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[RP]La nouvelle Dame de Lauzières

Cristòl
Petit hochement de tête négatif. Les questions de Maëlie sont pertinentes, et mieux valait les poser tout de suite.
Il l'avait écouté le regard parfois ailleurs, tantôt sur la fiche du fief, tantôt sur les mains ou dans les yeux de Maëlie. Mais quand il la regarda de plus loin, embrassant du regard le visage de la jeune fille, il songea qu'elle était plus colorée que d'ordinaire. Quand cela était-il venu ?

Il chassa pour l'heure cette question.


-« Vous ne pouvez prendre la devise du Languedoc, qui lui est réservée. D'autre part, un sceau est attribué à vie, sauf si vous perdez le fief dont il est fait mention dessus, cela va de soi. On ne brise la matrice du sceau qu'à votre décès, votre destitution, ou votre renoncement à la noblesse. »

Le jeune Sìarr eut une pensée pour son propre scel, honteusement égaré lorsqu'il avait fait la malencontre d'une armée bretonne inattendue. Depuis n'avait-il plus rien, pour ses actes officiels.

-« Mais vous n'êtes pas obligée de faire figurer votre devise sur votre matrice. Nous pouvons simplement y mettre "Maëlie, Dòna de Lauzièrs", ou en français, ou en latin. »

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[Je finis les affaires en cours et je tire ma révérence. Ce fut un plaisir de jouer avec vous tous.]
Maelie
Maëlie accueillit la réponse de Cristòl avec une déception manifeste : elle n'y avait pas vu là usurpation mais hommage à son Comté, bien qu'elle comprenait que les lois héraldiques ne s'embarrassaient pas de ces considérations. Le regard dans le vague, elle fronça inconsciemment le nez tant sa concentration était grande. C'est qu'il ne fallait pas se tromper, au risque de déshonorer la confiance qui lui avait été donnée et de ridiculiser ses gens... Piètre entrée en matière, en vérité... Il lui fallait également quelque chose qui reflète qui elle était, quelque chose de pas trop vaniteux ou ronflant, de vrai et de pertinent.

Ces réflexions l'éloignaient bien à propos des pensées parasites qui venaient parfois frôler son esprit en observant Cristòl ou le bureau qui l'entourait, comme un refuge bienvenu qui dissipait peu à peu la chaleur de ses joues.
Elle reprit la parole d'un air songeur.


Que pensez-vous de "Dòna Maëlie de Lauzièrs - Dum spiro, spero"* ?

L'idée lui avait soudain jaillit de l'esprit, se souvenant de ces mots qu'elle avait vu, toute petite, sur l'étrange note coincée dans son médaillon, cadeau de sa mère qu'elle cachait et qu'elle chérissait comme un trésor. C'était parce qu'elle avait voulu déchiffrer cette note qu'elle avait appris à lire et à écrire, et elle en était venue à croire que sa mère avait voulu ainsi lui donner une ligne de conduite et une chance de se construire un avenir. Elle n'avait cependant toujours pas élucidé le mystère de la rédaction de ce mot : ses deux parents étaient analphabètes...

L'image de ses deux parents la fit dériver sur un autre sujet... Le mariage noble, le vivre noble... Cristòl avait dit que c'était là une raison qui l'avait fait hésiter dans sa décision. Maëlie sentit tout son flegme s'envoler et ses rougeurs revenir.


Vous avez parlé des obligations de la noblesse. J'espère pouvoir compter sur vous pour m'expliquer la procédure du serment que je devrai prêter à chaque élection comtale.
Vous avez également évoqué... le mariage.

Il y a à ce sujet une chose qui m'étonne et m'intrigue... La noblesse se doit d'être un modèle pour tous, et en ce sens devrait, il me semble, faire sien les préceptes aristotéliciens. Or, parmi eux, l'un des plus important est le sacrement du mariage, je ne vous apprends rien.

Elle eut un petit sourire amusé devant l'ironie de la situation : allons bon, expliquer le Dogme à un Hospitalier...

Cependant, et c'est là que je m'interroge, l'apologie du mariage d'intérêt ou de raison n'est-il pas parfaitement contraire au principe même du mariage sacré? Car le mariage se doit d'être l'ultime hommage à la parole divine, le symbole d'une union dont l'amour reflète au plus près l'amour divin et universel. Or comment cela est-il possible si l'on se contraint à ne pas écouter son coeur? N'est-ce pas une entorse à la volonté divine ?

Certes, il y a le respect et l'obéissance que l'on doit à ses parents, mais l'Eglise elle-même dit qu'avec la maturité de l'individu, cette obéissance doit être assouplie. Pourquoi cette obéissance irait-elle à l'encontre de la volonté divine ? Et pourquoi les parents seraient-ils offensés de trouver en leurs enfants de dignes disciples d'Aristote, dont l'amour envers leur conjoint serait un acte de communion divine sans cesse renouvellée? Si cet amour est sincère et vrai, qui sommes-nous pour nier l'action de la main de Dieu ?

Je ne comprends pas...


Maëlie avait réussi, au prix d'une couleur pivoine généralisée, à exprimer le fond de sa pensée, et attendit avec impatience la réponse qui allait lui être donnée.

*tant que je respire, j'espère.
Cristòl
Au sujet de la devise, le Héraut avait aussitôt répondu :

-« Vous êtes seule juge de ce que cela représente pour vous. J'ai mis longtemps avant de trouver la mienne, j'avais déjà mon sceau de Seigneur... Mais il m'en faudra bien un autre, désormais. »

Il ne s'étendit pas sur les raisons de ce changement, et laissa la dame continuer, sur les devoirs et les droits de la noblesse.
Et sur le vivre noblement, le mariage... Il n'aurait pas fallu être grand druide, à n'importe quel observateur, pour réaliser que Maëlie prenait Cristòl en exemple d'une obéissance aveugle et contradictoire aux attentes d'un père et aux exigences de la noblesse.

Mais le jeune Sìarr ne comprit pas immédiatement, car la personne qui s'était imposée à son esprit, à l'ouïe des mots de Maëlie, c'était sa marraine. Une ombre triste avait passé sur son visage, et il avait finalement soupiré.


-« Vous avez raison... Dans la cité idéale d'Aristote, nous, nobles, serions la classe d'argent, un modèle, plaçant la foi plus haut que tout, et honorant les institutions de Christos et d'Aristote.
Mais le Livre des Vertus est si riche de préceptes qu'il arrive que certains entrent en conflit les uns avec les autres. Le respect de l'autorité paternelle, contre l'amour présidant à l'hyménée.

Je n'ai pas fait, devant vous, l'apologie du mariage de raison : je vous ai dit que si vous aimiez un homme qui n'était pas noble, il vous faudrait choisir, entre noblesse et amour. Il arrive que certains choisissent l'amour, et cela les honore.
Je doute que l'on puisse épouser une personne pour laquelle on n'a pas, au moins, de l'admiration et du respect.

Cela arrive, pourtant... quand on a trop appris à obéir. »


Il détourna le regard, caressant les reliures de cuir des livres sur le mur du bureau.

-« Je préférerais vous voir perdre par amour le présent que j'ai voulu vous faire, et continuer de chanter par le Languedoc, que devenir une ombre sans joie, comme son mariage a rendu Margot, ma marraine, que vous ne connaissez peut-être pas. Elle était amoureuse, dit-on... Mais point de l'homme que son père avait choisi. »

Sa voix se fit râpeuse, mais lorsqu'il voulut écarter ces tristes pensées, ce ne fut que pour que s'imposât, ferme, intransigeante, sa propre situation.

-« Et moi... »

Il regarda Maëlie dans les yeux.

-« Je n'ai pas d'espoir d'épouser celle que j'aime, car je suis promis à une jeune fille pour laquelle j'ai beaucoup d'affection, et pour satisfaire mon estimé père et les projets qu'il avait faits pour moi. Je lui dois tout, y compris d'avoir survécu, d'être sorti de la mendicité... Mon histoire est longue, mais mon ingratitude le serait bien autant, si je renonçais à mon titre pour recouvrer une pleine liberté.

La noblesse accorde des privilèges, mais a son lot de contraintes... De lourdes, très lourdes contraintes parfois.

L'amour dans le mariage viendra avec le temps... »


Mais il était égaré dans son propos, dans ses pensées, comme après la discussion qu'il avait eue avec Loreleï, qui lui reprochait de ne pas l'aimer vraiment.
Il se tut, et respira lentement, un œil sur la Dame de Lauzières... Le cœur étrange, comme si s'imposait à son esprit une chose qu'il n'avait jamais cherchée à voir.

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[Je finis les affaires en cours et je tire ma révérence. Ce fut un plaisir de jouer avec vous tous.]
Maelie
Le coeur de la jeune femme se figea et pesa comme un poids de plomb dans sa poitrine... Par tous les Saints et les saints Prophètes, était-il permis d'être aussi sotte ?
Son visage se vida de son sang tandis que ses yeux s'écarquillaient lentement, leur iris émeraude cerclé du blanc de la stupeur, rivés à ceux de Cristòl qui semblaient lui vriller l'âme. Elle se redressa vivement, manquant de renverser quelques papiers qu'elle frôla dans son mouvement brusque, et s'inclina jusqu'à terre en une profonde révérence, tête baissée et les yeux papillonnant cette fois de larmes de détresse. Lorsqu'elle s'exprima, sa voix exprimait un grand désarroi et une contrition bouleversée.


Oh, meu Pairin... je maudis mille fois ma langue et ma curiosité. Ce n'était... Je veux dire... Tout le monde a entendu parler des mariages de nobles et... Je ne voulais pas... C'était...
Je voulais simplement comprendre, je le jure! Je n'étais pas au courant... Je...


Par Dieu, ma fille, mais tais-toi donc!, songea-t-elle.
Ridicule. Voila ce qu'elle était... Parlait-on ainsi de choses dont on ignorait tout? Ha! Belle dame en vérité, une dame que ne savait que blesser celui à qui elle devait tant. Croyait-il qu'elle le jugerait, alors qu'elle-même ... D'une pichenette mentale, elle repoussa cette pensée inachevée au plus profond de son esprit.
Maëlie tremblait légèrement, maintenant. Elle tremblait de fureur, cette même fureur qui l'avait traversée fugitivement lorsqu'elle avait entendu parler des rumeurs à l'encontre de Cristòl; cette même fureur jadis tournée vers les médisants et maintenant dirigée vers elle-même. Puis cette fureur fondit soudainement devant son absurdité. D'une voix blanche, atone, sans bouger de sa révérence ni lever le regard, elle parla à nouveau.


Vous n'avez à vous expliquer de rien devant moi. J'ai cru... J'ai simplement voulu comprendre ce que je ressentais comme un paradoxe de la noblesse.
Je n'aurai même pas dû évoquer ce sujet. Le mariage n'entre pas dans mes projets pour tout vous dire et je doute de jamais avoir à me poser la question. Ainsi, vous voyez, rien ne s'oppose à ce que j'accomplisse dignement ce qu'on attendra de moi.


Pardonnez-moi.
Cristòl
[Pardon pour le retard, me suis pris un peu de recul.]

La situation désormais échappait totalement à la raison. Chacun avait cru devoir se justifier devant l'autre, et le jeune Héraut faisait pâle figure. Avait-il à ce point donné le sentiment de parler à contre-cœur ? La dame de Lauzières se retrouva courbée en révérence devant lui, sans qu'il n'ait pu articuler un mot, et parlait avec tant de regret et d'amère émotion dans la voix que le jeune homme en fut touché et peiné.
Il se pinça les lèvres, agençant à l'avance les mots qu'il voulait lui dire, les mots qui, jamais, ne devaient trouver leur chemin à travers ses lèvres, car jamais un discours répété ne s'accorde avec la spontanéité de l'émotion.

Lorsqu'elle eut fini, il était à côté d'elle, et glissa sa main sous le menton de la jeune femme, où il cueillit les reliefs d'une larme. Et d'une douce inflexion, il chercha à lui faire relever un peu la tête, alors que lui-même s'asseyait sur ses genoux. Posture fort peu protocolaire, mais nul n'en était besoin en cet instant.


-« Ne jurez plus, meuna filhòla. »

Il lui sourit, d'un sourire aimant qui n'attendait rien en retour.

-« Vous n'avez forcé aucun mot de ma bouche. Je les ai dits, parce que je ne voulais pas m'arrêter au héraut disant à une nouvelle noble qu'elle ne peut épouser un roturier. Vous êtes meuna filhòla, vous ouvrez une discussion sur un sacrement de l'Eglise... Non, n'ayez crainte : vous ne m'avez pas blessé. Je voulais vous faire comprendre, réellement, ce qu'était le mariage de noblesse. Je voulais abattre les préjugés de la roture, que vous avez bien mis en avant.

Vous n'avez rien fait de mal.
Je n'ai pas peur de vous montrer les limites de ma force, les défaillances de mon cœur. J'ai une confiance absolue en vous et je veux vous protéger, vous garder de toute blessure qu'un hymen de raison peut engendrer. Je ne laisserai aucun homme sans mérite vous courtiser, fût-il Duc, Marquis ou Prince.
Mais ne dites pas que jamais vous ne vous marierez : c'est faire bien peu de cas du Très Haut, à qui il plaira peut-être que vous rencontriez un homme que vous aimeriez et qui vous aimerait, avec qui il ne tiendrait qu'à vous de vivre dans l'institution du mariage. »

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[Je finis les affaires en cours et je tire ma révérence. Ce fut un plaisir de jouer avec vous tous.]
Maelie
Lorsque Maëlie croisa le regard de Cristòl, un frisson lui parcourut le dos. Et lorsqu'il lui sourit, elle ne put retenir ses larmes.
N'était-il donc pas stupide qu'ils passent leur temps à se justifier mutuellement ? L'ironie de la situation n'aurait pas manquer de la faire sourire si elle ne s'était pas sentie si gauche. Il y avait tant de choses qu'elle voulait dire mais qui ne passeraient jamais le seuil de ses lèvres... tant de choses...

D'un revers de main spontané, elle essuya ses joues : au diable la Dame de Lauzières et le protocole! Et pourquoi donc pleurait-elle au juste? Un sourire étrange fleurit sur ses lèvres, lorsqu'elle prit la parole.


Comme vous le voyez, meu pairin, je n'ai pas peur non plus de vous montrer mes limites et mes faiblesses. Et il ne m'est pas plus grande douleur que de vous voir souffrir. J'ai cru que je vous avais blessé et je ne l'ai pas supporté : je suis soulagée de m'être trompée.
Ma vie a tellement changée, tout est sens dessus dessous, j'ai l'impression que vous êtes la seule chose qui maintient mon équilibre dans cette tornade. Hier encore j'élevais des vaches et le monde se moquait bien de savoir si j'existais !

Elle eut un petit rire sourd, tandis que ses larmes se tarissaient, la tempête de ses émotions déjà passé comme un nuage au vent. Là, assise en face de Cristòl, elle se sentait à nouveau elle-même pour la première fois depuis... depuis quand? Elle ne se souvenait plus.

Peut-être que j'accorde trop d'importance à tout cela. De toute façon, rien ne m'importe que de rester à vos côtés.

Dans son sourire, redevenu lumineux avec la soudaineté d'un arc-en-ciel après l'orage, ne se lisait qu'une profonde affection admirative et une confiance totale.
Cristòl
Quand Cristòl comprit vraiment ce que ces mots cachaient, il en eut presque de la peine. La peine du jour où il faudra bien clarifier la situation. La peur de blesser, lors que tant d'amitié mouvait ses intentions.

Il n'avait pas envie de savoir, et ne savait désormais que faire, que dire, pour revenir à ce bureau, à cette discussion sur le vivre noblement, ces mots rassurants qu'il pourrait prononcer par cœur. Ce visage qui passait sous ses yeux des larmes au rire, c'était un supplice presque. Que d'affection avait-il, et pourtant !

Dans un geste imprévisible, il passa son bras autour de l'épaule de la dame de Lauzières, et l'attira près de lui, comme on serre une sœur ou une amante contre son cœur. Parce qu'il ne voulait pas voir ce visage changeant, cette débauche de joie soudaine, après le flot des larmes.
Et la seule chose qui lui vint alors à l'esprit était fort incongrue :


-« Vous pourrez garder vos vaches, meuna filhòla, mais vous ne pourrez plus vous salir les mains à vous occuper d'elle désormais. Vous embaucherez pour cela grâce aux revenus de votre terre.

Les moutons me manquent... »

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[Je finis les affaires en cours et je tire ma révérence. Ce fut un plaisir de jouer avec vous tous.]
Maelie
Lorsque Cristòl la prit dans ses bras, Maëlie se raidit d'un coup : c'était inattendu... et un peu effrayant. Pendant quelques secondes, elle resta là, l'écoutant évoquer sa nostalgie pour ses moutons, puis, doucement mais fermement, elle repoussa son étreinte et s'écarta, le rose aux joues et la mine grâve. Elle n'était pas... elle n'était plus simple paysanne et lui était son parrain et un grand seigneur du Languedoc. Quelque soit le sens de ce geste, il ne devrait pas en rester trace dans sa mémoire... quand bien même l'espace d'un battement de coeur, sa gratitude fut sans bornes. Elle le savait pertinemment : elle resterait dans l'ombre de cet homme jusqu'au jour où l'un d'eux ne le souhaiterait plus; et elle priait pour que ce jour ne vienne jamais. Mais elle savait aussi que cela impliquait des limites qu'ils venaient de franchir allègrement, à cause d'elle. Parviendrait-elle à rétablir l'équilibre?

Mercè, fit-elle simplement, en se redressant pour se retourner pudiquement, le temps d'effacer sur son visage les dernières traces de ses montagnes russes émotionnelles.

Il ne me reste plus qu'à devenir une bonne gestionnaire, alors, ainsi nul ne pourra m'interdire d'aller gambader dans les champs pour vérifier que les fermes sont bien tenues !

Il y avait dans sa voix une malice légèrement forcée. Elle se retourna, les yeux encore un peu rouges, mais la mine plus sereine. Elle refusait de laisser s'installer la gêne dans son attitude, aussi tenta-t-elle vaillamment de se comporter avec le détachement le plus naturel possible. S'agenouillant devant Cristòl, elle reprit, cette fois plus assurée et plus spontanée.

Vous ne devez pas être confortable ici, que diriez-vous de retourner à votre bureau? Je crois que nous en avons bientôt fini de toute façon. Il faudra bien que je vous laisse retourner à vos dossiers et que je prenne la route de Lauzières avant la fin des temps.
Cristòl
Le jeune Sìarr resta le regard bas, lorsque Maëlie se releva, et comme en un rêve. Mais ce n'était pas de ces rêves sucrés dont on souhaiterait qu'ils ne se terminassent jamais. C'était plus... caustique.
Rongé par les questions, les incertitudes et les remords, il ne savait trop quels mots dire, afin qu'aucune ambigüité ne subsistât, quant à son geste. Il avait une vague idée de son état d'éveil et de son environnement, comme après une soirée bien arrosée ; ce dont il était certain c'était la présence de Maëlie, et le geste qu'il avait fait sans réfléchir.

Il tendit ses jambes pour se redresser, et passa une main dans ses cheveux sombres, tout en retournant à sa place. Quelque chose avait changé. Cela serait-il irréversible ? Il ne voulait pas la perdre, mais quand elle reprit la parole, il sentit comme elle une tension dans sa voix... Et le jeune homme avait la même. L'envie de faire comme si de rien n'était.


-"Personne ne pourra vous reprocher de vous intéresser de près à l'état de vos élevages. Vous avez reçu une terre du Languedoc pour qu'elle soit exploitée à votre profit, non pour qu'elle soit laissée en jachère... Je vous fais tout à fait confiance, sur ce point."


Il se retint de dire tout le plaisir qu'il avait lui-même à gambader. C'était assez tirer de parallèles entre eux deux. Il passa sa main dans son cou, gratta un peu sa nuque, et ajouta :

-"Le port de vos couleurs est obligatoire, en écusson sur vos vêtements, en tabard, ou par un valet qui vous accompagne, si vous choisissez d'en prendre un. Le vivre noblement comporte bien des clauses, mais... Je vous connais assez pour vous assurer que tant que vous resterez telle que vous êtes, vous serez en accord avec toutes ces valeurs."

Il avait jusque là évité de la regarder dans les yeux, préférant brasser inutilement quelques papiers sur le bureau. Il releva la tête pour dire :

-"Je crois que c'est tout, je ne vous retiens pas plus longtemps. Vous devez avoir hâte de rejoindre vos terres et les découvrir de vos propres yeux..."

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[Je finis les affaires en cours et je tire ma révérence. Ce fut un plaisir de jouer avec vous tous.]
Maelie
Lorsque leurs regards se croisèrent, Maëlie lui adressa un sourire d'une grande douceur, presque maternelle, où se lisait une grande affection mais aussi une acceptation sans question. Un soupçon de nostalgie, peut-être. Au fond d'elle-même, elle se sentait coupable de ce qui était advenu, mais elle avait déjà scellé sa résolution et enfermé ce souvenir avec tant d'autres, dans un coin reculé de son esprit. Dans son regard, nulle trace des émotions qu'elle venait de traverser : elle était comme un lac dont la surface était redevenue lisse. Elle était à nouveau Maëlie, la jeune filleule du Senhèr de Siarr, une femme simple, ni plus, ni moins; celle qu'elle n'aurait jamais dû cesser d'être.

Que siaga atal.

Sa voix n'était qu'un murmure, si faible qu'on aurait pu croire que ces mots n'avaient pas été dit.

Je vais suivre vos conseils, meu pairin.
Pour mon sceau, j'ai pris ma décision : je souhaite qu'y figure la devise "Dum spiro, spero". Je trouverai difficilement plus adapté à ma personne, je crois.

Dans sa voix, cette fois claire et haute, un amusement sincère plein d'autodérision et de malice. Puis elle s'inclina légèrement, comme pour prendre congé.

Me ferez-vous l'honneur de venir m'y rendre visite lorsque le domaine sera prêt à vous recevoir?
Cristòl
Le sourire de sa filleule parvint à adoucir un peu le remords du Héraut, mais non à l'évincer de son cœur. Il ne comprit pas ce qu'elle dit après lui, ou du moins ne sut en estimer la portée. Pour qui, pour quoi parlait-elle ?

Il l'écouta, et sentait son cœur s'apesantir. Un sourire peut beaucoup, mais il se demandait s'il devait demander pardon pour son geste. A mesure qu'elle parlait, désormais bien haut, il retrouvait son air enjoué et insouciant qu'il appréciait tant. Pourquoi n'arrivait-il à chasser ses pensées, comme elle semblait le faire ? Se sentait-il coupable d'une chose ?


-« Je demanderai alors votre matrice à 'Sigillant', il cisèle à merveille. »

Tant que je respire, j'espère. Etait-ce un message qu'elle lui envoyait, qu'elle voulait qu'il comprenne ? "Peu importent les actes et les refus, il y aura toujours de l'espoir" ?
Jamais Cristòl n'avait songé à s'appliquer de pareilles maximes. Il se leva pour saluer sa filleule, qui partait, et se contenta d'un sourire et d'un salut de la tête.


-« Adissiatz, la meuna filhòla. Je viendrai vous voir, je vous le promets. »

Et ce n'est que lorsqu'elle eût résolument franchi le seuil de la porte qu'il murmura :

-« Perdona me... »

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[Je finis les affaires en cours et je tire ma révérence. Ce fut un plaisir de jouer avec vous tous.]
Maelie
De bonne heure ce matin, Maëlie était venue poser son rapport de douane. Enfin... de bonne heure pour elle, car ses nuits agitées ne lui offraient que trop peu de repos, ces jours-ci, et faisaient de chaque matin presqu'une épreuve. Ses traits pourtant ne marquaient pas cette fatigue, pas encore, tant l'excitation de sa nouvelle vie la faisait rayonner tel un soleil.
Dès réception du courrier de son parrain, par un messager du Château, Maëlie se promit de s'y rendre en journée. Etait-il trop tôt? Allait-elle le déranger? L'impatience gagnait du terrain et le bon sens semblait perdre allègrement au fil des minutes. Elle savait que Cristòl n'était pas un matinal, mais que perdait-elle à tenter sa chance?

C'est ainsi qu'elle se retrouva, sans trop savoir comment, devant la porte du bureau du Héraut, pour la seconde fois. Ce n'est que là qu'elle ressentit les vestiges du malaise qui l'en avait chassée la dernière fois, et qui retinrent un moment sa main en suspens. Par le même effort de volonté qui lui était devenu familier, Maëlie chassa ces pensées, voilant involontairement son regard de jade.

Elle frappa trois petits coups à la porte.
Cristòl
Matinal, le jeune Sìarr l'était rarement - très rarement.
Il préférait veiller tard, jusqu'au cœur de la nuit, que vivre au rythme des réveils des gens, et de l'agitation de ceux qui ont une bonne nuit de sommeil derrière eux.
Non, il n'était vraiment pas matinal, mais ce jour-là, il avait un nombre accablant de registres à mettre à jour et à compléter, à la Hérauderie locale, avant d'entamer le reste de la journée... et il en fut tiré par les coups brefs à sa porte.


-« Dintratz ! » lança-t-il mécaniquement.

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[Je finis les affaires en cours et je tire ma révérence. Ce fut un plaisir de jouer avec vous tous.]
Maelie
Maëlie pénétra dans le bureau puis s'inclina dans une révérence respectueuse.

Adissiatz, meu Pairin. Soi contenta de vos revéser.

Redressa un peu la tête pour observer les lieux et leur hôte, elle constata que peut de choses avaient changées, si ce n'était l'amoncellement croissant des documents qui jonchaient son bureau et la fatigue croissante qui barrait son front. Un pli d'inquiétude vint creuser le sien, sans pour autant faire disparaître son sourire chaleureux. Pourtant, il y avait ça et là quelques branches odorantes dont elle percevait les douces effluves : elle en fut surprise, mais n'en montra rien.

Je suis venue récuperer la matrice de mon sceau. Je ne vous retiendrai pas plus que nécessaire loin de vos occupations, c'est promis.

Elle se redressait déjà et déposait avec précaution, emprunte d'une douce autorité, un paquet de gâteaux entre deux piles de documents. Si elle n'entendait pas rester trop, elle n'avait visiblement pas non plus l'intention de partir en coup de vent.

Voici de quoi vous restaurer en attendant votre repas. Je vous remercie de votre message, meu Pairin. J'avoue avoir conçu quelque inquiétude de votre silence, mais dans mon égoïsme, il m'arrive d'oublier combien lourdes sont vos charges; et vous m'avez totalement rassurée.

La jeune femme se tut, réalisant qu'elle avait surgit un peu comme un diable hors de sa boîte. Elle laissa planer un sourire malicieux sur ses lèvres.
Cristòl
-« Ah, oui ! »
Le Héraut se leva, le scel de Maëlie... Il l'avait conviée pour cela. Joli prétexte - il n'avait pas envie de faire envoyer la matrice dans quelque boîte sous clef. L'avait-il fait pour revoir le sourire de sa filleule, qui oeuvrait dans des ailes bien différentes du château comtal, ou l'avait-il fait pour les biscuits qu'elle lui apporterait immanquablement ?

Ou pour être un peu avec elle, plus simplement... Dans cette ambiance aux effluves douce-amères, à la fois stimulantes et apaisantes, il pensait pouvoir échapper à tout ce qui le pressait au conseil ; il comptait les jours, désormais. Il voulut répondre machinalement à Maëlie qu'elle ne le dérangeait jamais - ce qui n'en eût pas moins été vrai - mais comme elle continuait de parler, il laissa le fil de sa pensée évoluer vers d'autres thèmes.


-« Voici de quoi vous restaurer en attendant votre repas. Je vous remercie de votre message, meu Pairin.
J'avoue avoir conçu quelque inquiétude de votre silence, mais dans mon égoïsme, il m'arrive d'oublier combien lourdes sont vos charges; et vous m'avez totalement rassurée. »


Il posa une petite boîte en bois grossier, sans ciselures ni ornements superflus, sur la table, à côté des gâteaux ; tous deux debouts contre la table, regardant les paquets respectifs - ça ressemblait à un échange, entre deux conspirateurs... Le poison pour assassiner le Roi, contre les lettres pour compromettres l'ingrate amante ayant déserté le lit de l'amour. C'était ce genre de scène qui venait à l'esprit original du jeune Sìarr ; c'était ainsi, en vérité, qu'il voyait sa relation avec Maëlie : un donnant-donnant implicite, fondé bien plus sur la confiance que sur un intérêt mercantile ou politique.

Mais Cristòl se sentait beaucoup de dettes envers Maëlie. C'était une maladie, chez lui, de se croire toujours plus débiteur que créancier.


-« Vous prenez soin de moi, meuna filhòla, quand ce devrait être à moi de veiller sur vous et vos intérêts... Les rôles sont inversés, je m'en veux. Je devrais avoir plus de temps pour vous... »

Comme il ne savait qu'ajouter, il posa la main sur la boîte en bois, pour se donner contenance, et dit :

-« Votre scel. Il y a une feuille avec les exemples d'empreintes, dans les trois couleurs les plus usitées.
Il y a aussi plusieurs bâtonnets de cire de chaque couleur. Si vous en manquez, n'hésitez pas à venir m'en demander. »

Cela pouvait s'acheter, aussi... Mais pour sa filleule, le héraut en trouverait bien à ses frais.




Légende bilingue : +S:DONA:MAELIE:DE:LAUZIERS:DUM:SPIRO:SPERO

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