Chère Poup,
Je ne pense pas que tu puisses me reconnaitre sous ce diminutif que j'ai pris lors de ma fuite du Béarn. Je suis bien Nestaly... Le temps, la vie et tant de choses ont fait que ma destinée a pris une toute autre tournure que celle dont je rêvais en quittant Cosne avec mon tendre Rincevent et quelques amis. Mon sorcier a disparu il y a peu dans les limbes d'Irlande, les autres se sont éparpillés un peu partout, du moins ceux qui sont encore en vie. Nous nous sommes un peu fâchés lors de notre dernière entrevue car je leur avais annoncé prendre les armes pour défendre les opprimés en Périgord il y a exactement un an. Ils m'ont d'abord ri au nez puis ont rapidement déchantés en apprenant que j'étais à la tête d'une 60aine de Vilains terrorisant tout un comté abusif pendant plus d'un mois. J'ai suivi de près l'action des pseudos Zoko en Bourgogne et j'ai refusé d'y participer car la vermine rouge du Colosse est la pire merdaille que je connaisse. Je les avais fait venir en Périgord alors qu'ils s'appelaient encore Libertad et m'en suis mordu les doigts. Ils ont également fait capoté l'un de mes plans récemment. Voici ce que je suis devenue... Une dissidente mais non une brigande. Soit on m'aime, soit on me déteste.
Après un passage à la procure du Poitou au cours duquel j'ai mis en exergue la ptite flicaille véreuse et mis à mal un comte plus proche du baudet que du meneur d'hommes, me voici à nouveau au tribunal mais de l'autre côté de la barre. ça aussi, j'en ai pris l'habitude ! Le prix à payer pour une certaine notoriété qui me rend suspicieuse au moindre mouvement, qui me fait rencontrer subitement une armée complète au coin d'un bosquet malgré un laissez-passer en bonne et due forme ou encore qui me vaut tant d'autres douceurs comme ces insultes dès que je mets un pied en taverne... Plus rien à voir avec l'avenir envisagé par cette gamine joviale que j'ai pu être au Val Tordu.
L'on m'a donc jugée coupable il y a quelques jours pour avoir pris une cuite avec des amis. Nous voulions rendre une visite de courtoisie à un charmant comte en ce château que je devais vendre à un escroc angevin. Un gaillard un peu beaucoup connu en Poitou et dans tout le Royaume pour non seulement la rousseur de ses cheveux mais également ses exploits majoritairement ratés. Un joyeux drille quoi qu'il en soit. C'est donc à la mairie de Poitiers, la capitale du Poitou, que nous avons pillé les caves de la vinasse jusqu'à la dernière bouteille, jusqu'à plus soif ! Il est dommage que les pictaves n'est pas vu cela du même oeil que nous. En tout cas, le déroulement de mon procès fut des plus étranges : aucun témoignage... personne ne m'a vue... tout le monde prétend que j'ai organisé une révolte même le jour où je défendais ma propre ville... Je ne dis pas le contraire mais je n'accepte pas la tournure du procès tout comme je n'accepterai jamais que l'on bafoue des lois. C'est d'ailleurs ce qui motive mon recours en appel. Sauf que je ne puis me défendre seule, en raison des préjugés à mon encontre. C'est donc pour cela que je cherche un avocat pour me représenter. Je maitrise parfaitement le coutumier poitevin qui est concis et bien construit. J'ai simplement besoin de quelqu'un qui fasse bonne figure à ma place.
Ne connaissant que très peu de monde à la CA et surtout me méfiant trop de certains dont la Linon pour son appartenance inavouée au Colosse des pseudos Zoko, j'ai fureté dans les listes des avocats du Dragon et, qu'elle ne fut pas ma surprise ? de te voir dans cette liste. Raison pour laquelle je prends contact avec toi ce jour. Sachant aussi que je comptais le faire, avec bien plus d'humilité, une fois à Cosne car me dirige doucement (40 lieux en 2 mois) vers l'est, si Aristote me le permet. De plus, j'ai rencontré il y a peu, une jeune femme fort sympathique de Tonnerre et sieur Xollir qui m'ont parlé de toi. Un brin de nostalgie et beaucoup de remords d'avoir coupé court un jour de juillet avec l'intégralité de mon passé. Pardonne moi pour cela.
Serais tu prête à prendre la défense de la Grande Vilaine que je suis ? pour un procès bourré de vices de forme et de procédure ? sans en aborder le fond de l'accusation ? Je sais que cela est plus que culotté de ma part de lancer un tel challenge après tant d'années. Je pense que peu de personne sont susceptibles de se montrer objectives et impartiales dans ce genre d'affaire. J'ai pensé à toi tout simplement.
Au plaisir de te lire au fond de mon cachot.
Fait à Chinon en Touraine en ce 4ème jour de décembre 1457.
Nessty
Grande Vilaine