Extraelle
La brune sourit. Thierryvlad avait soigneusement évité certaines questions épineuses comme son curieux retournement de veste pour redire pour la troisième fois qu'il n'aimait pas deux mesures. Sa version toute personnelle du comique de répétition, sans doute...
"Ce n'est pas un effort d'expliquer les choses quand c'est réellement une explication. Ca le devient quand il s'agit d'une fausse question, qui n'amène aucune réponse, et qui n'est là que pour tirer dans les pattes de son interlocuteur. Quoi que je réponde, vous n'écouterez même pas. M'enfin, puisque vous insistez...
Alors, effectivement, pour le Pictave que vous êtes, le marché trémouillois peut surprendre. C'est une ville de verger et il y a trop de potagers, les fruits et les légumes y sont toujours bas, et autant je pouvais encore les exporter quand j'étais CaC il y a trois quatre mois, autant avec la situation actuelle, cela devient difficile. Si j'étais maire de cette ville, je découragerais fortement les champs de légumes, mais je ne le suis pas, et le Comté a ses limites sur la régulation des marchés. C'est avant tout le rôle du bourgmestre, et il n'y a pas d'ingérence de notre part.
Donc, à part sur ces deux denrées, les prix remontent à la Trémouille, et surtout, fait très important, les stocks fondent à vue d'oeil. Et je n'ai pas besoin de me pencher sur le marché, j'ai l'oeil quotidiennement sur nos marchés poitevins, et vous n'avez pas de chance, peu les connaissent tous les six aussi bien que moi. La viande est passée de 17 à 18 écus en deux mois, et surtout d'une situation de surproduction cet été, on est désormais en pénurie: plus un morceau au marché à l'heure où je vous parle. Il y a un mois jour pour jour, il y avait plus de 400 sacs de maïs à 3,30 qui s'amassaient sur le marché, et je prédisais que cela allait vite changer. Aujourd'hui, il y a 18 sacs à 3,30 écus, 181 à 3,40 écus et 66 à 3,60 écus. Les quantités baissent, et le prix va bientôt remonter.
Le pain qui était à moins de 6 écus est désormais à 6,20 écus. Il y a pénurie sur le lait qui est à 10,30 écus, et nul doute que La Trémouille va pouvoir écouler du surplus des autres villes en lait et en poissons. Bref, je pourrais continuer longtemps comme ça. A l'évidence, vous connaissez mal ce marché, demandez donc à Petitjehan votre colistier s'il pense que les prix baissent ou remontent à la Trémouille, ça risque d'être fort instructif pour vous.
Revenons sur l'assemblée, et je vais être concrète pour que vous compreniez bien. Imaginons par exemple que le Comte désire rédiger un texte sur la citoyenneté, texte qui touche l'ensemble des poitevins. Il est plus intéressant d'en discuter avec le Poitou dans son ensemble plutôt qu'avec un petit groupe, qui est parfois trop dans ses bureaux pour penser à toutes les conséquences sur le terrain. Ou tout simplement parce qu'il y a peut-être ailleurs des gens mieux informés sur ce point précis que les actuels conseillers élus, qui ne deviennent pas des surhommes à la minute où ils sont élus. Sur certains points (et non la totalité des dossiers), c'est une bonne chose de consulter avant d'agir.
Sa fonction sera à la fois de donner au conseil l'accès à un panel plus large d'interlocuteurs, mais il permettra aussi aux Poitevins de s'impliquer. Des discussions éviteraient sans doute les petits couacs qu'on voit régulièrement fleurir, comme notre modification de la coutume toute récente, qui vient annuler celle qui a été prise lors du précédent mandat, et où figuraient des éléments qui n'ont rien à faire dans un coutumier.
En ce qui concerne l'université, laissez moi rire. Il y a une vraie formation de disponible au château et au conseil ? Qui permet d'aider les maires, les nouveaux CaC, les nouveaux baillis ? (Oui, excusez moi de parler ENCORE économie, mais figurez-vous qu'il s'agit de mon domaine de compétence, et donc de ce que je connais le mieux) Absolument rien. J'en sais quelque chose. Actuellement, cela se fait par transmission orale, avec le risque qu'un jour on perde de précieuses connaissances. Dois-je appeler à la barre tous les gens que j'ai formés en quelques mois de temps à ces divers postes pour vous en convaincre ? Demandez donc à votre amie Letilet qui m'a formée quand moi, je suis arrivée au conseil comtal en tant que bailli.
Pour le droit d'entrée, actuellement quand on va à l'Université pour étudier sa voie, on ne paye pas peut-être, et même très cher ? L'éducation est un privilège, l'accès à l'érudition se mérite... Oui effectivement c'est loin d'être démagogique, mais ce n'est pas notre style. N'est-il pas logique que les étudiants contribuent au salaire de leurs professeurs ? Et 25 écus, ce n'est pas cher payé pour disposer d'une vraie formation de qualité à ces postes-clés.
Voilà. Je pense avoir répondu à vos questions, et patiemment de surcroit. Nulle attaque personnelle dans mes propos, juste un légitime étonnement de voir quelqu'un qui a défendu un programme aux élections se retourner contre, maintenant qu'il fait partie d'une nouvelle liste. Sur ce, si vous répétez une quatrième fois que vous n'aimez pas nos mesures, la discussion en restera là. La dernière fois que nous avons échangé icelieu, vous me traitiez de naïve avec un brin de condescendance, et les angevins étaient selon vos dires sur le point de nous attaquer. On allait voir ce qu'on allait voir... On a vu, en effet. Alors excusez moi de ne pas être convaincue par vos intimes convictions, et de l'être davantage par celles des gens qui oeuvrent actuellement pour le Comté."
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Extraelle de Montignac. Hauts, la tête et le verbe.
"Ce n'est pas un effort d'expliquer les choses quand c'est réellement une explication. Ca le devient quand il s'agit d'une fausse question, qui n'amène aucune réponse, et qui n'est là que pour tirer dans les pattes de son interlocuteur. Quoi que je réponde, vous n'écouterez même pas. M'enfin, puisque vous insistez...
Alors, effectivement, pour le Pictave que vous êtes, le marché trémouillois peut surprendre. C'est une ville de verger et il y a trop de potagers, les fruits et les légumes y sont toujours bas, et autant je pouvais encore les exporter quand j'étais CaC il y a trois quatre mois, autant avec la situation actuelle, cela devient difficile. Si j'étais maire de cette ville, je découragerais fortement les champs de légumes, mais je ne le suis pas, et le Comté a ses limites sur la régulation des marchés. C'est avant tout le rôle du bourgmestre, et il n'y a pas d'ingérence de notre part.
Donc, à part sur ces deux denrées, les prix remontent à la Trémouille, et surtout, fait très important, les stocks fondent à vue d'oeil. Et je n'ai pas besoin de me pencher sur le marché, j'ai l'oeil quotidiennement sur nos marchés poitevins, et vous n'avez pas de chance, peu les connaissent tous les six aussi bien que moi. La viande est passée de 17 à 18 écus en deux mois, et surtout d'une situation de surproduction cet été, on est désormais en pénurie: plus un morceau au marché à l'heure où je vous parle. Il y a un mois jour pour jour, il y avait plus de 400 sacs de maïs à 3,30 qui s'amassaient sur le marché, et je prédisais que cela allait vite changer. Aujourd'hui, il y a 18 sacs à 3,30 écus, 181 à 3,40 écus et 66 à 3,60 écus. Les quantités baissent, et le prix va bientôt remonter.
Le pain qui était à moins de 6 écus est désormais à 6,20 écus. Il y a pénurie sur le lait qui est à 10,30 écus, et nul doute que La Trémouille va pouvoir écouler du surplus des autres villes en lait et en poissons. Bref, je pourrais continuer longtemps comme ça. A l'évidence, vous connaissez mal ce marché, demandez donc à Petitjehan votre colistier s'il pense que les prix baissent ou remontent à la Trémouille, ça risque d'être fort instructif pour vous.
Revenons sur l'assemblée, et je vais être concrète pour que vous compreniez bien. Imaginons par exemple que le Comte désire rédiger un texte sur la citoyenneté, texte qui touche l'ensemble des poitevins. Il est plus intéressant d'en discuter avec le Poitou dans son ensemble plutôt qu'avec un petit groupe, qui est parfois trop dans ses bureaux pour penser à toutes les conséquences sur le terrain. Ou tout simplement parce qu'il y a peut-être ailleurs des gens mieux informés sur ce point précis que les actuels conseillers élus, qui ne deviennent pas des surhommes à la minute où ils sont élus. Sur certains points (et non la totalité des dossiers), c'est une bonne chose de consulter avant d'agir.
Sa fonction sera à la fois de donner au conseil l'accès à un panel plus large d'interlocuteurs, mais il permettra aussi aux Poitevins de s'impliquer. Des discussions éviteraient sans doute les petits couacs qu'on voit régulièrement fleurir, comme notre modification de la coutume toute récente, qui vient annuler celle qui a été prise lors du précédent mandat, et où figuraient des éléments qui n'ont rien à faire dans un coutumier.
En ce qui concerne l'université, laissez moi rire. Il y a une vraie formation de disponible au château et au conseil ? Qui permet d'aider les maires, les nouveaux CaC, les nouveaux baillis ? (Oui, excusez moi de parler ENCORE économie, mais figurez-vous qu'il s'agit de mon domaine de compétence, et donc de ce que je connais le mieux) Absolument rien. J'en sais quelque chose. Actuellement, cela se fait par transmission orale, avec le risque qu'un jour on perde de précieuses connaissances. Dois-je appeler à la barre tous les gens que j'ai formés en quelques mois de temps à ces divers postes pour vous en convaincre ? Demandez donc à votre amie Letilet qui m'a formée quand moi, je suis arrivée au conseil comtal en tant que bailli.
Pour le droit d'entrée, actuellement quand on va à l'Université pour étudier sa voie, on ne paye pas peut-être, et même très cher ? L'éducation est un privilège, l'accès à l'érudition se mérite... Oui effectivement c'est loin d'être démagogique, mais ce n'est pas notre style. N'est-il pas logique que les étudiants contribuent au salaire de leurs professeurs ? Et 25 écus, ce n'est pas cher payé pour disposer d'une vraie formation de qualité à ces postes-clés.
Voilà. Je pense avoir répondu à vos questions, et patiemment de surcroit. Nulle attaque personnelle dans mes propos, juste un légitime étonnement de voir quelqu'un qui a défendu un programme aux élections se retourner contre, maintenant qu'il fait partie d'une nouvelle liste. Sur ce, si vous répétez une quatrième fois que vous n'aimez pas nos mesures, la discussion en restera là. La dernière fois que nous avons échangé icelieu, vous me traitiez de naïve avec un brin de condescendance, et les angevins étaient selon vos dires sur le point de nous attaquer. On allait voir ce qu'on allait voir... On a vu, en effet. Alors excusez moi de ne pas être convaincue par vos intimes convictions, et de l'être davantage par celles des gens qui oeuvrent actuellement pour le Comté."
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Extraelle de Montignac. Hauts, la tête et le verbe.