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[RP] Retour au pays mais... quel pays?

Ceraphin
RP se déroulant après celui nommé "Moi Ceraphin d'Azayes, 13 ans..." même si celui-ci n'est pas complètement achevé.
RP prévu de longue date, percuté de plein fouet par une guerre pas prévue par le joueur, mais on s'adapte avec plaisir mais du coup c'est sur cette gargote qu'il sera, bien fait pour vous... .
RP privé car se déroulant dans un cadre familial et donc clos mais s'il y a une envie de participer en incarnant via PNJ un p'tit frère ou une p'tite sœur, envoyez moi donc un MP.



Oui quel pays, c'était bien là la question qui lui dansait dans la caboche.
Certes, les pavés qu'il piétinait depuis quelques instants étaient bien ceux de Châteauroux, sa ville natale mais la présence de bannière limousine rendaient Ceraphin perplexe.
Quelle était donc cette supercherie?
A moins qu'une mauvaise blague... ?
De fait, il avait bien ouïe dire au sujet d'une annexion territoriale mais cela dépassait l'entendement du gamin et allait à contrario de sa logique naturelle.
Car après, fussent ils légions à clamer qu'un cochon était désormais une vache que cela ne changeait rien à l'affaire... alors bon.

Chemin poursuivant, Ceraphin se mit à redouter l'arrivé du sempiternel douanier qui parlait à la manière d'une marionnette de bois, au visage pas très expressif mais débitant un discours parfaitement rodé.
Allait-il, au terme de son monologue habituel, conclure sur une phrase du genre...


Vous êtes en terre limousine, laisser passer je vous prie!

Mais non... pas de douanier.
De toutes façon, le gamin lui aurait répondu, à l'hypothétique douanier un truc du genre...


J'en viens des terres limousines, j'étais en... balade.

Certes il était inutile de préciser qu'il s'en revenait au bercail après avoir louvoyé sur les chemins, esquivant autant que faire se peut, armées et lances.
Aristote avait encore une fois veillé sur lui, manifestement.
Pourtant il n'aurait pas parié là dessus le gamin.
Faut dire qu'il avait la conscience lourde, lourde d'avoir participé au fauchage de probables malheureux voyageurs qui s'ne venaient trop près de l'armée dans laquelle il s'était retrouvé incorporé, presque par la force des évènements.

Une armée qui avait été le dernier rempart pour protéger Châteauroux, une armée qui s'était retrouvée contrainte à s'enfoncer au cœur de l'ennemi puisque le retour au pays n'était plus possible.
Fort heureux d'être encore vivant à l'issu du fracas des armées qui se percutèrent lors du second assaut contre la ville, l'enfant avait acquiescé aux arguments du général Tadek, comme il l'appelait par complète méconnaissance des grades... faute de pouvoir rentrer désormais, il suivrait les rangs des soldats berrichons.
Mais Ceraphin avait gardé l'espoir ténu de rentrer au village dès que possible, afin de pouvoir assurer lui même la protection de sa famille mais aussi de pouvoir défendre sa ville.

Or une brèche lui était apparue au fil d'une rencontre improbable avec le vassal de feue Maman qui n'était autre que le commandant en chef de la Memento Mori.
Etrange rencontre.
Une opportunité confortée par les nouvelles du pays qui disaient que la ville étaient tombée et que rapidement les combats avaient migré vers Bourges, la capitale.
Qu'était il advenu des siens?

Et voici donc qu'il s'en revenait chercher, anxieux, la réponse à cette fatidique question.
Le cœur serré et l'esprit fiévreux, l'enfant Malherbe devenu Azayes remontait le chemin s'éloignant du centre et menant aux abords du village, en direction de Neuvy St Sepulchre.
Les pavés avaient cédé le pas à la terre battue, devenue boueuse à cette saison.
Quelques cailloux de ci de là qui ne l'attirent guère, ce jour.
Ses yeux sont ailleurs, fixés sur la façade de la masure familiale qui s'agrandit à mesure qu'il s'en rapproche, la peur aux tripes.

Non la guerre n'est décidemment pas une affaire d'enfant, quoi que certains pourront conter.
Et si vous croisez, sur un champ de bataille, quelque minot ou minote qui semble y être heureux l'épée à la main... probable qu'il s'agisse plutôt là d'une très petite personne déguisée en bambin pour tromper l'ennemi, mais pas d'un enfant.
Car comme on ne peut mêler le sang au lait en espérant lui faire garder sa blancheur naturelle, de même on ne peut espérer voir l'enfance s'épanouir dans telles circonstances faites cris, larmes et mort.
Néanmoins, si tant est que l'enfant soldat existe parfois, probable qu'il y soit contraint par les actes ou les mots d'adultes qui le dupent... or ne vous fiez pas aux apparences, cet enfant là n'en est déjà plus un, il est déjà vieillissant, il va bientôt mourir.

Et lui, après avoir vécu la mort d'autrui parfois par sa main, est-il toujours le même?
Il refoule pour mieux renier.
Mais une fois l'obscurité venue, dans l'intimité de la nuit, cette terre fertile qu'est l'esprit d'un enfant ne sait empêcher les cadavres ensevelis remonter à la surface et le hanter jusqu'à la nausée.

Mais pour l'heure, le soleil est haut et les cauchemars seront pour plus tard.
Mais pour l'heure, le seuil de la masure est à portée d'un pas... il s'est arrêté.
Nul bruit, nulle vie, l'angoisse le saisit.
S'il en manque un, l'enfance s'envolera définitivement et la vengeance envahira irrémédiablement son âme.

Dieu comme cette porte lui semble lourde à pousser.
A ses tempes martèle douloureusement un cœur effréné.
Une suée froide lui brûle l'échine...

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--Brunehaut_malherbe




C’est le cœur serré que Brunehaut accompagnée de ses enfants, revenait vers son logis. Lorsque la campagne berrichonne s’était retrouvée garnie d’une multitude de soldats, brandissant étendards étrangers et tout aussi menaçants les uns que les autres, ils avaient été contraints de se réfugier au château du seigneur dont ils étaient les serfs.

Tous s’étaient rassemblés dans la grande salle d’audience du majestueux castel qui s’était alors muée en refuge. Nobles et paysans, femmes, enfants et vieillards ; ils attendaient et espéraient un dénouement heureux pour le Berry. La libération n’était pas venue, les enfermant un peu plus dans leur détresse. Néanmoins, ils n’avaient pas eu à souffrir physiquement des exactions de l’armée ennemie. Aucune n’était venue enfoncer le pont-levis du castel seigneurial. Soulagée de voir ses enfants en sécurité, la paysanne n’en était pas moins torturée. Contrairement aux gens qui l’entouraient, ce n’était pas le sort de Châteauroux ou des soldats de l’Ost qui la tourmentait mais plutôt celui de son aîné, Céraphin.

Un enfant qu’elle avait cédé à une noble dame afin qu’il eut un avenir meilleur que celui qui l’attendait au sein de sa propre famille. A cette époque, les Lucioles avaient dévasté leur contrée, provoquant la mort de son époux tombé au combat. La disparition de Clotaire et les ravages de la guerre avait rendu leur ordinaire bien pitoyable. C’était une chance pour Céraphin que de se voir offrir le logis, le couvert et une bonne éducation par une personne au sang bleu. Brunehaut, bien qu’aux abois et dont l’avenir était des plus précaires, lui avait abandonné, non sans déchirement du cœur et une honte certaine.

La famille Malherbe sont des gens de la terre et bien qu’ils pataugent dans la boue une bonne partie de l’année, ils ont leur fierté. Pas de celle d’accéder à de hautes-fonctions ou d’être responsable de Hauts-faits d’arme, non, tout simplement la satisfaction d’offrir à leur famille un repas quotidien, un toit au-dessus de la tête, un feu pour se réchauffer l’hiver et toutes ces choses qui vous éloignent de la mendicité. Et cet amour-propre, la guerre et les troupes tourangelles lui avaient pris aussi sûrement que son mari et son fils. Mais jamais, non, jamais Brunehaut n’aurait supporté que ces enfants mendient. Elle avait fait la meilleure chose qui soit, même si son cœur de mère saigne encore de cet abandon.

Elle avait bien failli défaillir lorsque Céraphin s’était présenté à eux, il y a quelques temps. Elle avait éprouvé quelques peines à le reconnaître dans un premier temps. Une distance s’était irrémédiablement établie à son plus grand regret. Remise de sa surprise, la petite famille Malherbe lui avait réservé un accueil chaleureux. Ils s’étaient montrés curieux de connaître son vécu depuis son départ et les plus jeunes avaient inondé Céraphin des questions les plus saugrenues. Lorsqu’à son tour, il les avait questionné, Eudes avait tenté de rendre un peu plus palpitante leur vie, somme toute, très routinière. Leur quotidien était d’un ennui mortel comparé aux mésaventures de Céraphin…d’Azayes. Il était encore trop tôt pour en être sûre, mais Brunehaut avait senti germer en son deuxième fils, une pousse de jalousie à l’égard de son aîné.

‘Mannnnnnn ! Tu m’fais mal...

Une petite voix geignarde. C’est celle de Thibaud, le plus jeune de ses enfants. Absorbée par ses pensées, la mère meurtrie n’avait pas réalisé qu’elle broyait les doigts de son enfant qu’elle tenait par la main.

Dès l’annonce du départ de l’armée limousine, tout le monde avait pris le chemin de sa manse. La petite famille se dirigeait donc vers sa fermette le cœur en berne. Tout le long du chemin un silence oppressant avait régné trahissant les tensions et les inquiétudes de chacun. Qu’allaient-ils retrouver ? Est-ce que les soldats, appliquant consciencieusement la politique de la terre brûlée auront ravagé leur petite maison ? A vrai dire, Brunehaut était bien plus préoccupée par le sort de son aîné que par celle de leur chaumine. Parce que malgré tout, il était sa chair et son sang, il serait toujours son cher petit.

La petite chaumière de la famille Malherbe était adossée au coteau afin d’être protégée des intempéries et des rigueurs de l’hiver. Ils commençaient à peine à apercevoir le toit de chaume que Eudes abandonne leur unique vache à sa sœur et se précipite au-devant de la maisonnette. La paysanne invite ses enfants à presser le pas, plus vite ils seront fixés et mieux ça sera.

Mannnnnnnnn ! Ils ont volé les poules ! Ils ont saccagé le potager ! Ils ont défoncé la porte...un cri de rage fuse…celui d’un jeune garçon indigné qui serre les poings afin de contenir son courroux.

Arrivée à hauteur de son fils, Brunehaut échappe un soupir de soulagement, la ferme est intacte. On devinait aisément qu’une poignée de cavaliers avait sciemment piétiné leur petit lopin de terre. Les poules avaient disparu, la maison mise en désordre. Certainement des mercenaires à la recherche de Dieu-sait-quoi qui avaient renversé jarres et paniers. Fort heureusement, hormis les poules, la famille avait emmené tous ses vivres.

Ce n’est pas grave…ils auraient pu faire bien piremais peut-être l’ont-ils fait songea-t-elle en pensant que Céraphin enrôlé dans l’armée de Tadek, avait peut-être succombé sous les lames de l’ADC. Chassant ses funestes pensées de son esprit, elle enjoint ses enfants à se mettre à l’ouvrage.

Eudes va couper du petit bois au lieu de te lamenter ! Le ton est volontairement ferme. Elle se sait presque injuste mais elle ne veut pas leur laisser le temps de se décourager.

Romain va traire cette pauvre bête, on aura du lait au moinsindiquant la vache de l’index. Le garçonnet de 6 ans se précipite.

En bonne mère de famille, elle assigne à chacun une corvée, tant et si bien qu’au bout de quelques heures, une soupe épaisse mijote dans une marmite.


Mère…on manque de presque toutannonça Clotilde avec dépit. Amer constat d’une fillette de 10 ans qui a déjà souffert dans sa tendre enfance des affres de la guerre.

Je sais …prions pour que le marché de Châteauroux soit de nouveau achalandé et que les soldats ne l’aient pas pillé. Nous irons demainun soupire…Brunehaut adresse une supplique au Très-Haut... « Ô Mon Dieu, va-t-il encore que je me défasse d’un de mes enfants pour que les autres puissent vivre ». L’ombre de la disette planait sur eux aussi sûrement que celle de l’ADC sur le Berry.

Faudrait déjà que les prix soient corrects !...les mots sont crachés par un Eudes scandalisé.

Le regard noir de sa mère lui ordonne de se taire. Ce n’était pas le moment de s’apitoyer et de balayer par quelques excès de rancœur, les maigres espoirs auxquels ils se raccrochaient.

Jele môme refoule les quelques larmes de rage qui menacent d’inonder son visagej’vais monter la garde...on sait jamais…ils pourraient revenirEudes venait de trouver là une bien piètre parade mais il avait besoin de s’isoler afin de déverser par flots continus toute sa colère, sa déception et sa hargne.

Brunehaut acquiesce de la tête et laisse son benjamin aller se réfugier en haut du chêne qu’il affectionnait temps.
Ceraphin
Hésitant une infime seconde à pousser la porte du logis familial, voici qu'un choc retentit dans son bouclier, toujours fiché sur son dos, l'habitude est ancrée.
Enfin le choc n'est pas si rude, plutôt léger mais sonore... minéral tintant sur le métal.
Se retournant vivement, main sur la garde de sa lame, l'enfant a légèrement les nerfs à fleur de peau.
Vagabonder sur les routes tout en esquivant les armées ennemies l'a rendu un rien réactif.
Pourtant, à la rigueur, il semble que se balader sous ces augures là lui ait moins coûté personnellement que lors de son précédent voyage en temps de paix.
Comme quoi... rien n'est prévisible.

Donc... un choc.
Suivi d'autres et bientôt accompagné d'invectives haineuses...


Foutez l'camp bande d'assassins!
Rentrez dans vot'pays d'chiens galeux!


Tentant de se protéger d'un bras des projectiles qui fusent encore un peu, Ceraphin tente d'en discerner l'origine géographique.
Il faut croire que la réserve de projectiles s'est tarie car il peut enfin lever le nez librement et entrevoir la silhouette là haut perchée, dans un arbre.

Sourire et soupir de satisfaction.
Au moins ce bon à rien de frangin est bel et bien vivant.


C'est moi tête de mort!
Eh tu lances toujours comme une gonzesse ou c'est juste pour aujourd'hui?!


Et se marre d'un rire libérateur, se moquant avec bonheur comme savent le faire les grands frères.

Bientôt et après quelques jurons que leur mère ne pardonnerait pas si elle entendait, voici un Eudes qui atterrit bientôt sur le plancher des vaches avant de s'ne venir vers lui, sans précipitation et ne roulant des mécaniques, avec un néanmoins un sourire qui le trahit un peu.
Confrontation presque testostéronée, face à face yeux dans les yeux...
S'en suit un rituel immuable... coup de poing dans l'épaule de l'autre genre "salut, c'ma façon d'te dire que j'suis content de revoir ta trogne 'spèce de blaireau... mais c'est moi le plus fort, avoue que t'as mal hein!" et ça s'enchaine jusqu'à ce qu'on finisse par grimacer des deux côtés.


Et m'man?
Et les p'tiots?


Eudes se masse l'épaule et montre la porte d'un mouvement du menton.


'sont là, t'inquiètes...

Demi-tour, droite, cette fois la porte sera poussée plus sereinement...
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--Brunehaut_malherbe




Un à un, les petits disques de métal s’étalaient devant Brunehaut qui était installée à un coin de la table. Les récoltes avaient été bonnes et la petite famille en vendant son blé, avait engrangé de quoi payer les diverses taxes au seigneur mais surtout de quoi s’alimenter pendant l’hiver. Malheureusement, c’était sans compter sur cette fichue guerre et la flambée des prix qu’elle avait entraîné dans son sillage comme tant d’autres épreuves. Si les denrées ne reprenaient pas leur cours normal rapidement, La paysanne ne pourrait pas nourrir ses enfants jusqu’au printemps. C’est du moins la conclusion qu’elle en avait rapidement tirée après avoir recompté encore et encore les écus durement gagnés. Les provisions avaient fondues durant le laps de temps où ils étaient restés à l’abri du Castel seigneurial. C’est cela d’avoir trop bon cœur. Brunehaut savait se montrer généreuse en toute occasion et les pauvres miséreux qui avaient fui leur maisonnette sans même prendre le temps de sauver quoique ce soit en avaient bien profité.


Délaissant la monnaie, elle posa son regard ambré légèrement teinté de tristesse sur ses chers petits. Devant la cheminée, ses deux plus jeunes garçons jouaient aux osselets. Thibault n’était pas encore très adroit mais ne se décourageait pas, provoquant par ses maladresses l’hilarité de Romain. Ils étaient si proches. Un sourire fleurit sur le visage blême de la paysanne. Ils étaient presque aussi complice qu’Eudes et Céraphin avant l’arrivée des armées « lucioliques ».

Clotilde disposait dans un silence quasi religieux les écuelles, quelques couverts, du pain et des gobelets sur la seule et unique table de la chaumière. Brunehaut constatant l’heure tardive rangea rapidement son petit trésors et se leva mollement afin d’aller chercher la marmite où mijotait la soupe. A peine avait-elle posé le récipient sur la table, que les deux petits dont l’estomac grondait, se hâtèrent de prendre place, tandis que Clotilde leur distribuait un morceau de pain de seigle.

D’une voix fatiguée
Clotilde va chercher ton…

A peine ces mots furent prononcés que Eudes accompagné de son frère aîné fit irruption dans la pièce. Stupéfaite, Brunehaut resta immobile les yeux grands ouverts et luttant pour que sa mâchoire ne se décroche pas un peu plus. Les deux jeunes garçonnets de 4 et 6 ans poussèrent des cris de joie et se ruèrent sur Céraphin. C’est dire s’ils étaient heureux de le retrouver pour qu’ils abandonnent si spontanément leur pitance.

Oooohhhh ! Céraf ! T’es pô mouru !...le bon dieu a entendu nos prières !
s’exclame Romain, les yeux pétillant de joie.

C’est que c’est croyant des paysans mais faut avouer qu’en circonstance aussi tragique même le plus athée de tous se tournerait bien volontiers vers le ciel afin d’adresser une supplique.

Brunehaut était toujours figée….elle avait tellement craint…redouté le pire…qu’en l’instant présent, elle aurait pu fondre en larmes…des larmes de bonheur et de soulagement assurément. Refoulant les sanglots qui menaçaient d’inonder son visage, elle laissa ses enfants se retrouver, refreinant son envie de le prendre dans ses bras.

Clotilde s’avança afin de saluer timidement mais chaleureusement son frère puis de se tourna vers BrunehauMère ?… oui, elle dit « mère » et non pas « maaannn ! »…c’est bien connu, les filles c’est plus polie.

Je mets une autre écuelle ?

Un sourire en guise de réponse convainc la gamine de s’exécuter rapidement.

Eudes souriait en coin…donnant de l’accolade…ébouriffant Céraphin, l’air de dire en se mettant sur la pointe des pieds « hé ! chui plus grand que toi ! ».


Même pas le temps de poser ses affaires pour Céraphin que les deux petits le tirent par les manches et l’inondent de questions.

Dit, dit !!! t’en a tué beaucoup des Périloudingues ? !...demande avidement Thibaut.

Pfff…que t’es idiot, on dit pas Périloudingues mais Périgourdasses !! …l’interrompt Romain.

Naaaannnnnnnnn, les soldats y z’ont dit… qu’on dit Pé-ri-lour-dingues ! Un index potelé levé et un air faussement savant gravé sur son visage rebondit.

N’im-por-te quoi s’esclaffe son jeune frère…

Siiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii……………hein Céraf on dit Périlourdingues ?!...un brin vexé…

Cela suffit !

La voix de Brunehaut tonna du fond de la pièce.

Allez poussez-vous donc…et allez prendre place autour de la tableavec un accent d’autorité.

La mère s’avance vers son aîné …elle approche lentement ses mains un peu tremblantes...le geste est hésitant et pourtant, comme encouragée par le sourire de son fils, elle passe ses bras autours de ses épaules et le serre contre son cœur. L’attitude lui semble un peu trop étudiée pour être réellement spontanée. Pourtant, la tendresse y est…un baiser sur le front….une caresse sur la tête afin de dégager une mèche de cheveux et admirer le visage de son enfant mais les mots restent coincés dans sa gorge. Long instant de silence où seule l’humidité du regard trahit les élans du cœur.

Mannnnnnn ?!

Un coup d’œil en arrière et un souriretu es rentré à temps pour le souper…viens…viens t’asseoir au bout de la table, à la place qu’occupait ton père naguère….tu nous raconteras tout aprèsune pression sur les épaules afin d’inciter le jeune garçon…un Eudes bougon qui se voit contraint de céder la place paternelle qu’il occupait jusqu’à présent…un Céraph qui s’assoit, dernière touche de couleur au tableau familial.

Alors…dit ???...t’en a tué beaucoup des ....regard méfiant adressé à Romaindes méchantslui tire la langue au passage….hein ?
Ceraphin
Retour aux sources.
La chaleur d'un foyer qu'il avait presque oublié, tant ces derniers mois il a plutôt été sujet à la solitude... depuis la mort de Maman.
Maman qu'ici, pudiquement, il appelle Diane, alors qu'il ne l'appelle jamais ainsi.
Mais il ne peut décemment la nommer autrement devant sa vraie mère, il lui semble que ce serait comme un outrage même s'il n'y a aucune malignité dans son propos.
Mais, comment dire, comme une sorte d'infidélité maternelle... comme s'il bafouait l'ordre naturel des choses, égoïstement.
Qui n'a jamais rêvé de décuplé un amour maternel lui jette la première pierre.
De toute façon, la norme avait été rétablie... et suffisamment violemment pour que l'enfant en cultive une profonde culpabilité inavouée.

Mais l'ambiance de la maison Malherbe lui réchauffait grandement le cœur et Ceraphin en profitait sans n'en laisser rien paraitre car après tout, n’était-il pas censé être celui qui était envié par les siens, de cette chance de vivre tant de choses qui ne lui étaient pas destinées?
Mais cette nouvelle destinée avait un prix parfois pesant pour un enfant de cet âge, mais il ne s'en plaindrait pas, préférant largement laisser briller toutes ces étoiles dans les yeux de ses petits frères et sœur.

Ingurgitant avidement sa tranche de pain toute détrempée de soupe, Ceraphin se prit d'un fou rire étouffé, comme autrefois, lorsque son regard croisa celui de Romain, entre autres.
Car à vouloir trop vite enfourner, la soupe lui dégoulinait maintenant des commissures de ses lèvres, limite s'il ne lui en débordait pas aussi des naseaux.
Sa mère oserait-elle encore le gronder, comme autrefois?

Reprenant de lui même son sérieux, il se décida à satisfaire la curiosité des plus petits.


On dit comme on veut, ça dépend de qui on parle, hein.
Y a des périgorets, des périgourdasses et des périlourdingues... ça c'est clair.
Mais y a aussi des périgourdins, des gens biens.
J'en connais, j'étais là bas avant de venir ici.
J'ai un mentor là bas, à Castillon... Modock qu'il s'appelle, un homme grand et fort, comme un ogre!...
les gestes descriptifs à l'appui.
Il m'a même écrit qu'il voulait venir se battre avec nous, enfin nous défendre contre les autres du Périgord et de l'alliance du centre.
Comme quoi, ils sont pas tous pareils, hein.
Mais de toutes, j'lui ai dit qu'il ne fallait pas venir, enfin je crois, je sais plus trop ce que j'ai écrit exactement mais une chose est sûre, c'est pas une bonne chose la guerre.

Tuer des gens c'est pas rigolo, hein Romain, des fois on a pas le choix mais... c'est pas rigolo du tout.


Un voile glissa devant ses yeux, tentant d'occulter encore et encore les silhouettes de ceux tombés devant leurs armes lors de leur épopée limousine.
Mais pour revivifier l'imaginaire de ses garçons de frangins il avait au moins le fabuleux épisode du second assaut de Châteauroux à raconter, celui auquel il avait survécu sans une égratignure et s'était payé le culot de cogner sur la tête d'un capitaine Tourangeau-tête-de-veau, ou du moins sur son casque.

Une fois les faits d'armes contés, Ceraphin revint à des considérations plus terre à terre.


M'man?
Si tu veux bien je vais rester un peu, quelques semaines, le temps que la guerre s'éloigne définitivement de Chato.
Et puis, comme ça, je vais pouvoir travailler un peu et gagner quelques écus pour la famille.
J'aurais pu te rapporter des écus, mais les routes ne sont pas sûres... on m'a déjà piqué ma réserve de pain, sur le chemin.
Après je repartirai
... ces mots là étaient surement cruels ainsi énoncés mais Ceraphin ne voulait laisser nul doute planer.

Il était parti une fois, profitant d'une opportunité inespérée pour un enfant de serfs et libérant par la même, les siens des charges d'une bouche à nourrir.
Il n'était pas question de redevenir une charge pour les siens... et quelque part, il avait pris gout à l'indépendance, quitte à ce qu'elle soit empreinte de solitude, parfois... souvent même.

Il observa sa mère, un instant, s'essuyant la bouche avec la manche.
Et sourit timidement, presque confus d'être là.


Mais... reprend il... et si un jour il fallait songer à partir d'ici?Je serais là, hein, tu le sais.
C'pas que je n'aime plus le Berry, mais avec tout ça
... vague geste... j'ai bien l'impression que le duché va devenir une terre maudite.
Parce que personne ne pardonnera, ici, et les tourangeaux, les auvergnats, les limousins et les périgourdins ça sera toujours sur eux que les berrichons iront cogner dès que possible, pour leur faire payer et cher.
C'est comme ça et les traités de paix n'y changeront plus rien, parce que là, ils sont allés trop loin pour que ça soit jamais oublié.

Donc... une pause et un haussement d'épaules... faudrait p't'être voir à partir... j'sais pas, non?

Un peu gêné d'avoir à dire cela mais en même temps, cela lui semblait la meilleure solution pour les éloigner des conflits présents et surtout à venir.

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--Brunehaut_malherbe


Quelques jours s’étaient écoulés depuis l’arrivée du jeune Céraphin. Un retour que sa maternelle n’avait même pas osé espérer. Alors, lorsqu’il avait demandé s’il pouvait séjourner quelques temps parmi eux, elle pourtant si pudique, n’avait pu dissimuler sa joie.

Pendant ces instants, ils avaient comme retrouvé la complicité qui les unissait auparavant. La gêne installée qui faussait leurs rapport depuis le retour du jeune garçon, s’était progressivement dissipée. Ainsi, Les échanges naturels et plein d’affections qu’ils entretenaient naguère, étaient revenus.

Céraphin avait de nouveau sa place dans la famille Malherbe et l’aurait toujours. C’était un fait acquis. Pourtant, il allait reprendre la route. Cet enfant était fait d’amour, certes, mais surtout de vents et de mystères. Ces souffles qui le poussent sans cesse sur les chemins et ces arcanes qui semblent liés à son étrange destin. En ce sens, Brunehaut était persuadée que son fils n’était pas un enfant comme les autres, ne serait-ce que par la chance qui semblait l’accompagner à chacun de ses pas. A son contact, chaque malheur semblait se muer en quelque chose de plus bénéfique. C’est du moins ce qu’elle ressentait et cela depuis fort longtemps.

Quitter le Berry ? Il n’en était pas question. Ils étaient nés serfs et on ne déliait pas si facilement un contrat immuable avec un seigneur. Devant la déception de son fils, elle lui avait expliqué qu’ils n’étaient pas si malheureux et que la guerre se fichait bien des frontières.

Une fin d’après-midi, la petite famille vaquait à ses corvées quotidiennes. Brunehaut profita de l’inattention des uns et des autres pour attirer son aîné à l’intérieur d’une dépendance attenante à la maisonnette. Il s’agissait de l’ancien atelier paternel. Forgeron de son état, Clotaire ferrait les chevaux, réparait quelques pièces agricoles pour l’ensemble du domaine seigneurial. Lorsqu’il pérît, sa forge mourut avec lui car aucun de ses enfants n’avait manifesté d’intérêt pour le travail du métal.


Entre Céraphin…

Elle le poussa presque et referma la porte en jetant un coup d’œil rapide vers l’extérieur, espérant ne pas être aperçue.

La pièce était sombre. Une odeur de renfermé et de moisi irritait fortement leurs narines.
Rapidement, la mère parvint à allumer une bougie. Elle connaissait l’endroit par cœur et même en fermant les yeux, elle pouvait dire à quel endroit se trouvait tel objet.


Avant même que le jeune garçon n’ouvre la bouche, elle apposa son index sur ses lèvres afin de lui intimer le silence. S’agissait-il d’un moment solennel qui exigeait le mutisme des acteurs ?

Une fois que ses yeux tapissés de miel s’étaient habitués à la pénombre, elle se dirigea vers une étagère de fortune fixée au mur. Elle poussa les pots, outils et chiffons qui y reposaient en un joyeux désordre, soulevant un nuage de poussière. Quelques toussotements…une main qui couvre une bouche…des yeux qui pleurent…révélant ainsi que personne n’avait pénétré ici depuis des lustres. Devant le regard à la fois perplexe et curieux de son fils, Brunehaut esquissa un léger sourire. D’un geste mal assuré, elle poussa une petite trappe dissimulée dans le mur et en extrait un sac de toile. La paysanne l’époussette puis glisse sa main blanche à l’intérieur. L’inquiétude se lisait sur son visage pâle. La peur de le trouver vide certainement. Soudain ses yeux semblent s’illuminer et elle offre au regard de son enfant un poignard finement ouvragé.


Brunehaut s’approche alors de Céraphin...

Vois-tu…c’est une commande de ton pèrefaisant courir un de ses doigts sur le manche ciselé…Clotaire l’avait fabriqué à la demande d’un riche noble, mais ce dernier est mort avant de l’avoir eut en main. Pensant que ses héritier allait venir réclamer l’ouvrage, il l’avait soigneusement caché afin de leur remettre le jour où ils viendraientc'était pas un voleur ton père mais un habile artisan...le regarde intensémentmais il n’en fût rien. Peut-être te souviens-tu les longues nuits qu’il passait dans sa forge …et bien c’était pour concevoir ce poignard. La guerre a éclaté, ton père est mort et personne n’est venu le réclamer. Je n’ai jamais pu me résoudre à mon séparer…baissant le regard il en était tellement fierune pointe d’émotion dans la voix. La femme serre l’arme contre son cœur un moment en fermant les yeux puis le glissa rapidement entre les mains de son aîné. Il est à toi…prends-le…garde-le en souvenir de Clotaire. . Elle ne lui en dit guère plus. Les paysans ne se livrant pas facilement, certains de leurs gestes les plus anodins semblaient parfois imprégné de symbolime. Remarquez, qu'il s'en tire bien le Céraphin, il aurait pu repartir avec la paire de sabots de son paternel, ce qui est nettement moins glorieux.

Brunehaut lui demanda de ne pas en parler à ses frères et sœurs afin de ne pas attiser la jalousie. C’est bien la seule chose qu’elle était en mesure d’offrir à Céraphin. Outre la valeur marchande, c’était surtout celle du cœur qui importait.
Ceraphin
Jouant de la petite lame à la lueur de la chandelle, Ceraphin l'observait comme hypnotisé.
Les armes blanches avaient toujours eu cet effet là sur lui, comme une fascination pour l'objet, sa pureté froide et son fil parfaitement aligné... du moins quand la lame était de bonne facture.
Et là, elle l'était.
Et les yeux du gamin dansaient dessus, fier de si bel héritage.


... en souvenir de Clotaire.

Elle avait dit Clotaire.
Peut être craignait-elle de lui redire "ton père" ou encore... "papa".
Peut être pensait-elle qu'il avait oublié ce lien naturel, ou du moins qu'il le reléguait dans un coin de ses souvenirs et eux tous avec.
Aussi, comme pour dissiper ce doute, il se réfugia dans les bras de sa mère, comme il ne l'avait pas fait depuis longtemps.


Merci m'man...

"Je t'aime" aurait pu suivre, si les prémices de pudeur adolescente ne refreinait pas déjà le naturel de l'enfance qui bientôt et trop vite s'enfuirait, entrainant toute l'innocence qui lui restait encore... un peu, bon d'accord, un p'tit peu.
Quoique, même s'il n'était plus naïf, Ceraphin gardait la candeur des rêveurs... qui sait si ça ne perdurerait pas au long des années?


J'en prendrai soin, t'inquiètes... finit-il par ajouter, profitant du contact contre sa mère pour dissimuler l'humidité furtive de ses yeux.
Non pas dans le corsage, je vous vois venir, et encore que, ce ne serait que la poitrine de sa mère, celle qui l'avait nourri en son temps.
Non, c'était sur l'épaule maternelle qu'il épongeait pudiquement son émotion.
Au pire, s'il était pris sur le fait de son émotivité, il pourrait toujours accuser la poussière qui proliférait dans l'coin.

Au moins ce retour aux sources lui avait redonné conscience de la réalité et de la vivacité de ses racines.
Ici étaient les siens et s'il ne l'avait pas oublié, en tous cas il ne le pourrait encore moins.
Chacun ici était sa chair et son sang et il s'en sentait responsable... même si en refusant de quitter le Berry, sa mère lui avait rappelé qu'elle était et demeurait l'autorité parentale.
Un peu déçu, mais pas tant que ça.
C'était logique et très "Malherbe"... faire ce que l'on doit faire, affronter la réalité au mieux, sans fuir ni s'enfuir.
Le Berry était leur terre et le demeurerait, fi des guerres ou des Ducs qui défileraient.

S'écartant du giron maternel, ou du moins de ses bras, Ceraphin prit un air des plus sérieux...


Tu sais que je reviendrai, hein?
Et j'aurais surement une surprise, la prochaine fois...


Voyant une paire de sourcils se froncer, il ajouta...

Non, non pas d'écus t'inquiètes, j'ai compris... même si les objections de sa mère ne l'empêcheraient pas de laisser une bourse dissimulée dans un recoin de la masure, fruit de ses labeurs occasionnels le temps de son séjour.

Tu verras... conclut-il énigmatiquement, avant de quitter l'appentis paternel en sa compagnie, cadeau paternel caché sous sa chemise.

Une fois à l'air libre et pendant que sa mère refermait le local, il huma profondément le fond de l'air, pour s'imprégner des senteurs de son pays natal.

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