait un noeud simple au bout des pointes. Sourire ravi, elle est belle, comme ça. Dommage que ses cheveux ne soient pas du même avis, regard navré sur les méches qui essayent de se faufiler hors la tresse. Elle se penche sur le côté pour accrocher la barrette et s'écarte un peu.

Tu es devenue si belle Maeve. Même malgré.. ça..
Doigt fin qui redessine lentement la cicatrice sur la joue de sa soeur. Noisettes qui se voilent un instant avant d'étinceler, paillettes dorées, la haine, toujours. Intarrissable haine à l'égard de celui qui a osé la toucher. Aléanore secoue la tête un instant, chasser la haine, elle ne devrait pas avoir de place dans son coeur.

Elle se lève d'un bond avant de sortir le premier volume du Livres des Vertus et d'en sortir un dessin
.

Tiens, c'est pour Toi, je l'ai fais à Limoges en attendant de revenir ici.


Elle dépose le dessin, avant de retourner à son bureau et d'en sortir des fusains et un vélin assez épais. Puis, attrapant un petit tabouret, elle s'asseoit juste en face du lit, en face d'elle, modèle du jour, griffonnant distraitement quelques traits, la regardant de temps à autre

Bon, je t'ai dit pour le couvent, mais je ne t'ai pas tout dit. Alors si tu veux connaitre toute la suite, il faudra me raconter pour .. C'est Leandre son prénom ? Pour Leandre et puis ce que tu as fait, où tu vis, si tu vis bien et qui est celui qui t'as fait ça.


Lancée sur le ton de la conversation, la dernière phrase, noisettes fixées sur le vélin, allez dis moi son nom, ma Flamme. Il va bien devoir payer un jour, alors ce jour, je te vengerai. Sourire sincère, elle écoute, elle se noit dans les yeux océans de sa cadette, tandis que le fusain gratte sans relâche.

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Maeve
Sans vraiment voir ce que sa soeur pêche sur la table de nuit, Maeve se retrouve en tailleur, 'Nore dans son dos, et sent bien les mains fines de son ainée courir dans sa tignasse indisciplinée. Les boucles roulent autour des doigts d'Aleanore, tandis que la jeune rouquine fronce le nez.
A se demander pourquoi elle s'est embêtée à les démêler la minute précédente, si de toute façon le travail ne convient pas. Et puis ça tire un peu aussi... 'Fin... Semblerait qu'elle n'ait de toute façon pas le choix, et puis ça détend, aussi, de se faire coiffer doucement comme ça. Après tout, si elle arrive à en tirer quelque chose...

Dire que pendant de longues années, celles qui ont suivi sa convalescence, elle avait refusé tout instrument de torture dans l'entrelac roux qui lui sert de chevelure, laissant les boucles libres de masquer cette joue marquée. Il avait fallu toute la force de persuasion de Lucie, dans une taverne de joinville, pour faire comprendre à Maeve qu'elle ne devait pas avoir honte, et qu'elle pouvait arborer cette cicatrice sans crainte.
La belle blonde en avait également une, qu'elle ne cachait nullement, et la jeune Alterac s'était laissée convaincre, ressortant la barrette au serpent de sa poche, laissant la mercenaire lui attacher sa tignasse en arrière, dévoilant la pommette mutilée.

Sentir de nouveau aujourd'hui la caresse d'un courant d'air salvateur sur la boursouflure rose qui pare sa joue attise un nouveau sentiment. C'est les premières retrouvailles avec 'Nore depuis son agression, et le regard de sa soeur sur sa cicatrice la veille et encore à l'instant ne lui a pas échappé. Au moins a-t-elle retenu une grimace...
Flamme qui vacille un moment avant d'échapper au jugement de son Etincelle, la laissant la coiffer, soulagée par la soustraction à son regard de la Marque.


Oui je l'aime bien aussi Eusaias... Il est gentil. Il m'a promis de me protéger la première fois que je l'ai rencontré. Et de m'apprendre les armes aussi. Avec Maman.
Mais après... j'ai rencontré des mercenaires, et il était leur bourreau, ça m'a... perturbée un peu... Tu sais j'ai beaucoup appris sur les méchants et les gentils.


Voile devant l'azur de ses prunelles. La perception de son monde s'était considérablement élargie quand elle avait compris que des méchants pouvaient être gentils. Mais avait été chamboulée aussi quand elle avait appris que des gentils pouvaient être méchants. Il lui faudra encore quelques temps pour arriver à se faire sa propre idée du monde dans lequel elle vit.
Le rire joyeux de sa soeur quand elle évoque le couvent, éclat surpris. Pas tant que Maeve n'apprécie pas, juste qu'elle n'y ait jamais allée encore. Son éducation religieuse, elle l'avait reçue de Muad, alors Grand Aumonier de France, dans la bonne humeur et aromatisée de sucettes au calva.


ça a l'air chouette les archanges, Muad ne m'avait pas montré d'aussi jolis dessins.. Mais tu ne t'es pas ennuyée ? ça a l'air si austère...

L'envie de se retourner pour suivre sur le visage de sa soeur les réactions, lire sur elle ce qu'elle en a retiré... Mais la poigne de Nore autour de la tresse qui prend forme, le 'clic' d'une barrette qui se referme sur ses cheveux l'en empêchent. Prunelles qui s'échappent pour revenir sur le couvre lit... La cicatrice qui allume dans les noisettes de son Etincelle des éclats haineux.
De nouveau face à face, un doigt enroulant une mèche échappée, floraison d'un sourire sur ses lèvres alors qu'elle remarque combien Nore a grandi, quelle femme elle est en train de devenir, les courbes enfantines ayant laissé place à celle d'une adolescente qui a désormais l'âge d'être une adulte. Etoiles brillantes d'admiration dans le regard bleu qui se plante dans les noisettes flamboyantes, ne les laissant s'enfuir qu'un instant, juste le temps pour 'Nore de tendre à sa cadette un velin aux traits limousins, un dessin superbement effectué.


Magnifique... tu dessines parfaitement, 'Nore ! Une vraie artiste !

Sans se préoccuper plus avant de la position dans laquelle s'installe sa soeur, elle reste en tailleur, roulant avec précaution le dessin, se promettant de l'afficher dans la maison de Vieux Grégoire en Lorraine. Quand elle relève les yeux, elle ne se dit pas une seconde que son Etincelle lui tire le portrait, elle imagine missive à écrire, dessin de la cérémonie, espère que Nore le lui montrera, bien sur, sans en douter pour autant.
La Flamme scintille de retrouver son ainée, elle qui a un frère adoptif, une mère, un père, des amis, un chevalier... Mais sa grande soeur avec laquelle elle n'avait pas eu le temps de tisser des liens s'avère depuis son retour son alliée inébranlable, celle qu'elle avait osé espérer depuis l'allégeance en Limousin il y aura quatre ans maintenant.


Bon, je t'ai dit pour le couvent, mais je ne t'ai pas tout dit. Alors si tu veux connaitre toute la suite, il faudra me raconter pour .. C'est Leandre son prénom ? Pour Leandre et puis ce que tu as fait, où tu vis, si tu vis bien et qui est celui qui t'as fait ça.

A peine un tressaillement à la fin de la phrase, vite effacé par le sourire qui éclot instinctivement sur ses lèvres à la simple mention de son chevalier. Le jeune impérial qui l'avait conquise alors qu'elle n'était encore qu'une enfant, celui qui l'avait ramenée saine et sauve de Normandie, qui avait été son meilleur ami jusqu'à leurs retrouvailles, où ils s'étaient rendus à l'évidence. Son promis, son amoureux. Leandre avec qui elle se marierait, sans le moindre soupçon d'un doute dans son esprit.

Leandre ? Oui, mon chevalier... Tu sais je le connais depuis toujours ou presque. Il était à Dieppe avec moi, et puis il m'a ramenée à Maman. Ensuite ses parents et lui se sont installés à Sémur avec nous. Mais Maman m'a emmenée en Limousin, et lui est parti en Provence apprendre la guerre avec son père. Nous nous sommes revus deux après, au mariage de Belialith, qui nous avait appris des gros mots... Et nous sommes promis de nous marier pour ne plus être séparés...
Seulement, nous avons encore voyagé avec Maman, et lui avec son père. Pis y'a eu... ma convalescence, et encore deux passés dans le chateau de Gaborn, avec Gaspard et Maman... Nous nous sommes enfin retrouvés y'a quelques mois. Et Maman a accepté que j'aille avec lui en Lorraine, pour me prouver qu'on pouvait pas vivre tout le temps ensemble...
Voix qui se baisse légèrement, lueurs mutines dans l'azur de ses yeux, regard en coin vers sa soeur. Elle a eu tort, parce que tout se passe très bien, et puis... on est amoureux tu sais... comme les grands en moins compliqué...

Rose qui vient se nicher sur les pommettes, rendant pâle la cicatrice alors qu'elle repense à ce baiser échangé dans une taverne vaudemontoise, au souffle qu'ils avaient repris ensuite, à leur timide gêne, mais au plaisir ressenti. Brasier qui s'allume sur les jours d'une Flamme bercée par le regard de son Etincelle.

On va se marier, quand j'aurai l'âge, tu sais. j'ai hâte que vous puissiez discuter, tu verras, il a toujours raison, et il est gentil, et intelligent, et beau... Comme d'habitude, d'une objectivité à toute épreuve, la rouquine fait l'éloge de son chevalier.

Et puis... et puis la dernière question revient résonner à ses oreilles, faisant frémir l'échine d'une adolescente qui redevient l'espace d'une seconde la frêle petite fille rieuse qu'elle était quand elle avait couru dans cette clairière limousine un après midi d'été, rencontrant le Mal.


Un homme méchant, un coquillard, 'Nore... on n'y peut rien... Tu m'aimes quand même ?

Prunelles scintillantes qui s'en vont chercher l'approbation dans le regard noisette de son ainée, avant qu'elle n'essaie de dévier le sujet.

Alors dans ce couvent ? tu t'es fait des amies ?

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Aleanore
De derrière l'écran protecteur, s'il en est besoin, de son vélin, la jeune fille regarde sa cadette en souriant. Elle le connait déjà l'Eusaias, que ne donnerait-elle pas pour avoir passé ces longues années à ses côtés, rencontrer ces personnes dont elle parle, ceux qui ont accompagné sa vie quand elle restait dans son couvent. Un coup de fusain qu'elle essaye d'estomper de la pulpe du pouce, là, c'est mieux, avant de lever le nez sur sa soeur et de lui sourire.

Moi aussi, j'ai appris beaucoup sur les méchants et les gentils, ma Flamme, à nous deux, nous serions parées contre les erreurs de jugements. Mais je comprends ce que tu veux dire, c'est assez perturbant de ne pouvoir savoir de quel côté, on doit placer certaines personnes. Peut être il y a-t-il un milieu. Ni bon, ni mauvais, juste humain. Tu ne crois pas ? Après cela dépend de tellement de choses.

Austère ? Le couvent ? Le doigt dérape et relâche sa prise sur le fusain.

Oh .. Sacrelotte !


Elle contient un rire, tandis qu'elle répare sa bêtise sur le vélin qui dûment frotté n'en demandait pas tant.

Ce n'est pas austère Maeve. Tu sais, je dirai même plus que j'y ai reçu un traitement de faveur puisque la Mère supérieure connaissait notre situation.. dans la société, on va dire. Et encore plus, après .. Sa mort. Temps d'arrêt, regard vif sur le dessin, pourquoi ne peut-elle poser son visage sur le parchemin. Arthur, tu m'échappes encore.. Sourire de nouveau, ne pas l'inquiéter, elle est si pure malgré tout cette petite Flamme. Arthur n'aurait pas voulu qu'elle s'inquiète, oui, il n'aurait certainement pas voulu. Et de nouveau, le sourire se fait sincère tandis que les noisettes captent les détails et que le fusain les étale.

Vous êtes amoureux alors.. Oh.. Et vous allez vous marier. Alors je dois vite me dépêcher de rentrer vraiment dans les ordres. D'ici ta majorité, ils accepteront peut être de me faire prononcer les sacrements, car je pourrais te marier alors. Ca te dirait ma Flamme que ce soit moi qui vous unisse ?

Sourire en coin, oui puisqu'il faut la céder à un autre, autant qu'elle soit au premier rang. Il n'a pas l'air si dérangeant que ça, qui plus est, elle a raison, il est beau, intelligent, elle n'a pu en juger, mais au moins il la rend heureuse, ce qui importe plus que tout à ses yeux. De nouveau, la haine quand elle évoque celui qui lui a fait ça. Les doigts se crispent sur le fusain, avant de se détendre aussi soudainement qu'ils s'y étaient accroché. Lâchant vélin et fusain, elle grimpe sur le lit, et attrape sa soeur par la taille avant de déposer un baiser sur son front.


Je sais bien qu'on n'y peut rien ma Flamme. Mais ne crois pas qu'il te suffira d'une cicatrice pour que je ne t'aime plus. Il t'en faudra sûrement des centaines, voire plus et puis des bien grosses, d'un genre bien chevaleresque, bien gros, bien hideux, le genre de cicatrice qui ferait qu'on ne discernerait plus ton joli minois. Elle fait mine de réfléchir puis la tient en recul avant secouer la tête en signe de négation, puis de l'attirer doucement contre elle. Et même comme ça, je ne sais pas si j'arriverai un jour à ne plus t'aimer ma Flamme. Je suis bien trop égoïste pour imaginer ma vie sans toi à mes côtés.

Doucement, elle la berce contre elle, comment a-t-elle pu imaginer cette chose, l'Etincelle sans la Flamme..


Des amies au couvent, oui .. enfin non.. Pas des amies, des camarades, de celles que l'on voit chaque jour. Mais à Limoges quand j'en suis sortie, je m'en suis faite une d'amie. Elle s'appelle Karyaan, et je lui ai promis qu'un jour, je t'amènerai à elle pour te la présenter. Il faut dire que je lui ai tellement parlé de toi. Et puis, j'ai revu des amis de Papa et Maman, aussi. Karyaan m'a appris certaines choses tu sais. Des choses que je n'imaginais même pas, et puis elle me parlait comme à une adulte de son âge, alors qu'elle était plus agée.. 19 ans rends toi compte..


Elle s'écarte doucement détachant la barrette et la tresse avec emphase, rejetant les boucles rousses sur le visage de sa cadette, couvrant l'entièreté du visage de la masse de cheveux.

Comment veux-tu que j'arrive à faire ton portrait dans ces conditions? Décidément les cheveux attachés, cela ne te ressemble pas. Quand ils sont en fouillis, c'est plus Toi.. Bon, sinon question comme ça.. L'Ost .. Pourquoi Maeve ?

De nouveau derrière son vélin, fusain en main, elle reprend, elle retouche, plus facilement cette fois. Avant de lancer taquine.


Dis moi.. Tu as pensé à une chambre pour moi en Lorraine ? Puisque je ne vais pas tarder à t'y rejoindre. Leandre ne va pas apprécier d'avoir sa presque belle-soeur sous son toit.

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Maeve
Le petit nez se fronce. Plusieurs raisons... elle comprend enfin ce que fabrique sa soeur avec ce fusain. Depuis qu'elle porte sur sa joue cette marque, elle n'a pas songé qu'un jour on pourrait lui tirer le portrait. Et n'apprécie que moyennement.
Faut il qu'elle aime sa soeur pour la laisser continuer et se plier à l'exercice. La deuxième raison... Parce que non, Maeve n'est pas d'accord, certains ne sont pas humains... Celui qui la lui a faite, cette cicatrice, par exemple. Un visage d'ange déchu, l'âme en moins, le mal en plus. Pas humain non...
Et la dernière raison, c'est que Maeve s'étonne qu'on puisse aimer le couvent. Elle a certes fait son éducation avec un évêque, qui ne l'est plus, mais elle n'aime pas pour autant l'allure austère des monastères, la rigueur de la pierre et des tenues, et surtout, le silence qui y règne.


Hum... je suis pas convaincue... et puis je les évite, ça porte la poisse les couvents...

Et puis instinctivement, comme toujours quand le nom de son chevalier est prononcé, elle sourit. Les prunelles azurées se parent d'une voie lactée brillante, les pommettes rosissent et les lèvres s'étirent joliment.

Oui, amoureux... Le mot résonne encore si adulte à ses oreilles qu'elle s'étonne toujours de le prononcer. Mais ils en ont parlé, et il a bien fallu se l'avouer, oui ils sont amoureux. Rose qui s'empourpre, blanchissant la cicatrice, chaleureuse coloration de ses joues, alors qu'elle relève les yeux vers son Etincelle.

On se mariera quand j'aurai quatorze ans... ça te laisse deux ans pour pouvoir officier... Bien sur que je serais contente ! et Leandre aussi j'en suis sure!

Là elle s'avance peut être un peu la demoiselle, mais bon, elle ne doute pas qu'ils arriveront à s'entendre un jour ces deux là, et deux ans ça lui parait une éternité.
Son index vient effleurer sa pommette zébrée tandis que sa soeur la rassure sur son amour. Léger soupir qui s'exhale de soulagement, même si elle ne doutait pas vraiment. Dans l'azur, de la reconnaissance. Quoi qu'on en dise, Maeve a perdu une pincée de confiance en attrapant cette balafre.


Merci mon Etincelle... Continuant sur sa lancée... Il faudra que tu me présentes cette Karyaan alors... Si tu l'aimes, elle doit être bien ! Même si c'est une adulte... Tu sais je me suis fait des amis adultes aussi... Comme Lea, Kles... Lui il m'a appris à tirer à l'arc. Et puis des enfants, comme Calyce, Clélie Nayenna...

De nouveau elle quitte du regard les mains charbonneuses de son aînée pour chercher ses yeux. Pourquoi l'armée ? elle aurait pensé que c'était évident.

Parce que j'ai besoin d'apprendre les armes, et de m'occuper, 'Nore. Leandre est tribun tu sais, et ... bien j'ai entendu parler de plusieurs personnes à l'Ost qui sont réputées et sages, et dont je pense que je peux beaucoup apprendre... Et je me rends utile comme ça...

Léger rire alors qu'elle se remet debout, fourmis dans les jambes d'être restée trop longtemps inactive.

Bien sur ! Y'a de la place dans la maison du Vieux Grégoire. Tu verras, elle est jolie... Avec plein de chambres. Bon, c'est pas un chateau hein, mais c'est propre et joli. Pis il y fait bon... Enroulant ses bras autour du cou de sa soeur, en profitant pour glisser un regard sur le velin.

Ce sera chouette quand tu seras là... Et je suis sure que Leandre sera content. Il l'est toujours quand je le suis. Oh si tu viens ce sera génial ! Son de cloche qui retentit aux tréfonds de l'escalier... Léger sursaut, bise collée sur la joue de son Etincelle. C'est ... très joli. Sure que c'est moi que tu dessines là ?

Et de tirer la langue en allant ouvrir la porte.

Preum's au petit-déj ? j'te parie que je gagne !

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