Marignane, en ce dimanche 27 septembre, son vicomte portait son habit de lumière, cette complexe composition de divers vêtements alternant l'or et l'azur, couleurs qui lui étaient chères. Pour cette soirée, il avait préféré abandonner son large manteau blanc de deuil, après tout, depuis sa rencontre avec Aurore, il n'en éprouvait plus le besoin, il revivait. Quant à cette dernière, Alexis lui avait fait visiter son domaine propre, domaine qu'il avait qualifié, avec son château, de mausolée dédié à sa suzeraine et à son épouse, toutes décédées. Lorsqu'il s'était promené dans les terres des environs dont le seul relief était
La Cadière, ce ruisseau qui serpentait depuis le
Plateau de Vitrolles jusqu'à se jeter dans l'
Étang de Berre. Seuls véritables joyaux sans contestes, des oliveraies aux vignobles de la vicomté, les salines de l'étang étaient les plus riches revenus qui soient pour le seigneur.
St-Victoret, un peu plus tard, terre inféodée au vicomte qu'il devait traverser dans son palanquin à deux chevaux qui le transportait lui et sa compagne jusqu'à la Pioline, le lieu du rendez-vous. Là l'attendait Vitruvio Antonio d'Agneau, son vassal auquel il avait donné cette terre située entre Marignane et Vitrolles. Certainement le seigneur penserait à renforcer leur escorte jusqu'à la campagne d'Aix peu sûre comme l'était le domaine vicomtal. Alexis n'avait par ailleurs pris que six gens d'armes. Une livrée robuste à ses couleurs, capable de résister à des archers embusqués, des écus de même, le tout équipé des pertuisanes et d'épées. Deux ouvraient la marche, les quatre autres la fermaient. Son palanquin quant à lui était d'une texture sobre et discrète, seule la garde révélait l'identité de son propriétaire. Et il était ballotté doucement par les deux cheveux de trait soignés par les écuyers du château.
Enfermés dans une boîte plus confortable à l'intérieur que le laissait présager son premier aspect, le vicomte et la belle Aurore. Des coussins, sorte de petit divan portable, accueillaient les occupants. Seuls quelques derniers rayons de soleil passaient à travers les rideaux des petites fenêtres lors des mouvements pour illuminer leur intimité. Alexis faisait passer le temps à sa douce amie par la compagnie de quelques chauds baisers et tendres caresses. Peau dont il ne se lassait jamais de ses saveurs, étreinte désireuse, il aurait tant aimé que le trajet entre Marignane et St-Victoret dure des années, voire des siècles. Il pouvait entendre les murmures et les tintements de fers quand ils s'arrêtèrent, la haie d'honneur était là. Tirant le rideau, Alexis jugea de la fenêtre son vassal monté sur son destrier. Vitruvio était là, prêt, dans une tenue alliant pragmatisme et ostentatoire. Le suzerain s'adressa alors à son fidèle seigneur.
Le bon soir mon ami, nous ne vous avons pas fait que trop attendre !
Je n'ose faire descendre ma galante compagnie et entamer les présentations, peut-être au château..._________________