L'usage que les autorités temporelles font en général de la religion, l'homme utilisé pour « réduire les hommes raisonnables à l'état de bêtes ».
La religion et la morale relèvent d'une démarche strictement personnelle, autrui n'a pas à s'en mêler.
Un « droit supérieur de nature » : celui de penser librement!
Chaque homme a le droit de penser ce quil veut. Contester la légitimité de certaines institutions et critiquer la religion ne signifie pas se soustraire à la contrainte judiciaire : on a le droit de critiquer, mais on obéit pourtant aux lois dont on reconnaît le bien-fondé.
La liberté de penser est lun des droits les plus précieux de lhomme, inhérent à sa nature. On ne peut donc pas demander à quelquun de sabstenir de penser : chacun, est « maître de ses propres réflexions par un droit supérieur de Nature », personne « ne peut abandonner sa liberté de penser et de juger ce quil veut ».
Même si lon peut reconnaître que certains inconvénients peuvent parfois naître dune telle liberté, il faut rappeler quaucune institution, même la plus sage, nest sans inconvénient. Ce que lon ne peut empêcher doit être permis nécessairement, même sil sensuit souvent un dommage .
L'homme doit renoncer au droit dagir conformément au « seul décret de sa pensée ». En effet, un gouvernement nest légitime que sil repose sur un « pacte fondateur » en vertu duquel tous les concitoyens abandonnent au pouvoir souverain le droit de fonder et dabroger les lois, et sengagent à ne rien faire qui contredise ces lois.
Par conséquent, les hommes loyaux renoncent par avance à exprimer certaines opinions qui seraient susceptibles daller à lencontre de ce pacte fondateur.
Toutes les prises de positions déloyales, politiques ou autres, qui incitent à rompre le pacte en employant des procédés violents ou retors, relevant de la ruse, de la haine, de la vengeance sont des « opinions séditieuses » pour le Duché.
Elles ne peuvent être proférées publiquement, non pas parce quelles sont en elles-mêmes inacceptables, tout le monde a le droit de penser ce quil veut, mais en raison des actions quimpliqueraient de tels jugements.
On ne demandera donc à chacun que de se plier aux lois mais il pourra continuer de penser ce quil veut. Toute la difficulté porte sur la question de savoir qui doit fixer les limites de ce qui peut être exprimé et selon quels principes.
Réclamons la totale dissociation du politique et du religieux.
La liberté est la condition de possibilité du bonheur en communauté.
Mais ce régime de liberté ne peut être établi que dans une société dont les lois protègent les hommes non seulement des tyrans, mais aussi d'eux-mêmes. Car la multitude, naturellement superstitieuse et irascible, ne suit pas spontanément la raison.
La religion est positive comme sa politique.
Elle comprend toutes les formes de religion que l'humain a connues, et elle les justifie par une interprétation exempte de préjugés, en les mettant chacune à son véritable rang.
Tout d'abord, pour la plupart des humains, la religion a sa source dans la révélation, et la révélation est consignée dans les livres saints, ou la doctrine pour nous, spinozistes. Il s'agit de les lire avec la même liberté et la même intégrité d'esprit que s'il s'agissait des épopées ou des tragédies de l'Antiquité.
Je ne doute pas que des esprits sincères n'aboutissent à la même conclusion que moi: le Crédo aristotélicien, écrit dans la langue de l'imagination, s'adresse à l'imagination.
Il y est parlé de Dieu comme d'un humain dont on verrait le corps ou dont on redouterait la colère, et pour justifier l'autorité des prophéties, il y est fait appel, non à des démonstrations rationnelles, mais à des signes extérieurs, aux miracles qui seraient, s'ils étaient authentiques, des échecs à la nécessité des lois naturelles, c'est à dire à l'unité de Dieu.
La religion, de manière générale, est structurées par des écritures qui lui désignent la modalité et l'objet de ses croyances, son origine et sa fin, ses fondements. La religion devient libre, c'est à dire qu'elle qu'elle se libère de l'impuissance, quand elle donne au croyant le moyen de relire ses écritures, c'est à dire la possibilité de se rapporter librement au texte de sa croyance. Ce n'est pas le cas de certaines, doit-on les juger, les blâmer? C'est à voir.
Par l'imagination, l'écriture agit sur les passions des humains, elle les détourne de l'égoïsme et de l'envie par la crainte de Dieu, et elle leur commande la justice et la charité. C'est par là qu'elle fait uvre religieuse et qu'elle est intouchable.
Elle donne une certitude morale qui peut devenir le substitut pratique de la conviction rationnelle et qui est pour la foule des ignorants l'unique voie du salut.
Seulement le Crédo aristotélicien ne satisfait pas la raison: il ne démontre aucun des attributs de Dieu, il ne tranche aucune question d'ordre spéculatif.
La révélation historique, qui est pour un peuple et pour un temps, est subordonnée à la raison qui est la révélation permanente et profonde de l'essence divine.
« Nous connaissons, que nous demeurons en Dieu et que Dieu demeure en nous, par ce qu'il nous a donné de son esprit ».
L'Aristotélicisme doit être contesté au nom des préjugés traditionnels que sa doctrine s'efforce d'exclure, j'ai moi-même laissé voir mon éloignement pour les églises, ou je ne retrouvais ni désintéressement moral ni pureté spirituelle et qui me paraissaient avoir renié Christos.
L'humain n'est qu'un mode fini, perdu en apparence dans l'infini de Dieu. Mais, puisque son être a sa racine en Dieu, il lui est possible d'exprimer adéquatement par le développement de son essence propre l'essence divine.
Quelle que soit la cause particulière de nos idées ou de nos actions, quel que soit le tissu d'événements où notre existence individuelle est engagée, partout se retrouvent un seul être, une seule loi. De tous les points de l'univers, de tous les moments du temps se forme en nous l'idée de Dieu. Elle remplit notre âme, et la forme sur son modèle, comme une unité totale. En elle, nous nous sentons vivre de la vie éternelle, et nous sommes détachés de ce que nous étions dans le temps.
Nous ne pouvons à la fois concevoir l'essence de Dieu, et faire retour sur notre individualité, comme si elle était distincte de Dieu. Nous ne pouvons renoncer à notre ascension perpétuelle vers Dieu, pour nous interroger sur les sentiments de Dieu à notre égard.
Toute cause d'inquiétude, de tristesse, est bannie. L'idée de Dieu est devenue l'amour intellectuel de Dieu.
L'identité peut même aller plus loin. Ce n'est plus nous qui aimons Dieu, c'est Dieu qui s'aime en nous d'un amour éternel.
Le développement infini de l'être, qui se présente pour la déduction métaphysique comme une nécessité d'ordre géométrique, est devenu, dans la conscience du sage, une source perpétuelle de joie et de béatitude.
Nous devenons, à la lettre, la gloire de Dieu!
Le vulgaire a ainsi référence possible à un univers différencié, ou bien marqué par le prodige, dont le support est le délire, et qui relève de la superstition, et qui relève de la religion. I
l est vrai que les deux horizons ne sont pas forcément distincts dans la réalité. Les hommes crédules sont sujets à la superstition, et contraires à la religion. Entre la religion et la superstition, il y a comme différence principale que celle-ci a pour fondement l'ignorance et celle-là la sagesse.
Or la sagesse qualifie seulement les enseignements de la religion, car, en réalité, la foi est inversée en superstition par les aristotéliciens eux-mêmes.
Le passage de l'individuel au collectif peut s'opérer vis-à-vis de mon groupe d'appartenance: je partage la logique de comparaison qui détermine les aptitudes de ma classe ou de mon Duché vis à vis de toute autre classe ou Duché.
La contemplation de soi se prolonge jusqu'au niveau des religions, pouvant entrer les unes par rapport aux autres dans le jeu de la comparaison, chercher à s'affirmer par la contemplation de leur propre puissance, et de la faiblesse des autres.
Le résultat est la haine, jusque dans son extrémité, la guerre, la guerre des religions. La comparaison est homogène, ne s'exerce que vis-à-vis d'un semblable; une unité individuelle ou collective ne désire que ce qui suit de sa nature, et donc d'une nature semblable à la sienne. Voilà pourquoi un groupe est en relation conflictuelle avec tout autre groupe de même nature lorsqu'il se fixe sur la contemplation de lui-même; le conflit est en fin de compte permanent, puisque l'esprit s'efforce toujours d'imaginer ce qui pose sa puissance d'agir, en s'aidant de toutes les modalités disponibles, notamment celles de nature sociale. Je ne m'efforcerais pas à vous faire comprendre ce que sous-entend ces dernières réflexions, l'moins malinois aura sans doute lui même compris quelles sont les visées et portées en notre société actuelle.
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