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[RP] Traversée poitevine.

Extraelle
[Poitiers. Premier jour.]

Extraelle ouvrit les yeux et s'étira, encore fourbue par le voyage. Elle se redressa sur un coude pour regarder Mac dormir. La fièvre l'avait repris pendant la nuit, son visage était pâle et ses yeux cernés. Ils avaient été bien imprudents de prendre la route alors qu'il n'était pas encore totalement remis.

Elle se leva et parcourut des yeux la chambre baignée de lumière. Elle n'avait pas l'habitude d'un tel luxe, et soupira d'aise en s'habillant prestement. Jetant un œil sur le baquet de bois qui trônait dans un coin de la pièce, elle se promit de tester ce raffinement plus tard . Chez elle, le bain se prenait à la rivière, et en cette saison, elle y allait de plus en plus à reculons...

Mais pour l'heure, une visite de la ville s'imposait. C'était déjà le début de l'après-midi, et on entendait dehors les échos d'une intense activité. La petite sauvageonne était toute excitée à l'idée de découvrir le fourmillement et la beauté de la capitale, dont elle n'avait eu qu'un aperçu trop bref à leur arrivée.

Ils avaient franchi les portes de Poitiers tôt ce matin, et s'étaient aussitôt enquis de la meilleure auberge de la ville, à la demande expresse de Vendettal. La demoiselle avait beau côtoyer des gueux et vivre librement, elle n'en aimait pas moins son petit confort...
Les voyageurs avaient donc loué deux chambres avec bain, et s'étaient abattus sur leurs couches respectives pour prendre un repos bien mérité.

Le voyage avait été long et étonnamment silencieux. Extraelle, qui chevauchait son étalon avec Mac en croupe, se retournait de temps à autre vers la pouliche de Vendettal. La jeune femme semblait perdue dans ses rêveries, et se laissait conduire comme si elle se moquait de la destination où les mèneraient leurs pas. Cela ne lui ressemblait guère. Elle cachait quelque chose, assurément...

Étrange équipage en vérité que ces deux jeunes femmes en armes et ce convalescent plongés dans leurs pensées, qui partaient sur les chemins poitevins sans but apparent.
Extra profitait de la fin de son mandat pour aller voir quelques amis et découvrir les autres villes du Poitou, mais surtout pour oublier ses tourments des dernières semaines qui avaient laissé son cœur exsangue. Vendettal était du voyage pour tromper son ennui, enfin c'est ce qu'elle prétendait et son amie n'avait pas posé de questions. Quant à Mac... Malgré sa faiblesse, il avait tenu à se joindre à elle, elle ne savait trop pourquoi... Peut-être avait-il peur qu'elle ne se volatilise en chemin ?

Elle eut un petit rire à cette idée, puis se rembrunit aussitôt en pensant qu'il avait bien des raisons de se méfier d'elle, et en se remémorant le mal qu'elle avait pu faire autour d'elle ces derniers temps, avec son tempérament infernal et ses hésitations permanentes.

Quittant la chambre sans bruit, elle alla toquer à la porte de Vendettal et demanda d'une voix forte:


Vend, ma belle ? Tu es réveillée ? Tu viens visiter la ville avec moi ?


Pas de réponse... Soit Vend dormait à poings fermés, soit elle était déjà partie en vadrouille. Extraelle quitta donc l'auberge seule, à la rencontre de la capitale.
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Extraelle
[Poitiers. Deuxième jour. Taverne du gai Clain.]

Extraelle reposait ses pieds endoloris par ses nombreuses excursions à la taverne municipale, assise dans un coin, les jambes croisées sur la table comme à son habitude. Le tavernier l'avait regardée d'un mauvais œil mais n'avait rien osé dire, il faut dire qu'elle avait gardé sa longue épée à la ceinture et n'avait pas pris un air véritablement engageant.

Elle sortit plume et parchemin et se mit à griffonner, le sourire aux lèvres.



Citation:
Ma chère Cali,

Voici comme promis les premières nouvelles de mon voyage...
Poitiers est une grande et belle ville qui cultive les paradoxes. La Halle est digne d'une capitale, riche, vaste et intéressante. Je m'y suis promenée avec grand intérêt, piochant ça et là quelques idées d'aménagement pour la nôtre. Mais chose un peu surprenante, l'activité n'est pas aussi dense que je l'aurais pensé, et notre petit village n'a rien à lui envier de ce côté.

Ma première soirée en taverne a failli être un fiasco. Tout a commencé avec l'apparition d'un angevin incognito mais que j'ai tôt fait de démasquer, vu qu'il passait son temps à cracher sur le Poitou avec moults sarcasmes. Il s'est avéré que c'était le cousin de Vendettal, chose qu'il ne veut visiblement pas que j'ébruite, mais je m'en moque éperdument n'ayant pas de comptes à lui rendre et aucune envie de lui faire plaisir. Ce rustre passablement énervé d'être immobilisé 45 jours dans la capitale suite à une altercation avec notre armée, m'a tout bonnement embrassée, puis s'est enfui en m'insultant, avant de se confondre en plates excuses quand je l'ai revu aujourd'hui. Bref, cette rencontre ne risque pas de me donner une meilleure opinion de nos voisins querelleurs.

Après une interdiction de rentrer en taverne des plus fâcheuses, qui m'a condamnée à errer dans les rues comme une âme en peine, j'ai pu enfin me rincer le gosier en compagnie de la délicieuse Kiliana, qui est une ancienne collègue Tribun, de Daien, l'ami de Sandy et fier humoriste, et d'une charmante excentrique dont je me suis entichée, tant et si bien que je lui ai offert quelques sous pour qu'elle puisse acquérir sa liberté et se joigne à nous.

Me voilà donc avec une nouvelle compagne de voyage, Erzebet, elle prendra la place de Mac qui va rester à Poitiers, le pauvre a trop présumé de ses forces et doit prendre du repos. Nous le récupèrerons au retour...

Ensuite, direction Niort où j'espère revoir Neferoure et peut-être rencontrer enfin la célèbre Nessty dont elle m'a tant parlé et que j'aimerais beaucoup voir de mes yeux, bien qu'elle soit l'ancienne flamme de Mac... Mais que veux-tu, tu me connais, j'aime vivre dangereusement...

Je te laisse ma toute belle, car voici de la compagnie, le fameux angevin dont je te parlais plus haut...

A très vite, prends soin de toi, et de lui...
Je t'embrasse.

Extraelle

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Erzebet
[Le soir du départ.]

Du Gai Clain s'élèvent les éclats de voix, les ris, les bruits des chopes qui s'entrechoquent vivement. Une chaleur noctambule berçant la rue de la soif pictave en une houle imbriaque et grisée, écumant les rues, les pavés, les murs... Des lueurs s'échappent des vitres embuées de la taverne, dont le portier se trouve être une armoire bretonne pas très commode ces temps-ci. Kissiou, Fayom... Et même Sandrae eurent à supporter la mauvaise humeur de ce dernier, mal dans ses godillots assurément. Pour qu'il en vienne à s'en prendre à la patronne... Fallait être un brin barré, ou avoir un problème d'belle-doche ménopausée au gourbi. Mais cela n'manque pas d'agrémenter la soirée de jet de chaises contre l'affreux jojo qui n'manquait pas de toupet, pour ainsi dire, et ayant par ailleurs réussi à mettre la tavernière à bout. Des choses à en devenir branque, et c'est ce qui ne manque pas de traumatiser la susnommée tavernière, qu'Erzébet ne se soustrait pas à enlacer, bichonner, rassurer malgré le trauma. Sa pauvre amie a b'soin de réconfort, d'jà qu'elle aimerait elle aussi partir en voyage... La Colombe Noire se sent soudainement légère. C'est peut-être égoïste, mais elle se dit qu'elle n'aimerait pas être à la place de Dra. Vogue la tsigane, l'horizon recule toujours malgré tes pas... Mais rester cloué à Poitiers. Hem.

Après un bout de temps, il est l'heure de lever les voiles et de laisser la taverne à sa beuverie. Elle se vide. Elle est transpercée de part en part par des courants d'airs. Elle s'éteint progressivement.
Erzébet, séant posé à côté de la noble Extraelle, se lève, s'étire longuement, et puis tourne sa tête brune vers sa voisine. Sourire en coin. Regard de velours. Et soudain, coup de bassin vers la droite, l'Erzébet se dirige vers la ch'mise d'la châtainette qui a d'jà bien séché, l'attrape d'un seul mouvement rapide, puis se retourne vers Extraelle et la lui lance. Vol grâcieux du vêtement, étoile filante textile, aérolithe diaphane à travers la taverne. Erzébet suit des yeux la trajectoire du projectile, qui retombe vers sa compagne de voyage, attrapé ensuite par sa main d'un geste tout aussi rapide. Main posée sur la hanche. La Romni avise l'assemblée d'un regard scrutateur. Front haut, elle se redresse, puis salue les piliers d'taverne d'un " Latcho drom ! " enthousiaste, vif. Extraelle, chemise à présent séchée, ainsi qu'ses bottes, s'apprête à en faire tout autant, et à quitter la tablée. Maintenant est venu le temps de prendre la route, l'objet de toutes les impatiences de la gitane pouvant enfin être consommé. Erz' tourne le dos à l'assemblée, et roulant d'la croupe vers la sortie, renifle l'odeur de fauve du vouyou de portier lorsqu'elle passe devant lui pour aller dehors. De l'odeur de mâle, ça. D'la bonne odeur, qui titille ses narines, et bien sûr sa gloutonnerie.
Elle pouffe de rire dans son châle aux franges colorés, puis racle sa gorge et foule le pavé déjà.

Dans la rue, la Colombe Noire réajuste son châle un peu mieux sur ses épaules, attendant qu'Extraelle sorte aussi. Les pierres de cette rue sont baignées d'une lueur sélénite tout à fait saisissante. Les pas, les sabots résonnent contre le pavé. Tout est plongé dans un calme glaçant. La froidure monte, peu à peu. Cela ne saurait tarder, et à cheval, l'air doit être plus piquant au museau.
Erzébet tourne sa tête vers la porte de la taverne. Et bientôt, elles allaient partir toutes trois vers La Trémouille, qu'un voyage d'un jour les sépare.

Extraelle lui emboîte le pas, allure de cavalière au sang bleue, et au port altier. Des joues quelque peu rougies par l'humide chaleur de la taverne, dont les vitres restent couvertes d'une buée indécrottable. Purée d'pois: on n'y aperçoit que dalle. Erzébet hausse des épaule en y r'pensant. D'toute façon, elles n'y retourneront qu'à partir de mercredi. Si toutefois elles continuent l'chemin ensemble, bien sûr.
Sa compagne enfin sortie, la Colombe Noire l'aborde en lui touchant la joue gauche de son index tendu vers elle, les autres de ses doigts repliés vers la paume. Bref éclair tactile, un simple effleurement espiègle qui entraîne Erzébet à afficher un sourire satisfait.


Héhé, gadji, j'te dois le voyage à canasson et le permis d'quitter la ville... Ca fait beaucoup pour une seule nénette. Alors ma reconnaissance rétribuée, jusqu'à quand s'étendra-t-elle dans la durée? J'imagine qu'elle durera un temps proportionnel à la faveur que tu m'as faite...

Son air malicieux en dit long sur son humeur joviale et taquine. Elle rigolboche. Ce rire rauque qui accompagne le martèlement des pas sur le pavé pendant qu'elles marchent vers les dadas.

Il fait peut-être frisquet, mais au moins, le ciel est dégagé. Immensité sombre aux étoiles glacées, toisant de toute leur superbe le commun des mortels. Et la lune, joufflue... Bienveillante...
Des ombres sur les murs à sa douce lumière.

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Erzsébet Báthory, comtesse de ses fesses...
Diseuse de très bonnes aventures.
Paloma Negra...
Vendettal
[Poitier]

Une odeur moite… alliance étrange d’arômes boisés et d’effluve citadine… des étoiles qui scintillent sur un fond noir despotique… un partie de cache-cache entre la lune et quelques nuages égarés qui par impulsion téméraire affrontent le vent dans une danse sensuelle… D’un soupire, ses yeux couleur azur sont hypnotisés par le spectacle nocturne. Tout respire le souvenir de cette nuit là… Le décor est à l’identique. Un seul élément manque… Lui…

Mais elle a décidé de fuir. Peut être veut elle mettre à l’épreuve ce sentiment nouveau et passionnel qui grandit en elle et qui l’effraie… Ou peut être attend elle qu’il la rejoigne au péril de sa vie lui prouvant ainsi son amour pour elle... Ou veut elle simplement l’oublier… Qui sait ? Ses idées s’embrouillent et des doutes antithétiques s’entrechoquent dans le plus total anonymat. Si seulement sa mère était encore en vie, elle la conseillerait.

Une fumée formée des vapeurs de soupirs s’échappe de ses lèvres entrouvertes. Son visage s’assombrit malgré les lueurs de la lune qui se reflètent dans ses yeux. Ses pensées s’égarent à nouveau… vagabondent… dans les méandres d’une mélancolie subtile… passagère invisible sans billet… elle va et vient au gré de ses envies, envahissant la jeune femme comme par enchantement avant de l'abandonner sans préavis.

Elle repense alors à sa venue ici. Poitiers… Elle y séjourne depuis 2 jours. Le voyage s’est passé sans encombre. Extra a trouvé la meilleure auberge de la ville des leur arrivée. Mais Vendettal n’est que peu sortie. Pourquoi ? Elle qui veut voir le monde… elle qui déborde de vie… voilà qu’elle se surprend à aimer la solitude... louve sauvage même au milieu de la foule… la jeune femme grandit… tout simplement.

Perdue dans ses pensées, une brise vient lui caresser le visage et Vendettal retrousse le nez. Sa tête délicatement posée dans l’herbe humide se relève lentement alors qu’elle réalise brusquement qu’elle est allongée là sous cet arbre depuis quelques heures. Dans un mouvement de panique, elle se redresse. Il est tard… Extralle et Erzebet doivent l’attendre.
Ni une ni deux, elle ramasse son sac et s’empresse d’aller rejoindre sa pouliche entendant au loin des rires qu’elle ne manque pas de reconnaître…
Mac_hyavel
[Poitiers Chambre d'hôtel]

C'était la deuxieme fois que Mac Hyavel se réveillait de sa torpeur. Il avait fait des rêves étranges. Le dernier était un cauchemar.
Il sursauta en se réveillant, en nâge, il se sentait chaud, vraiment pas bien, non reposé, terriblement éprouvé il ne savait pourquoi.

Cherchant à se rassurer, il tâta un peu ce qui semblait être un oreiller, il ne savait pas où il était, puis sentit dessous lui une espece de papier. Il le prît, regarda qui lui avait écrit (il se doutait quand même un peu du nom de la personne), et lu le mot espérant y trouver paroles réconfortantes.

Probablement que c'était le but de ce mot, mais l'esprit encore préoccupé par des récents évennements, Mac ne voyait que certains qui pouvaient être interprétés de deux manieres. Il ne lisait pas la lettre, il lisait une phrase, lisait la relisait à se fatiguer les yeux. Et plus il la lisait, plus un préssentiment grandissait en lui, et plus ce préssentiment était là, plus il lisait la phrase comme pour se rassurer...

Finalement n'y tenant plus, il rassembla ses forces pour prendre une plume, et écrivit à celle qui lui avait adressé ce message.
Alors qu'au départ il voulait savoir, il se rendit compte qu'un tel geste ne servirait à rien, et lui ferait probablement plus de tords encore, si ce préssentiment était vérifié, il la perdait de toute facon, et si il ne l'était pas, là il la perdrait alors qu'il ne l'aurait pas fait si il ne disait rien. C'est donc une lettre relativement banale, fortement gentille mais banale qu'il écrivit.

Puis épuisé, se rendit compte qu'il n'avait encore rien mangé, mais malgres la faim, l'appétit n'était pas là, il ne pourrait même pas arriver.
Exténué, il posa sa tête contre l'oreiller, puis lentement ferma les yeux, les cauchemars encore plus sombre et plus étranges allaient s'emparer de lui pendant un moment, il le savait

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Cultivateur de paradoxe




La réflexion est l'affaire des miroirs
Extraelle
[Poitiers. Soir du départ]

Elle emboite le pas de la froufroutante tsigane, non sans jeter un œil appréciateur sur son croupion dandinant avec un sourire mi amusé, mi conquis. A peine sortie, l'air froid la saisit jusqu'à la moelle à travers sa chemise encore légèrement humide, et elle resserre sa cape autour d'elle en frissonnant.
La lune baigne les ruelles de Poitiers d'une lueur bleutée, le décor se fait mystère aux ombres dansantes et fantomatiques.

La brune se rapproche dans un cliquetis de colliers et lui colle une pichenette sur la joue, en susurrant de sa voix rocailleuse:


Héhé, gadji, j'te dois le voyage à canasson et le permis d'quitter la ville... Ça fait beaucoup pour une seule nénette. Alors ma reconnaissance rétribuée, jusqu'à quand s'étendra-t-elle dans la durée? J'imagine qu'elle durera un temps proportionnel à la faveur que tu m'as faite...

Beauté, tu ne me dois rien du tout, et tu es libre de tes mouvements. Je ne t'ai aidée que pour avoir le plaisir de ta compagnie pendant ce voyage, au moins sera t-il plus animé que celui qui m'a mené dans cette ville.

Puis, souriant malicieusement:

En fait, ce n'est pas tout à fait tout. Par ce froid, la course à cheval ne va pas être des plus agréables, et le contact d'un bel animal à sang chaud tel que toi ne sera pas de trop pour me réchauffer.

Elle éclate de rire, et se tourne vers le haut de la ruelle en entendant des bruits de pas qui se rapprochent. Plissant les yeux, elle distingue la silhouette de Vendettal et sourit d'un air satisfait.
Sautant en selle avec souplesse, elle se penche pour cueillir la fleur exotique qui pose en croupe son séant dodu et se colle à elle aussitôt.

Les deux chevaux marchent côte à côte, faisant résonner de leurs sabots les pavés pictaves et laissant derrière eux le centre ville endormi. La thouarsaise se dirige sans hésitation dans le dédale de ruelles où elle a usé les semelles de ses bottes pendant ces deux jours. Elle repense à Sandrae et Sylmeria avec une bouffée de reconnaissance. Ses deux amies lui ont fait découvrir les moindres recoins de la ville et ont égayé cette visite de la capitale, qui s'est soldée par la dégustation de spécialités alcoolisées... mais aussi de l'eau du lavoir local dans lequel elle a fait un plongeon inopiné. Fayom aussi, qui a défaut d'être parfait s'est révélé un heureux compagnon de taverne, pauvre soldat niortais coincé ici et souffrant du mal du pays.

Les trois jeunes femmes arrivent enfin aux portes de la ville et dépassent les hauts remparts pour s'engager sur la route que la rotondité opalescente, encastrée dans un ciel sans nuages, dessine de son éclat lunaire. Ses pensées s'envolent vers celui qu'elle laisse ici. Drôle d'histoire qu'ils commencent à écrire ensemble, l'un sur les routes et l'autre qui garde la chambre, elle si vive, si impétueuse et volcanique, lui fiévreux, maladif, faible...
Pourquoi s'attache t-elle à cet être étrange qui ne lui ressemble en rien et qu'elle a tant de mal à cerner, elle ne le sait pas. Cet amour qui grandit en elle et qu'elle surveille d'une fébrilité inquiète, ne s'arrête ni aux défauts, ni aux absences de cet homme insondable.
Elle ne tente pas même de comprendre, et se laisse porter sans impatience, chose qui là encore n'est pas dans ses habitudes. Mais l'attente est aussi délectable que la conquête, et pour rien au monde elle ne renoncerait à ce vertige délicieux et insoutenable qui la saisit quand elle l'aperçoit.

Un accent chantant vient la tirer de ses rêveries, la colombe se lance dans le récit de ses exploits avec son dernier pigeon. La mine réjouie, la cavalière éperonne sa monture en riant, la chevauchée ne manquera pas de piquant.

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Erzebet
[La nuit. La route.]

Beauté, tu ne me dois rien du tout, et tu es libre de tes mouvements. Je ne t'ai aidée que pour avoir le plaisir de ta compagnie pendant ce voyage, au moins sera t-il plus animé que celui qui m'a mené dans cette ville.
En fait, ce n'est pas tout à fait tout. Par ce froid, la course à cheval ne va pas être des plus agréables, et le contact d'un bel animal à sang chaud tel que toi ne sera pas de trop pour me réchauffer.


Grimpées sur l'canasson, elles prennent la route, nuit tombée, silence de la ville qu'elles quittent. Silence étouffant d'une léthargie environnante. Le bruit de la chevauchée entamée perce la bulle de ce mutisme pictave. Silhouettes inquiétantes qui traversent les portes de Poitiers et s'engagent sur la route menant à La Témouille. Des souffles chauds crevant l'air frigorifié et frigorifiant de ces obscurités nocturnes du mois de novembre. Leurs souffles chauds. Epousant la cadence de la foulée équine, tenue par la pression des cavalières, qu'elle soit au niveau des jambes, de l'assiette ou de la badine. Ces souffles chauds qui trahissent de leur présence sur la route déserte.
"Pataclop, pataclop, pataclop...", cavalières qui filent à travers la brume de ces ténèbres avec l'heureux dessein de trouver au bout une ville égayée. Et sans regret, Erzébet laisse une ville où sa différence avait fait la différence, très justement. Oh... Peut-être si, pour Sandrae. Mais la Romni ne désespère par un jour de la voir prendre la route avec elle. Un jour. Ou une nuit... Comme cette nuit-là.

Vigoureuse, la bête!

Avait-elle lancé à l'intention d'Extraelle, qui lui a permis ce baptême de cavalcade. Et vrai qu'il fait bien frisqué en c'moment...
Bras ceinturant fermement la taille de la Thouarsaise, Erzébet pose sa main sur la hanche de cette dernière, étendant ses doigts longuement. Première fois qu'elle monte à ch'val, alors pour sûr... C'est pas de tout r'pos. La gitane est secouée dans tout les sens, ballotée comme un sac à patates, et dont l'assise est du moins assez inconfortable. La bestiole, sans autre scrupule que celui de marcher, trotter ou galoper vers La Trémouille, ne lui laisse guère de répit. Lorsque l'allure s'accélère, s'accentuent aussi les peines pour Erzébet. Et à commencer par le déplaisir des saccades répétées du dos de l'animal contre sa féminité. Chose qu'on a pu lui contester, et qu'à ce moment, elle aurait aimé ne pas avoir! Eh quoi? Peut-être qu'en étant homme, elle aurait eu moins mal à canasson. Mais pour l'instant, faut qu'elle serre les dents, et qu'elle s'accroche à la taille et à la hanche d'Extraelle. Surtout qu'elles en auraient pour un bon moment avant d'faire une halte...

Alors la Romni, après un temps, pas moins douée qu'les autres, commence à s'adapter exactement aux mouvements du cheval, suivant du bassin le rythme de l'animal, articulant sa colonne aux maudites secousses, comme pour trouver une harmonie entre les foulées du dada et le confort de sa position sur celui-ci. Il lui a fallu un bon moment, mais voilà qu'tout est dans l'ordre. La tsigane a dressé le déplaisir. Y'a au moins ça, hein...
A l'aise à présent, à dos d'cheval, la Colombe Noire tient d'une manière plus ferme la hanche de sa cavalière émérite devant elle, repliant ses doigts sur le vêtement, atteignant doucement la chair, comme un chat ravi. Tout cela, en effet, pour se tirer vers la choucarde. Puis elle se penche peu à peu vers l'avant, s'approchant lentement du dessus de l'épaule d'Extraelle. Soucieuse de s'équilibrer parfaitement, cette fois, aux mouvements de l'animal et de la jeune femme, Erzébet presse sa main qui se trouve alors sur le ventre d'Extraelle, dont le bras enserrait la taille, afin de l'attirer contre elle et d'épouser au mieux la courbe de son dos.
Finalement, quand tout est accompli, la brune aux yeux noirs peut enfin incliner sa tête sur le côté, effleurant la partie du cou découvert d'Extraelle, et son oreille aux boucles châtains. Dans un souffle voluptueux, l'Erzébet lui susurre d'une voix mêlée de suavité et de rogomme à la fois:

Et par ce froid, la nuit à La Trémouille risque de ne pas être non plus des plus agréables... A charge de quittance, belle gadji.

La Romni arbore un sourire en coin, tête légèrement balancée vers la gauche afin d'avoir une vision plus large d'Extraelle, l'odeur de ses cheveux lui titillant les narines. Puis la Colombe Noire a une brève seconde de rire, de ce rire rocailleux qu'elle diffuse et partage. Un rire qui change parfois, qui prend d'autres tons, d'autres rythmes, et qu'elle étrenne avec un grain d'folie non dissimulé. Enfin, un rire qu'elle veut franc, et ce rire, il lui donne toujours du plaisir à être libéré en fin de compte.
En toute situation.
Relâchant légèrement sa prise d'avec sa main droite sur le ventre d'Extraelle, Erzébet se redresse progressivement, toujours penchée au-dessus de l'épaule de la belle gadji. Et avec son petit sourire satisfait qu'on lui connait, bien entendu. Lance son regard loin devant les deux oreilles de l'animal, suivant des yeux la ligne de la route, qu'une lumière lunaire éclaire.

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Erzsébet Báthory, comtesse de ses fesses...
Diseuse de très bonnes aventures.
Paloma Negra...
Extraelle
[Nuit. Trajet entre Poitiers et La Trémouille]

Froidure humide et glaciale, éclat lunaire d'une campagne silencieuse et paisible martelée par les sabots de deux équidés au galop... La thouarsaise goûte cette chevauchée, faisant corps avec sa monture et offrant son visage au vent glacé qui s'insinue dans ses vêtements.

Sensation de liberté bienvenue, elle se sentait à l'étroit dans son patelin, et là, tout à coup, la vie semble s'offrir à elle sans aucune limite. Elle s'amuse de l'incongruité de la situation: une simple villageoise, traînant dans son sillage une jeune noble de haut rang et une gitane diseuse de bonne aventure... trois femmes que tout sépare galopant en pleine nuit sur les routes poitevines.

Une main se resserre sur elle, trouvant sa peau nue sous la chemise et lui rappelant qu'elle n'est pas seule sur l'étalon. Elle sent que sa compagne derrière elle commence à être plus à l'aise, et accompagne mieux les mouvements du cheval. Elle s'apprête à lui glisser quelques mots d'encouragement quand un souffle chaud et une voix rocailleuse viennent caresser son oreille, la parcourant de frissons.


Et par ce froid, la nuit à La Trémouille risque de ne pas être non plus des plus agréables... A charge de quittance, belle gadji.

Elle éclate de rire, suivie de la Romni avec qui elle partage une étrange complicité, déjà. La brune la fascine, princesse aux pieds nus, riante et chantante comme un ruisseau de montagne, féminine et roucoulante dans ses colliers et ses froufrous, frisant le ridicule mais ne l'atteignant jamais, car à défaut d'avoir la bourse bien garnie elle a la richesse de l'âme.

Extraelle commence en pensée la lettre qu'elle enverra à Mac à son arrivée, pour lui décrire ce trajet et leur nouvelle compagne de voyage. Elle a envie soudain de partager cet instant avec lui. Elle attisera sans doute sa curiosité, savourant à l'avance le plaisir qu'elle lui donnera en lui faisant rencontrer cette merveille venue d'ailleurs. Elle sait que comme elle, il l'aimera.

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Extraelle
[La Trémouille. Quelques jours plus tard]

Calée contre le dossier de sa chaise, Extraelle tirait sur sa bouffarde, soufflant avec volupté quelques ronds de fumée dans la taverne déserte et silencieuse. Elle avait fui la Taverne Hurlante, bondée, et qui pour le coup portait bien son nom, pour choisir un lieu moins fréquenté et y attendre son excentrique amie qui se faisait désirer.

Elle avait déjà envoyé quelques lettres en réponse à la correspondance reçue ici, à son ami Bambata, plus surprenant au curé Loupfred, et bien sûr quelques missives plus ou moins enflammées, plus ou moins excédées, à cet agaçant et non moins adorable Mac.
Il y avait une autre personne à laquelle elle pensait beaucoup, mais cet ami, elle l'avait perdu de l'avoir trop aimé, et savait qu'elle ne devait chercher à le joindre...

Elle se décida à commencer un nouveau courrier, cette fois destiné à son frère qui ne lui avait rien demandé, et surtout pas de lui écrire, mais elle devait s'avouer que le diablotin lui manquait.


Citation:
Salut insupportable frangin,

Je t'écris de La Trémouille, où mon séjour touche à sa fin. Le village est tel qu'on nous l'a décrit, vivant, animé et joyeux. Non, ne te réjouis pas trop vite, je n'ai point décidé de rester m'y installer et tu n'es pas encore débarrassé de moi. Déjà, j'ai joué de malchance puisque la Halle m'est restée désespérément inaccessible, ce qui m'a grandement ôté le plaisir de découvrir la ville. Ensuite, je ne sais si je me fais vieille ou non, mais toute cette vie désordonnée est épuisante à la longue, et si ce n'est le charmant couple que forment notre ami Eragon et sa douce Araya, ainsi que le duo de compères Lorryus et Forcehung, je n'ai guère goûté que la compagnie de ma pétillante nouvelle amie.

En parlant d'Araya, sais-tu que tu es incroyablement borné, que cette fille est délicieuse et aurait tout à fait sa place sur le sol poitevin. Oui, je te vois déjà sourire dans ta moustache, peu te chaut mon avis, et c'est bien dommage, cela t'éviterait quelques bévues parfois.

J'en profite pour réclamer une faveur, celle de prolonger l'autorisation de ma lance d'une dizaine de jours, le temps que nous visitions dignement Niort, puis sans doute La Rochelle et Saintes. A mes deux compagnons de voyage s'ajoute donc la divine Erzébet, vagabonde inoffensive et diseuse de bonnes aventures, qui n'a pour seules armes que son regard de velours et son don pour extorquer quelques piécettes en disant ce que son client veut entendre. Merci d'avance Prévôt de mon coeur.

A bientôt chiante chose, et prends bien soin de Thouars en mon absence, c'est que ce patelin de bouseux me manque, mine de rien.

Extraelle

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Vendettal
[La Trémouille]

2 jours… 2 jours se sont déjà écoulés et c’est de nouveau le départ. Vendettal fait son sac… Elle n’a pas emporté beaucoup d’affaire, d’ailleurs, elle ne possède presque rien. Arf le matériel ? Aucune importance ! Même si la jeune femme est née une cuillère en argent dans la bouche. La liberté et ce sentiment incomparable qui vous enivre sur les chemins, vous parcoure de la tête au pied, voilà sa drogue. Et puis depuis son enfance, elle ne cesse de parcourir les routes, à la découverte du monde. Pourtant, cette fois, elle aurait aimé resté un peu plus dans cette ville dont on lui a tant parlé : La Trémouille. Malheureusement, elle n’a pu croisé que peu de monde en taverne. Volonté manifeste ou manque de temps, le résultat est le même. Un soupçon de regret s’impose délicieusement à elle alors qu’elle vérifie qu’elle n’a rien oublié dans sa chambre d’hôtel. Elle reviendra… Elle en est sure à présent, c’est une évidence.

Affaire emballée… Elle se dirige vers la sortie. Mais on frappe à la porte et une petite voix résonne en cadence avec les bruits environnant de l’auberge.


Damoiselle Vendettal! Une missive vient d’arriver pour vous.

Son enchanteur glissant sous la porte… Vendettal saisit le parchemin. Aucun cachet… Aucun sceau. Elle s’assoit sur le lit quelques minutes regardant comme pétrifiée cette lettre. Et si c’était lui ? Et si ce n’était pas lui ? Ses battements de cœur s’accélèrent et sa veine jugulaire se gonfle et se rétracte à foison… pléthore locale puis généralisée… Elle reste là un instant fixant le parchemin. Elle se décide enfin à l’ouvrir non sans en avoir déchiré un coin dans sa hâte. Une seconde lettre contenue dans la première tombe au sol. Elle la ramasse et les lit… relit… et relit encore, s’imprégnant de ces quelques mots… Son cœur bat maintenant la chamade… divine sensation... reddition sans appel… elle est submergée par un sourire niais. D’un bond elle se lève, prend une plume et griffonne quelques mots avec empressement.

Citation:
Yop Chuichian,

Tout va bien… ta sœur se tient relativement bien (et moi aussi ) et le voyage se passe sans encombre. Tu devrais venir visiter la Trémouille à l’occasion et sortir un peu, c’est… digne de sa réputation !
Je t’écris ces quelques mots afin de solliciter un laisser passer. Je te joins à ce courrier la demande et j’espère de tout mon cœur que tu y porteras attention. Ne t’étonnes pas si elle est écrite en vers… l’amour parfois est source d’inspiration…
Portes toi bien Chuichian et n’embête pas trop les gens hein !
Qu’Aristote veille sur toi.

Tal


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Citation:
Messire Chuichian,

Je vous demande par cette lettre,
D'accéder à une simple requête,
De l'octroi d'un laissez-passer,
De joie, vous me combleriez,
Las, je suis de ne la voir,
Elle, qui réside à Thouars,

Il n'y a cependant qu'une frontière,
En proie à mille misères,
Un mur invisible qui nous sépare,
Seule barrière à notre histoire,
Car mon aimée se trouve en votre Comté,
Et la retrouver n'en serait que volupté,

Ainsi, messire, je sollicite,
L'attribution d'un droit de visite,
Mes armes en ma demeure je laisserai,
Seul et entiché, je viendrai,
de Vendettal, elle se prénomme,
et Moulte frites, je me nomme.

A remettre à qui de droit, à messire Chuichian, prévôt des maréchaux

A peine le tout cacheté, étalant un sourire de plus en plus niais sur ses lèvres couleur framboise, que la voilà sortie en trombe, son sac à la main, dévalant les escaliers de l’auberge deux par deux afin d’aller retrouver Extra et Erz à l’écurie.
Kilderic
Alors qu'il se promenait dans les rues de Poitiers, Kild' vit sa cousine passer.

Blurp!

Il l'a suivit un court instant, se disant que si elle était là, c'était peut être pour le voir. Puis, se rappelant de son altercation avec elle, il se dit que ça ne pouvait être ceci... Il décida donc d'aller la voir. Il esseya de marcher d'un certain pas, pour la rattraper.

Yop Vendé!

Un sourire naquit sur son visage, pendant qu'il regardait autour de lui. Puis, un riend e temps après, son regard se reposa sur Vendé.
_________________
Chuichian
[Thouars, Cabinet du Maire]

Un bout de chandelle éclairant d'une vacillante lueur les quelques parchemins disposaient, éparpillés serait peut-être plus juste, sur le bureau du maire. Fin d'une journée harassante au service des Thouarsais et du Poitou. Chuichian quitta son siège pour s'approcher de la fenêtre. Le soleil s'était couché il y a plusieurs heures maintenant.

La lune pleine dispensait une obscure luminescence sur le petit village poitevin. Soudain une forme sombre se détacha du ciel. Un curieux volatile se dirigeait vers Thouars en provenance du Sud. Le messager orienta son vol vers le dernier lieu encore éclairé à cette heure tardive.
Chuichian ouvrit la fenêtre afin de permettre au piaf de se poser. Il lui délivra un message provenant... de sa soeur.
La surprise passée, il se décida à lire le courrier. Peut-être lui annonçait-elle son départ définitif. Enfin il en serait libéré. Tout guilleret il décacheta le parchemin et se mit à lire.

Il parcourut la lettre rapidement. La dernière phrase retint particulièrement son attention...

Ce village de bouseux me manque murmura t'il pour lui-même.
La décéption ne perça pas sur son visage, pourtant il savait qu'elle reviendrait sous peu.
Il s'accorda quelques instant afin de lui répondre.

Citation:
Ma chère Extra,

Qu'elle joie de voir une missive de ta part. Celle-ci m'emplit de joie. Qu'elle joie également de savoir ton retour prochain. Le village est comme tu l'as laissé en partant: Plein d'amour, d'harmonie et de spiritualité. Vivant, joyeux, sans haine ni discorde. Un véritable paradis. Tout le monde attend ton retour avec impatience.

Quand à ton avis, j'en fais grand cas, si si je t'assure, même si cela ne se voit pas.

Prend soin de toi.
Bon voyage.
Ton chiant frangin qui tient à toi (enfin pas trop quand même)


Il reposa sa plume, relut une dernière fois la missive et lui fit parvenir grace à un de ses pigeons particuliers. Le volatile s'envola en direction du destinataire.

Chuichian se frotta les yeux, l'heure était avancée. Il décida donc de rejoindre sa couche. Il souffla la chandelle qui était à bout et ferma à double tour le bureau.

_________________
Lieutenant de la Police de Thouars
Tribun de Thouars du 29 mai au 28 Juillet 1456
Auteur premier des "Chuichianiseries"
Maire de Thouars
Prévôt des Maréchaux
Mac_hyavel
[Poitiers, chambre d'hôtel, 9 novembre]

Mac Hyavel lisait une lettre, cette correspondante semblait mettre beaucoup de zèles à lui envoyer des missives. Que contenaient elles ? Des mots rassurants, des mots doux, des mots qui font du bien, du moins pour quelqu'un d'a peu près sensé et normal au niveau moral. Quel sombre destin voulait qu'il ne s'attarde là où il ne devait pas s'attarder ?
En tout cas, plus il regardait cette lettre, moins il la lisait, et plus il s'attardait à ce qui lui faisait mal, mû comme par un désir malsain de se faire souffrir moralement. Il ne lisait que ce qu'il voulait, et en l'occurrence il voulait, pour une raison totalement incompréhensible, avoir raison et se faire du tord, pour rien peut être par ailleurs.


Ainsi c'est donc cela. Pensa t'il à l'intérieur de lui-même.
Elle l'a prise pour cela. Cette fois ci c'était un cri qui venait du coeur.

De rage il tapa de sa main valide contre le mur, il ne souffrait pas physiquement tellement la douleur morale était intense. Il fallait qu'il se calme, une fois déjà il avait cédé à cette tentation et il en regrettait encore les conséquences, peut être même les regretterai t'il toute sa vie, en tout cas il avait l'impression que ces conséquences il les avaient maintenant, comme si il était pris dans un cercle vicieux. Il se devait d'en sortir.
Pour se calmer, il ouvrit la fenêtre afin de sentir le vent glacial le frapper de plein fouet contre son torse nu. Il savait que cela n'aggraverait pas son état, car il était déjà au plus bas. Il posa ses mains sur le rebord de la fenêtre et plongea son regard sur la ville. Il resta comme cela de longues minutes, ne bougeant pas, ne répondant pas aux commandements de son corps qui lui réclamait de retourner à l'intérieur.
Finalement il se décida à retourner dans sa chambre.
En rentrant, il toisa le crucifix qui ornait la pièce et lança à Jésus un :

T'es un petit salaud dans ton genre tu sais ?

Il se posa contre le lit, il se souvenait d'un message lui disant qu'elles avaient prises (Vendettal et elle) deux chambres, étant donné qu'elle avait accès à la sienne, c'était donc eux deux qui en avaient pris une commune. C'est vrai que le lit paraissait grand, suffisamment pour deux personnes pour dormir et trois pour faire autre chose.
Et si pendant son sommeil elles avaient ? A côté de lui, toutes proches ? Etait ce de là que lui venait ses si étranges rêves ? Si ca se trouve, elles n'avaient pas dormies. Si ca se trouve? C'en etait meme certains, tellement occupées qu'elles devaient être, au moins elles avaient vu l'aube se lever.
Un sentiment de dégoût venait du fond de sa gorge, la bile semblait venir. Puis il prit sa plume pour répondre, il décida de ne rien laisser transparaître quand à ses sentiments et sensations actuelles, si ça en était là c'était de sa faute et uniquement de sa faute. Il transmit donc dans ce courrier sa volonté de s'améliorer, tout en faisant comme si il n'était pas jaloux.
Puis à contre coeur il se restaura.

_________________
Cultivateur de paradoxe




La réflexion est l'affaire des miroirs
Extraelle
[La Trémouille. Nuit du départ vers Poitiers]

Extraelle passa dans sa chambre d'hôtel récupérer ses quelques affaires et préparer son baluchon. Sur le chevet, deux lettres posées en évidence.

La première la fit sourire. Son frère, qui a défaut d'être tendre, ne s'était pas départi de son humour légendaire... Thouars, havre de paix et de spiritualité ? Elle rit de bon coeur et s'imagina déjà le retour au bercail dans ce village morose, où le curé local devait être en train de se mettre à dos toutes ses ouailles, pendant que les quelques bonnes âmes suppliaient la majorité silencieuse de venir se joindre à elles sur la Halle...

Puis, elle décachetta la seconde missive, et la mine tout d'abord joviale, elle se départit peu à peu de son sourire pour écarquiller les yeux au fil de la lecture. Etait-il donc devenu fou ?


Citation:

Douce tigresse,

Ainsi, tu as aidé une tsigane à sortir de la ville (c'est Fayom que j'ai rencontré en taverne qui vient de me l'apprendre) dans le but de t'abandonner à ses caresses, et par la même occasion aux plaisirs entre femmes.
Je ne doute pas combien ce voyage fut miraculeux pour ta santé et jusqu'à quel point tu as pris plaisir à chevaucher avec une amazone, peut être même que parfois la proximité de ta compagnonne t'a fait momentanément lâcher les rennes de ton destrier, et je suppose que tu attendais avec un plaisir non contenu que la route devienne chaotique dans le but de profiter des sauts obligatoires de ton cheval, mais soit, je ne t'en veux pas, je rumine juste contre moi même, et j'ose espérer que les mains et les formes de ta gitane ne te fassent point oublier à terme mes pauvres cicatrices, ma mine triste, et mes éludations, car sinon je m'en voudrai toute ma vie.

Tu affirmes être résolue à te perdre jusqu'au bout? J'espère que ce voyage m'éloignant momentanément de toi n'entame en rien ta conviction, car pour ma part, je suis résolu de moins te délaisser, et de passer plus de temps avec toi, lorsque cela sera possible.

Ensuite il me semble que tu aies mal compris ce que je voulais dire : je n'affirmais pas que tu ferais tout ton possible pour faire pâmer les trémouillois, c'est juste qu'il n'existe aucun homme (ni aucune femme à mon sens si elles avaient un peu de goût) sensé(e) (même moi) qui ne voudrait honorer ce corps fait pour l'amour, et te faire atteindre maintes fois le septième ciel sur le champ .

Je t'embrasse et m'abandonne à mes rêves qui ne manqueront pas d'être érotiques.

Un pauvre imbécile qui t'aime.



Elle avait à la fois envie de rire et de pleurer. Rire, parce qu'elle goûtait le style de son poète paranoïaque et les envolées chatoyantes de sa plume. Pleurer, parce qu'elle savait bien qu'il prenait tout au sérieux, ne voyait en toutes choses que la pire des possibilités, et devait déjà s'imaginer qu'elle l'avait abandonné pour les bras de la belle Romni épicée.

Elle hésita à répondre sur le champ,mais Erzé et Vendettal devaient déjà l'attendre, elle ne pouvait s'attarder davantage, et il valait mieux s'expliquer de vive voix. Elle se promit de faire irruption dans la chambre de Mac au matin pour le sommer de s'expliquer, et peut-être, qui sait, violer un peu de son intimité?
Un sourire à la fois tendre et cruel vint à cette pensée éclairer son visage, et la tigresse bottée partit rejoindre ses compagnes de voyage d'un pas décidé.

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Nessty
[Niort, retour chez les pécores et départ vers les couards]


Nessty s'en était revenue à Niort il y a quelques jours de cela.

Quelque chose avait changé. Etait ce elle ou cette ville ? Elle ne chercha point à savoir. Elle jeta son barda dans un coin et se laissa tomber sur sa paillasse, fort épuisée par ces dernières nuits de route, peut être même heureuse de se retrouver chez elle, enfin dans cet environnement familier dans lequel elle avait pu trouver quelques repères.


Ces dernières semaines avaient été bien plus intéressantes pour cette gueuse que tous ces mois à Niort. Le fait de revoir ses amis et d'autres bourguignons dans un coin du royaume, toutes ces personnes riches de leurs expériences rencontrées au détour d'un chemin, tant de conversations constructives dans l'ivresse des tavernes, ces hommes et femmes partageant quelques brèves de leur vie, ce poète sarcastique dans sa Normandie... Ses souvenirs remués et son identité recouvrée étaient autant de blessures remises à vif par autant d'esprits incisifs. Promesse avait été faite et rompue non pas par sa propre volonté mais par ces amis, anciens ou nouveaux, qui la rappelaient à eux. Au nom de Eleane, de Nounours, d'Ellias, de Smol, de Dyonyzos, de Bell et d'autres tous disparus aujourd'hui, il était temps pour elle de repartir un jour vers le pays qu'elle avait vu naitre, sans quoi elle ne serait jamais en paix. Sa fuite prenait fin aujourd'hui même et elle n'avait plus aucun recours possible pour repousser une quelconque échéance.

Leel la fraîche et Cali la franche avaient répondu présentes à sa proposition, manquaient encore l'orchidée, la curieuse et le grand blondinet. Tous avaient été navrés d'apprendre la maladie de leur pluche adorée qui s'était recluse dans son antre pendant de longs mois. Sans lui, ce ne serait pas la même chose qu'en ce jour où cerisiers s'étaient mis à fleurir, certes, mais tous savaient déjà qu'il était de tout coeur avec eux. En son nom, la taverne du Cuiteux reverra le jour dans toute sa splendeur et résonnera à nouveau sous les adishatz, les rires et les chopines entrechoquées.


Les noisetiers étaient-ils encore en place à proximité de ce moulin partagé près du Saison ? Le soleil du matin se levait il encore du côté de l'Etxekortia surement recouvert des premières neiges ? Ce dernier jeune homme recueilli avait il pris assurance et fait fortune ? Et ce mystérieux tisserand cosnois serait il à nouveau là pour lui distiller ses rares paroles ? Cet amoureux transi qui avait traversé le royaume en silence avait il trouvé élève ? Son poisson rouge préféré réussira-t-il à les accompagner sans se perdre dans son bocal ? Le charcutier serait il ponctuel ? La douce brune sera-t-elle accompagnée par son chevalier ? Quelle sera la tête de l'ânesse à la vue de leur retour ?

Les questions se bousculaient les unes après les autres dans la caboche de la jeune gueuse, surtout depuis que l'Ancien lui avait demandé de la rejoindre. Il lui avait rendu ce bien précieux, ce cadeau qu'il lui avait lui même fait dans l'est, la seule chose qu'elle avait souhaiter sauvegarder avant de fuir le sud, ce symbole qu'elle n'avait su confier au seul homme qu'elle en savait digne et qui était parti dans le nord. Les voici réunis à nouveau, dans l'ouest depuis quelques jours à peine, pendant que l'Ancien fermait doucement ses paupières dans les bras de sa protégée avec un dernier soupire d'apaisement et d'accomplissement.


Elle se savait déjà attendue, lourdes tâches à honorer, aides spontanées offertes, choix décisifs arrivés à terme, amitiés nouées telles des serments, espoirs en suspend. Tout prenait un sens là où les destins l'emportent.


Nessty se leva en ce onzième jour de novembre avant l'avènement du l'aube, en même temps que son tendre Rorkh. Ce dernier se rendit prestement en son moulin, comme s'il n'avait jamais quitté la ville, comme s'il n'allait pas en repartir le soir même. Deux longues journée à Niort, des tavernes quasi désertes, une halle close, de quoi se reposer et traiter quelques affaires urgentes. La gueuse toujours aussi préoccupée par son passé se saisit de sa plume et se décida enfin à prévenir cet homme de foi qui avait un jour apposé l'eau du baptistère sur son front d'enfant. Il sera surement accablé par le départ de l'Ancien et savoir leurs disputes de chien et chat appartenir à des temps lointains. Les lettres et les mots s'alignèrent sciemment et élégamment. Nessty relut une dernière fois cette funeste missive, laissant au parchemin le temps d'absorber l'encre et les maux. Elle rajouta ces quelques mots l'espace d'un soupire :

Citation:
Il s'est éteint, serein.
Je reviens en notre sein.
Vous retrouverez tous les siens.


Un ruban sombre cercla le rouleau avant de prendre son envol endeuillé.

Une autre missive pour annoncer son départ, puis une pour annoncer son passage, puis encore une pour rappeler à mémoire de velours sa promesse, puis enfin celle à Sat pour l'assurer de leurs retrouvailles certaines, avec ou sans son cuiteux adoré. Joli envol de piafs nostalgiques et audacieux.


Le jour était en train de poindre avec certitude. Le breuvage chaud du matin appelait déjà à la dégustation. Nessty prit entre ses mains son godet pour le porter avec lenteur aux lèvres. D'un souffle léger, elle chassa la vapeur brûlante avec de nouvelles pensées pour ces amis qui étaient ici, à Niort. Certains sieurs avaient retrouver leur quiétude nocturne, son fillot volait de ses propres ailes, cette autre blonde était en émoi devant un jeune soldat. En convaincre certains de la suivre. Le gueuse y réfléchissait déjà pour éviter de perdre leur amitié. Comment leur annoncer ? Comment leur demander ? Comment oser les arracher de leurs terres ? Comment oser les arracher au seul quotidien qu'ils connaissent ? Nessty se rendit à l'évidence que de nouveaux déchirements se préparaient alors qu'elle venait à peine d'en panser d'autres.


Dans la chambre attenante, on gigotait déjà dans un bruissement de paille et de laine. Un homme apparut à l'embrasure de la porte, tignasse hirsute et cet air qu'elle lui si connaissait bien au réveil et qui se rapprochait de celui des mauvais jours. Nessty arbora un sourire timide sans piper mot devant son ancien compagnon et lui tendit un peu de son breuvage avant qu'il n'ait eu le temps de grogner. Laissant le liquide revigorer le bougre, elle attendit patiemment le bon moment pour lui annoncer ses projets.


Rince, je te laisse ici avec notre Pluch pour quelques jours. Tu sauras en prendre soin comme je l'ai fait ces derniers mois.

Je pars sur Thouars saluer enfin cette nièce dont il m'a parlé et que l'on réclame en Bretagne. J'en profiterai aussi pour remercier le prévôt pour sa complaisance, et...



Nessty prit une bonne inspiration avant de finir sa phrase dans son inimitable sourire taquin qui ne pouvait que laisser pantois le sorcier à qui elle l'adressait.
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