Mariealice
[Sémur. Les retours ne seront donc jamais heureux....]
Il y avait longtemps désormais qu'elle savait que ce jour arriverait. Longtemps qu'elle s'attendait à ce qu'un homme portant livré des Hennfield se présenta à elle pour le lui annoncer. Depuis qu'il s'était refermé sur lui-même, avant même qu'il ne soit parti dans ce monastère sans même un mot d'au-revoir... Oui elle savait. Mais lire ces mots là sur un parchemin écrit par le Prieur du monastère n'en avait pas été moins difficile.
Sa Grasce Gaborn de Hennfield s'est éteint dans son sommeil cette nuit. Pour l'heure il est veillé par nos frères dans l'attente des souhaits de la famille.
Eteint... Veillé... Un de plus... Encore entre ces fichus murs qui, malgré sa foi, commençaient à lui donner une furieuse envie de vomir, de fuir, d'abattre, de détruire, de brûler. Pourquoi toujours en cet endroit... Pourquoi? Pourquoi ne pouvaient y entrer pour mieux en sortir, heureux de vivre, rassérénés, ayant envie de la retrouver? Qu'avait-elle donc fait de si grave, de si monstrueux pour que tous la fuient ainsi. Bien sûr qu'elle savait au fond d'elle que ce n'était pas sa faute, qu'elle n'y était pour rien mais toujours cette douleur revenait, ne lui laissant nul répit et guère le temps de souffler entre deux deuils. Elle avait perdu le compte des gens perdus, des pleurs versés, des heures à se demander pourquoi encore tenir.
Elle avait dû rédiger un courrier à son tour pour Gabrielle, fait de même pour Theodomir. Comment faire pour Soraya, où la joindre? La Lybie, patrie de leur mère était si loin, si grande...Coucher sur un vélin cette nouvelle ne l'avait rendue que plus tangible encore mais elle n'avait pas le choix. Puis Armoria. Sa soeur. Du moins c'était ainsi qu'ils se considéraient et la brune ne le savait que trop bien. Rien qu'à l'idée de ce qu'elle ressentirait si Enguerrand venait à rejoindre le Très Haut, le coeur de Marie se serrait à l'étouffer. Elle ne pouvait songer à cela sinon autant aller à son tour s'enfermer entre ces murs et n'en plus en sortir.
Une fois les missives rédigées et parties, elle vint se placer devant la croisée et observa le jardin noyé sous les feuilles mortes qui s'amoncelaient ça et là. L'automne, saison où la nature semblait faire son deuil du printemps et de l'été pour se préparer au long sommeil de l'hiver. Bientôt un autre reposerait au coeur de la terre, d'un sommeil éternel mais lui ne se réveillerait plus en ce monde. Les paupières du Ténébreux resteraient closes et plus jamais elle ne verrait les deux puits sans fond qui avaient parfois aspiré son âme.
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Il y avait longtemps désormais qu'elle savait que ce jour arriverait. Longtemps qu'elle s'attendait à ce qu'un homme portant livré des Hennfield se présenta à elle pour le lui annoncer. Depuis qu'il s'était refermé sur lui-même, avant même qu'il ne soit parti dans ce monastère sans même un mot d'au-revoir... Oui elle savait. Mais lire ces mots là sur un parchemin écrit par le Prieur du monastère n'en avait pas été moins difficile.
Sa Grasce Gaborn de Hennfield s'est éteint dans son sommeil cette nuit. Pour l'heure il est veillé par nos frères dans l'attente des souhaits de la famille.
Eteint... Veillé... Un de plus... Encore entre ces fichus murs qui, malgré sa foi, commençaient à lui donner une furieuse envie de vomir, de fuir, d'abattre, de détruire, de brûler. Pourquoi toujours en cet endroit... Pourquoi? Pourquoi ne pouvaient y entrer pour mieux en sortir, heureux de vivre, rassérénés, ayant envie de la retrouver? Qu'avait-elle donc fait de si grave, de si monstrueux pour que tous la fuient ainsi. Bien sûr qu'elle savait au fond d'elle que ce n'était pas sa faute, qu'elle n'y était pour rien mais toujours cette douleur revenait, ne lui laissant nul répit et guère le temps de souffler entre deux deuils. Elle avait perdu le compte des gens perdus, des pleurs versés, des heures à se demander pourquoi encore tenir.
Elle avait dû rédiger un courrier à son tour pour Gabrielle, fait de même pour Theodomir. Comment faire pour Soraya, où la joindre? La Lybie, patrie de leur mère était si loin, si grande...Coucher sur un vélin cette nouvelle ne l'avait rendue que plus tangible encore mais elle n'avait pas le choix. Puis Armoria. Sa soeur. Du moins c'était ainsi qu'ils se considéraient et la brune ne le savait que trop bien. Rien qu'à l'idée de ce qu'elle ressentirait si Enguerrand venait à rejoindre le Très Haut, le coeur de Marie se serrait à l'étouffer. Elle ne pouvait songer à cela sinon autant aller à son tour s'enfermer entre ces murs et n'en plus en sortir.
Une fois les missives rédigées et parties, elle vint se placer devant la croisée et observa le jardin noyé sous les feuilles mortes qui s'amoncelaient ça et là. L'automne, saison où la nature semblait faire son deuil du printemps et de l'été pour se préparer au long sommeil de l'hiver. Bientôt un autre reposerait au coeur de la terre, d'un sommeil éternel mais lui ne se réveillerait plus en ce monde. Les paupières du Ténébreux resteraient closes et plus jamais elle ne verrait les deux puits sans fond qui avaient parfois aspiré son âme.
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